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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
4A_137/2012 
 
Arrêt du 16 juillet 2012 
Ire Cour de droit civil 
 
Composition 
Mmes et M. les juges Klett, présidente, Corboz et Rottenberg Liatowitsch. 
Greffier: M. Thélin. 
 
Participants à la procédure 
X.________, 
représenté par Me Philippe Kitsos, 
demandeur et recourant, 
 
contre 
 
Commune de Payerne, 
représentée par Me Philippe-Edouard Journot, 
Etat de Vaud, 
représenté par Me Christian Favre, 
défendeurs et intimés. 
 
Objet 
procédure civile; retard injustifié 
 
recours contre l'arrêt rendu le 16 janvier 2012 par la Chambre des recours civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
Faits: 
 
A. 
Dès le 1er mars 2002, en application du statut du personnel communal, la Municipalité de Payerne a engagé X.________ en qualité de brigadier de police. Par lettre du 6 septembre 2002, elle lui a communiqué qu'elle ne désirait pas prolonger l'essai et qu'elle résiliait l'engagement avec effet au 31 octobre suivant. 
X.________ a recouru au Tribunal administratif du canton de Vaud. Par arrêt du 17 janvier 2003, cette autorité a annulé la décision du 6 septembre 2002 au motif que l'agent licencié n'avait pas été dûment entendu. 
 
B. 
Le 18 juillet 2005, X.________ a ouvert action contre la commune de Payerne et contre l'Etat de Vaud devant le Tribunal civil de l'arrondissement de la Broye et du Nord vaudois. 
Dans l'intervalle, le statut du personnel communal avait été révisé et les collaborateurs communaux étaient désormais liés à la collectivité par un contrat de travail de droit public. A teneur de l'art. 77 du statut révisé, « tout litige portant sur le contrat de travail peut être porté devant le tribunal compétent conformément à la loi vaudoise sur la juridiction du travail ». La demande fait référence à cette disposition. 
Le Tribunal civil est requis de constater que « [le demandeur] est employé de la commune de Payerne avec tous les droits et prérogatives qui en découlent ». Le tribunal doit également constater que « le refus déclaré par le commandant de la police cantonale vaudoise d'intégrer le demandeur au corps de la gendarmerie vaudoise est constitutif de discrimination à l'embauche [...] et que la responsabilité de l'Etat de Vaud est engagée ». La commune et l'Etat doivent être condamnés à payer respectivement 40'000 fr. et 10'000 fr., avec intérêts au taux de 5% par an dès le lendemain de la notification de la demande. 
La commune de Payerne conclut au rejet de l'action; par demande reconventionnelle, elle prétend au paiement de 5'860 fr.30 avec intérêts dès le 1er février 2003. 
L'Etat de Vaud conclut au rejet de l'action. 
 
