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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
6B_701/2014  
   
   
 
 
 
Arrêt du 14 novembre 2014  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Mathys, Président, 
Jacquemoud-Rossari et Denys. 
Greffier : M. Vallat. 
 
Participants à la procédure 
X.________, 
représentée par Me Jana Burysek, avocate, 
recourante, 
 
contre  
 
Ministère public du canton du Valais,  
intimé. 
 
Objet 
Ordonnance de non-entrée en matière (escroquerie, 
faux dans les titres), 
 
recours contre l'ordonnance du Tribunal cantonal du canton du Valais, Chambre pénale, du 10 juin 2014. 
 
 
Faits :  
 
A.   
Le 11 mai 2013, X.________ a déposé plainte pénale contre A.________ pour escroquerie et faux dans les titres. Ensuite de la vente par celle-ci à celle-là, pour 75'000 fr., de la boutique de vêtements B.________, à C.________, X.________ reprochait à l'aliénatrice de lui avoir présenté une comptabilité mensongère avant la signature du contrat de vente, la trompant sur les frais de transport effectivement supportés par sa boutique et lui cachant qu'elle réalisait une part importante de son chiffre d'affaires en « WIR ». A.________ l'aurait aussi mal conseillée sur la taille des vêtements à vendre lors de la reprise du commerce. Par ordonnance du 12 novembre 2013, le Ministère public du Bas-Valais a refusé d'entrer en matière. 
 
B.   
Par ordonnance du 10 juin 2014, la Chambre pénale du Tribunal cantonal valaisan a rejeté le recours formé par X.________ contre cette ordonnance. 
 
C.   
X.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre cette ordonnance, concluant, avec suite de frais et dépens, à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision au sens des considérants. Elle requiert, par ailleurs, le bénéfice de l'assistance judiciaire. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
La recourante se prétend victime d'une escroquerie, commise notamment au moyen de titres qu'elle considère comme faux. Elle invoque l'existence d'un dommage. Elle allègue, dans ce contexte, le montant investi de 75'000 fr., une perte de gain, un dommage ménager ainsi qu'un tort moral qu'elle met en relation avec la faillite de sa boutique et le fait qu'elle en est tombée gravement malade. On peut sérieusement douter que la recourante endosse la qualité de lésée en relation avec ces derniers préjudices allégués, qui n'apparaissent pas en relation directe avec les infractions dénoncées qui, de leur côté, ne protègent pas l'intégrité physique (art. 115 al. 1 CPP). Il n'en demeure pas moins qu'invoquant avoir été spoliée du prix de vente, elle peut être considérée comme lésée même si l'infraction de faux dans les titres protège, en première ligne, la bonne foi dans les rapports commerciaux (cf. ATF 119 Ia 342 consid. 2b p. 346 s. et les références citées). Il n'est, par ailleurs, pas contestable que le refus d'entrer en matière serait de nature à influencer négativement le jugement de ses conclusions civiles. La recourante remplit ainsi les exigences jurisprudentielles (ATF 138 IV 86 consid. 3 p. 87; 137 IV 219 consid. 2.4 p. 222 s.) permettant de lui reconnaître la qualité pour recourir contre le classement de la procédure en application de l'art. 81 al. 1 let. a et b ch. 5 LTF. 
 
2.   
La recourante invoque la violation de l'art. 310 CPP en relation avec l'adage  in dubio pro duriore.  
 
2.1. Conformément à l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis. L'entrée en matière peut encore être refusée au terme des investigations policières (art. 306 et 307 CPP) - même diligentées à l'initiative du procureur -, si les conditions de l'art. 310 al. 1 let. a CPP sont réunies (arrêt 1B_183/2012 du 20 novembre 2012, consid. 3). Selon la jurisprudence, cette disposition doit être appliquée conformément à l'adage  in dubio pro duriore (arrêt 6B_127/2013 du 3 septembre 2013, consid. 4.1). Celui-ci découle du principe de la légalité (art. 5 al. 1 Cst. et 2 al. 2 CPP en relation avec les art. 319 al. 1 et 324 CPP; ATF 138 IV 86 consid. 4.2 p. 91) et signifie qu'en principe un classement ou une non-entrée en matière ne peuvent être prononcés par le ministère public que lorsqu'il apparaît clairement que les faits ne sont pas punissables ou que les conditions à la poursuite pénale ne sont pas remplies. Le ministère public et l'autorité de recours disposent, dans ce cadre, d'un pouvoir d'appréciation que le Tribunal fédéral revoit avec retenue. La procédure doit se poursuivre lorsqu'une condamnation apparaît plus vraisemblable qu'un acquittement ou lorsque les probabilités d'acquittement et de condamnation apparaissent équivalentes, en particulier en présence d'une infraction grave (ATF 138 IV 86 consid. 4.1.2 p. 91; 186 consid. 4.1 p. 190; 137 IV 285 consid. 2.5 p. 288 s.).  
 
