Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
5A_742/2024
Arrêt du 14 avril 2025
IIe Cour de droit civil
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Bovey, Président,
De Rossa et Josi.
Greffière : Mme Achtari.
Participants à la procédure
PPE A.________,
représentée par Me Yvan Guichard, avocat,
recourante,
contre
Office cantonal des poursuites de Genève, rue du Stand 46, 1204 Genève,
1. B.________,
représentée par Me Arnaud Moutinot, avocat,
2. C.________,
représenté par D.________et E.________,
Service de protection de l'adulte,
route des Jeunes 1c, Case postale 107, 1211 Genève 8.
Objet
réalisation d'une part de copropriété par étages, inscription d'une hypothèque légale de la PPE à l'état de charges,
recours contre la décision de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites, du 17 octobre 2024
(A/4035/2023-CS DCSO/488/24).
Faits :
A.
A.a. C.________ et B.________ sont copropriétaires, à raison d'une moitié chacun, de la part de copropriété par étages inscrite au Registre foncier de Genève, section W.________, sous feuillet n° (...). Cette part de copropriété correspond au lot n° (...) de la propriété par étages constituée sur l'immeuble de base immatriculé sous feuillet n° (...) de la commune de X.________, section W.________, lequel confère un droit d'usage exclusif sur un appartement de cinq pièces (ci-après: l'appartement) situé au premier étage du bâtiment édifié sur ledit immeuble, sis avenue de U.________ à V.________ (Genève).
A.b. A la suite de poursuites par voie de saisie (notamment poursuites n° xxx et yyy), la mise en vente aux enchères publiques de l'appartement a été publiée dans la F.A.O. du 12 (...) 2023. Les créanciers gagistes et titulaires de charges foncières ont été sommés de produire leurs droits sur l'immeuble au 9 (...) 2023.
B.
B.a.
B.a.a. Par courrier du 9 novembre 2023, la PPE A.________ (ci-après: PPE) a produit la somme totale de 38'960 fr. 69, invoquant son droit à l'inscription d'une hypothèque légale au sens de l'art. 712i CC. Elle a soutenu que la reconnaissance directe à l'état des charges de sa créance lui permettait d'éviter des frais judiciaires et d'inscription au Registre foncier inutiles, les autres créanciers conservant la faculté de contester l'état des charges s'ils estimaient ses prétentions injustifiées.
B.a.b. Par courrier du 21 novembre 2023, l'office cantonal des poursuites genevois (ci-après: office) a rejeté la production de la PPE, au motif qu'aucune inscription de gage n'avait été requise auprès du Registre foncier.
Le 27 novembre 2023, l'office a communiqué à la PPE l'état des charges et les conditions de vente relatives aux enchères du bien immobilier. Ce document ne mentionne pas la production effectuée le 9 novembre 2023 par la PPE. La vente aux enchères de l'immeuble était fixée au 9 (...) 2024.
B.b.
B.b.a. Par acte expédié au greffe de la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites de la Cour de justice du canton de Genève (ci-après: chambre de surveillance) le 1
er décembre 2023, la PPE a formé plainte contre la décision de l'office du 21 novembre 2023, concluant à ce que son droit à l'inscription d'une hypothèque légale soit porté à l'état des charges et à ce qu'elle puisse participer de plein droit à la distribution des deniers au rang qui lui aura été attribué, nonobstant l'absence d'inscription d'une hypothèque légale au Registre foncier.
Par courrier expédié le 7 décembre 2023, la PPE a requis l'élargissement de sa plainte à la communication de l'état des charges et des conditions de vente du 27 novembre 2023.
Par courrier du 26 avril 2024, la PPE a allégué avoir obtenu, à titre pré-provisionnel, l'inscription de son droit d'hypothèque afin de préserver ses droits.
Par courriers séparés du 8 mai 2024, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.
B.b.b. Par décision du 17 octobre 2024, la chambre de surveillance a rejeté la plainte de la PPE formée les 1
eret 7 décembre 2023 contre les décisions de l'office des 21 et 27 novembre 2023 écartant sa production.
