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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
4P.223/2005 /ech 
 
Arrêt du 15 décembre 2005 
Ire Cour civile 
 
Composition 
MM. et Mme les Juges Corboz, président, Klett et Favre. 
Greffière: Mme Cornaz. 
 
Parties 
X.________ SA, 
recourante, représentée par Me Olivier Rodondi, 
 
contre 
 
les époux A.________, 
intimés, représentés par Me Mike Hornung, 
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, case postale 3108, 1211 Genève 3. 
 
Objet 
art. 9 et 29 al. 2 Cst., art. 6 CEDH (appréciation arbitraire des preuves en procédure civile, droit d'être entendu), 
 
recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre 
civile de la Cour de justice du canton de Genève 
du 24 juin 2005. 
 
Faits: 
A. 
Les époux A.________ exploitent un domaine agricole à Z.________, y élèvent leur propres chevaux, pour les vendre, et prennent en pension les chevaux de particuliers. 
 
Le 6 octobre 1998, X.________ a publié l'article d'une journaliste intitulé "Trois cavalières vont déposer plainte contre une pension équestre à Z.________". Les propriétaires de chevaux en question reprochaient aux tenanciers une nourriture insuffisante et inappropriée, un mauvais entretien des locaux et, dans un cas établi par une vidéo de surveillance, le retrait d'un aliment spécial apporté par une propriétaire elle-même. L'auteure de l'article a aussi relaté les explications de la tenancière et mentionné, dans un encadré, l'avis du répondant local du Service vétérinaire vaudois, qui voyait dans le litige un malentendu sur le type de service proposé de part et d'autre, l'établissement tenant "plus du train de ferme que de la pension de luxe". 
 
Suite à une plainte pénale, le Tribunal de police du district de Nyon a condamné pour diffamation la journaliste et une propriétaire de cheval, tout en acquittant deux autres. Sur recours de la journaliste, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois, puis du Tribunal fédéral, qui a renvoyé la cause à celle-là, ont finalement libéré la journaliste des fins de la poursuite. 
 
Sur le plan civil, X.________ SA a renoncé à invoquer la prescription jusqu'au 31 décembre 2003. Le 19 décembre 2003, les époux A.________ ont introduit devant la Cour de justice du canton de Genève, instance unique, une action en constatation d'une atteinte illicite à leurs droits de la personnalité, à leur réputation professionnelle et à leur crédit en affaires, par laquelle ils ont demandé la condamnation de X.________ SA à leur verser la somme de 299'341 fr. avec intérêt à 5% l'an dès le 1er juillet 2001, le paiement des frais d'avocat dans la procédure pénale et la publication du dispositif de la décision à intervenir. 
 
En comparution personnelle, les époux A.________ ont confirmé leur demande et précisé qu'ils avaient contacté X.________, qui avait maintenu la publication de l'article, alors que deux autres journaux y avaient renoncé. Cette publication leur avait causé un dommage considérable en raison de l'étroitesse du milieu de l'équitation, dans lequel les informations circulaient volontiers. Alors que tous les établissements avaient des listes d'attente, ils n'avaient plus de demande de pension. 
 
Le vétérinaire traitant a déclaré que les animaux étaient bien soignés et bien alimentés. Une cliente de la pension équestre a témoigné que sa recommandation, faite à une amie, de placer son cheval chez les époux A.________ n'avait pas été suivie en raison de cet article. De même, des personnes travaillant dans un manège en France voisine avaient déconseillé à une autre cliente de placer son animal à Z.________. Un masseur de chevaux, qui avait été chargé de proposer à la vente des animaux élevés par les époux A.________, s'était vu opposer des refus à plusieurs reprises à la suite de la parution critiquée et des propos rapportés. Un autre vétérinaire, en sa qualité de cavalier, a déposé qu'il n'aurait pas placé son cheval dans l'écurie des époux A.________ et qu'il aurait été très fâché que l'exploitant ne respecte pas l'accord passé, en ce qui concerne la nourriture. Une autre cliente a confirmé avoir demandé à plusieurs reprises à dame A.________ d'augmenter la nourriture de son cheval. La comptable chargée d'établir les comptes de l'entreprise a constaté une baisse des revenus liée à "l'activité chevaux" dès 1999, tant pour l'élevage que pour le gardiennage des animaux. La baisse des ventes entraînait une augmentation des charges, parce que les animaux restaient plus longtemps dans l'établissement. En 1998, "l'activité chevaux" était bénéficiaire et en 1999, les exploitants ont procédé à l'achat d'animaux pour 19'000 fr., soit un montant important pour eux, en référence à leur comptabilité. 
 