2.2. En résumé, la cour cantonale a retenu que la simple communication de pièces comptables vieilles de plus de deux ans à l'acquéreur potentiel d'une entreprise ne constituait à l'évidence ni un édifice de mensonges, ni une manoeuvre frauduleuse, ni une mise en scène. Rien n'indiquait ensuite que la vérification de la comptabilité 2007 et 2008 de la boutique n'était pas possible, ne l'était que difficilement, respectivement ne pouvait raisonnablement être exigée de la recourante, laquelle ne prétendait au demeurant pas avoir été dissuadée de vérifier. Faute de rapport de confiance particulier, A.________ ne pouvait avoir prévu que la recourante renoncerait à vérifier. La cour cantonale a encore relevé que la recourante reconnaissait avoir plusieurs années d'expérience en matière de vente, dont celle de vêtements, et disposer de quelques connaissances en comptabilité. Elle apparaissait largement co-responsable de son dommage du moment que l'on pouvait attendre d'elle qu'elle se renseigne sur le dernier bilan et la comptabilité récente et pose des questions poussées au comptable de l'aliénatrice. Enfin, vu les dénégations de cette dernière, il n'apparaissait pas possible de lui imputer une intention délictueuse et un dessein d'enrichissement illégitime.  
 
2.3. La recourante objecte que les comptes étant tronqués, leur consultation ne lui avait pas permis (comptes 2004/2005 et 2005/2006), respectivement ne lui aurait pas permis (comptes 2006/2007 et 2007/2008 non encore bouclés) de percevoir qu'ils étaient faux. Ses connaissances en comptabilité ne lui auraient pas permis non plus de réaliser que les frais de transport étaient artificiellement réduits par le transfert de la TVA à l'importation payée par le transporteur dans le prix d'achat des vêtements. On ignorerait si cette manière de faire est conforme aux règles de l'art comptable et même si la TVA à l'importation a réellement été reportée sur le prix des marchandises. La TVA ne pourrait, de toute manière, pas représenter 85% des factures de transport. La recourante en conclut que l'on ne saurait lui reprocher d'avoir fait preuve d'un minimum d'attention au titre de la co-responsabilité du dommage. Elle relève, de même, l'absence de comptabilisation séparée des transactions effectuées en « WIR », dont le volume serait important, ce dont elle n'aurait été informée qu'après la reprise de la boutique. Elle souligne que l'argent « WIR » ne permet de payer ni les charges ni les fournisseurs. L'intégration des paiements effectués en « WIR » par les clients de la boutique au chiffre d'affaires aurait donné aux comptes annuels une image meilleure que la réalité et aurait donc permis à A.________ d'obtenir un prix plus élevé lors de la vente de la boutique.  
 
2.4. En ce qui concerne l'importance des frais de transport, il ressort, tout d'abord, des factures figurant au dossier que, dans plusieurs cas, ces frais étaient inclus dans la facture ou même dans le prix des marchandises (p. ex.: dossier cantonal, pièces nos 52, 53, 55: frais de transport forfaitaires de 3% du prix de la marchandise; dossier cantonal, pièces nos 50 et 51: factures stipulées « frei Haus » [Frei Hs.] soit « franco domicile »). On comprend ainsi pourquoi, dans de très nombreux cas, la facture adressée par le transporteur au destinataire de la marchandise ne comporte aucune somme au titre des frais de déplacement de la marchandise (acquittés par le vendeur), mais porte exclusivement sur le dédouanement et comprend donc essentiellement les sommes payées à la douane par le transporteur (TVA à l'importation), les frais et la commission de ce dernier en relation avec cette opération ainsi que la TVA sur ce service précis (dossier cantonal pièces 65 à 123; 126 à 128). Dans de telles hypothèses, la TVA acquittée à l'importation représente ainsi l'essentiel de la facture adressée par le transporteur à l'acquéreur des biens importés. Il n'y a donc rien de surprenant que la TVA à l'importation ait pu constituer 85% de ces factures. Cela étant précisé, la recourante, qui se borne à opposer que les frais de transport qu'elle a dû assumer auraient été plus élevés que ceux apparaissant dans les comptes de A.________, ne démontre pas qu'elle aurait travaillé avec les fournisseurs et transporteurs de la même manière et selon les mêmes conditions. La simple comparaison qu'elle propose avec sa propre structure de frais de transport n'est pas pertinente et ne suffit, en tous les cas, pas à démontrer que ceux communiqués par l'aliénatrice auraient été artificiellement réduits dans la comptabilité soumise avant la vente.  
 