C.
Par acte posté le 31 octobre 2024, la PPE interjette un recours en matière civile devant le Tribunal fédéral contre cette décision. Elle conclut principalement à sa réforme en ce sens que sa plainte est admise et, en conséquence, l'état des charges litigieux corrigé en ce sens qu'il est fait droit à sa requête tendant à voir son droit à l'inscription d'une hypothèque légale porté à l'état des charges et à pouvoir participer de plein droit à la distribution des deniers au rang qui lui aura été attribué, nonobstant l'absence d'inscription d'une hypothèque légale au Registre foncier. Subsidiairement, elle conclut à l'annulation de la décision cantonale et au renvoi de la cause à l'autorité de surveillance pour nouvelle décision. En substance, elle invoque la violation des art. 140 LP, 34 et 36 ORFI.
Invités à déposer des observations, tant B.________, que l'office y ont renoncé, alors que l'autorité de surveillance s'est référée aux considérants de l'arrêt attaqué. C.________ ne s'est pas déterminé.
Considérant en droit :
1.
Le recours est dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF), rendue en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 72 al. 2 let. a LTF en lien avec l'art. 19 LP), par une autorité cantonale de surveillance statuant en dernière (unique) instance cantonale (art. 75 al. 1 LTF). La voie du recours en matière civile est ainsi ouverte, indépendamment de la valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. c LTF). Le recours a par ailleurs été interjeté dans le délai (art. 100 al. 2 let. a LTF) par une partie qui a succombé dans ses conclusions prises devant l'autorité précédente (art. 76 al. 1 LTF).
2.
2.1. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 s. LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Cela étant, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 2 LTF, il n'examine en principe que les griefs soulevés (ATF 142 III 364 consid. 2.4 et les références). Le recourant doit par conséquent discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 146 IV 297 consid. 1.2; 142 I 99 consid. 1.7.1; 142 III 364 consid. 2.4).
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF).
Partant, l'existence d'une convention des 30 et 31 mai 2024 entre les parties ne ressortant pas des faits de l'arrêt attaqué, il ne peut en être tenu compte (art. 97 al. 2 LTF, 105 al. 2 LTF
cum 9 Cst., 99 al. 1 LTF).
3.
L'autorité de surveillance a jugé que la décision de l'office d'écarter la production de la recourante au motif qu'aucune hypothèque légale n'avait été inscrite au registre foncier était conforme au droit. Elle a considéré que le gage immobilier invoqué consistait en une hypothèque légale indirecte, qui n'existait que par son inscription au registre foncier. Le droit à l'inscription dont se prévalait la recourante ne constituait dès lors pas une charge de l'immeuble tant que l'hypothèque n'avait pas été, même provisoirement, inscrite au registre foncier. Elle a ajouté que l'office n'avait par ailleurs pas excédé son droit restreint d'examen des productions à inscrire à l'état des charges, dans la mesure où son refus était fondé sur l'inexistence d'une charge grevant l'immeuble, et non sur le bien-fondé matériel de la prétention invoquée.
4.
La recourante se plaint de la violation des art. 140 LP, 34 et 36 ORFI.
