Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
7B_774/2023
Arrêt du 15 octobre 2025
IIe Cour de droit pénal
Composition
M. et Mmes les Juges fédéraux Abrecht, Président,
van de Graaf et Koch.
Greffier: M. Hösli.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Yvan Jeanneret, avocat,
recourant,
contre
Ministère public de la République et canton de Genève,
route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy,
intimé.
Objet
Ordonnance de non-entrée en matière,
recours contre l'arrêt de la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 13 septembre 2023
(ACPR/706/2023 - P/7261/2023).
Faits :
A.
A.a. A.________ (ci-après: le plaignant) est médecin spécialiste en oto-rhino-laryngologie. Dans les années 1990, il a développé une technique chirurgicale, désormais désignée sous le terme de "sialendoscopie", qui permet le diagnostic et le traitement de pathologies des glandes salivaires.
Le 8 janvier 2002, le plaignant a conclu un contrat de licence avec B.________ (désormais B.________; ci-après: la société B.________), société sise à U.________ dans le land de Bade-Wurtemberg et active notamment dans la fabrication, le commerce et la distribution d'appareils et d'instruments médicaux. Ce contrat de licence a été suivi de deux autres conventions de même nature conclues le 12 novembre 2007 et le 19 décembre 2016. Aux termes de ces contrats, le plaignant cédait à la société B.________ son droit de commercialiser des instruments médicaux dans le domaine de la sialendoscopie, et notamment des micro-endoscopes, en échange du versement d'une redevance sur leur prix de vente net (
net sales prices) et de la remise annuelle d'un décompte détaillé des ventes d'articles par pays et des montants totaux des redevances dues. Ces décomptes ont été effectivement remis au plaignant entre 2002 et 2019. Ce dernier disposait par ailleurs d'un droit de faire examiner les comptes de la société B.________ par un auditeur indépendant.
A.b. En juin 2018, le plaignant a demandé à la société B.________ de lui fournir un décompte précis des ventes par pays pour chaque référence produit depuis janvier 2014 à des fins de réalisation d'une étude scientifique. Après plusieurs relances, la société B.________ a transmis le 10 décembre 2018 au plaignant un document correspondant. Le 26 juillet 2019, celui-ci a fait usage de son droit contractuel d'audit et a mandaté C.________ SA à cette fin. Après avoir notamment eu accès aux pièces comptables de la société B.________, C.________ SA a retenu que 6'214 endoscopes et 8'111 autres instruments n'avaient pas été pris en compte dans les décomptes de redevance pour la période allant de 2009 à 2019, alors qu'ils avaient quitté le stock de la société B.________. Selon la prise de position ultérieure de cette dernière, ces endoscopes et autres instruments ne correspondaient toutefois pas à des ventes, comptabilisées dans le canal de distribution "neufs", mais à des réparations, comptabilisées dans le canal de distribution "services", ou à des prêts, comptabilisés dans le canal de distribution "prêts".
Entre le 29 janvier 2021 et le 21 mai 2021, le plaignant a introduit contre la société B.________ une requête de conciliation devant le Tribunal de première instance de la République et canton de Genève, une procédure d'arbitrage en Suisse, ainsi que deux actions en responsabilité civile en Allemagne, lesquelles ont été ultérieurement retirées. Dans le cadre de la procédure arbitrale, un auditeur indépendant, D.________ SA, a été désigné. Selon son rapport du 22 novembre 2022, les écritures comptables de la société B.________ pour la période allant de 2015 à 2019 permettaient de calculer efficacement le montant des redevances dues au plaignant. Savoir si les éléments comptabilisés dans le canal de distribution "services" devaient être contractuellement considérés comme des ventes était en revanche une question juridique que D.________ SA n'était pas en mesure de trancher. Quant aux éléments comptabilisés dans le canal de distribution "prêts", une facture était émise uniquement s'ils n'étaient pas retournés à la société B.________, aucune recette n'étant comptabilisée dans l'intervalle. Sur mandat du plaignant, le Dr E.________ - professeur en contrôle de gestion à la Faculté des hautes études commerciales de l'Université de Lausanne (cf. art. 105 al. 2 LTF) - a rendu le 29 mars 2023 un rapport selon lequel l'examen de D.________ SA relatif aux opérations de prêt était lacunaire. Il s'interrogeait par ailleurs sur le nombre élevé d'instruments inscrits dans les canaux de distribution "prêts" et "services", ce qui, selon lui, pouvait refléter des ventes déguisées.
