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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
9C_529/2024  
 
 
Arrêt du 14 mai 2025  
 
IIIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux 
Moser-Szeless, Présidente, Parrino et Beusch. 
Greffier : M. Bürgisser. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
recourant, 
 
contre  
 
Conseil d'État de la République et canton de Genève, rue de l'Hôtel-de-Ville 2, 1204 Genève, 
représenté par Me David Hofmann, avocat, 
intimé. 
 
Objet 
Taux des centimes additionnels du canton de Genève, période fiscale 2024; contrôle abstrait, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 9 septembre 2024 (A/920/2024-ABST - ACST/14/2024). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par arrêté du 13 mars 2024, publié dans la Feuille des avis officiels de la République et canton de Genève le 15 mars 2024, le Conseil d'État de la République et canton de Genève a approuvé les délibérations des Conseils municipaux des communes du canton de Genève fixant le taux des centimes additionnels pour l'année 2024. 
A.________ a recouru contre cet arrêté. 
 
B.  
Statuant par arrêt du 9 septembre 2024, la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre constitutionnelle (ci-après: la Cour de justice), a déclaré le recours irrecevable. 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ conclut à l'annulation de l'arrêt cantonal du 9 septembre 2024 et à ce que la cause soit renvoyée à la Cour de justice pour "traitement au fond du recours". Subsidiairement, il conclut au renvoi de l'affaire à l'instance précédente pour qu'elle se dessaisisse au profit de la Chambre administrative de la Cour de justice, afin qu'elle traite du recours au fond. Encore plus subsidiairement, il conclut en substance au renvoi de la cause à l'instance précédente pour qu'elle transmette la cause au Tribunal fédéral et encore plus subsidiairement à l'annulation de l'arrêté du Conseil d'État du 13 mars 2024. 
Après que le Conseil d'État a conclu au rejet du recours dans la mesure de sa recevabilité, A.________ s'est encore déterminé. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 150 IV 103 consid. 1).  
 
1.2. L'arrêt entrepris, lequel a déclaré le recours irrecevable, est une décision finale (art. 90 LTF). En principe, la voie du recours en matière de droit public est ouverte à l'encontre des jugements d'irrecevabilité prononcés par la Cour constitutionnelle (cf. ATF 149 I 81 consid. 3.3.7 et la référence).  
 
1.3. S'agissant de la qualité pour recourir sous l'angle de l'art. 89 al. 1 LTF, on constate que le recourant est domicilié dans la commune de U.________, dans le canton de Genève et se voit donc appliquer les centimes additionnels décidés par le Conseil municipal de sa commune de domicile et approuvés par le Conseil d'État dans son arrêté du 13 mars 2024. Il est donc touché par la réglementation en cause et dispose d'un intérêt à recourir contre l'arrêt de la Chambre constitutionnelle.  
 
2.  
Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits constatés par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF
 
3.  
Le litige porte sur le point de savoir si c'est à bon droit que la Chambre constitutionnelle a considéré que le recours déposé devant elle était irrecevable car l'acte attaqué émanant du Conseil d'État ne constituait pas un acte normatif (consid. 6 infra)et si ce recours aurait dû, le cas échéant, être transmis directement au Tribunal fédéral (consid. 7 infra). 
 
4.  
 
4.1. Selon l'art. 291 let. a de la loi générale du 9 novembre 1987 sur les contributions publiques du canton de Genève (LCP; rs/GE D 3 05), lorsque les recettes d'une commune, provenant de ses propres biens, des allocations ou des répartitions qui lui sont faites par l'État sur des taxes ou impôts, ou de ses autres ressources, ne lui permettent pas de subvenir à ses dépenses, elle est autorisée à percevoir un impôt communal, sous forme de centimes additionnels applicables en supplément aux impôts cantonaux sur le revenu et la fortune des personnes physiques et sur le bénéfice net et le capital des personnes morales.  
Aux termes de l'art. 30 al. 1 let. b de la loi genevoise du 13 avril 1984 sur l'administration des communes (LAC; rs/GE B 6 05), "le conseil municipal délibère sur le nombre des centimes additionnels communaux à percevoir". L'art. 113 al. 3 LAC prévoit que "le Conseil d'État approuve par un arrêté le nombre des centimes additionnels communaux à percevoir pour l'exercice budgétisé". 
 
4.2. L'art. 130B al. 1 let. a de la loi genevoise du 26 septembre 2010 sur l'organisation judiciaire (LOJ; rs/GE E 2 05) prévoit que la chambre constitutionnelle connaît des recours contre les lois constitutionnelles, les lois et les règlements du Conseil d'État (let. a); en matière de votations et d'élections (let. b) et en matière de validité des initiatives populaires (let. c).  
Selon l'art. 132 al. 1 LOJ, la chambre administrative est l'autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative. Les compétences de la chambre constitutionnelle et de la chambre des assurances sociales sont réservées. 
 