Elle soutient que le droit à l'inscription d'une hypothèque légale indirecte, telle que l'hypothèque prévue par l'art. 712i CC, doit être porté à l'état des charges par l'office même sans inscription préalable au registre foncier. A l'appui de son propos, elle invoque que l'art. 36 al. 2 ORFI impose l'inscription de la charge qu'elle a produite et que sa solution sert l'économie de procédure, en évitant au créancier une procédure complète d'inscription au registre foncier de son droit de gage, alors que personne, par hypothèse, n'en remettrait en question le principe, l'existence et l'étendue. Elle ajoute à cet égard que ses droits pécuniaires peuvent être établis lors de la distribution des deniers et qu'en appliquant strictement les exigences de l'état des charges, la PPE serait même obligée d'obtenir une inscription définitive avant le jour même de la vente, ce qui est pratiquement impossible. Si le lot est vendu entre-temps, le jugement ne pourrait que confirmer les droits pécuniaires de la PPE dans le cadre de la distribution des deniers, ce que l'état des charges aurait déjà permis d'établir en précisant le rang et l'existence du droit de gage de la PPE. La recourante précise aussi que c'est au juge d'évaluer la validité de son droit de gage dans le cadre de la procédure d'épuration de l'état des charges, si tant est que cette validité ait été contestée, l'office devant pour sa part uniquement s'exécuter. Elle considère la décision attaquée excessivement formaliste à son égard, alors qu'il suffit au débiteur (ou à un créancier saisissant), en cas d'admission du droit à l'inscription à l'état des charges, de contester l'existence ou l'étendue de ce droit pour que le créancier qui en a obtenu l'inscription soit renvoyé à le faire établir selon la voie ordinaire.
5.
La question qui se pose est de savoir si, dans une procédure de saisie, l'office des poursuites doit inscrire à l'état des charges le droit à l'inscription d'une hypothèque légale indirecte (art. 712i CC) produit par un créancier.
5.1.
5.1.1. Dans l'exécution par voie de saisie, les immeubles sont réalisés par l'office des poursuites aux enchères publiques (cf. art. 133 al. 1 LP).
Les conditions de vente (art. 135 LP et 45-52 ORFI) doivent indiquer que l'immeuble est vendu avec toutes les charges le grevant d'après l'état des charges et, notamment, que les dettes exigibles garanties par gage immobilier sont payées par préférence sur le produit de la réalisation (art. 135 al. 1, 3
ème phr., LP; 45 al. 1 let. d ORFI), et non pas en sus du prix d'adjudication. Le moment déterminant pour l'exigibilité est celui de la vente aux enchères (art. 46 al. 2 ORFI). Le paiement entraîne l'extinction de la dette et le gage ne grève plus l'immeuble (BERNHEIM/KÄNZIG,
in Kurzkommentar SchKG, 2
ème éd., 2014, n° 11 ad art. 135 LP; POSSA/GASSER/STÖCKLI,
in Basler Kommentar, SchKG, 3
ème éd., 2021, n° 13 ad art. 135 LP).
5.1.2. Les conditions de vente sont établies sur la base de l'état des charges qui grèvent l'immeuble (servitudes, charges foncières, gages immobiliers, droits personnels annotés).
Ainsi, avant de procéder aux enchères, l'office doit dresser l'état des charges, de manière qu'il puisse être déposé en même temps que les conditions de vente (art. 33 ORFI). Il se fonde sur les productions des ayants droit et les extraits du registre foncier (art. 140 al. 1 LP et 34 al. 1 let. b ORFI). La publication de la vente aux enchères doit comporter la sommation aux créanciers gagistes et autres intéressés de produire à l'office des poursuites, dans le délai de vingt jours, leurs droits sur l'immeuble, faute de quoi ils seront exclus de la répartition, pour autant que leurs droits ne soient pas inscrits au registre foncier (art. 138 al. 2 ch. 3 LP). Les prétentions revendiquées après l'expiration du délai de production de vingt jours ne peuvent pas être portées à l'état des charges (art. 36 al. 1 ORFI). Ce délai de production est péremptoire (ATF 113 III 17 consid. 2; 101 III 36 consid. 2).
L'extrait du registre foncier, que l'office doit requérir (art. 28 ORFI), constitue la base sur laquelle est dressé l'état des charges (arrêt 7B.157/2001 du 28 août 2001 consid. 1a). Toutefois, les productions priment l'extrait du registre foncier pour déterminer la charge à porter à l'état des charges. S'il existe une divergence entre la production et le contenu de l'extrait du registre foncier, l'office s'en tiendra à la production, mais il mentionnera le contenu de l'extrait du registre foncier (art. 34 al. 1 let. b, 3ème phr., ORFI). Ainsi, si une charge produite n'est pas inscrite au registre foncier, l'office doit la porter à l'état des charges, avec la mention précitée (JENT-SØRENSEN, Die Rechtsdurchsetzung bei der Gründstückverwertung in der Spezialexekution, 2003, n° 46 et 166; SCHLEGEL/ZOPFI,
in SK Kommentar zum SchKG, 4ème éd., 2017, n° 4 ad art. 140 LP).
