Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
7B_352/2023, 7B_354/2023
Arrêt du 14 février 2024
IIe Cour de droit pénal
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Abrecht, Président,
Koch et Kölz,
Greffière : Mme Kropf.
Participants à la procédure
7B_352/2023
A.________,
représentée par Me Giorgio Campá, avocat,
recourante,
et
7B_354/2023
1. B.________,
2. C.________ Inc.,
3. C.________ Ltd,
tous les trois représentés par Me Jean-Marc Carnicé et Me Guglielmo Palumbo, avocats,
4. E.________,
représenté par Me Daniel Tunik et Me Jean-René Oettli, avocats,
recourants,
contre
7B_352/2023 et 7B_354/2023
Ministère public de la République et canton de Genève,
route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy,
7B_352/2023
1. B.________,
représenté par Me Jean-Marc Carnicé et
Me Guglielmo Palumbo, avocats,
2. E.________,
représenté par Me Daniel Tunik et Me Jean-René Oettli, avocats,
3. C.________ Inc.,
représentée par Me Jean-Marc Carnicé et
Me Guglielmo Palumbo, avocats,
4. C.________ Ltd,
représentée par Me Jean-Marc Carnicé et
Me Guglielmo Palumbo, avocats,
5. F.________ SA,
représentée par Me Guerric Canonica et Me Bettina Aciman, avocats,
7B_354/2023
1. A.________,
représentée par Me Giorgio Campá, avocat,
2. F.________ SA,
représentée par Me Guerric Canonica et Me Bettina Aciman, avocats,
Objet
Séquestre,
recours contre l'arrêt de la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 19 juin 2023 (ACPR/463/2023 - P/3072/2018).
Faits :
A.
A.a. A la suite d'une plainte pénale déposée en février 2018 par F.________ SA, compagnie pétrolière appartenant à l'État sud-américain U.________, le Ministère public de la République et canton de Genève (ci-après : le Ministère public) mène une instruction contre différentes personnes - dont B.________, E.________ et A.________ -, employés ou prestataires de services pour le groupe G.________, pour corruption d'agents publics étrangers (art. 322septies CP) et blanchiment d'argent (art. 305bis CP), respectivement soustraction de données (art. 143 CP).
Dans ce cadre, il leur reproche en substance d'avoir mis en place, notamment depuis Genève, un système de corruption des employés de F.________ SA pour obtenir l'obtention d'informations confidentielles et faire attribuer des marchés aux sociétés détenues par B.________ et E.________, dont C.________ Inc. Il les soupçonne également d'avoir mis en place un dispositif permettant d'avoir accès, à distance, notamment depuis la Suisse et depuis V.________ (États-Unis), à des données confidentielles contenues sur les serveurs de F.________ SA.
A.b. Dès le 23 février 2018, ont été saisis du matériel informatique (ordinateurs, disques durs, tablettes numériques, téléphones cellulaires, clés USB) et des carnets ou cahiers, découverts à Genève, notamment dans la succursale de C.________ Ltd. Le 12 mars 2018, le serveur utilisé par le comptable de C.________ Inc. à V.________ (ci-après : le serveur US) a été transmis au Ministère public. F.________ SA a également remis à ce dernier, le 17 avril 2018, une copie de l' "image" de ses serveurs informatiques, dont les données seraient extraites, puis indexées sur un logiciel spécialisé.
Les scellés apposés sur tout ou une partie de ce matériel ont été levés en mai, juillet et août 2018 - le cas échéant de manière partielle - par sept ordonnances du Tribunal des mesures de contrainte (ci-après : le TMC). Chacune des ordonnances de cette autorité comportait, dans son dispositif, la précision que les fichiers et les documents pour lesquels les scellés étaient levés - tous dûment référencés - étaient remis dans la foulée au Ministère public.
Dans l'ordonnance STMC1 du 27 août 2018, le TMC a en particulier relevé que les parties pourraient requérir ultérieurement, le cas échéant, que tous ou certains fichiers contenus dans le serveur US soient écartés du dossier, un "recours cantonal [étant] ouvert" en cas de refus du Ministère public.