5.  
La Chambre constitutionnelle a considéré qu'elle n'était pas compétente pour procéder au contrôle au droit supérieur des normes communales, étant précisé que de telles normes étaient soumises au contrôle du Conseil d'État en sa qualité d'autorité de surveillance des communes. En substance, par son arrêté du 13 mars 2024, le Conseil d'État s'était limité à approuver les délibérations des Conseils municipaux des communes genevoises fixant le taux des centimes additionnels communaux pour l'année 2024. Ce n'était donc pas lui qui avait fixé de tels centimes. L'acte en cause ne constituait donc ni une loi constitutionnelle, ni une loi cantonale, ni un règlement du Conseil d'État, de sorte qu'il ne pouvait s'agir d'un acte normatif sujet à recours devant la Chambre constitutionnelle au sens de l'art. 130B al. 1 let. a LOJ. Elle était donc incompétente pour connaître du recours dirigé contre l'arrêté du Conseil d'État. 
Selon la Chambre constitutionnelle, la Chambre administrative de la Cour de justice n'était pas davantage compétente pour traiter la cause. Le recourant n'avait pas formé son recours contre la délibération du Conseil municipal fixant le taux de centimes additionnels (qui touchait le cas échéant aux droits et obligations des contribuables et qui aurait pu faire l'objet d'un recours devant la Chambre administrative), mais uniquement contre l'approbation desdits taux par le Conseil d'État. Ensuite, le recourant ne critiquait pas le bien-fondé de l'approbation du Conseil d'État dans le cadre de ses tâches de surveillance des communes, mais contestait en réalité le système de perception des centimes additionnels et donc la législation permettant leur perception, mais ces griefs étaient de toute façon exorbitants au litige. 
En outre, le recours ne pouvait pas être transmis au Tribunal fédéral, car l'arrêté en cause, faute de contenir des règles de droit, ne constituait pas un acte normatif au sens de l'art. 82 let. b LTF. En définitive et pour les juges cantonaux, le recours devait être déclaré irrecevable. 
 
6.  
 
6.1.  
 
6.1.1. Sous l'angle de la compétence de la Cour constitutionnelle, le recourant soutient que le pouvoir de rendre "applicable en droit" (et non pas seulement exécutoire) les délibérations des Conseils municipaux portant sur les centimes additionnels appartient au Conseil d'État. Par conséquent, cela serait bien l'arrêté du gouvernement cantonal qui fonderait la perception de tels centimes additionnels; son approbation constituerait donc une condition de validité de la perception de ces centimes. L'arrêté litigieux contiendrait donc des règles générales et abstraites destinées à s'appliquer à un nombre indéterminé de personnes. La Chambre constitutionnelle aurait méconnu la notion d'acte normatif, qui serait selon le recourant "une notion relevant du droit fédéral et du droit constitutionnel cantonal", de sorte qu'elle aurait dû entrer en matière sur son recours.  
 
6.1.2. Contrairement à ce que prétend le recourant, la notion d'acte normatif au sens de l'art. 130B al. 1 let. a LOJ/GE ne relève pas du droit fédéral que le Tribunal fédéral peut revoir librement (cf. arrêt 1C_676/2019 du 23 mars 2021 consid. 4 et 4.1). Partant, les griefs dirigés par le recourant contre le raisonnement des juges précédents ne peuvent être examinés par le Tribunal fédéral que sous l'angle restreint de l'arbitraire puisqu'ils ont trait à l'interprétation de normes cantonales de procédure (sur la notion d'arbitraire, cf. ATF 144 I 170 consid. 7.3; arrêt 1C_619/2023 du 27 février 2025 consid. 3.1.2).  
 