Les charges qui ont été inscrites au registre foncier après la saisie de l'immeuble (cependant avant l'établissement de l'état des charges) sans le consentement de l'office seront portées à l'état des charges, mais avec mention de cette circonstance et avec l'observation qu'il ne sera tenu compte de ces charges que pour autant que les créanciers saisissants auront été complètement désintéressés (art. 34 al. 2 et 53 al. 3 ORFI; ATF 117 III 36 consid. 3 et Note de GILLIÉRON,
in JdT 1993 II p. 108; JENT-SØRENSEN,
op. cit., n° 139 et 303 ss).
5.1.3. Contrairement à l'office des faillites, l'office des poursuites n'a pas le pouvoir d'examiner l'existence ou l'étendue des charges (BERNHEIM/KÄNZIG,
op. cit., n° 8 ad art. 140 LP; FEUZ,
in Basler Kommentar, SchKG, 3ème éd., 2021, n° 102b et 104 ad art. 140 LP; JENT-SØRENSEN,
op. cit., n° 130; STAEHELIN, Die Aufnahme in das Lastenverzeichnis und die Parteirollenverteilung für den Lastenbereinigungsprozess,
in Schuldbetreibung und Konkurs im Wandel, 2000, p. 287 ss [290]). Il n'a ainsi pas le droit de refuser de porter à l'état des charges celles qui figurent dans l'extrait du registre foncier ou qui ont fait l'objet d'une production, ni de les modifier ou de les contester ou d'exiger la production de moyens de preuves (art. 36 al. 2 ORFI).
Il appartient au juge saisi de la procédure en épuration de l'état des charges de régler les éventuels litiges. A défaut d'opposition, l'état des charges devient définitif et les droits y figurant sont censés avoir été reconnus par tous les intéressés pour la poursuite en cours (art. 37 al. 2 ORFI; ATF 121 III 24 consid. 2b).
5.1.4. Ne doivent toutefois figurer à l'état des charges que les créances qui impliquent une charge pour l'immeuble, partant qui influent sur le calcul du prix d'adjudication (cf. art. 53 ORFI) et sur l'offre des enchérisseurs (art. 36 al. 1 et 45 al. 1 let. a ORFI).
Si l'office des poursuites n'est pas compétent pour examiner des questions de droit matériel relatives aux charges, il est en revanche en droit de vérifier si une prétention est garantie par le droit de gage immobilier invoqué. En d'autres termes, il peut contrôler si une créance produite à la suite de la publication des enchères et de la sommation aux ayants droit implique une charge pour l'immeuble et doit être portée à l'état des charges (ATF 120 III 32 consid. 3a; 117 III 36 consid. 3). Seules les prétentions qui, de par leur nature, ne peuvent pas constituer une charge pour l'immeuble doivent être refusées à l'état des charges (BERNHEIM/KÄNZIG,
op. cit., n° 8 ad art. 140 LP; FEUZ,
op. cit., n° 106 ad art. 140 LP; JENT-SØRENSEN,
op. cit., n° 134 ss; SCHLEGEL/ZOPFI,
op. cit., n° 8 ad art. 140 LP; STAEHELIN,
op. cit.,
loc. cit.). C'est ainsi que les droits personnels, notamment les prétentions contractuelles en inscription d'un gage, en sont exclus (ATF 113 III 42 consid. 2; arrêt 2P.90/2006 du 13 juillet 2006 consid. 2.7; JENT-SØRENSEN,
op. cit., n° 135), sauf s'ils grèvent l'immeuble et sont annotés au registre foncier (arrêts 5A_702/2021 du 7 octobre 2021 consid. 2.1; 5A_657/2020 du 21 décembre 2020 consid. 3.5).
