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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
1B_136/2014  
   
   
 
 
 
Arrêt du 14 mai 2014  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Fonjallaz, Président, 
Aemisegger et Chaix. 
Greffière: Mme Kropf. 
 
Participants à la procédure 
A.________, représenté par Me Robert Ayrton, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public central du canton de Vaud.  
 
Objet 
Procédure pénale, séquestre, 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 27 février 2014. 
 
 
Faits:  
 
A.   
A.________ fait l'objet d'une instruction pénale pour tentative d'assassinat, voies de fait, mise en danger de la vie d'autrui, dommages à la propriété, calomnie et subsidiairement diffamation, injure, utilisation abusive d'une installation de télécommunication, menaces, violation de domicile et insoumission à une décision d'autorité. Il lui est notamment reproché d'avoir, le 11 juin 2013, au domicile de son épouse à B.________, menacé celle-ci avec une arme à feu, de l'avoir atteinte à la cuisse droite, d'avoir ensuite défoncé la porte de la salle de bain dans laquelle s'étaient réfugiés son épouse, sa fille et ses beaux-parents, d'avoir alors fait feu, blessant de la sorte sa belle-mère à l'abdomen et son beau-père à la main. 
Depuis son interpellation par la police le 11 juin 2013, A.________ se trouve en détention provisoire. 
Par ordonnance du 31 janvier 2014, le Ministère public de l'arrondissement de l'Est vaudois a séquestré le montant de 18'000 fr. appartenant à l'intéressé afin de couvrir une partie des frais d'enquête; à ce stade, ceux-ci - sans tenir compte des indemnités qui seront dues aux défenseurs d'office - s'élevaient à environ 12'000 fr. Le 27 février 2014, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté le recours intenté par l'intéressé contre cette décision. 
 
B.   
Par acte du 7 avril 2014, A.________ forme un recours en matière pénale contre ce jugement, concluant à son annulation et à la levée en sa faveur du séquestre prononcé sur le montant de 18'000 fr. Il demande aussi le renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision et sollicite l'octroi de l'assistance judiciaire. 
Invité à se déterminer, le Ministère public a en substance conclu au rejet du recours, produisant une copie des déterminations produites devant la cour cantonale. Quant à cette dernière, elle s'est référée aux considérants de sa décision. Le recourant n'a pas produit d'observation supplémentaire. 
 
 
Considérant en droit:  
 
1.   
Le recours en matière pénale (art. 78 al. 1 LTF) est ouvert contre la décision entreprise, rendue dans une cause pénale par une autorité statuant en dernière instance (art. 80 al. 1 LTF) et confirmant le maintien d'un séquestre à des fins de garantie. Le recourant a qualité pour agir, étant le détenteur du montant séquestré (art. 81 al. 1 LTF). Privé de la libre disposition de la somme saisie, il subit un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF (ATF 126 I 97 consid. 1b p. 101; voir également ATF 133 IV 139 consid. 4 p. 141; 128 I 129 consid. 1 p. 131). Le recours a été déposé en temps utile (art. 45 al. 1 et 100 al. 1 LTF) et les conclusions qui y sont prises sont recevables (art. 107 al. 1 LTF). Il y a donc lieu d'entrer en matière. 
 
2.   
Le recourant reproche à l'autorité précédente une violation de l'art. 268 al. 1 let. a CPP. Il soutient qu'aucun indice sérieux ne permettrait de penser qu'il entendrait se soustraire à ses obligations financières en cas de condamnation; il y aurait dès lors lieu de présumer qu'il y ferait face dans la mesure de ses moyens. Le recourant invoque également une violation du principe de proportionnalité, car si le séquestre devait porter, il n'aurait plus de ressources financières lors de sa libération. 
 