B.
Par acte du 31 mars 2023, A.________ a déposé plainte pénale auprès du Ministère public de la République et canton de Genève (ci-après: le Ministère public) contre tout organe ou employé - actuel ou ancien - de la société B.________ en lien avec les faits susmentionnés, avec constitution de partie plaignante demanderesse au pénal et au civil. De son opinion, ces faits devaient être qualifiés d'escroquerie par métier au sens de l'art. 146 al. 2 CP. Par ordonnance du 22 mai 2023, le Ministère public n'est pas entré en matière sur cette plainte.
Par arrêt du 13 septembre 2023, la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève (ci-après: la Chambre pénale de recours) a rejeté le recours formé par le plaignant contre cette ordonnance.
C.
Par acte du 16 octobre 2023, A.________ interjette un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre cet arrêt, en concluant à sa réforme en ce sens qu'une procédure pénale soit ouverte et la cause renvoyée au Ministère public afin qu'il procède à son instruction.
Invités à se déterminer, le Ministère public a déposé le 14 juillet 2025 des observations en concluant à la confirmation de l'arrêt entrepris, alors que la Chambre pénale de recours y a renoncé. Par acte du 23 juillet 2023, le recourant a spontanément répliqué.
Considérant en droit :
1.
1.1. Dirigé contre un arrêt confirmant une ordonnance de non-entrée en matière, le recours concerne une décision rendue en matière pénale (cf. art. 78 LTF), qui émane d'une autorité cantonale de dernière instance (cf. art. 80 LTF) et qui revêt un caractère final (cf. art. 90 LTF). Il est donc recevable quant à son objet.
1.2.
1.2.1. Selon l'art. 81 al. 1 LTF, a qualité pour former un recours en matière pénale quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire (let. a) et (cumulativement) a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée (let. b). La partie plaignante n'a toutefois qualité pour former un recours en matière pénale que si la décision attaquée peut avoir des effets sur le jugement de ses prétentions civiles (art. 81 al. 1 let. b ch. 5 LTF). Constituent de telles prétentions celles qui, résultant directement de l'infraction alléguée, sont fondées sur le droit civil et doivent en conséquence être déduites ordinairement devant les tribunaux civils, soit principalement les prétentions en réparation du dommage et du tort moral au sens des art. 41 ss CO (ATF 148 IV 256 consid. 3.1; 146 IV 76 consid. 3.1; voir également ATF 148 III 401 consid. 3.2.1).
Lorsque le comportement d'un auteur lèse exclusivement le patrimoine d'autrui, ce dommage n'est susceptible de faire l'objet d'une prétention civile en dommages-intérêts que si le comportement en cause constitue une violation d'une norme protectrice visant à protéger le lésé dans les droits atteints par l'acte incriminé (ATF 146 IV 211 consid. 3.2; 141 III 527 consid. 3.2; 133 III 323 consid. 5.1; 129 IV 322 consid. 2.2.2). Dans un
obiter dictum récent, le Tribunal fédéral a considéré que l'escroquerie, au sens de l'art. 146 CP, constituait une telle norme protectrice du patrimoine (arrêt 7B_111/2024 du 25 juillet 2024 consid. 3.5). Ce précédent doit être confirmé. En effet, l'escroquerie vise précisément à protéger le patrimoine, de sorte qu'il serait manifestement contraire à l'esprit de l'art. 146 CP de lui dénier la qualité de norme protectrice de ce même patrimoine (dans le même sens: arrêt de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision, du 16 avril 2025 [n° AARP/216/2025] consid. 7.1.2.2; REICHLE/STEHLE, Präjudizienbuch OR, 11
e éd. 2025, n° 3 ad art. 41 CO p. 163; ROLAND BREHM, in Berner Kommentar, Obligationenrecht, Allgemeine Bestimmungen, 5
e éd. 2021, n° 39 ad art. 41 CO; MATTHIAS KUERT, Öffentlich-rechtliche Verhaltensnormen im schweizerischen Haftungsrecht, 2018, n° 415).