Par arrêt du 28 janvier 2019 (cause 1B_443/2018), le Tribunal fédéral a partiellement admis le recours formé par B.________, C.________ Inc. et C.________ Ltd contre cette ordonnance dans la mesure où il était recevable. Il a constaté que le mandat d'enquête du 12 mars 2018 donné par le Ministère public après la réception de la demande de mise sous scellés violait la procédure de mise en oeuvre de cette requête; il n'en résultait cependant pas l'inexploitabilité du serveur US et la copie de celui-ci ne pouvait pas, à ce stade, être écartée du dossier (cf. consid. 1.2.3 et 3.2).
A.c. Dans le courant de l'année 2022, B.________, E.________ et A.________ ont demandé la levée des séquestres frappant leurs valeurs patrimoniales et le classement de la procédure, au motif notamment que les charges pesant sur eux seraient insuffisantes.
Dans seize ordonnances du 7 novembre 2022, le Ministère public a levé ces séquestres; il a précisé que l'instruction se poursuivait, notamment par l'exploitation des preuves recueillies sous la forme électronique. F.________ SA a fait recours contre ces ordonnances, procédures pendantes au 19 juin 2023.
A.d. Par arrêt du 6 septembre 2022 (causes 1B_601/2021, 1B_602/2021 et 1B_603/2021), le Tribunal fédéral a considéré que la nature quasi étatique de F.________ SA imposait des restrictions au droit de celle-ci de consulter le dossier (cf. en particulier consid. 3.4 et 3.5).
B.
B.a. Par deux ordonnances du 25 mai 2023 (SEQMP1 et SEQMP2), le Ministère public a ordonné le séquestre probatoire et le versement au dossier de la procédure des données informatiques issues d'un tri par mot-clés, ainsi que des documents sous format papier pour lesquels les scellés avaient été levés.
B.b. Le 19 juin 2023 (ACPR/463/2023), la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève (ci-après : la Chambre pénale de recours) a rejeté les recours formés par B.________, E.________, C.________ Inc., C.________ Ltd (ci-après : B.________ et consorts) et A.________ contre ces ordonnances.
C.
C.a. Par acte du 20 juillet 2023 (cause 7B_352/2023), A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt ACPR/463/2023 précité, en prenant notamment les conclusions suivantes :
- "mettre à néant les ordonnances [du 25 mai 2023] du Ministère public et l'arrêt cantonal entrepris qui les confirme, respectivement annuler tous et chacun des perquisitions de pièces, séquestres et versements de pièces au dossier ordonnés dans lesdites ordonnances";
- "enjoindre au Ministère public de classer la procédure après décision sur toutes indemnités dues à la Recourante de ce chef";
- "renvoyer la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision sur les frais et dépens de l'instance cantonale".
A titre subsidiaire, la recourante demande le renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision. Préalablement, elle sollicite, à titre de mesures (super-) provisoires, le constat que "le Ministère public a suspendu le caractère exécutoire de ses ordonnances [...] jusqu'à droit définitivement jugé sur leur bien-fondé" et l'octroi de l'effet suspensif, interdiction étant faite au Ministère public de verser au dossier les éléments papier et informatiques visés dans ses ordonnances.
C.b. Par acte du 20 juillet 2023 (cause 7B_354/2023), B.________ et consorts forment également un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt ACPR/463/2023, en prenant les conclusions suivantes :
"
Principalement
3. Annuler l'arrêt ACPR/463/2023 rendu le 19 juin 2023 par la Chambre pénale de recours de la Cour de justice du Canton de Genève.
Cela fait
S'agissant des éléments de preuve issus du tri des données informatiques extraites des pièces visées par le chiffre 2 de l'ordonnance No. SEQMP1 du Ministère public du 25 mai 2023 :
4. Interdire au Ministère public de procéder à la perquisition, au séquestre probatoire et au versement à la procédure des éléments de preuve issus du tri des données informatiques extraites des pièces visées par le chiffre 2 de l'ordonnance No. SEQMP1 du Ministère public du 25 mai 2023, confirmée par l'arrêt ACPR/463/2023 rendu le 19 juin 2023 par la Chambre pénale de recours de la Cour de justice du Canton de Genève.
5. Ordonner la restitution à C.________ Inc. de la Pièce n° 1 de l'inventaire n° aaa (« serveur US »).
6. Ordonner la restitution à C.________ Ltd de :
1. la Pièce n° 2 de l'inventaire n° bbb;
2. la Pièce n° 3 de l'inventaire n° ccc;
3. la Pièce n° 4 de l'inventaire n° ddd;
4. la Pièce n° 5 de l'inventaire n° eee;
5. la Pièce n° 6 de l'inventaire n° fff.