Les époux A.________ ont sollicité une expertise sur la quotité du dommage à laquelle X.________ ne s'est pas opposée, avant qu'ils n'aient finalement renoncé à la requérir. 
B. 
Par arrêt du 24 juin 2005, la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève a constaté que l'article litigieux constituait une atteinte illicite aux droits de la personnalité économique des époux A.________, condamné X.________ SA à leur verser le montant de 113'900 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 1er juillet 2001 et ordonné la publication du dispositif de son arrêt sur un quart de page et en caractères gras, sans adjonction ou commentaire. 
 
En substance, la cour cantonale a retenu que l'article, dans son ensemble, donnait une image dénigrante des époux A.________, sur des points essentiels, de sorte qu'il consacrait une atteinte illicite aux droits de la personnalité économique de ces derniers, en violation des art. 3 al. 1 let. a LCD, voire de l'art. 28 CC. Les précédents juges ont établi la perte totale de 1999 à 2002, celle de 2003 n'étant pas prouvée, à 227'692 fr. 44. Ils ont réduit de 50% le montant de l'indemnité, en raison de la faute concomitante des époux A.________, pour l'arrondir finalement à 113'900 fr. La demande en remboursement de frais d'avocat a été écartée. 
C. 
Parallèlement à un recours en réforme, X.________ SA (la recourante) interjette un recours de droit public au Tribunal fédéral. Invoquant les art. 9 et 29 al. 2 Cst., elle se plaint d'arbitraire dans l'appréciation des preuves et dans l'établissement des faits ainsi que d'une violation de son droit d'être entendu. Elle conclut à l'annulation de l'arrêt entrepris, avec suite de dépens. 
 
Les époux A.________ (les intimés) proposent le rejet du recours, avec suite de dépens. Pour sa part, la cour cantonale se réfère aux considérants de son arrêt. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Conformément à la règle de l'art. 57 al. 5 OJ, il convient en l'espèce de traiter le recours de droit public avant le recours en réforme. 
2. 
2.1 Exercé en temps utile compte tenu des féries (art. 34 al. 1 let. b et 89 al. 1 OJ), dans la forme prévue par la loi (art. 90 al. 1 OJ), pour violation de droits constitutionnels des citoyens (art. 84 al. 1 let. a OJ), contre une décision finale prise en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 OJ), par la recourante qui est personnellement touchée par la décision attaquée - qui la déboute en partie de ses conclusions libératoires -, de sorte que la qualité pour recourir doit lui être reconnue (art. 88 OJ), le recours de droit public soumis à l'examen du Tribunal fédéral est en principe recevable. 
2.2 Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'examine que les griefs d'ordre constitutionnel invoqués et suffisamment motivés dans l'acte de recours (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 130 I 26 consid. 2.1 p. 31, 258 consid. 1.3 p. 262). 
3. 
Dans un second moyen qu'il convient d'examiner en priorité vu son caractère formel (ATF 127 V 431 consid. 3d/aa p. 437 et l'arrêt cité), la recourante se plaint d'une violation de l'art. 29 al. 2 Cst. garantissant le droit d'être entendu. Elle reproche à la cour cantonale un manque de motivation sur la question du dommage, "le flou laissé par l'arrêt entrepris" ne permettant pas de savoir les faits sur lesquels les juges cantonaux se sont fondés pour déterminer le dommage et sa quotité. 
3.1 Selon la jurisprudence, le droit d'être entendu implique notamment pour l'autorité l'obligation de motiver sa décision afin que le justiciable puisse la comprendre, l'attaquer utilement s'il y a lieu et que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle (ATF 129 I 232 consid. 3.2 p. 236 et les arrêts cités). Pour répondre à ces exigences, il suffit que l'autorité mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 122 IV 8 consid. 2c p. 15 et les arrêts cités). Cela ne signifie pas que l'autorité doive se déterminer expressément sur chaque allégation de fait et sur chaque argument juridique. Elle peut bien davantage se limiter aux éléments essentiels de la décision à prendre (ATF 126 I 97 consid. 2b p. 102 s. et les arrêts cités). 
3.2 Dans le cas présent, il est exact que certains éléments de fait sont mentionnés seulement dans la partie "en droit" de l'arrêt cantonal, en page 14, consid. 5.2, concernant l'existence d'un dommage résultant de la publication de l'article litigieux, qui complètent les explications figurant en pages 4 et 5 de la décision entreprise. Ainsi, en liant ces deux passages de l'arrêt attaqué, la recourante pouvait comprendre le motif pour lequel la Cour de justice avait retenu l'existence d'un dommage, lorsqu'elle s'est fondée sur les dépositions qui ont été brièvement résumées dans la partie en fait de son arrêt. En tout état, en développant à cet égard une argumentation détaillée aux pages 12 à 15 de son acte de recours, la recourante démontre par là qu'elle a compris le sens et la portée de la décision cantonale et qu'elle a pu l'attaquer devant le Tribunal de céans en toute connaissance de cause. 
Certes, la cour cantonale s'est basée principalement, voire exclusivement, sur un tableau récapitulatif dressé par les intimés, et non expressément et directement sur les comptes produits, qui avaient été établis par la comptable de la fiduciaire s'occupant de la revision de l'entreprise. Il n'en demeure pas moins que les données figurant dans ce tableau correspondaient strictement aux résultats des comptes annuels versés au dossier sous pièces 13 à 20. Aussi, en se référant à ces preuves documentaires par le biais du témoignage de la comptable qui a confirmé ces comptes, la cour cantonale a pu prendre une décision sur l'existence du dommage et sa quotité, d'une façon suffisamment explicite pour que la recourante comprenne la solution retenue par la Cour de justice et puisse la critiquer sur les différents points qu'elle a soulevés respectivement dans ses recours de droit public et en réforme. Et ceci d'autant plus qu'elle n'a jamais contesté la conformité du tableau récapitulatif à la comptabilité dont il reprenait les données. 
 