1.2.2. Lorsque le recours est dirigé contre une décision de non-entrée en matière ou de classement d'une procédure pénale, la partie plaignante doit expliquer dans son acte de recours au Tribunal fédéral pour quelles raisons et dans quelle mesure la décision attaquée peut avoir des conséquences sur le jugement de ses prétentions civiles concrètes (arrêts 7B_571/2023 du 27 mai 2025 consid. 1.2.2; 7B_1174/2024 du 19 février 2025 consid. 1.1.2; 7B_1040/2024 du 29 novembre 2024 consid. 1.1.2). Elle doit exposer de manière précise les éléments fondant ses prétentions civiles, notamment en alléguant et en chiffrant, dans la mesure du possible, le dommage subi (arrêts 7B_571/2023 précité consid. 1.2.2; 7B_1/2025 du 3 mars 2025 consid. 2.1; 7B_1174/2024 précité consid. 1.1.2).
En matière d'infractions contre le patrimoine, la partie plaignante ne peut pas se contenter de se prévaloir d'avoir été touchée par l'infraction invoquée; elle doit fournir des explications préci ses sur le dommage épr ouvé, sinon le recours est irrecevable (arrêts 7B_654/2023 du 17 avril 2025 consid. 1.2.1; 7B_1174/2024 précité consid. 1.1.2; 7B_77/2022 du 12 décembre 2023 consid. 2.2.1).
1.2.3. Une action civile par adhésion à la procédure pénale présuppose, afin d'éviter des jugements contradictoires, que les prétentions civiles ne fassent pas l'objet d'une autre litispendance ou d'une décision entrée en force (ATF 145 IV 351 consid 4.3). En pareille situation, il appartient à la partie recourante de démontrer que la procédure civile, pendante ou ayant abouti à une décision entrée en force, ne fait pas obstacle à l'exercice de l'action civile par adhésion à la procédure pénale (arrêts 7B_1230/2024 du 19 mai 2025 consid. 1.1.3; 7B_247/2023 du 8 mai 2025 consid. 3.1.2; 7B_1174/2024 précité consid. 1.1.3).
1.3. En l'espèce, il ressort clairement du mémoire de recours que le recourant allègue avoir été victime d'une escroquerie lui ayant causé un dommage sous la forme d'une absence de hausse de son patrimoine pour un montant d'au moins un million d'euros. Des organes ou employés de la société B.________ auraient, de son opinion, dissimulé des ventes assujetties à son droit contractuel de redevance en les qualifiant de prêts ou de services, afin d'escamoter une partie du montant qui lui était dû à ce titre. Au stade d'une ordonnance de non-entrée en matière, il faut admettre que de telles allégations satisfont aux exigences de motivation liées à l'art. 81 al. 1 let. b ch. 5 LTF.
Il ressort des faits établis par la Chambre pénale de recours que le recourant a intenté des actions civiles en lien avec le même complexe de fait que celui objet de la présente procédure. Au contraire de son action civile exercée par adhésion à la procédure pénale, ces actions sont dirigées contre B.________, et non contre des personnes physiques, de sorte que, comme l'avance le recourant, les objets des litiges en cause ne sont pas identiques (sur ce point, cf. ATF 142 III 210 consid. 2.1; 140 III 278 consid. 3.3). Ces actions ne font ainsi pas obstacle à sa qualité de partie plaignante à l'action civile.
Il s'ensuit que la qualité pour recourir doit être reconnue au recourant. Pour le surplus, le recours a été formé en temps utile (cf. art. 100 al. 1 LTF) et dans le respect des formes prescrites par la loi (cf. art. 42 LTF), de sorte qu'il est recevable.
2.
2.1. Par deux griefs intitulés "prescription de l'action pénale" et "exclusion de l'élément constitutif objectif de la tromperie astucieuse", qu'il convient d'examiner conjointement, le recourant reproche à la Chambre pénale de recours d'avoir confirmé l'ordonnance de non-entrée en matière du Ministère public, alors même que les faits de la cause ne permettraient pas de conclure que les éléments constitutifs d'une infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale n'étaient manifestement pas réunis. Ce vice serait d'autant plus notable que la Chambre pénale de recours aurait arbitrairement apprécié certains faits et rejeté certaines offres de preuve.
2.2.
2.2.1. Conformément à l' art. 310 al. 1 let. a et b CPP , le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis, ou qu'il existe des empêchements de procéder.
Cette disposition doit être appliquée dans le respect de l'adage
in dubio pro duriore qui découle du principe de la légalité (ATF 138 IV 86 consid. 4.2; arrêt 7B_1425/2024 du 21 juillet 2025 consid. 3.2.1). Selon ce principe, un classement ou une non-entrée en matière ne peuvent être prononcés par le ministère public que lorsqu'il apparaît clairement que les faits ne sont pas punissables ou que les conditions de la poursuite pénale ne sont pas remplies; la procédure doit se poursuivre lorsqu'une condamnation apparaît plus vraisemblable qu'un acquittement ou lorsque les probabilités d'acquittement et de condamnation apparaissent équivalentes, en particulier en présence d'une infraction grave; en effet, en cas de doute s'agissant de la situation factuelle ou juridique, ce n'est pas à l'autorité d'instruction ou d'accusation mais au juge matériellement compétent qu'il appartient de trancher (ATF 143 IV 241 consid. 2.2.1; 138 IV 186 consid.4.1; 138 IV 86 consid. 4.1.1 et 4.1.2; 137 IV 285 consid. 2.3). Le ministère public et l'autorité de recours disposent dans ce cadre d'un pouvoir d'appréciation et le Tribunal fédéral n'intervient qu'avec retenue (ATF 146 IV 68 consid. 2.2; 143 IV 241 consid. 2.3.3; 138 IV 186 consid. 4.1).
Saisi d'un recours contre une décision de non-entrée en matière ou de classement, le Tribunal fédéral examine sous l'angle de l'arbitraire l'appréciation des preuves et l'établissement des faits opérés par l'autorité précédente, y compris quant à la question de savoir si un fait est clairement établi ou non (ATF 143 IV 241 consid. 2.3.2 et 2.3.3; arrêts 7B_105/2023 du 5 février 2025 consid. 2.2.2; 7B_630/2023 du 20 août 2024 consid. 3.2.2). En revanche, déterminer si l'autorité intimée a correctement appliqué le principe
in dubio pro duriore relève du droit (ATF 143 IV 241 consid. 2.3.3; arrêts 7B_891/2024 du 22 octobre 2024 consid. 2.1.3; 7B_163/2022 du 30 août 2023 consid. 2.2.2).
2.2.2. La survenance de la prescription constitue un empêchement de procéder durable au sens de l'art. 319 al. 1 let. d CPP (ATF 151 IV 57 consid. 3.1; 146 IV 68 consid. 2.1). Lorsque la situation juridique est incertaine, il ne ressort pas à l'autorité d'instruction ou d'accusation, mais aux tribunaux compétents pour juger de la cause au fond, de décider si la prescription est atteinte; un classement fondé sur la prescription ne peut ainsi être ordonné que lorsque celle-ci est manifestement atteinte (ATF 146 IV 68 consid. 2.1; voir également ATF 143 IV 241 consid. 2.2.1).
2.3. Dans son arrêt, la Chambre pénale de recours a retenu que les accusations relatives aux complexes de faits des années 2002 à 2007 étaient prescrites.
S'agissant des années 2008 à 2020, la question de savoir si les revenus liés au canal de distribution "service" constituaient ou non des ventes soumises à redevance relevait exclusivement du droit privé. Quant au canal de distribution "prêts", la société D.________ SA n'avait pas constaté d'irrégularités dans le système comptable de la société B.________ et il n'avait pas été rendu vraisemblable que les transactions y relatives étaient en réalité des ventes déguisées. Que des collègues du recourant à l'étranger n'eussent pas eu connaissance de programmes de prêts d'instruments médicaux dans leurs pays respectifs ne permettait pas d'exclure l'existence de tels prêts. Par ailleurs, même si les montants indiqués dans les décomptes de redevance avaient été erronés, un tel procédé n'aurait pas constitué une tromperie astucieuse dès lors que le recourant disposait d'un accès aux pièces comptables lui permettant de contrôler le calcul réalisé par la société B.________.
2.4.
2.4.1. Au vu des faits retenus par la Chambre pénale de recours, le comportement dénoncé par le plaignant est susceptible d'être subsumé comme une gestion déloyale au sens de l'art. 158 CP. Cependant, les faits allégués dans la plainte pénale pourraient aussi être constitutifs d'une autre infraction contre le patrimoine, telle que l'escroquerie, invoquée par le recourant. Cette question ne doit en tout état de cause pas être irrévocablement tranchée au stade de l'entrée en matière.
Selon la jurisprudence fédérale, le mandataire qui viole son devoir de rendre compte à son mandant est susceptible de se rendre coupable de gestion déloyale (ATF 144 IV 294 consid. 2.3.3). Il en va de même lorsqu'il conserve pour lui des rémunérations devant être contractuellement remises à son mandant (ATF 144 IV 294 consid. 3.5).
En l'espèce, il ressort des faits retenus par la Chambre pénale de recours que le plaignant et la société B.________ ont conclu un contrat de licence aux termes duquel la seconde devait verser au premier une redevance sur le prix net des ventes d'instruments médicaux relevant de la sialendoscopie. Il est également établi que le plaignant a fait usage de son droit d'auditionner les comptes de la société B.________ en 2019 et que l'entreprise mandatée à cette fin a retenu que 6'214 endoscopes et 8'111 autres instruments n'avaient pas été pris en compte dans les décomptes de redevance pour la période de 2009 à 2019 alors qu'ils avaient quitté le stock de la société B.________. Quant à l'auditeur indépendant désigné dans le cadre de la procédure arbitrale opposant le plaignant à la société B.________, il s'est limité à vérifier si la comptabilité de cette dernière permettait théoriquement d'identifier les ventes soumises à redevance, sans approfondir la question de savoir si de telles ventes avaient été qualifiées, intentionnellement ou non, de "services" ou de "prêts".
À la lumière de ces éléments, la conclusion des juges cantonaux selon laquelle les éléments constitutifs d'une infraction n'étaient manifestement pas réunis ne convainc pas. Elle peut d'autant moins être suivie que, comme le souligne le recourant, le dossier comporte de nombreuses déclarations écrites de médecins pratiquant la sialendoscopie qui ont affirmé ne pas avoir eu connaissance d'un programme de location d'endoscopes par la société B.________ (cf. pièces 1'0001'066 [Québec], 1'001'080 [Finlande], 1'001'081 [Lituanie], 1'001'084 [Autriche], 1'001'086 [Irlande], 1'001'088 [Égypte], 1'001'106 [Tunisie], 1'001'110 [Israël], 1'001'115 et 1'001'118 [France] et 1'001'121 [Espagne]). Seul un médecin saoudien a évoqué le prêt d'un endoscope pendant un mois avant achat (cf. pièce 1'001'103). Sur ce point, la motivation de la Chambre pénale de recours selon laquelle ces éléments de preuve ne permettraient pas d'exclure l'existence de prêts effectifs n'est pas non plus conforme au principe
in dubio pro duriore. Celui-ci lui imposait d'examiner si l'hypothèse de la réalisation d'une infraction était suffisamment vraisemblable pour qu'une instruction pénale soit entreprise, et non si une culpabilité apparaissait comme la seule hypothèse vraisemblable.