S'agissant des éléments de preuve issus du tri de la documentation papier saisie lors de la perquisition des locaux de C.________ Ltd, visée par le chiffre 2 de l'ordonnance No. SEQMP2 du Ministère public du 25 mai 2023:
7. Interdire au Ministère public de procéder à la perquisition, au séquestre probatoire et au versement à la procédure des éléments de preuve issus du tri de la documentation papier saisie lors de la perquisition des locaux de C.________ Ltd, visée par le chiffre 2 de l'ordonnance No. SEQMP2 du Ministère public du 25 mai 2023, confirmée par l'arrêt ACPR/463/2023 rendu le 19 juin 2023 par la Chambre pénale de recours de la Cour de justice du Canton de Genève.
8. Ordonner la restitution à C.________ Ltd, des pièces visées au chiffre 2 du dispositif de l'ordonnance No. SEQMP2 du Ministère public du 25 mai 2023, confirmée par l'arrêt ACPR/463/2023 rendu le 19 juin 2023 par la Chambre pénale de recours de la Cour de justice du Canton de Genève.
Subsidiairement
9. Annuler l'arrêt ACPR/463/2023 rendu le 19 juin 2023 par la Chambre pénale de recours de la Cour de justice du Canton de Genève.
Cela fait
10. Ordonner au Ministère public de procéder au tri préalable à tout versement de pièces au dossier des données informatiques extraites des pièces visées par le chiffre 2 de l'ordonnance No. SEQMP1 du Ministère public du 25 mai 2023, aux fins que seules les pièces pertinentes figurent au dossier.
11. Ordonner au Ministère public d'autoriser E.________, B.________, C.________ Inc. et C.________ Ltd à participer à ce tri préalable des données informatiques, dont ils sont les détenteurs et/ou les ayants droit, extraites des pièces visées par le chiffre 2 de l'ordonnance No. SEQMP1, en :
10.1. leur fournissant une copie de l'ensemble des données informatiques dont ils sont les détenteurs et/ou les ayant droits, à savoir :
- la Pièce n° 1 de l'inventaire n° aaa. (« serveur US »);
- la Pièce n° 2 de l'inventaire n° ggg;
- la Pièce n° 3 de l'inventaire n° ggg;
- la Pièce n° 4 de l'inventaire n° ddd;
- la Pièce n° 5 de l'inventaire n° eee;
- la Pièce n° 6 de l'inventaire n° fff.
10.2. leur fournissant une copie des données informatiques extraites destinées à être versées au dossier de la procédure P/3072/2018, visées par le chiffre 2 de l'ordonnance No. SEQMP1 du Ministère public du 25 mai 2023, dont ils sont les détenteurs et/ou les ayants droit, à savoir :
- la Pièce n° 1 de l'inventaire n° aaa. (« serveur US»);
- la Pièce n° 2 de l'inventaire n° bbb;
- la Pièce n° 3 de l'inventaire n° ccc;
- la Pièce n° 4 de l'inventaire n° ddd;
- la Pièce n° 5 de l'inventaire n° eee;
- la Pièce n° 6 de l'inventaire n° fff.
10.3. leur remettant les données informatiques susvisées sur un support électronique comportant un dossier par TAG'S NAME (selon le fichier Excel joint à l'Ordonnance SEQMP1) contenant les fichiers relatifs à ce TAG;
10.4. leur impartissant un délai suffisant, d'au moins trois mois prolongeable, pour se déterminer sur le versement à la procédure des éléments de preuve issus du tri des données informatiques extraites des pièces visées par le chiffre 2 de l'ordonnance No. SEQMP1 du Ministère public du 25 mai 2023.
Plus subsidiairement
11. Annuler l'arrêt ACPR/463/2023 rendu le 19 juin 2023 par la Chambre pénale de recours de la Cour de justice du Canton de Genève.
Cela fait
12. Renvoyer la cause à la Chambre pénale de recours de la Cour de justice du Canton de Genève pour nouvel arrêt dans le sens des considérants."
Les recourants ont également requis l'octroi de l'effet suspensif.