Ces considérations commandent d'écarter le grief de violation du droit d'être entendu, envisagé sous l'angle du défaut de motivation. 
4. 
Invoquant l'art. 9 Cst., la recourante se plaint d'arbitraire dans l'appréciation des preuves et l'établissement des faits par la cour cantonale quant à la force probante accordée aux déclarations des intimés, à l'ignorance d'un arrêt de la Cour de cassation pénale du Tribunal fédéral selon lequel la journaliste avait rapporté la preuve de vérité et de bonne foi concernant "le retrait" de nourriture à un cheval et enfin quant à la détermination du dommage et de sa quotité. 
4.1 Selon la jurisprudence, l'arbitraire ne résulte pas du seul fait qu'une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu'elle serait préférable; le Tribunal fédéral n'annulera la décision attaquée que lorsque celle-ci est manifestement insoutenable, qu'elle se trouve en contradiction claire avec la situation de fait, qu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté, ou encore lorsqu'elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité (ATF 131 I 57 consid. 2; 129 I 8 consid. 2.1). Pour qu'une décision soit annulée pour cause d'arbitraire, il ne suffit pas que la motivation formulée soit insoutenable, il faut encore que la décision apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 131 I 217 consid. 2.1; 129 I 8 consid. 2.1). 
Dans la mesure où l'arbitraire est invoqué en relation avec l'établissement des faits, il convient de rappeler que le juge dispose d'un large pouvoir lorsqu'il apprécie les preuves (arrêt 4P.178/2005 du 18 octobre 2005, consid. 3.1; 4P.95/2005 du 5 août 2005, consid. 5.1). La partie recourante doit ainsi expliquer dans quelle mesure le juge a abusé de son pouvoir d'appréciation et, plus particulièrement, s'il a omis, sans aucune raison sérieuse, de prendre en compte un élément de preuve propre à modifier la décision attaquée, s'il s'est manifestement trompé sur son sens et sa portée ou encore si, en se fondant sur les éléments recueillis, il en a tiré des constatations insoutenables (ATF 129 I 8 consid. 2.1; 127 I 38 consid. 2a p. 41). 
4.2 
4.2.1 La recourante se plaint tout d'abord de l'importance démesurée accordée aux déclarations des intimés, énoncées à l'occasion de l'audition des parties au sens de l'art. 208 de la loi genevoise de procédure civile du 10 avril 1987. S'il est exact que la déposition des parties elles-mêmes est également un élément de preuve, il ne peut réellement en être tenu compte que dans la mesure où de telles déclarations sont corroborées par d'autres éléments du dossier, preuves documentaires ou témoignages, par exemple (cf. Habscheid, Schweizerisches Zivilprozess- und Gerichtsorganisationsrecht, 2e éd., Bâle 1990, n. 693 p. 421 s.). 
 