6.1.3. Eu égard au pouvoir d'examen restreint de la Cour de céans, ainsi que le relève du reste à juste titre l'intimé, l'argumentation du recourant ne met pas en évidence en quoi l'interprétation des dispositions cantonales applicables par la Chambre constitutionnelle de la Cour de justice serait arbitraire. Il en va ainsi en particulier de son allégation selon laquelle "dire que l'arrêté du Conseil d'État n'est pas un acte normatif [...] revient à dire qu['il] n'a aucun pouvoir normatif ou décisionnel en la matière" et que par conséquent, la Cour de justice en aurait tiré une conclusion "arbitraire dans ses motifs [...] et dans son résultat". Ce faisant, le recourant se limite à présenter des généralités qui ne permettent pas de démontrer que le droit cantonal aurait été interprété de manière insoutenable par les juges cantonaux. Par ailleurs, l'interprétation de ces derniers échappe à toute critique puisque selon la jurisprudence, c'est bien l'acte législatif fixant le taux de l'impôt (soit en l'occurrence les centimes additionnels) qui impose, par des mesures générales et abstraites, des obligations aux particuliers et contient des règles de droit (cf. ATF 101 Ia 369 consid. 4d et 5). La Chambre constitutionnelle pouvait donc considérer, sans que cela n'apparaisse insoutenable, que l'arrêté du Conseil d'État litigieux ne contenait pas de telles règles, puisque le gouvernement cantonal se limitait à y approuver les taux arrêtés par les communes dans le contexte de la surveillance des communes qu'il exerce en application de la LAC.  
 
6.2. Par ailleurs, le recourant ne peut être suivi lorsqu'il se réfère à l'art. 29a Cst., en soutenant que la solution des juges cantonaux aurait pour effet d'empêcher tout recours judiciaire. On rappellera en effet que l'art. 29a Cst. n'exige pas la possibilité d'un contrôle abstrait des normes (cf. arrêt 2C_407/2021 du 23 décembre 2022 consid. 7.1 et les références, non publié in ATF 149 I 81). Le recourant ne conteste d'ailleurs pas le raisonnement convaincant de la cour cantonale, selon lequel il lui serait loisible de contester le système de perception des centimes additionnels qu'il critique, et ce par le truchement d'un recours contre sa décision de taxation.  
 
6.3. Dans ces conditions, la Chambre constitutionnelle pouvait déclarer le recours irrecevable en application des règles cantonales topiques. L'arrêt attaqué doit donc être confirmé sur cet aspect du litige.  
 
7.  
Il reste à déterminer si, comme le recourant l'allègue, le recours contre l'arrêté querellé aurait été directement recevable auprès du Tribunal fédéral de sorte que la cause aurait dû être transmise par la Chambre constitutionnelle directement à la Cour de céans. L'intimé soutient pour sa part que l'arrêté litigieux ne constitue pas un acte normatif au sens de l'art. 87 LTF
 
7.1.  
 
7.1.1. Le Tribunal fédéral connaît par la voie du recours en matière de droit public des recours (dits abstraits) contre les actes normatifs cantonaux (art. 82 let. b LTF), dont font partie les actes normatifs édictés par les communes (arrêt 2C_177/2022 du 17 novembre 2022 consid. 1.1) dès leur approbation par l'autorité cantonale (arrêt 2C_88/2009 du 19 mars 2010 consid. 1.1). Les actes normatifs se caractérisent par le fait qu'ils sont généraux et abstraits. Un acte est général lorsqu'il s'applique à un nombre indéterminé de personnes. Il est abstrait lorsqu'il se rapporte à un nombre indéterminé de situations ou, en d'autres termes, lorsque le nombre des cas d'application peut varier durant la période de sa validité (arrêt 2C_688/2022 du 14 mars 2023 consid. 1.1).  
 
7.1.2. Toutefois, selon la jurisprudence, l'homologation cantonale (par exemple par le Conseil d'État) d'un acte communal est considéré, du point de vue de l'art. 82 let. b LTF comme un acte organisationnel d'autorité indépendant qui n'est pas inclus dans le recours contre l'acte normatif au sens de cette disposition (ATF 138 I 171 consid. 3.3.1; arrêts 2C_981/2020 du 15 juin 2022 consid. 1.2 et les références; 2C_756/2015 du 3 avril 2017 consid. 1.3.1, non publié in ATF 143 I 272).  
 
7.2. En l'occurrence, le recourant ne s'en prend expressément qu'à l'arrêté du Conseil d'État, par lequel celui-ci a approuvé les délibérations des Conseils municipaux des communes genevoises fixant les taux de centimes additionnels. En tant qu'il s'agit d'un acte organisationnel par lequel des actes communaux sont homologués, il ne s'agit pas d'un acte normatif tombant sous la définition de l'art. 82 let. b LTF. Le raisonnement de la cour cantonale, qui a considéré qu'il n'existait pas de possibilité d'interjeter directement un recours contre l'arrêté litigieux devant le Tribunal fédéral, n'est donc pas contraire au droit fédéral.  
 
8.  
Le recours est entièrement mal fondé. 
 
9.  
Succombant, le recourant doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre constitutionnelle. 
 
 
Lucerne, le 14 mai 2025 
 
Au nom de la IIIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Moser-Szeless 
 
Le Greffier : Bürgisser