C.c. Dans les deux causes, la cour cantonale et le Ministère public s'en sont remis à justice s'agissant de l'effet suspensif. Sur le fond, l'autorité précédente a renoncé à déposer des observations. Les recourants se sont soutenus mutuellement. Sur le fond, le Ministère public a demandé, dans deux écritures similaires, la jonction des causes et a conclu à l'irrecevabilité des recours, respectivement à leur rejet. F.________ SA (ci-après : la société intimée) a conclu au rejet des requêtes d'effet suspensif, ainsi que des recours. Les recourants ont persisté dans leurs conclusions. Ces différentes dernières déterminations ont été adressées aux parties le 19 octobre 2023.
C.d. Par ordonnances du 4 octobre 2023, le Président de la IIe Cour de droit pénal du Tribunal fédéral a admis les requêtes d'effet suspensif et a fait interdiction au Ministère public de verser aux dossiers les pièces visées par les ordonnances SEQMP1 et SEQMP2 du 25 mai 2023.
Considérant en droit :
1.
Les recours dans les causes 7B_352/2023 et 7B_354/2023 sont formés contre la même décision. Les recourants - qui se soutiennent mutuellement - soulèvent des griefs très similaires afin en substance de s'opposer au versement au dossier des pièces litigieuses (cf. en particulier le prétendu défaut de soupçons suffisants). Les recourants B.________ et consorts ne s'opposent d'ailleurs pas à la jonction des causes (cf. cause 7B_354/2023 acte 26), que le Ministère public sollicite quant à lui expressément.
Partant et pour des raisons d'économie de procédure, il se justifie de joindre les causes 7B_352/2023 et 7B_354/2023 et de statuer dans un seul arrêt (art. 24 al. 3 PCF applicable par analogie vu le renvoi de l'art. 71 LTF).
2.
2.1. Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 149 IV 9 consid. 2).
Toutefois, lorsque les conditions de recevabilité ne ressortent pas à l'évidence de la décision attaquée ou du dossier, le recourant est tenu d'exposer en quoi elles sont réunies, sous peine d'irrecevabilité (cf. art. 42 al. 2 LTF; ATF 147 IV 453 consid. 1.4.8; 141 IV 1 consid. 1.1; arrêt 7B_49/2022 du 23 octobre 2023 consid. 1 et l'arrêt cité).
2.2. Dans le cadre d'un recours en matière pénale, le Tribunal fédéral contrôle uniquement l'application correcte par l'autorité cantonale du droit fédéral en vigueur au moment où celle-ci a statué (cf. art. 453 al. 1 CPP; ATF 145 IV 137 consid. 2.6 ss; 129 IV 49 consid. 5.3). L'arrêt attaqué ayant été rendu le 19 juin 2023, il n'y a donc pas lieu en l'état de prendre en compte les modifications du code de procédure pénale entrées en vigueur le 1er janvier 2024 (RO 2023 468; arrêt 7B_997/2023 du 4 janvier 2024 consid. 1.2).
3.
3.1. En lien tout d'abord avec l'objet du litige, il y a lieu de préciser que les recours dans la présente cause ne sont pas dirigés contre l'une ou l'autre des ordonnances rendues par le TMC levant les scellés sur les pièces litigieuses.
C'est dans le cadre du recours contre ces ordonnances que les détenteurs des documents ou les autres ayants droit bénéficiant de cette mesure doivent faire valoir les motifs justifiant, le cas échéant, le maintien des scellés (cf. notamment le secret professionnel de l'avocat ou le caractère privé des données), ainsi que les objections dites accessoires, dont l'insuffisance des soupçons suffisants laissant présumer une infraction (cf. art. 197 al. 1 let. b CPP), l'absence de pertinence des objets et/ou documents saisis pour la procédure pénale ("utilité potentielle"), la violation du principe de la proportionnalité (cf. art. 197 al. 1 let. c CPP) ou l'illicéité de l'ordre de perquisition (cf. notamment arrêts 7B_90/2022 du 29 décembre 2023 consid. 2; 7B_253/2023 du 31 août 2023 consid. 3.2.1 et 3.2.2; 7B_205/2023 du 31 août 2023 consid. 5.1.1; THORMANN/BRECHBÜHL, in Basler Kommentar, Strafprozessordnung, 3e éd. 2023, n° 54 ad art. 248 CPP; SCHMID/JOSITSCH, Schweizerische Strafprozessordnung, Praxiskommentar, 3e éd. 2018, n° 6 ad art. 248 CPP).
3.2. En l'espèce, si les recourants estimaient que le TMC n'avait, de manière contraire à ses obligations, pas tranché l'une ou l'autre des problématiques précitées - qui se recoupent à certains égards avec celles entrant en considération dans le cadre du contrôle d'un séquestre -, ils disposaient alors de la voie du recours en matière pénale au Tribunal fédéral pour faire valoir leurs griefs. Sous réserve de la question particulière soulevée dans la cause 1B_443/2018 - soit la licéité de l'exploitation du serveur US -, les recourants ont choisi de ne pas remettre en cause les ordonnances de levée des scellés et les questions entrant dans le champ des compétences du TMC ont par conséquent été traitées de manière définitive par cette autorité.
Il en va ainsi en particulier de l'existence de soupçons suffisants justifiant les perquisitions au moment où celles-ci ont été opérées (2018), de l'utilité potentielle des pièces, ainsi que du respect du principe de la proportionnalité de la mesure mise en oeuvre, notamment quant à son ampleur. Le propre d'une instruction étant d'affirmer ou d'infirmer des soupçons, l'évolution de ceux-ci dans un sens favorable aux recourants ne saurait en principe suffire pour considérer qu'une perquisition et une saisie antérieures - réalisées au demeurant a priori au début de l'enquête - constitueraient, au moment du versement des pièces pour lesquelles les scellés ont été levés, une recherche indéterminée de preuves.
Il découle de ces considérations que dans la mesure où les griefs soulevés dans les recours 7B_352/2023 et 7B_354/2023 tendent à remettre en cause les ordonnances du TMC, ils sont irrecevables.
4.
4.1. Sous l'angle de la recevabilité, la recourante A.________ se plaint d'un déni de justice formel (art. 94 LTF; cf. p. 3 et ch. II p. 13 ss du recours 7B_352/2023); il en va de même, mais uniquement au fond, des recourants B.________ et consorts (cf. ch. 155 ss p. 36 ss du recours 7B_354/2023). A cet égard, ils reprochent en substance à l'autorité précédente de ne pas avoir traité leurs griefs en lien avec l'interdiction d'une recherche indéterminée de preuves; tel serait le cas puisque depuis les ordonnances du TMC (2018) et le versement formel au dossier des pièces litigieuses (2023), les soupçons pesant sur eux se seraient amoindris.
4.2. Indépendamment de savoir si ce grief est recevable (cf. les considérations émises au consid. 3.2 ci-dessus), il doit en tout état de cause être écarté.
En effet, la cour cantonale a considéré que la levée des scellés avait pour effet que le Ministère public était placé en situation de reprendre l'acte de procédure interrompu par l'apposition des scellés (cf. consid. 4.2 p. 6 de l'arrêt attaqué). Ce faisant, elle a donc estimé - certes implicitement - qu'elle n'avait pas à examiner l'état des soupçons suffisants au jour où le Ministère public avait rendu les deux décisions ordonnant le versement au dossier des pièces litigieuses. Le seul fait qu'une motivation déplaise aux recourants, respectivement serait erronée, ne constitue ni un déni de justice, ni une violation de leur droit d'être entendus.
5.
5.1. L'arrêt entrepris confirme en substance le séquestre à des fins probatoires et le versement au dossier des pièces - après un premier tri du Ministère public - pour lesquelles les scellés ont été levés. Ce faisant, il ne met pas un terme à la procédure pénale et, vu son caractère incident, le recours en matière pénale au Tribunal fédéral n'est recevable qu'en présence d'un risque de préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF, l'hypothèse prévue à l'art. 93 al. 1 let. b LTF étant manifestement inapplicable dans le cas d'espèce.
Il doit s'agir d'un préjudice de nature juridique, à savoir qui n'est pas susceptible d'être supprimé par une décision ultérieure favorable au recourant (ATF 148 IV 155 consid. 1.1; 144 IV 321 consid. 2.3).