5.1.5. Les effets de l'état des charges se limitent à la poursuite en cours (ATF 129 III 246 consid. 3.1; arrêt 5A_275/2012 du 29 juin 2012 consid. 2.1). Il remplace ainsi le feuillet du registre foncier en vue de la réalisation forcée de l'immeuble (ATF 117 III 36 consid. 3), raison pour laquelle certains auteurs le qualifient de "registre foncier
ad hoc " (BERNHEIM/KÄNZIG,
op. cit., n° 1 ad art. 140 LP; JENT-SØRENSEN,
op. cit., n° 36). Le principal effet juridique de l'état des charges reste de se substituer au mécanisme de publicité du registre foncier (JENT-SØRENSEN,
op. cit.,
loc. cit.; DENIS PIOTET,
in Commentaire romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 41 ad art. 140 LP).
Ainsi, exception faite des créances garanties par hypothèque légale qui n'étaient pas encore exigibles lors de la vente (art. 49 al. 1 let. b ORFI), le fait qu'une charge ne figure pas à l'état des charges, soit parce que l'ayant droit ne l'a pas produite, soit par la faute du fonctionnaire compétent, entraîne son extinction à l'égard de l'adjudicataire de bonne foi, cela même si la charge était inscrite au registre foncier (ATF 106 II 183 consid. 3a). A l'inverse, vu l'absence de pouvoir d'examen de l'office des poursuites en la matière, des charges peuvent être portées à l'état des charges puis réalisées, faute d'avoir été contestées avec succès devant le juge de l'épuration de l'état des charges, alors qu'elles n'existent pas (arrêt 5A_272/2014 du 21 juillet 2014 consid. 4.1.1; BERNHEIM/KÄNZIG,
op. cit., n° 9 ad art. 140 LP; FEUZ,
op. cit., n° 117 ad art. 140 LP). L'état des charges devient définitif sur ce point, même si ses effets se limitent à la procédure de poursuite en cours (cf. art. 37 al. 2 et 43 al. 1 ORFI; ATF 129 III 246 consid. 3.1).
5.2.
5.2.1. L'hypothèque légale indirecte est un droit réel limité dont le titre d'acquisition est la loi elle-même. Elle ne prend toutefois pas naissance par le seul effet de la loi. Celle-ci se limite en effet à conférer au créancier un droit à l'inscription du gage. Il appartient ensuite au créancier de faire valoir ce droit et de veiller à ce que l'hypothèque soit effectivement constituée (STEINAUER, Les droits réels, tome III, 5ème éd., 2021, n° 4431 et 4406). L'inscription dans le grand livre est déterminante, mais l'effet de celle-ci remonte à l'inscription au journal ( art. 972 al. 1 et 2 CC ).
5.2.2. Le droit à l'inscription d'une hypothèque légale est un droit de nature personnelle, qui a son origine dans la loi. Il ne s'agit pas d'un droit réel, car l'hypothèque ne prend naissance que si le bénéficiaire du droit fait valoir celui-ci et obtient l'inscription (constitutive) de l'hypothèque au registre foncier (ATF 123 III 53 consid. 4b; 95 II 31 consid. 3). Il ne s'agit pas non plus d'un droit produisant un effet réel, en ce sens que le droit à la constitution de l'hypothèque n'est en principe pas renforcé (STEINAUER,
op. cit., n° 4421). L'hypothèque ne prendra rang qu'à la date de sa constitution, soit, selon le système de la priorité dans le temps (art. 972 CC), après tous les droits de gage qui sont inscrits au registre foncier à la date de sa constitution (art. 972 al. 2 CC), étant précisé que si le droit a été inscrit provisoirement, la date de cette inscription détermine le rang (art. 961 al. 2 CC; STEINAUER,
op. cit., n° 4236, 4442, 4550).
La créance légale tendant à la constitution de l'hypothèque présente toutefois la particularité d'être rattachée
propter rem à l'immeuble et son inscription peut être invoquée à l'égard de tout propriétaire actuel (ATF 92 II 227 consid. 1). S'il reste une prétention de nature contractuelle, le droit à la constitution de l'hypothèque déploie donc un effet réel (ATF 134 III 147 consid. 4.3 ["
realobligatorische Natur "]; 125 III 248 consid. 2b; 106 II 183 consid. 1 et 3b; STEINAUER,
op. cit., n° 4422).
5.2.3.
5.2.3.1. Pour faire réaliser l'objet de son gage et obtenir le paiement de la créance garantie, le bénéficiaire de l'hypothèque légale indirecte doit, au vu du caractère constitutif de l'inscription, faire inscrire celle-ci au registre foncier (ATF 123 III 53 consid. 4b; 106 II 183 consid. 3c). Son gage sera alors porté à l'état des charges en principe d'office, puisqu'il est inscrit au registre foncier dont l'office doit requérir un extrait (sur les effets des réquisitions d'inscription portées au journal, cf. arrêt 5C.232/2003 du 2 mars 2004 consid. 2.1, non publié aux ATF 130 III 306; ATF 118 II 119 consid. 3a; JENT-SØRENSEN,
op. cit., n° 123).
Une inscription provisoire (annotation selon l'art. 961 al. 1 ch. 1 CC) suffit pour faire admettre la créance à l'état des charges en qualité de créance garantie par gage immobilier, sans qu'il soit encore nécessaire de constituer formellement le droit de gage par une inscription définitive au registre foncier (ATF 83 III 138 consid. 3).
Pour des impératifs liés à l'économie de la procédure, si aucun procès en inscription définitive n'est déjà pendant au moment de la saisie, une décision sur l'existence de l'hypothèque doit être prise dans la procédure d'épuration de l'état des charges, car celle-ci peut également aboutir au jugement de la prétention matérielle, qui ne produit toutefois d'effets que pour la procédure d'exécution forcée (ATF 119 III 124 consid. 2b et 2c; cf. not. GASSER, Bauen, Schuldbetreibung und Konkurs,
in Baurechtstagung 1999, Tome II, p. 27 ss [32 s.]; GEISER, Geltendmachung des Bauhandwerkpfandrechts im Konkurs,
in RJB 1993 p. 708 s.; HIERHOLZER/KRAMER/SOGO,
in Basler Kommentar, SchKG, 3ème éd., 2021, n° 25 ad art. 247 LP; SCHUMACHER, Remarque ad ATF 119 III 124,
in BR 1994 p. 113 ss).
5.2.3.2. Dans la procédure d'exécution par voie de saisie, le droit de constituer une hypothèque légale indirecte ne peut pas être délégué à l'adjudicataire. Comme le gage garantit des créances échues, il doit nécessairement être réalisé lors de la vente aux enchères de l'objet du gage (cf.
supra consid. 5.1.1). En conséquence, le bénéficiaire doit faire valoir son droit à la constitution d'une hypothèque, pour laquelle l'inscription au registre foncier est nécessaire. Il ne peut pas y renoncer et obtenir, après la réalisation de l'immeuble, l'inscription de son hypothèque contre l'adjudicataire sous prétexte du caractère
propter rem de sa créance. Il ne peut pas non plus faire valoir uniquement un droit à la constitution de l'hypothèque légale (ATF 106 II 183 consid. 3d et 3e;
contra sur ce dernier point not. HUNKELER,
in Basler Kommentar, SchKG, 3ème éd., 2021, n° 7 ad art. 198 LP; STAEHELIN,
op. cit., p. 309; ZOBL, Das Bauhandwerkerpfandrecht
de lege lata und
de lege ferenda,
in RDS 1982 II p. 1 ss [167]; dubitative: JENT-SØRENSEN,
op. cit., n° 261 ss). Au demeurant, même si la créance garantie n'était pas exigible, une solution contraire serait non seulement inéquitable pour les autres créanciers saisissants, car on ne sait pas si le gage sera effectivement constitué, mais il serait douteux, pour les hypothèques légales dont l'inscription est soumise à un délai (not. art. 839 CC), qu'elle soit même réalisable (JENT-SØRENSEN,
op. cit., n° 262 s.).