2.4.2. En ce qui concerne la prescription de l'action pénale pour les années 2002 à 2007 incluse, la motivation de l'autorité précédente ne peut pas non plus être suivie. En effet, comme le relève le recourant, l'existence d'une unité naturelle d'action ne peut pas être clairement exclue. Le Tribunal fédéral a d'ailleurs retenu l'existence d'une telle unité d'action, respectivement d'une infraction de durée, s'agissant de la mise à la charge d'une société, pendant de nombreuses années, de frais d'entretien et d'assurance d'un avion et de locaux dont l'auteur disposait à sa guise à des fins privées (arrêt 6B_310/2014 consid. 4.4 et 4.6). Sur ce point, l'existence d'une volonté criminelle unique de l'auteur d'une potentielle infraction commise au préjudice du recourant est une question essentielle (ATF 149 IV 240 consid. 3.1; 132 IV 49 consid. 3.1.1.3). Dans le cas d'espèce, la résolution de celle-ci appelait à tout le moins une instruction.
2.4.3. Au vu de ce qui précède, l'appréciation de la Chambre pénale de recours selon laquelle les éléments constitutifs d'une infraction n'étaient manifestement pas réunis viole l'art. 310 al. 1 let. a CPP. Il en va de même de sa motivation selon laquelle une éventuelle infraction portant sur les années 2002 à 2007 incluse serait en tous les cas prescrite. Les griefs y relatifs se révèlent bien fondés.
3.
3.1. Conformément à l'art. 107 al. 2 LTF, lorsque le Tribunal fédéral admet un recours, il peut renvoyer l'affaire à l'autorité précédente ou à l'autorité qui a statué en première instance, pour qu'elle prenne une nouvelle décision.
3.2. Dans son arrêt, la Chambre pénale de recours s'est interrogée sur la compétence des autorités pénales suisses dans la mesure où la quasi-totalité des faits objets de la procédure s'étaient déroulés à l'étranger, et principalement en Allemagne. Elle a toutefois laissé cette question ouverte étant entendu que le recours pouvait être rejeté pour d'autres motifs. Dès lors que la motivation alternative ne peut pas être suivie (cf. consid. 2 supra), la question de la compétence des autorités pénales suisses retrouve sa pertinence. Or, au vu des faits ressortant de l'arrêt querellé, il apparaît que le seul lien de la cause avec la Suisse (outre la nationalité du plaignant) est constitué par une omission de verser des redevances sur un compte bancaire suisse. Ce rattachement apparaît donc particulièrement ténu. Certes, le Tribunal fédéral a, sous l'empire de l'ancienne partie générale du Code pénal, considéré qu'un tel lien suffisait pour fonder une compétence pénale des autorités suisses (cf. ATF 124 IV 241 consid. 4d). Savoir si tel est toujours le cas ne va cependant pas de soi. En effet, cette jurisprudence, qui octroie une portée extensive au principe de l'ubiquité en matière d'infractions de résultat contre le patrimoine, n'a été codifiée ni lors de l'adoption de la nouvelle partie générale du Code pénal en 2002 - laquelle prévoit pourtant plusieurs exceptions au principe général des art. 3 et 8 CP -, ni au cours des plus de vingt années qui ont suivi.
Dans la mesure où la compétence des autorités pénales suisses dans le cas d'espèce n'est pas manifeste mais nécessite un examen minutieux, il n'apparaît pas opportun que le Tribunal fédéral la tranche en instance unique et sans autre débat. La cause sera donc renvoyée à la Chambre pénale de recours afin qu'elle statue sur ce point.
4.
En conclusion, le recours doit être admis et l'arrêt de la Chambre pénale de recours annulé. La cause lui sera renvoyée afin qu'elle rende une nouvelle décision portant notamment sur la question de la compétence des autorités pénales suisses dans le cas d'espèce.
Le recourant, qui obtient gain de cause avec l'assistance d'un mandataire professionnel, a droit à une indemnité de dépens à la charge du canton de Genève (cf. art. 68 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu de percevoir de frais judiciaires (cf. art. 66 al. 4 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est admis. L'arrêt attaqué est annulé et la cause est renvoyée à la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève pour qu'elle procède au sens des considérants.
2.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
3.
Une indemnité de dépens, fixée à 2'000 fr., est allouée au recourant à la charge du canton de Genève.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève et à B.________.
Lausanne, le 15 octobre 2025
Au nom de la II
e Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Abrecht
Le Greffier : Hösli