C. 
Le Président du Tribunal civil a tenu audience préliminaire le 23 mai 2006. Le demandeur requérait une expertise afin d'établir qu'il avait été victime de harcèlement psychologique ou mobbing; il fut décidé que quatre témoins seraient d'abord entendus à ce sujet, de sorte que l'expertise se révélerait peut-être superflue. Il fut par ailleurs décidé que le demandeur serait soumis à une expertise médico-psychiatrique. 
Au mois de décembre 2006, le demandeur fit savoir qu'il renonçait à cette expertise-ci, de sorte que l'expert déjà mandaté fut relevé de sa mission. 
Les quatre témoins furent entendus le 1er et le 2 février 2007 et la reprise de l'audience préliminaire fut ajournée au 25 septembre suivant. Le demandeur persista dans sa demande d'une expertise destinée à établir le harcèlement. Le conseil de la commune de Payerne exposa que le demandeur percevait des prestations d'invalidité depuis le 1er décembre 2006. Le demandeur exposa que la décision de la caisse de pensions était contestée. Le Président annonça que l'expertise ne serait pas ordonnée tant que la caisse n'aurait pas pris une décision définitive et exécutoire sur le droit du demandeur à des prestations d'invalidité. 
La caisse confirma le 18 août 2008 que le demandeur bénéficiait d'une pension d'invalidité par l'effet d'une décision qu'il n'avait pas contestée. 
Dès le 27 août 2008, le Président prit contact avec le professeur Gabriel Aubert au sujet de la mission d'expertise. L'ordonnance sur preuves intervint le 13 mars 2009; elle portait notamment sur une « expertise juridique ». Après mise au point du questionnaire et versement de l'avance des frais par le demandeur, le professeur Aubert fut mandaté avec délai au 17 décembre 2009. Il ne rendit aucun rapport. Sept rappels lui furent adressés au cours de l'année 2010. Le Président quitta ses fonctions à la fin de cette même année car il était parvenu à l'âge de la retraite; il fut remplacé par un autre magistrat. 
La Présidente nouvellement en fonction révoqua le mandat du professeur Aubert le 28 janvier 2011. Le 18 mars 2011, après que l'expert eut restitué le dossier, elle fit savoir aux parties que l'expertise ordonnée en mars 2009 lui paraissait inadéquate et qu'elle envisageait une audience de conciliation en vue de « réorganiser la procédure probatoire ». Le demandeur s'y opposa et persista à proposer un expert que les adverses parties avaient refusé dès le début. Le 27 mai 2011, la Présidente communiqua qu'à son avis, l'expertise devrait aborder l'éventuel harcèlement psychologique aussi sous l'angle médico-social; elle annonçait une ordonnance sur preuves complémentaire pour la fin du moins de juin. Elle entreprit de nombreuses recherches afin de trouver un expert mais ses démarches n'aboutirent pas. 
Le 27 octobre 2011, répondant à une interpellation du demandeur, la Présidente confirma son intention de « réorganiser toute la procédure probatoire dans le cadre d'une ordonnance sur preuves complémentaire », ordonnance qu'elle annonçait pour la fin du mois de novembre. 
 
D. 
Le 9 décembre 2011, le demandeur a saisi la Chambre des recours civile du Tribunal cantonal d'un recours pour retard injustifié. Les conclusions présentées tendaient à ordonner au Tribunal civil de reprendre sans délai l'instruction de la cause et de mettre en oeuvre l'expertise juridique ordonnée le 13 mars 2009. 
Le Tribunal cantonal a rejeté le recours par arrêt du 16 janvier 2012. 
 
E. 
Agissant par la voie du recours en matière civile, le demandeur requiert le Tribunal fédéral de réformer l'arrêt de la Chambre des recours civile en ce sens qu'il soit ordonné au Tribunal civil de reprendre sans délai l'instruction de la cause et de mettre en oeuvre l'expertise juridique ordonnée le 13 mars 2009. 
Invitées à répondre au recours, les adverses parties ont déclaré s'en remettre à justice; elles n'ont pas présenté d'observations. 
Après que l'instruction eut été terminée devant la Ire Cour de droit civil du Tribunal fédéral, celle-ci a statué avec l'accord du Président de la Ire Cour de droit social qui était en principe compétente. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
Le Tribunal fédéral connaît des recours exercés contre les décisions rendues en matière civile, selon l'art. 72 al. 1 LTF, ou rendues dans des causes de droit public, selon l'art. 82 let. a LTF
Les prétentions litigieuses devant le Tribunal civil se rattachent à des rapports de travail que le demandeur a noués dès le 1er mars 2002 avec la commune de Payerne, pour exercer au service de cette collectivité une fonction de brigadier de police à caractère éminemment régalien. Ces rapports de travail étaient explicitement soumis au statut du personnel communal. Ce statut appartient au droit public; en conséquence, la cause ressortit elle aussi au droit public, alors même qu'elle est pendante devant un tribunal civil et instruite selon les règles de la procédure civile. Le recours adressé au Tribunal fédéral n'est pas correctement intitulé mais cela ne nuit pas à sa recevabilité (ATF 134 III 379 consid. 1.2 p. 382). 
Déterminée d'après les conclusions prises devant le Tribunal civil (art. 51 al. 1 let. c LTF), la valeur litigieuse excède le minimum de 15'000 fr. requis en matière de rapports de travail de droit public (art. 85 al. 1 let. b LTF). 
L'arrêt présentement attaqué est une décision incidente dans le procès qui se poursuit devant le Tribunal civil. Contre une pareille décision, le recours n'est en principe recevable que si la partie recourante se trouve menacée d'un préjudice irréparable (art. 93 al. 1 let. a LTF). Cette exigence doit être tenue pour satisfaite lorsque, comme en l'espèce, cette partie invoque l'art. 29 al. 1 Cst., se plaint d'un retard dans l'avancement du procès et fait grief à l'autorité précédente d'avoir refusé l'intervention demandée pour mettre fin à ce retard (cf. ATF 138 III 190 consid. 6 p. 191, concernant le recours dirigé contre une ordonnance de suspension). 
 