Il ressort, par ailleurs, des pièces comptables figurant au dossier que tant A.________ que la recourante s'acquittaient de la TVA à concurrence d'un montant correspondant à 2,3% du chiffre d'affaires de la boutique (dossier cantonal, pièces 20, 37 et 40). Ce taux, qui ne correspond pas au taux de la TVA facturée au client (7,6% entre 2001 et 2010), indique très clairement que l'une et l'autre ont opté pour le système de taxation « au taux de la dette fiscale nette », autrement dit pour un mode de calcul simplifié de la dette fiscale par application d'un taux forfaitaire établi par l'administration fiscale pour chaque branche économique. La dette fiscale correspond alors au produit du chiffre d'affaires par le taux déterminant (v. Brochure spéciale n° 03a de l'Administration fédérale des contributions « Taux de la dette fiscale nette », ch. 1.1 et ch. 15.1.3 entrée « confection, magasin de - [dames et hommes]). Ce système ne nécessite pas d'établir le montant de l'impôt préalable déductible de l'impôt dû par le contribuable (Brochure spéciale n° 03a, ch. 1.1) parce que le taux « de la dette fiscale nette » fixé par l'administration fiscale tient compte de façon forfaitaire de l'ensemble de l'impôt préalable contenu, notamment, dans les acquisitions de marchandises ( PASCAL MOLLARD, XAVIER OBERSON, ANNE TISSOT BENEDETTO, Traité TVA, 2009, p. 645). Il n'apparaît, dès lors, pas nécessaire, pour un contribuable soumis à ce système, de faire ressortir séparément dans sa comptabilité la TVA acquittée, notamment, sur les marchandises importées en Suisse en vue de leur vente. Cela étant précisé, selon les indications fournies par la fiduciaire de A.________ (dont il n'y a pas lieu de douter vu ce qui a été exposé au paragraphe précédent), le montant de la TVA acquittée à l'importation était répercuté sur le prix d'achat des marchandises importées. Il s'ensuit que les bénéfices d'exploitation, respectivement les indicateurs des marges bénéficiaires, n'étaient pas affectés par cette manière de comptabiliser. Les développements de la recourante relatifs aux frais de transport ne démontrent dès lors pas en quoi elle aurait pu être trompée quant à la viabilité du commerce qu'elle a acquis. 
 
2.5. En ce qui concerne la comptabilisation des ventes conclues en tout ou partie en « WIR » (sur ce système de paiement v.: ATF 95 II 176 consid. 3 p. 178 ss; arrêt 2A.577/1997 du 7 octobre 1999 consid. 2d), il suffit de relever que tous les bilans et comptes d'exploitation de la boutique B.________ figurant au dossier, soit dès 2004 (plusieurs années avant la vente), ont été établis de la même manière, sans distinction quant à la monnaie d'échange (« WIR » ou francs suisses). Par ailleurs, la cour cantonale a retenu qu'il n'apparaissait pas que le comptable de A.________ aurait reçu des instructions de cette dernière sur la façon de tenir cette comptabilité (décision entreprise, p. 7). Ces éléments permettaient aux autorités cantonales, sans abuser de leur pouvoir d'appréciation, d'exclure que la remise de ces comptes par A.________ à la recourante ait pu procéder de la volonté de tromper cette dernière sur l'importance réelle du chiffre d'affaires réalisé dans la boutique en vue d'en retirer un meilleur prix de vente.  
 
2.6. Il résulte de ce qui précède que les autorités cantonales pouvaient, sur la base des investigations déjà réalisées, et sans procéder à une expertise comptable, considérer sans abus de leur pouvoir d'appréciation, qu'une tromperie, respectivement l'intention de A.________ de tromper au sens des art. 146 et 251 CP, était exclue. Le litige apparaissant ainsi de nature purement civile, le refus d'entrer en matière n'est pas critiquable (ATF 137 IV 285 consid. 2.3 p. 287).  
 
3.   
La recourante succombe. Ses conclusions étaient dénuées de chances de succès, de sorte que l'assistance judiciaire doit être refusée (art. 164 al. 1 LTF). Elle supporte les frais de la procédure, qui seront fixés en tenant compte de sa situation financière (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens (art. 68 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
L'assistance judiciaire est refusée. 
 
3.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton du Valais, Chambre pénale. 
 
 
Lausanne, le 14 novembre 2014 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Mathys 
 
Le Greffier : Vallat