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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
9C_643/2023  
 
 
Arrêt du 15 novembre 2024  
 
IIIe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Parrino, Président, 
Moser-Szeless et Beusch. 
Greffier : M. Berthoud. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par M e Marino Montini, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Service des contributions de la République et canton de Neuchâtel (SCCO), rue du Docteur-Coullery 5, 2300 La Chaux-de-Fonds, 
intimé. 
 
Objet 
Impôts cantonaux et communaux du canton de Neuchâtel et impôt fédéral direct, périodes fiscales 2018 à 2020, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel du 13 septembre 2023 (CDP.2022.377-FISC/der). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________ et B.________ ont vécu en concubinage. Ils ont eu un enfant, C.________, né en 2004. À teneur d'une convention signée par les deux parents le 29 décembre 2007, A.________ s'est engagé à payer une contribution d'entretien mensuelle de 1'662 fr. 50 à B.________ pour leur fils, ainsi qu'une pension familiale mensuelle de 3'900 fr. pour elle.  
Dans ses déclarations d'impôt pour les périodes fiscales 2018 à 2020, A.________ a revendiqué, sous le ch. 6.10 "pensions alimentaires versées au conjoint divorcé et/ou pour enfants mineurs", des déductions totales annuelles de 66'750 fr., soit 46'800 fr. pour B.________ et 19'950 fr. pour l'enfant C.________. 
Par décisions de taxation du 8 juillet 2022 concernant l'impôt fédéral direct (IFD) et l'impôt cantonal et communal (ICC) pour les périodes fiscales 2018 à 2020, le Service des contributions de la République et canton de Neuchâtel (ci-après: SCCO) a, notamment, refusé la déduction de la contribution annuelle de 46'800 fr. versée à B.________. 
 
A.b. A.________ a déposé des réclamations contre les décisions de taxation du 8 juillet 2022. Par décision sur réclamation du 25 novembre 2022, le SCCO a admis partiellement la réclamation en tant qu'elle concernait la déduction de frais professionnels. L'autorité fiscale a confirmé le refus de la déductibilité de pensions alimentaires en faveur de B.________ au motif que la déduction de contributions d'entretien ne valait que pour les pensions dues en application du droit de la famille et qu'elle ne s'appliquait pas aux ex-concubins.  
 
B.  
A.________ a déféré cette décision au Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel, Cour de droit public, en concluant à la déductibilité des contributions versées à son ex-compagne, à hauteur de 46'800 fr. par an. La juridiction cantonale l'a débouté par arrêt du 13 septembre 2023. 
 
C.  
A.________ interjette un recours en matière de droit public contre cet arrêt dont il demande l'annulation. À titre principal, il conclut à ce qu'une nouvelle décision au sens des considérants soit rendue. À titre subsidiaire, il conclut au renvoi de la cause à l'autorité intimée pour nouvelle décision au sens du présent recours. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. La décision attaquée a été rendue en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF), dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF) qui ne tombe pas sous le coup des exceptions de l'art. 83 LTF. La voie du recours en matière de droit public est donc ouverte (cf. aussi art. 73 al. 1 LHID [RS 642.14]).  
 
1.2. L'instance précédente a traité dans un seul arrêt de l'IFD et des ICC, ce qui est admissible. Partant, le dépôt d'un seul acte de recours est aussi autorisé, dans la mesure où le recourant s'en prend clairement aux deux catégories d'impôts (cf. ATF 142 II 293 consid. 1.2; 135 II 260 consid. 1.3.2).  
 
1.3. Même si le recourant se limite à prendre des conclusions cassatoires, sans indiquer formellement ce qu'il entend obtenir sur le fond de la cause, son recours en matière de droit public, qui se caractérise comme un recours en réforme (art. 107 al. 2 LTF), est recevable. Les conclusions doivent en effet être interprétées selon le principe de la confiance, à la lumière de la motivation du recours (ATF 137 III 617 consid. 6.2 et les références). En l'occurrence, les motifs du recours permettent de comprendre que le recourant requiert que l'arrêt entrepris soit modifié en ce sens que la déduction des contributions d'entretien versées à son ex-compagne soit admise. Partant, il y a lieu d'entrer en matière sur le recours, les autres conditions de recevabilité ne prêtant pas à discussion.  
 
2.  
 