5.2.4.
5.2.4.1. Le créancier peut faire inscrire son hypothèque légale indirecte au registre foncier même après le prononcé de la faillite du propriétaire foncier ou la saisie de l'immeuble, car il s'agit d'une restriction légale indirecte de la propriété foncière (ATF 106 II 183 consid. 3c; 95 II 31 consid. 4; critiques, cf. not. GILLIÉRON, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, Art. 89-158, 2000, n° 81 ss ad art. 140 LP; IDEM,
op. cit., Art. 159-270, 2001, n° 21 ss ad art. 204 LP; DENIS PIOTET,
op. cit., n° 20 ad art. 138 LP), bien que la saisie soit annotée (à titre déclaratif; art. 960 al. 1 ch. 2 CC) et la faillite mentionnée (art. 176 al. 2 LP) au registre foncier. Il faut aussi déduire de cette jurisprudence que le droit de gage entre en ligne de compte pour le calcul du prix d'adjudication et que le bénéficiaire peut participer à la distribution des deniers comme s'il avait inscrit son gage avant la saisie, et donc même si les créanciers saisissants n'ont pas été complètement désintéressés, sinon, elle n'apporterait aucun avantage au système prévu par l'ORFI (art. 34 al. 2, 53 al. 3 et 81 ORFI; cf.
supra consid. 5.1.2).
5.2.4.2. L'inscription (provisoire) est non seulement nécessaire pour faire réaliser le gage, au vu de son caractère constitutif, mais elle doit intervenir avant que l'office dresse l'état des charges (ATF 123 III 53 consid. 4a; 106 II 183 consid. 3c). En d'autres termes, le créancier doit l'avoir obtenue dans le délai de production de vingt jours (art. 138 al. 2 ch. 3
cum 140 LP). Si le bénéficiaire doit se montrer diligent, il faut toutefois préciser que, avant la publication des enchères, il est déjà informé de la saisie par le registre foncier (art. 960 al. 1 ch. 2 CC). Par ailleurs, il peut requérir l'inscription de l'hypothèque légale par voie de mesures superprovisionnelles. Le juge peut alors ordonner la mesure requise immédiatement, avant audition des parties (art. 265 al. 1 CPC). Pour le bénéficiaire du gage prévu par l'art. 837 ch. 1 CC, l'inscription ne nécessite qu'une simple déclaration de sa part au registre foncier (BOVEY,
in Commentaire romand, CC II, 2016, n° 106 ad art. 839 CC et n° 7 ad art. 838 CC).
Il n'en demeure pas moins que, dans la procédure de saisie, l'office des poursuites n'ayant pas de pouvoir d'examen sur l'existence du gage produit (cf.
supra consid. 5.1.3), il doit porter à l'état des charges une éventuelle production de l'hypothèque légale indirecte, même si elle n'est pas inscrite au registre foncier. Il appartiendra ensuite aux créanciers de faire opposition, le bénéficiaire supportant la charge de l'action (cf. art. 107 al. 5 LP; STAEHELIN,
op. cit., p. 311). A défaut, l'état des charges entrera en force avec le gage, qui sera réalisé. En revanche, si le bénéficiaire produit une simple prétention en constitution du gage, l'office est en droit de refuser de porter celle-ci à l'état des charges: le gage n'existant pas, la prétention ne constitue pas une charge pour l'immeuble.