En l'occurrence, les intimés ont déclaré que l'article avait entraîné une désaffection de leur établissement, alors que leurs concurrents connaissaient des listes d'attente pour la prise en pension des chevaux. Si ces propos n'ont pas été confirmés littéralement par des témoins, quatre d'entre eux ont donné des indications établissant la perte de chiffre d'affaires après la publication de l'article litigieux, imputable notamment à la décision de certains cavaliers de renoncer à placer leur cheval dans ce centre équestre. A cet égard, le vétérinaire traitant avait constaté qu'il y avait moins de clients; une d'entre eux a déposé qu'elle avait recommandé à une amie de placer son animal à la pension équestre des intimés, mais que cette personne y avait renoncé en raison de l'article incriminé, porté à sa connaissance par "une personne du manège de (...)". Dans le même sens, une autre cliente a relevé que des personnes travaillant dans un manège en France voisine lui avaient déconseillé de placer son animal à Z.________. Enfin, la comptable de la société de revision a déclaré que les revenus avaient baissé à la suite d'une diminution d'activité relativement à l'élevage et à la prise en pension des chevaux. 
Même si ces diverses dépositions ne sont pas la transcription des déclarations des intimés, elles en épousent le sens et permettent de tenir pour acquis que diverses personnes intéressées finissaient par renoncer à confier leur cheval aux intimés, suite à la publication de l'article litigieux. Ce dernier mentionne d'ailleurs que "les pensions qui ont repris les animaux confirment en effet l'état déplorable des animaux à leur arrivée". 
 
En conséquence, les précédents juges pouvaient prendre en considération la déclaration des intimés en procédure, car, jointe aux autres éléments indiqués ci-dessus, elle contribuait à établir la diminution du chiffre d'affaires concernant l'élevage et la pension des chevaux, sans que l'on puisse constater que la cour cantonale ait accordé "une portée probante démesurément importante" à ces allégations. 
 
En tous les cas, le seuil d'une appréciation arbitraire des preuves n'est pas franchi, motif pour lequel le grief doit être écarté. 
4.2.2 La recourante reproche ensuite à la cour cantonale de n'avoir pas suffisamment tenu compte de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du Tribunal fédéral, qui a conduit à l'acquittement de la journaliste du chef de diffamation. Elle voit une contradiction insoutenable entre le fait d'admettre cette circonstance, le retrait de la nourriture à un cheval, et le raisonnement au terme duquel la journaliste aurait commis une faute et adopté un comportement contraire au principe de la bonne foi. 
 
Sans citer expressément l'arrêt de la Cour de cassation pénale du Tribunal fédéral, la Cour de justice a relevé, en page 15, consid. 5.2, § 1, que le retrait de la nourriture au cheval, à l'insu de la cliente, était reconnu par l'intimée, de sorte qu'il s'agit d'un fait avéré dont la véracité n'est pas contestée. En conséquence, il n'y a pas lieu de reprocher à la juridiction genevoise la méconnaissance de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du Tribunal fédéral sur ce point. Par contre, les précédents juges ont considéré que "la publication de ce fait, qui n'est pas illicite puisqu'il est admis, a un effet négatif sur la réputation de la pension équestre, au même titre que les allégations de mauvais soins et traitements des chevaux". Or, la pertinence de cette considération relève de l'application du droit fédéral, soit plus particulièrement des art. 3 let. a et 9 LCD, moyen irrecevable dans le présent recours de droit public, mais que la recourante avance dans le recours en réforme déposé parallèlement. 
 
En tant qu'il est recevable, le grief doit être rejeté. 
4.2.3 La recourante soutient enfin que la cour cantonale aurait établi de façon lacunaire, et donc arbitraire, l'estimation du dommage et de sa quotité, en se fondant sur un tableau récapitulatif, mais pas directement sur la comptabilité de l'entreprise. 
 
A l'appui de cette assertion, elle relève que le tableau comparatif ne fait pas partie de la comptabilité, que la comptable ne s'est pas exprimée clairement à son sujet et que la distinction entre deux postes de la comptabilité, concernant respectivement l'élevage des chevaux et le produit des pensions et autres activités du même type, avait été totalement ignorée dans la décision entreprise. 
 