2.1. D'après l'art. 106 al. 1 LTF, le Tribunal fédéral applique le droit d'office. Il examine en principe librement l'application du droit fédéral ainsi que la conformité du droit cantonal harmonisé et de sa mise en pratique par les instances cantonales aux dispositions de la LHID (arrêt 2C_826/2015 du 5 janvier 2017 consid. 2, non publié in ATF 143 I 73). Toutefois, lorsque la LHID laisse une certaine marge de manoeuvre aux cantons, le pouvoir d'examen du Tribunal fédéral se limite à l'arbitraire, dont la violation doit être motivée conformément aux exigences accrues de l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 134 II 207 consid. 2; arrêt 9C_670/2022 du 19 avril 2023 consid. 1.3).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF (ATF 142 I 155 consid. 4.4.3). Le recourant ne peut critiquer les constatations de fait ressortant de la décision attaquée que si celles-ci ont été effectuées en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 142 II 355 consid. 6). Le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur des critiques de type appellatoire portant sur l'état de fait ou sur l'appréciation des preuves (ATF 141 IV 369 consid. 6.3).  
 
3.  
Le litige a trait à la déduction des contributions d'entretien versées par le recourant à son ex-compagne, B.________, pour les périodes fiscales 2018 à 2020, sous l'angle de l'IFD et de l'ICC. Il porte en particulier sur le point de savoir si le Tribunal cantonal était en droit de nier la déductibilité, pour ces trois périodes fiscales, des contributions annuelles de 46'800 fr. 
 
4.  
 
4.1. En ce qui concerne tout d'abord l'IFD, l'art. 33 LIFD (RS 642.11) contient une liste de déductions générales que le contribuable peut soustraire de son revenu. Ainsi, conformément à l'art. 33 al. 1 let. c LIFD, s ont déductibles du revenu, notamment la pension alimentaire versée au conjoint divorcé, séparé judiciairement ou de fait. En corollaire, cette prestation est imposable chez le contribuable divorcé ou séparé judiciairement ou de fait qui l'obtient pour lui-même (art. 23 let. f LIFD; principe de correspondance [arrêt 2C_200/2011 du 14 novembre 2011 consid. 4.2.3, in RDAF 2012 II p. 56]).  
Aux termes de l'art. 9 al. 1bis LIFD, "les revenus des partenaires enregistrés qui vivent en ménage commun sont additionnés. Dans la présente loi, les partenaires enregistrés ont le même statut que des époux. Ce principe vaut également pour les contributions d'entretien durant le partenariat enregistré ainsi que pour les contributions d'entretien et la liquidation des biens découlant de la suspension de la vie commune ou de la dissolution du partenariat". Avec l'entrée en vigueur de la modification du Code civil du 18 décembre 2020 (Mariage pour tous), au 1er juillet 2022 (RO 2021 747), la loi fédérale du 18 juin 2004 sur le partenariat enregistré entre personnes du même sexe (LPart; RS 211.231) n'a d'effet que pour les partenariats enregistrés conclus avant cette date (art. 1 LPart). 
 
4.2.  
 
4.2.1. La juridiction cantonale a constaté que le recourant et B.________ n'ont jamais été mariés; ils avaient vécu en concubinage au Canada où ils avaient signé, le 29 juillet 2003, une "déclaration officielle d'union de fait" devant un commissaire aux serments, selon laquelle ils avaient déclaré solennellement avoir vécu ensemble maritalement, pendant une année consécutive à compter du 9 juillet 2002. S'agissant de la déductibilité des contributions versées à l'ex-conjoint, les juges cantonaux ont retenu que le législateur fédéral n'entendait assimiler aux couples mariés que les partenariats enregistrés entre personnes de même sexe, cela uniquement jusqu'à l'entrée en vigueur du "mariage pour tous" au 1er juillet 2022; comme les partenaires enregistrés avaient le même statut que les époux au niveau des contributions d'entretien, leurs revenus étaient additionnés. La juridiction cantonale en a déduit que la situation du recourant est clairement différente et ne justifie pas le régime exceptionnel de la déduction et d'imposition des aliments versés à son ex-compagne. De plus, la déclaration officielle d'union de fait au Canada semblait liée à des démarches en cas d'immigration dans ce pays, où les droits et responsabilités des conjoints de fait n'y sont pas les mêmes que ceux des personnes mariées ou unies civilement, ce qui confortait encore l'absence de régime exceptionnel.  
 
4.2.2. Pour le recourant, l'arrêt attaqué procède d'une violation des art. 9 et 33 LIFD et du principe de l'égalité de traitement, ainsi que d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. Le recourant soutient d'une part que selon le principe de la bonne foi, l'autorité fiscale est liée à sa pratique durable antérieure (dès lors qu'elle avait admis la déduction en cause "pendant plus d'une dizaine d'années"). D'autre part, il fait valoir que l'union de fait selon le droit canadien doit être assimilée, par analogie, au régime applicable aux partenariats enregistrés de droit suisse. À cet égard, il relève que les partenaires d'une union de fait canadienne sont soumis à des règles spécifiques qui prévoient des pensions alimentaires, ce qui institue son obligation d'entretien envers B.________. Il en déduit que les contributions d'entretien qu'il verse à son ex-compagne sont assimilables à une pension alimentaire déductible au sens de l'art. 33 al. 1 let. c LIFD.  
 