5.1.1. Selon la jurisprudence, les décisions relatives à l'administration des preuves ne sont en principe pas de nature à causer un dommage irréparable puisqu'il est normalement possible, à l'occasion d'un recours contre la décision finale, d'obtenir que la preuve administrée à tort soit écartée du dossier ou d'obtenir l'administration de la preuve refusée à tort, en particulier si elle devait avoir été écartée pour des raisons non pertinentes ou en violation des droits fondamentaux du recourant (ATF 141 III 80 consid. 1.2; 136 IV 92 consid. 4.1; arrêt 7B_215/2023 du 30 novembre 2023 consid. 1.2.1 destiné à la publication). Il en va en principe de même du séquestre à des fins probatoires en application de l'art. 263 al. 1 let. a CPP (ATF 136 IV 92 consid. 4.1; arrêts 7B_128/2022 du 24 novembre 2023 consid. 2.3; 7B_148/2023 du 13 juillet 2023 consid. 4.2.2).
Le Tribunal fédéral a également confirmé récemment que le versement formel au dossier de pièces pour lesquelles le TMC, puis le Tribunal fédéral ont autorisé la levée des scellés, ne cause, à l'instar de toute production de pièces au dossier pénal, aucun dommage irréparable (arrêt 1B_223/2023 du 9 mai 2023 consid. 1.2).
5.1.2. La règle précitée comporte toutefois des exceptions. Il en va notamment ainsi lorsque la loi prévoit expressément la restitution immédiate, respectivement la destruction immédiate, des preuves illicites (cf. par exemple les art. 248 [RO 2010 1881 et RO 2023 468 dès le 1er janvier 2024], 271 al. 3, 277 et 289 al. 6 CPP; ATF 144 IV 127 consid. 1.3.1; 143 IV 387 consid. 4.4; arrêt 7B_178/2023 du 31 août 2023 consid. 1.3.1), si le refus d'instruire porte sur des moyens de preuve qui risquent de disparaître et qui visent des faits décisifs non encore élucidés, ou encore quand la sauvegarde de secrets est en jeu (arrêts 7B_215/2023 du 30 novembre 2023 consid. 1.2.1 destiné à la publication; 1B_484/2022 du 28 septembre 2022 consid. 2; 1B_53/2022 du 14 juillet 2022 consid. 2.3 et les arrêts cités). Il en va de même quand, en vertu de la loi ou de circonstances spécifiques liées au cas d'espèce, le caractère illicite des moyens de preuve s'impose d'emblée. De telles circonstances ne peuvent être admises que dans la situation où l'intéressé fait valoir un intérêt juridiquement protégé particulièrement important à un constat immédiat du caractère inexploitable de la preuve (ATF 144 IV 127 consid. 1.3.1; 143 IV 387 consid. 4.4).
5.2.
5.2.1. En l'occurrence, il doit tout d'abord être rappelé que le seul fait que les données litigieuses puissent, le cas échéant, contenir des éléments à charge ne constitue pas un préjudice irréparable.
5.2.2. Les recourants ne sauraient ensuite se prévaloir, à titre de risque de préjudice irréparable, de l'éventuel accès aux données litigieuses que la partie plaignante pourrait obtenir (cf. en particulier p. 3 ss du recours 7B_352/2023 et ch. 40, 45, 50 p. 16 s. du recours 7B_354/2023). Celle-ci, en raison essentiellement de sa nature quasi étatique, fait en effet l'objet de restrictions à son droit de consultation (cf. arrêt 1B_601/2021, 1B_602/2021 et 1B_603/2021 du 6 septembre 2022). Or personne ne prétend que ces mesures ne seraient pas respectées ou ne concerneraient pas les pièces litigieuses. On ne voit en outre pas ce qui empêcherait les recourants de requérir, le cas échéant, d'autres mesures de protection - précisément ciblées et motivées - en application des art. 102 et 108 CPP .
5.2.3. Cette dernière considération vaut d'ailleurs également s'agissant des atteintes à la sphère privée ou au secret des affaires invoquées pour démontrer l'existence d'un risque de préjudice irréparable (cf. notamment ch. 42, 45, 49 et 50 p.16 s. du recours 7B_354/2023). Ces questions relèvent au demeurant en principe de la procédure de scellés et devraient donc, le cas échéant, avoir été soulevées devant le TMC (cf. en particulier art. 248 [RO 2010 1881 et RO 2023 468 dès le 1er janvier 2024] et 264 al. 1 let. b et al. 3 [RO 2010 1881 et RO 2023 468 dès le 1er janvier 2024] CPP), les recourants ne pouvant pas, par le biais de la présente cause, pallier un éventuel manquement à cet égard (cf. en particulier consid. 3 supra).