2. 
Selon l'art. 29 al. 1 Cst., toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable. Le caractère raisonnable ou adéquat du délai de décision s'apprécie au regard de la nature de l'affaire et de l'ensemble des circonstances (ATF 130 I 312 consid. 5.1 p. 331; 129 V 411 consid. 1.2 p. 416). Sur recours de la partie instante, lorsque l'autorité tarde sans justification à instruire ou à se prononcer, le Tribunal fédéral lui enjoint de le faire sans délai (ATF 31 I 379 p. 384; voir aussi ATF 124 I 327 consid. 4b/bb p. 333). Ce tribunal n'a cependant pas pour mission de surveiller l'instruction en cours devant l'autorité saisie; il ne lui appartient donc pas de constater, le cas échéant, un dysfonctionnement autre qu'un retard actuel et persistant. 
La Chambre des recours civile juge inadmissible qu'un conflit du droit du travail ne soit pas tranché dans un laps de six ans; elle en donne acte au demandeur. Elle retient cependant que le retard considérable ainsi avéré n'est pas imputable à l'inaction des juges instructeurs; elle discute aussi l'attitude du demandeur, relève que celui-ci « n'a rien fait pour faciliter l'avancement du dossier » et conclut qu'il n'est pas autorisé à se plaindre d'un retard injustifié. 
 