4.3.  
 
4.3.1. Les premiers juges n'ont pas procédé à des constatations de fait précises quant aux périodes fiscales au cours desquelles le SCCO aurait "apparemment" admis le principe de la déductibilité des contributions d'entretien versées par le recourant à son ex-compagne. Cela est toutefois sans incidence sur l'issue du litige, dès lors qu'une taxation en matière d'impôts périodiques n'entre en force que pour la période concernée; les circonstances de fait et de droit peuvent donc parfaitement être appréciées différemment lors d'une période de taxation ultérieure (ATF 140 I 114 consid. 2.4.3). De plus, il ne ressort pas de l'arrêt attaqué que l'administration fiscale aurait donné au recourant une promesse relative à la poursuite de la déductibilité des contributions d'entretien à son ex-compagne pour les périodes fiscales 2018 à 2020, dans une mesure qui pourrait justifier la protection de sa bonne foi au sens de l'art. 9 Cst. (sur cette question, voir notamment ATF 143 V 341 consid. 5.2.1 et 137 I 69 consid. 2.5.1). Le contribuable ne prétend du reste pas avoir requis voire obtenu une telle assurance.  
 
4.3.2. En ce qui concerne la violation invoquée du droit fédéral, l'argumentation du recourant ne trouve aucun appui dans la LIFD. Le texte clair de l'art. 33 al. 1 let. c LIFD ne souffre aucune interprétation en tant qu'il admet uniquement la déductibilité de "la pension alimentaire versée au conjoint divorcé, séparé judiciairement ou de fait, ainsi que les contributions d'entretien versées à l'un des parents pour les enfants sur lesquels il a l'autorité parentale (...) "; cette règle s'applique aussi aux partenaires enregistrés puisqu'ils ont le même statut que des époux en vertu de l'art. 9 al. 1bis LIFD. Il s'ensuit que les contributions d'entretien effectuées en faveur d'autres bénéficiaires ne sont pas déductibles dans le chef du débiteur.  
Par ailleurs, le grief tiré d'une violation du principe de l'égalité de traitement (art. 8 al. 2 Cst.; sur cette notion, ATF 148 I 160 consid. 8.1 et la référence) n'est pas davantage fondé. En faisant une différence entre les personnes qui sont divorcées, séparées judiciairement ou de fait, ou les partenaires enregistrés dont la vie commune a été suspendue ou le partenariat dissout, d'une part, et les autres personnes, d'autre part, le législateur n'a pas adopté une réglementation directement ou indirectement discriminatoire en matière de déduction d'impôt (cf. arrêt 2C_216/2020 du 24 avril 2020 consid. 2.7); cette réglementation est fondée sur les obligations d'entretien découlant du droit de la famille, singulièrement des liens du mariage et du partenariat enregistré et de leurs effets en cas de séparation ou de dissolution respectivement de l'union conjugale et du partenariat enregistré. De plus, l'union de fait selon le droit canadien dont se prévaut le recourant - sans prétendre qu'elle correspondrait à une forme de mariage reconnue en Suisse au sens de l'art. 45 LDIP (RS 291) - ne saurait être assimilée, par analogie, au régime applicable aux partenariats enregistrés de droit suisse, puisque ce régime concerne uniquement les personnes de même sexe. Au demeurant, la règle de l'art. 33 al. 1 let. c LIFD lie le Tribunal fédéral et toutes les autorités appliquant le droit (cf. art. 190 Cst.). 
 
4.3.3. Vu ce qui précède, les contributions d'entretien que le recourant verse à B.________ ne sont pas déductibles de son revenu. Sous l'angle de l'IFD, le recours est mal fondé.  
 
5.  
Reprenant l'art. 9 al. 2 let. c LHID, l'art. 36 al. 1 let. c de la loi neuchâteloise du 21 mars 2000 sur les contributions directes (RSN 631.0, LCdir) a, sur le plan cantonal, la même teneur que l'art. 33 al. 1 let. c LIFD, de sorte que les considérations émises à propos de l'IFD peuvent être appliquées aux ICC. 
 
6.  
Vu l'issue de la procédure, les frais judiciaires y afférents doivent être mis à la charge du recourant (art. 66 al. 1 LTF), qui n'a pas droit à des dépens (art. 68 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté en ce qui concerne l'impôt fédéral direct 2018, 2019 et 2020. 
 
2.  
Le recours est rejeté en ce qui concerne l'impôt cantonal et communal 2018, 2019 et 2020. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel, Cour de droit public, et à l'Administration fédérale des contributions. 
 
 
Lucerne, le 15 novembre 2024 
 
Au nom de la IIIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Parrino 
 
Le Greffier : Berthoud