S'agissant en particulier du secret des affaires, l'instruction porte sur des faits respectivement des infractions à caractère économique (cf. notamment l'art. 305bis CP), réalisés dans le cadre des activités professionnelles notamment des recourants A.________, B.________ et E.________ en lien avec les sociétés du groupe C.________ dont font partie les recourantes C.________ Inc. et C.________ Ltd. Dans une telle configuration, la recherche de la vérité prime généralement le secret des affaires et les recourants A.________, B.________ et E.________, tous trois prévenus, ne paraissent ainsi pas en mesure de s'en prévaloir, en particulier sans autre explication (cf., en matière de scellés, arrêts 7B_43/2023 du 12 octobre 2023 consid. 1.3.1; 1B_541/2021 du 22 mars 2022 consid. 2.3.1 et 2.3.2; 1B_295/2021 du 28 septembre 2021 consid. 1.1 et les arrêts cités)
En tout état de cause, le versement au dossier des pièces litigieuses - dont certaines ont déjà été retirées du dossier par le Ministère public, conformément au principe de la proportionnalité - n'exclut pas toute réquisition ultérieure - précise et motivée - de la part des recourants pour obtenir le retrait, le caviardage ou d'autres mesures de protection de certains documents du dossier pénal, y compris au motif que leur contenu serait dénué de pertinence pour l'enquête (cf. notamment arrêt 1B_53/2022 du 14 juillet 2022 consid. 2.3.2 rappelant qu'un tel grief peut être réitéré, y compris devant le juge du fond). Les recourants, qui n'ont a priori pas eu accès aux pièces litigieuses (cf. en particulier ch. 47 p. 17 du recours 7B_354/2023), ne soutiennent d'ailleurs pas que, dans le cadre de la présente cause, le Ministère public aurait déjà rejeté une demande dans ce sens ou qu'ils seraient dans l'impossibilité de déposer de telles requêtes à l'avenir (voir au demeurant l'avis à ce propos du Ministère public émis dans ses observations du 23 août 2023).
5.2.4. Partant, il n'apparaît pas que l'arrêt attaqué risque de causer aux recourants un préjudice qu'aucune décision ultérieure ne serait à même de réparer.
6.
Il s'ensuit que les recours dans les causes 7B_352/2023 et 7B_354/2023 doivent être rejetés dans la mesure où ils sont recevables.
Les recourants, qui succombent, supporteront les frais judiciaires de la cause les concernant (art. 66 al. 1 LTF); ceux-ci seront fixés en tenant compte de la jonction des causes et, dans la cause 7B_354/2023, ils seront supportés solidairement par les recourants B.________ et consorts (cf. art. 66 al. 5 LTF). La société intimée, qui obtient gain de cause avec l'assistance de mandataires professionnels, a droit à des dépens, à la charge de la recourante A.________ pour la cause 7B_352/2023 et à celle des recourants B.________ et consorts, solidairement entre eux, pour la cause 7B_354/2023 (cf. art. 68 al. 1, 2 et 4 LTF ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Les causes 7B_352/2023 et 7B_354/2023 sont jointes.
2.
Les recours dans les causes 7B_352/2023 et 7B_354/2023 sont rejetés dans la mesure où ils sont recevables.
3.
Les frais de la cause 7B_352/2023, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante A.________.
4.
Les frais de la cause 7B_354/2023, fixés à 2'000 fr., sont mis à la charge des recourants B.________ et consorts, solidairement entre eux.
5.
Une indemnité de dépens, arrêtée à 3'000 fr., est allouée à la société intimée pour la cause 7B_352/2023, à la charge de la recourante A.________.
6.
Une indemnité de dépens, fixée à 3'000 fr., est allouée à la société intimée pour la cause 7B_354/2023, à la charge des recourants B.________ et consorts, solidairement entre eux.
7.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties, au Ministère public de la République et canton de Genève et à la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève.
Lausanne, le 14 février 2024
Au nom de la IIe Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Abrecht
La Greffière : Kropf