3. 
Le demandeur se plaint précisément d'un retard dans la mise en oeuvre de l'expertise juridique admise par l'ordonnance sur preuves du 13 mars 2009; ses conclusions, tant devant l'autorité précédente que devant le Tribunal fédéral, tendent à la mise en oeuvre de cette expertise. 
L'expert alors désigné n'a pas accompli sa mission. La Chambre des recours civile discute et approuve les considérations qui ont pu, suppose-t-elle, retenir le Président du Tribunal civil de dessaisir cet expert plus rapidement. Quoi qu'il en soit, le retard éventuellement survenu avant le mois de mars 2011, moment où l'expert a restitué le dossier, n'est plus actuel. 
Dès ce même moment, la Présidente du Tribunal civil a fait savoir aux parties que l'expertise ordonnée le 13 mars 2009 lui paraissait inadéquate et qu'elle s'apprêtait à ordonner une mesure probatoire différente. Le demandeur s'est alors catégoriquement opposé à une modification de la mission d'expertise. L'affaire n'a ensuite plus progressé, notamment en raison de la difficulté de trouver un expert offrant les compétences médico-sociales désormais voulues par la Présidente. 
Le demandeur a articulé une offre de preuve et cette offre a été formellement admise par l'ordonnance de preuves du 13 mars 2009. Néanmoins, la Présidente du Tribunal civil actuellement en fonction entend ne pas mettre en oeuvre l'expertise concernée. Il incombe donc à la Présidente de révoquer cette ordonnance, en tant que le droit de procédure applicable le permet, cela de manière explicite et dans les formes requises, pour mettre fin à une situation procédurale équivoque et permettre au demandeur d'exercer, s'il s'y croit fondé, le recours éventuellement disponible. Le refus réitéré de donner suite à une ordonnance de preuves déjà intervenue, même motivé par l'intention d'ordonner une mesure probatoire différente, entraîne un retard dans l'instruction et ce retard est incompatible avec l'art. 29 al. 1 Cst. 
Au surplus, les intentions dont la Présidente a fait état ne permettent guère d'augurer la fin de l'instruction dans un délai raisonnable. La mise en oeuvre d'une expertise médico-sociale s'annonce d'ores et déjà laborieuse. La Présidente peine à trouver un expert et on voit mal que l'étude puisse s'accomplir sans le concours du demandeur, lequel a déjà fait connaître son refus. 
Il est enfin très douteux qu'une quelconque expertise soit réellement nécessaire dans la cause. Le mémoire introductif de l'action ne précise pas les bases juridiques sur lesquelles le demandeur prétend à des indemnités aux montants de 40'000 et 10'000 francs. En l'état, l'art. 49 al. 1 CO semble applicable à titre de droit public supplétif; il convient donc de se référer à la jurisprudence relative à cette disposition, selon laquelle une indemnité est éventuellement due au travailleur qui a été victime de harcèlement psychologique, si, d'un point de vue objectif, il a subi une humiliation particulièrement sévère (ATF 125 III 70 consid. 3a p. 74/75; voir aussi ATF 130 III 699 consid. 5.1 p. 704). La preuve de faits à ce point graves, survenus au cours des quelques mois durant lesquels le demandeur a effectivement exercé sa fonction de brigadier de police, ne devrait pas être excessivement difficile. Au demeurant, une expertise doit être limitée à l'examen de points de fait car la résolution des questions de droit ressortit exclusivement au juge (ATF 130 I 337 consid. 5.4.1 p. 345; 113 II 429 consid. 3a p. 432 in initio). Quatre témoignages ont déjà été recueillis au sujet du harcèlement allégué par le demandeur et ces dépositions ont été transcrites au procès-verbal. A supposer que le droit de procédure permette une révocation de l'ordonnance de preuves, il s'impose d'effectuer une appréciation rigoureuse de ces témoignages, anticipée, dans la perspective de renoncer à l'expertise et de réexaminer l'utilité des autres mesures probatoires aussi ordonnées le 13 mars 2009. 
 
4. 
Le demandeur est donc fondé à se plaindre d'un retard contraire à l'art. 29 al. 1 Cst. en tant que l'instruction de la cause ne progresse plus depuis le mois de mars 2011. Ses conclusions tendant à l'exécution de l'ordonnance sur preuves du 13 mars 2009 ne peuvent toutefois pas être accueillies car leur pertinence n'est pas établie au regard du principe de la célérité. Le recours ne sera donc que partiellement admis, la Présidente du Tribunal civil étant invitée à poursuivre l'instruction de la cause. 
Les frais et dépens du recours au Tribunal fédéral n'incombent pas aux parties défenderesses devant le Tribunal civil. Les dépens incombent au canton de Vaud à titre de collectivité dont dépendent les autorités précédentes. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est partiellement admis et la décision attaquée est réformée en ce sens que la Présidente du Tribunal civil est invitée à poursuivre l'instruction de la cause. 
 
2. 
Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire. 
 
3. 
Le canton de Vaud versera une indemnité de 1'500 fr. au demandeur, à titre de dépens pour le recours au Tribunal fédéral. 
 
4. 
Il n'est pas alloué de dépens aux autres parties. 
 
5. 
La Chambre des recours civile est invitée à statuer à nouveau sur les frais et dépens du recours cantonal. 
 
6. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
Lausanne, le 16 juillet 2012 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La présidente: Klett 
 
Le greffier: Thélin