2.1. Selon l'art. 263 al. 1 let. b CPP, des objets et des valeurs patrimoniales appartenant au prévenu ou à des tiers peuvent être mis sous séquestre notamment lorsqu'il est probable qu'ils seront utilisés pour garantir le paiement des frais de procédure, des peines pécuniaires, des amendes et des indemnités. L'art. 268 al. 1 CPP précise que le patrimoine d'un prévenu peut être séquestré dans la mesure qui paraît nécessaire pour couvrir les frais de procédure et les indemnités à verser (let. a), ainsi que les peines pécuniaires et les amendes (let. b). L'alinéa 2 de cette disposition ajoute que lors du séquestre, l'autorité pénale tient compte du revenu et de la fortune du prévenu et de sa famille. Quant à l'alinéa 3, il dispose que les valeurs patrimoniales insaisissables selon les art. 92 à 94 de la loi fédérale du 11 avril 1889 sur la poursuite pour dettes et la faillite (LP; RS 281.1) sont exclues du séquestre.  
Comme toute autre mesure de séquestre, celui en couverture des frais est fondé sur la vraisemblance. Tant que l'instruction n'est pas achevée, une simple probabilité suffit car la saisie se rapporte à des prétentions encore incertaines. L'autorité pénale doit pouvoir décider rapidement du séquestre provisoire (cf. art. 263 al. 2 CPP), ce qui exclut qu'elle résolve des questions juridiques complexes ou qu'elle attende d'être renseignée de manière exacte et complète sur les faits avant d'agir (ATF 116 Ib 96 consid. 3a p. 99). 
Le séquestre en couverture des frais peut porter sur tous les biens et valeurs du prévenu, même ceux qui n'ont pas de lien de connexité avec l'infraction. Pour ce type de saisie, comme pour toutes les mesures de contrainte, le principe de la proportionnalité doit être respecté (arrêt 1B_274/2012 du 11 juillet 2012 consid. 3.1). 
Le principe de proportionnalité doit d'abord être pris en considération lorsqu'il s'agit de décider de l'opportunité du séquestre en couverture de frais. L'autorité pénale doit disposer d'indices lui permettant de douter du futur recouvrement des frais auxquels le prévenu sera condamné. Cela peut être le cas si le prévenu procède à des transferts de biens aux fins d'empêcher une soustraction ultérieure ou si le prévenu tente de se soustraire à la procédure par la fuite, sans avoir fourni aucune garantie (Message du Conseil fédéral relatif à l'unification du droit de procédure pénale du 21 décembre 2005 [ci-après: le Message] FF 2005 1229; cf. également arrêts 1B_379/2013 du 6 décembre 2013 consid. 2.3.2; 1B_274/2012 du 11 juillet 2012 consid. 3.1). Le principe de proportionnalité entre aussi en ligne de compte lorsqu'il s'agit de déterminer la valeur des biens à mettre sous séquestre (cf. le Message, p. 1229); sous cet angle, le respect de ce principe se limite pour l'essentiel à la garantie du minimum vital (arrêt 1P.21/2007 du 2 mai 2007; ATF 106 III 107). Quant au montant définitif des frais judiciaires, il ne sera connu qu'à l'issue de la procédure et le principe de proportionnalité n'est violé que si le montant saisi en garantie des coûts de procédure est manifestement disproportionné par rapport aux coûts estimés (arrêts 1B_379/2013 du 6 décembre 2013 consid. 2.3.3; 1B_274/2012 du 11 juillet 2012 consid. 3.1). 
 
2.2. En l'occurrence, le recourant ne conteste pas que l'instruction en cours à son encontre porte sur de graves infractions (cf. notamment les coups de feu tirés sur sa femme et ses beaux-parents) et qu'il a reconnu les faits principaux, avec comme conséquence une probable condamnation et la mise à charge des frais de procédure en application de l'art. 426 CPP. Il soutient en revanche que l'importance des chefs de prévention ne permettrait pas de retenir qu'il ne s'acquitterait pas de ses obligations pécuniaires. Il omet cependant de relever que le raisonnement de la cour cantonale ne s'appuie pas sur ces seuls indices. En effet, celle-ci a aussi constaté qu'un risque de fuite était avéré en l'espèce (cf. également la décision de prolongation de la détention du Tribunal des mesures de contrainte du 6 février 2014). Au vu de l'ensemble des circonstances et notamment de ce dernier élément - sur lequel le recourant ne développe aucune argumentation -, le séquestre en vue de garantir les frais et indemnités n'est sur ce point pas critiquable.  
La saisie opérée (18'000 fr.) n'apparaît ensuite pas disproportionnée par rapport aux possibles frais de la procédure judiciaire (environ 25'474 fr. 20 au 21 février 2014), ce que ne prétend d'ailleurs pas le recourant. Ce dernier soutient cependant que ces 18'000 fr. constitueraient ses seuls biens. Se limitant à relever que l'entretien courant du prévenu, en tant que détenu, est entièrement pris en charge par le canton, la juridiction cantonale ne donne aucune indication sur la situation financière de celui-ci, en Suisse ou en Turquie. Dès lors que cette question est pourtant déterminante s'agissant du contrôle de la proportionnalité de la mesure, il appartenait à l'autorité précédente d'instruire et d'examiner cette question. En l'absence de toute considération sur ce point, le raisonnement tenu par la Chambre des recours pénale viole le droit fédéral. Partant, le grief relatif à la violation du principe de proportionnalité doit être admis. 
 
3.   
Il s'ensuit que le recours est partiellement admis et l'arrêt entrepris annulé dans la mesure où il n'examine pas de manière complète le respect du principe de proportionnalité de la mesure prononcée à l'encontre du recourant. 
Dès lors que le jugement attaqué ne contient pas les éléments de fait permettant au Tribunal de céans de statuer, il convient de renvoyer la cause à la juridiction précédente afin, d'une part, qu'elle complète les faits, et d'autre part, qu'elle examine si le séquestre prononcé - maintenu en l'état - respecte le principe de proportionnalité. 
Le recourant qui obtient gain de cause a droit à une indemnité de dépens à verser à son conseil pour la procédure devant le Tribunal fédéral (art. 68 al. 1 et 2 LTF), ce qui rend sans objet sa demande d'assistance judiciaire. Il ne supporte pas de frais (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:  
 
1.   
Le recours est partiellement admis. L'arrêt du 27 février 2014 de la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud est annulé au sens des considérants. La cause est renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. 
 
2.   
La requête d'assistance judiciaire est sans objet. 
 
3.   
Une indemnité de dépens de 1'500 fr. est allouée au mandataire du recourant pour la procédure fédérale à la charge du canton de Vaud. 
 
4.   
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
5.   
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Ministère public central du canton de Vaud et à la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 14 mai 2014 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président: Fonjallaz 
 
La Greffière: Kropf