5.2.4.3. A l'ATF 106 II 183 consid. 3c, le Tribunal fédéral avait certes laissé indécise la question de savoir s'il suffit, pour simplifier la procédure, de produire le droit de gage directement à l'office des poursuites, pour être porté à l'état des charges, sans inscription préalable au registre foncier, de façon que son existence doive être constatée dans la procédure d'épuration de l'état des charges. Par la suite, il a en outre affirmé que, dans cette procédure, le juge statue sur l'existence du gage (ATF 119 III 124), étant rappelé en outre que l'état des charges qu'il modifie à cette occasion remplace le feuillet du registre foncier pour l'exécution forcée en cours. Néanmoins, à l'ATF 123 III 53, le Tribunal fédéral a affirmé, cette fois sans réserve, que l'inscription au registre foncier est indispensable à la constitution du gage et pour être admise à l'état des charges, de sorte qu'il faut en déduire qu'elle doit avoir été faite préalablement à l'établissement de l'état des charges. La question a donc été tranchée par ce dernier arrêt. Bien que largement discutée, cette solution est du reste aussi soutenue en doctrine (cf. HIERHOLZER/KRAMER/SOGO,
op. cit., n° 26 et 26a ad art. 247 LP; SCHUMACHER/REY, Das Bauhandwerkerpfandrecht, System und Anwendung, 4ème éd., 2021, n° 1959, 1962 s., 1968; STAEHELIN,
op. cit., p. 309 s.; THURNHERR, Das Bauhandwerkerpfandrecht im Konkurs,
in Sanierung und Insolvenz von Unternehmen VIII, 2017, p. 49 ss [75];
contra BRITSCHGI, Das belastete Grundstück beim Bauhandwerkerpfrandrecht, 2008, p. 222 s.; SCHLEGEL/ZOPFI,
op. cit., n° 8 ad art. 140 LP; SCHMID, Das Bauhandwerkerpfandrecht im Konkurs,
in Schuldbetreibung und Konkurs im Wandel, 2000, p. 73 ss [82 ss]; moins claire: JENT-SØRENSEN,
op. cit., n° 541 ss).
5.2.5. En résumé, l'inscription étant constitutive, l'hypothèque légale indirecte doit être inscrite au registre foncier pour être portée à l'état des charges et réalisée dans la procédure d'exécution forcée. Au vu du caractère
propter rem du droit à la constitution du gage, cette inscription peut encore avoir lieu après la saisie, mais il faut qu'elle le soit avant l'établissement de l'état des charges. Néanmoins, étant donné qu'il n'a pas de pouvoir d'examen sur l'existence des charges, l'office des poursuites doit porter à l'état des charges la production ayant pour objet l'hypothèque légale indirecte de la communauté des copropriétaires (art. 712i CC), ceci indépendamment de son inscription au registre foncier. Il appartient aux intéressés de faire opposition pour faire écarter cette charge, et non à l'office de statuer sur l'existence de celle-ci. Doit être porté à l'état des charges le droit réel limité, et non la prétention en constitution de celui-ci, car il doit être réalisé. Si une opposition est formée (et qu'aucun procès n'est déjà pendant sur cet objet), le juge de l'action en épuration de l'état des charges doit statuer sur l'existence de l'hypothèque légale. A défaut, l'état des charges, remplaçant le registre foncier pour la procédure d'exécution forcée, entre en force avec ce droit.
5.3. En l'espèce, la recourante a produit uniquement son droit à l'inscription de son hypothèque légale indirecte au sens de l'art. 712i CC. Elle a allégué avoir fait inscrire son droit durant la procédure devant l'autorité de surveillance, mais après l'échéance du délai de plainte. Elle n'oppose toutefois pas à l'autorité de surveillance d'avoir arbitrairement omis de tenir compte de ce fait nouveau, dont la recevabilité est réglée par le droit cantonal, s'agissant ici d'une procédure de plainte LP. C'est donc sans violer l'art. 140 LP que l'autorité de surveillance a considéré que l'office devait rejeter la production d'une simple prétention en constitution d'un droit réel limité.
6.
En définitive, le recours est rejeté. Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). Aucuns dépens ne sont dus ( art. 68 al. 1, 2 et 3 LTF ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
3.
Le présent arrêt est communiqué à la recourante, à l'Office cantonal des poursuites de Genève, à B.________, à C.________, par le Service de protection de l'adulte, et à la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites de la Cour de justice du canton de Genève.
Lausanne, le 14 avril 2025
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Bovey
La Greffière : Achtari