En page 14 de l'arrêt attaqué, la Cour de justice a retenu que "la comptabilité produite (...) de même que le résultat des enquêtes suffisent à démontrer que (les intimés) ont subi un dommage causé par la publication de l'article litigieux, sous forme d'une perte de revenus liés à l'activité de vente et de prise en pension de chevaux". Conformément à la jurisprudence, l'estimation du dommage (ATF 130 III 145 consid. 6.2; 129 III 135 consid. 4.2.1 p. 153) de même que le constat de la causalité naturelle (ATF 129 V 177 consid. 3.1; 128 III 174 consid. 2b p. 177, 180 consid. 2d p. 184) sont des questions de fait, qui ne peuvent être critiquées que par la voie du recours de droit public, voie qu'a empruntée à juste titre la recourante à cet effet. 
 
Contrairement à l'argumentation de cette dernière, la Cour de justice s'est fondée sur les données établies par le tableau récapitulatif, qui reportent les éléments de la comptabilité dressée par la fiduciaire. 
 
En réalité, la recourante ne conteste pas la matérialité des chiffres de la comptabilité, ni ceux du tableau récapitulatif, mais fait une distinction entre la comptabilité établie par l'organe de revision et le tableau récapitulatif, rédigé par les intimés, sur la base des pièces justificatives. De même, la distinction que la recourante met en évidence entre les comptes n. 64.12 et 64.15, concernant successivement l'élevage des animaux et le produit des pensions et autres activités du même type, n'est pas déterminante, au regard de l'interdiction de l'arbitraire, dans la mesure où il convient d'ajouter ces deux postes pour obtenir le résultat de l'exploitation. Il ressort en effet de la déposition de la comptable, chargée par la fiduciaire de l'établissement des comptes de l'entreprise, que le nouveau mode comptable présentait davantage de rubriques pour répondre aux exigences fiscales, de sorte que pour obtenir le résultat du compte chevaux il fallait opérer un calcul, qui résulte du tableau comparatif. 
 
En effet, la comptabilité versée au dossier sous pièces 13 à 20 n'était "pas de gestion, mais fiscale", de telle manière que les chiffres tirés de cette dernière ne présentent aucun risque d'exagération ou de majoration dans l'établissement du montant du dommage. 
 
La comptable a déposé, concernant le tableau comparatif, que la façon de reporter les chiffres, à partir des documents comptables à proprement parler, paraissait correcte. De plus, le témoin a relevé que les résultats étaient négatifs depuis 1999, et qu'ils étaient liés à la diminution de l'activité de l'élevage du cheval et par rapport aux pensions, soit les deux postes distingués dans la comptabilité, et auxquels la recourante attribue une portée qu'elle n'a pas, dès lors que la distinction était imposée pour des raisons fiscales et que les deux activités, relativement liées, avaient pâti de la mauvaise réputation de l'entreprise, suite à l'article incriminé. 
 
Comme le relève à juste titre la recourante, la prise en compte de l'ensemble de ces éléments et la comparaison de la moyenne des résultats des années 1995 à 1998 avec les pertes des exercices 1999 à 2002 entrent dans le cadre du libre pouvoir d'appréciation des preuves par la cour cantonale, qui n'a pas versé dans l'arbitraire en comprenant le tableau récapitulatif fondé sur la comptabilité dans le sens des dépositions des témoins indiquant un lien pratique et de gestion entre les deux postes que des directives fiscales commandaient de distinguer. Dans ces conditions, l'évaluation du dommage et la constatation de la causalité naturelle ressortant suffisamment des preuves figurant au dossier, et ayant fait l'objet d'une appréciation des preuves résistant au grief d'arbitraire, il n'était pas nécessaire pour la cour cantonale, ni pour les parties, qui l'avaient envisagé en début de procédure, de faire exécuter une expertise sur le montant du dommage (cf. ATF 122 V 157 consid. 1d p. 162; 119 Ib 492 consid. 5b/bb p. 505 s.). 
 
Ces considérations amènent le rejet du grief, et avec lui, celui du recours dans son intégralité. 
5. 
Compte tenu de l'issue du litige, les frais et dépens seront mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté. 
2. 
Un émolument judiciaire de 4'000 fr. est mis à la charge de la recourante. 
3. 
La recourante versera aux intimés, créanciers solidaires, une indemnité de 5'000 fr. à titre de dépens. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des par-ties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. 
Lausanne, le 15 décembre 2005 
Au nom de la Ire Cour civile 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: La greffière: