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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
6S.82/2005 /rod 
 
Arrêt du 16 mai 2005 
Cour de cassation pénale 
 
Composition 
MM. les Juges Schneider, Président, 
Kolly et Zünd. 
Greffière: Mme Paquier-Boinay. 
 
Parties 
X.________, 
recourant, représenté par Me Serge Milani, avocat, 
 
contre 
 
Procureur général du canton de Genève, 
case postale 3565, 1211 Genève 3. 
 
Objet 
Expulsion (art. 55 CP), 
 
pourvoi en nullité contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre pénale, du 14 février 2005. 
 
Faits: 
A. 
Le 30 mai 2004 vers 13 h. 30, les passagers d'une voiture arrêtée à un feu rouge à Genève ont fait l'objet d'une agression. Un inconnu s'est approché de la fenêtre ouverte du passager avant, en direction duquel il a pointé un pistolet. Les occupants du véhicule se sont défendus et sont parvenus à mettre en fuite leur assaillant, lequel a perdu son arme et son téléphone portable, ce qui a permis de l'identifier et de l'interpeller. L'enquête a permis d'établir que plusieurs personnes étaient impliquées dans cette agression, parmi lesquelles X.________, qui avait accepté de passer devant le véhicule afin qu'il s'arrête au lieu prévu pour l'agression dans l'hypothèse où le feu serait vert. 
 
Se sachant recherché, X.________ s'est présenté spontanément à la police. Il a reconnu avoir eu des contacts avec les auteurs de cette infraction et a admis le rôle qu'il devait y jouer. Il a toutefois déclaré qu'après avoir constaté que l'un des auteurs principaux devenait de plus en plus nerveux, il avait décidé de renoncer à participer à l'agression. 
 
X.________, ressortissant algérien né en 1968, sans formation professionnelle, n'a jamais disposé d'une autorisation de séjour en Suisse. Il vit néanmoins à Genève avec son amie, qui dispose d'un permis "C" et travaille régulièrement. Le couple a un enfant, né en juillet 2000 et, en février 2005, attendait un second enfant. 
 
X.________ a fait l'objet des condamnations suivantes: le 24 novembre 1997, 400 fr. d'amende pour violation de domicile; le 7 août 1998, 8 mois d'emprisonnement avec sursis et 5 ans d'expulsion ferme pour vol, escroquerie, utilisation frauduleuse d'ordinateur et faux dans les titres; le 1er septembre 1998, 5 jours d'emprisonnement avec sursis pour vol; le 29 septembre 2000, 4 mois d'emprisonnement pour appropriation illégitime; le 19 mars 2001, 6 mois d'emprisonnement et 5 ans d'expulsion pour vol; le 13 novembre 2002, 20 jours d'emprisonnement pour rupture de ban. 
B. 
Par jugement du 15 novembre 2004, le Tribunal de police genevois a reconnu X.________ coupable de "désistement de brigandage" ainsi que de rupture de ban et l'a condamné à 6 mois d'emprisonnement. Il a en outre prononcé son expulsion du territoire suisse pour une durée de 5 ans. 
C. 
Statuant le 14 février 2005 sur recours de X.________, la Chambre pénale de la Cour de justice genevoise l'a acquitté du chef d'accusation de tentative de brigandage sous forme de désistement et a ramené à 2 mois la peine d'emprisonnement prononcée. Pour le surplus, elle a confirmé le jugement de première instance. 
 
Pour déterminer la durée de la peine sanctionnant la seule infraction retenue à l'encontre de X.________, savoir la rupture de ban, l'autorité cantonale a noté que l'infraction ne présente pas un caractère de grande gravité et que la faute du condamné, bien que certaine, est explicable par ses liens avec la Suisse, notamment la présence de son enfant dans ce pays. S'agissant de l'expulsion, la Chambre pénale a examiné conjointement le cas de X.________ et de l'un des organisateurs de l'agression. Elle a rappelé que ni l'un ni l'autre n'avaient jamais obtenu d'autorisation de séjour en Suisse et qu'ils y étaient restés et revenus malgré des mesures d'expulsion prises à leur encontre, y commettant par ailleurs de nombreuses infractions. Elle a considéré qu'ils avaient ainsi démontré leur incapacité à s'insérer en Suisse, justifiant donc la mesure prise. 
D. 
X.________ se pourvoit en nullité contre cet arrêt. Invoquant une violation de l'art. 55 CP, il conclut, avec suite de dépens, à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour qu'elle statue à nouveau. Il sollicite en outre l'assistance judiciaire. 
 
Le recourant reproche à l'autorité cantonale d'avoir violé l'art. 55 CP et notamment d'avoir interprété cette disposition d'une manière qui n'est pas conforme au droit constitutionnel, savoir les art. 14 et 36 Cst., ainsi qu'à l'art. 8 CEDH
E. 
L'autorité cantonale a renoncé à se déterminer sur le pourvoi, se référant aux considérants de son arrêt. 
 
Le Ministère public conclut au rejet du recours. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Le recourant ne remet en cause l'arrêt attaqué que dans la mesure où il le condamne à l'expulsion du territoire suisse pour une durée de cinq ans. 
1.1 Conformément à l'art. 55 al. 1 CP, le juge peut expulser du territoire suisse tout étranger condamné à la réclusion ou à l'emprisonnement. Il dispose d'un large pouvoir d'appréciation et ne viole le droit fédéral que s'il ne fonde pas sa décision sur des critères pertinents ou s'il abuse de son pouvoir d'appréciation en prenant une décision exagérément sévère ou clémente (ATF 123 IV 107 consid. 1 p 1; 104 IV 222 consid. 1b et l'arrêt cité). 
 
L'expulsion est à la fois une peine accessoire, réprimant une infraction, et une mesure, destinée à préserver la sécurité publique. La jurisprudence considère comme prépondérant le caractère de mesure de sécurité (ATF 123 IV 107 consid. 1; 117 IV 229). Dès lors, pour décider s'il doit ou non prononcer une expulsion, le juge doit tenir compte d'une part des critères qui régissent la fixation de la peine et, d'autre part, du but de sécurité publique que poursuit l'expulsion (ATF 123 IV 107 consid. 1; 117 IV 229 consid. 1). 
 
La décision relative à l'expulsion ne se confond pas entièrement avec celle afférente à la fixation de la peine, même si on admet qu'il existe en règle générale une certaine cohérence entre la durée de la peine principale et celle de l'expulsion judiciaire (ATF 123 IV 107 consid. 3). Elle suppose un examen spécifique de la situation personnelle de l'intéressé (ATF 104 IV 222 consid. 1b). Le juge doit ainsi tenir compte du fait que l'expulsion touchera modérément l'étranger qui n'est venu en Suisse que pour y commettre des infractions et qui n'a pas de liens particuliers avec notre pays. Elle représentera en revanche une sanction très lourde pour celui qui vit et travaille en Suisse, y est intégré depuis plusieurs années et y a, le cas échéant, fondé une famille. La situation du condamné détermine ainsi les conséquences qu'aura pour lui l'expulsion et influence donc largement la gravité que revêtira cette sanction. 
 
Comme en matière de fixation de la peine, la jurisprudence exige que la décision relative à l'expulsion soit suffisamment motivée pour permettre à l'autorité de recours de vérifier de quelle manière le droit fédéral a été appliqué, particulièrement lorsque l'autorité cantonale s'écarte de la règle générale selon laquelle il existe une certaine cohérence entre la durée de la peine principale et celle de l'expulsion et prononce une peine principale légère assortie d'une expulsion de longue durée ou au contraire une lourde peine principale assortie d'une courte expulsion (ATF 123 IV 107 consid. 3 p. 111; 117 IV consid. 3a p. 117). Néanmoins, un pourvoi ne saurait être admis simplement pour améliorer ou compléter un considérant lorsque la décision rendue apparaît conforme au droit (ATF 127 IV 101 consid. 2c p. 104 s.; 122 IV 265 consid. 2d p. 269). 
1.2 En l'espèce, l'autorité cantonale a acquitté le recourant de l'infraction la plus grave retenue à son encontre, savoir la tentative de brigandage avec désistement, et n'a retenu que la rupture de ban. Pour fixer la peine destinée à sanctionner cette infraction, elle a relevé que celle-ci ne présentait pas un caractère de grande gravité et a par ailleurs noté que la faute du condamné, bien que certaine, était explicable par ses liens avec la Suisse et la présence de son enfant dans ce pays. Elle a ainsi réduit de 6 à 2 mois d'emprisonnement la peine infligée au recourant. 
 
Elle n'a en revanche pas véritablement réexaminé la durée de l'expulsion judiciaire prononcée à son encontre, alors que le rapport entre celle-ci et la peine principale se trouvait largement modifié par l'abandon de la plus grave des infractions dont il avait à répondre. 
 
S'agissant de l'expulsion, l'autorité cantonale s'est contentée d'une motivation commune pour les deux condamnés qui avaient porté la cause devant elle, relevant qu'aucun des deux n'avait jamais obtenu d'autorisation de séjour en Suisse qu'ils y étaient néanmoins restés et revenus en dépit des mesures d'expulsion prises à leur encontre et y avaient tous deux commis de nombreuses infractions. Elle a confirmé l'expulsion pour une durée de 5 ans infligée à chacun d'eux. 
 
En procédant ainsi, l'autorité cantonale n'a pas exposé de manière suffisante les raisons qui lui faisaient maintenir à cinq ans la durée de l'expulsion prononcée contre le recourant alors qu'elle abandonnait l'infraction qui dénotait le plus grand danger pour la sécurité publique, ne retenant à sa charge qu'une infraction dont elle a expressément relevé qu'elle ne revêtait pas un caractère de grande gravité. Elle a par ailleurs considéré que la faute du recourant était explicable par la présence en Suisse de son enfant, admettant ainsi l'existence de liens effectifs entre le recourant et ses proches qui demeurent en Suisse, liens qui n'ont pas été évoqués lors de l'examen de la question de l'expulsion, alors qu'ils influencent indéniablement la gravité que revêt celle-ci pour le condamné. 
 
En outre, l'absence de toute distinction, fût-ce dans la motivation, entre le cas des deux condamnés qui avaient porté la cause devant l'autorité cantonale ne permet pas de s'assurer que celle-ci a appliqué correctement le droit fédéral à chacun d'eux et donc au recourant. En effet, les deux situations n'apparaissent pas suffisamment analogues pour pouvoir faire l'objet d'une seule et même motivation. Cela ressort clairement de l'importante différence de gravité des infractions imputées à chacun des condamnés et par conséquent des peines prononcées, savoir 18 mois pour tentative de brigandage respectivement 2 mois pour rupture de ban, et est encore accentué par l'examen des antécédents des deux intéressés. Si ceux du recourant n'apparaissent pas particulièrement favorables, puisque l'ensemble des peines auxquelles il a été condamné auparavant est de l'ordre de 19 mois d'emprisonnement, on constate que ceux de son coaccusé sont passablement plus lourds puisqu'il s'est déjà vu infliger quelque 36 mois d'emprisonnement. 
 
Compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, le pourvoi doit être admis et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour qu'elle statue à nouveau. 
2. 
Vu l'issue de la procédure, il ne sera pas perçu de frais (art. 278 al. 2 PPF) et une indemnité de 2'000 fr. sera versée au recourant (art. 278 al. 3 PPF). Il n'y a dès lors pas lieu de statuer sur la requête d'assistance judiciaire. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le pourvoi est admis. 
2. 
L'arrêt attaqué est annulé et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour qu'elle statue à nouveau. 
3. 
Il n'est pas perçu de frais. 
4. 
La caisse du Tribunal fédéral versera au recourant une indemnité de 2'000 fr. à titre de dépens. 
5. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, à la Chambre pénale de la Cour de justice et au Procureur général du canton de Genève. 
Lausanne, le 16 mai 2005 
Au nom de la Cour de cassation pénale 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: La greffière: