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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
6F_2/2018  
 
 
Arrêt du 16 août 2018  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président, 
Oberholzer et Jametti. 
Greffière : Mme Livet. 
 
Participants à la procédure 
W.________, représenté par Me Michael Mráz, avocat, 
requérant, 
 
contre  
 
Ministère public de la Confédération, 
intimé, 
 
Tribunal pénal fédéral, Cour des affaires pénales. 
 
Objet 
Demande de révision de l'arrêt du Tribunal fédéral suisse du 22 décembre 2017 (6B_668/2014 
[Jugement SK.2011.24]). 
 
 
Faits :  
 
A.   
Par jugement du 10 octobre 2013 et complément du 29 novembre 2013, le Tribunal pénal fédéral (ci-après: TPF) a condamné W.________ pour escroquerie, gestion déloyale aggravée et blanchiment d'argent répété et aggravé à une peine privative de liberté de 52 mois et à une peine pécuniaire de 285 jours-amende à 42 fr. le jour, avec sursis pendant 2 ans. Il a prononcé une créance compensatrice en faveur de la Confédération contre W.________ d'un montant de 383'646'706 fr., mis une part des frais s'élevant à 100'000 fr. à sa charge et lui a alloué des dépens à hauteur de 20'000 francs. 
 
Il ressort notamment de ce jugement que la société Mostecka Uhelna Spolecnost A.S (ci-après: MUS) était une société minière tchèque active dans la production et la distribution d'énergie charbonnière produite dans le bassin houiller de la Bohême septentrionale, autour de la ville de Most. Elle a été constituée le 1 er novembre 1993 par la réunion de trois anciennes entreprises d'Etat tchèques et inscrite le même jour au Registre du commerce, avec siège à Most et un capital social de 8'835'898'000 CZK divisé en 8'835'898 actions (1'502'102 actions nominatives et 7'333'796 actions au porteur) ayant chacune une valeur nominale de 1'000 CZK. Son unique fondateur était le Fonds du Patrimoine national de la République tchèque (ci-après: FNM, organisme chargé de gérer les participations de l'Etat tchèque, notamment leur transfert à des personnes privées ou à des entités publiques), lequel a libéré la totalité du capital social le 1 er novembre 1993, notamment par l'apport de biens matériels énumérés dans l'acte de fondation de MUS. Le capital social de 8'835'898'000 CZK correspondait au prix (dont l'estimation est citée dans le projet de privatisation) des biens mobiliers et d'autres biens des anciennes sociétés nationales mentionnés dans l'acte de fondation. Au jour de sa création, MUS était ainsi détenue exclusivement par l'Etat tchèque. Par la suite, le FNM a cédé 1'585'644 actions au porteur (représentant un total d'environ 17,94% du capital social) à près de 100'000 personnes physiques dans le cadre d'une privatisation dite «par coupons»; il a également cédé 2'100'183 actions au porteur (représentant un total d'environ 23,76% du capital social) à 132 fonds d'investissement. Jusqu'en février 1998, MUS était majoritairement détenue par des entités publiques tchèques. En effet, 46,29% des actions (4'089'763 actions) étaient encore détenus par l'Etat tchèque via le FNM et 8,88% (795'230 actions) par diverses villes et communes tchèques.  
Entre le printemps 1998 et août 1999, W.________, X.________, A.________, U.________ et Y.________, avec l'aide de V.________ et de Z.________, ont fait croire à l'Etat tchèque qu'un investisseur étranger de renom, soit le groupe E.________1, avait acquis la majorité des actions MUS au moyen de ses propres deniers et souhaitait acquérir la part de 46,29% appartenant au FNM, toujours grâce à ses propres deniers, incitant dit Etat à vendre ses 46,29% d'actions qui plus est à vil prix. En réalité, W.________, X.________, A.________, U.________ et Y.________ étaient les véritables titulaires de la majorité des actions qu'ils avaient acquises grâce aux fonds versés par MUS elle-même, grâce à un détournement commis à son préjudice, et c'était eux qui cherchaient à s'emparer, au travers de la société PP.________, de la part du FNM qu'ils allaient payer à nouveau au moyen de fonds détournés de MUS. Fondé sur sa fausse représentation de la réalité, l'Etat tchèque a accepté de vendre, le 28 juillet 1999, sa part de 46,29% des actions MUS au prix de 650 mio CZK, soit un prix bien inférieur à sa valeur réelle, subissant de la sorte un dommage estimé à 97'336'600 francs. 
 
B.   
Par arrêt du 22 décembre 2017 (6B_668/2014), la Cour de droit pénal du Tribunal fédéral a rejeté le recours formé par W.________ contre le jugement du TPF du 10 octobre et complément du 29 novembre 2013. 
 
C.   
W.________ requiert la révision de l'arrêt 6B_668/2014. Il conclut, avec suite de frais et dépens, à l'annulation de cet arrêt en raison de l'admission de sa demande de révision, à l'admission de son recours en relation avec les motifs de révision - c'est-à-dire l'incompétence pour la poursuite de l'escroquerie et/ou la non-réalisation de tous les éléments constitutifs objectifs de l'escroquerie - et, en conséquence, il requiert l'annulation du jugement du TPF du 10 octobre et 29 novembre 2013 et le renvoi de la cause à celui-ci pour nouvelle décision. 
Par ordonnance du 12 mars 2018, le Président de la Cour de droit pénal du Tribunal fédéral a admis la requête d'effet suspensif formée par W.________ pour ce qui concerne la peine privative de liberté. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le requérant se prévaut du motif de révision prévu à l'art. 121 let. d LTF. 
 
1.1. Aux termes de cette disposition, la révision d'un arrêt du Tribunal fédéral peut être demandée si, par inadvertance, le tribunal n'a pas pris en considération des faits pertinents qui ressortent du dossier. Ce motif de révision correspond à celui que prévoyait l'art. 136 let. d OJ, de sorte que la jurisprudence relative à cette norme conserve toute sa valeur (arrêts 6F_3/2012 du 16 mars 2012 consid. 2.1; 6F_14/2010 du 20 juin 2011 consid. 1 et les références citées).  
 
1.2. Selon cette jurisprudence, l'inadvertance suppose que le juge ait omis de prendre en considération une pièce déterminée, versée au dossier ou l'ait mal lue, s'écartant par mégarde de sa teneur exacte (ATF 122 II 17 consid. 3 p. 16). Elle doit se rapporter au contenu même du fait, à sa perception par le tribunal, mais non à son appréciation juridique (arrêt 6F_3/2012 précité consid. 2.2).  
 
Une inadvertance de la part du Tribunal fédéral ne peut être admise que si cette autorité avait le devoir de prendre en considération les faits dont on lui reproche de ne pas avoir tenu compte (ATF 115 II 399 consid. 2a p. 400; plus récemment arrêt 6F_3/2012 précité consid. 2.2 et les références citées). Dans le cadre du traitement d'un recours en matière pénale, les faits dont le Tribunal fédéral doit tenir compte sont définis par l'art. 105 al. 1 et 2 LTF. Il s'agit, d'une part, des faits établis par l'autorité précédente (al. 1), d'autre part, de ceux qui auraient été omis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (al. 2). La partie recourante qui entend s'écarter des constatations de l'autorité précédente (art. 97 al. 1 LTF) doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées, faute de quoi il n'est pas possible de tenir compte dans le cadre du traitement du recours d'un état de fait qui diverge de celui de la décision attaquée (ATF 142 III 364 consid. 2.4 p. 368; 136 II 101 consid. 3 p. 104 et les références citées). Aussi celui qui omet de soulever, dans son recours auprès du Tribunal fédéral, le moyen tiré de l'art. 105 al. 2 LTF, ou qui ne le motive pas suffisamment, ne saurait-il reprocher ensuite à cette autorité, par la voie d'une demande de révision, de n'avoir pas rectifié d'office une constatation de fait de l'autorité précédente, quand bien même cette constatation reposerait sur une inadvertance manifeste de l'autorité précédente (cf. ATF 115 II 399 consid. 2a p. 400; arrêt 6F_3/2012 précité consid. 2.2). 
 
1.3. En outre, ce motif de révision ne peut être invoqué que si les faits qui n'ont pas été pris en considération sont " importants ", ce qui signifie qu'il doit s'agir de faits pertinents, susceptibles d'entraîner une décision différente de celle qui a été prise et plus favorable au requérant (cf. ATF 122 II 17 consid. 3 p. 18 et les références citées).  
 
1.4. Dans un premier moyen, le requérant reproche au Tribunal fédéral d'avoir omis une pièce démontrant que le paiement de l'achat des actions MUS acquises par PP.________ auprès de la République tchèque aurait été effectué depuis un compte d'une banque sise en République tchèque. Or, le Tribunal fédéral aurait retenu que l'argent provenait d'un compte en Suisse, fondant en cela la compétence des autorités suisses pour la poursuite de l'infraction d'escroquerie commise au préjudice de la République tchèque.  
 
1.4.1. Selon l'arrêt du Tribunal fédéral du 22 décembre 2017 (ci-après: arrêt attaqué), le TPF avait retenu qu'il était reproché au requérant et aux cinq autres prévenus d'avoir commis en qualité de coauteur une escroquerie au détriment de l'Etat tchèque, pour avoir amené, par une mise en scène astucieuse, dit Etat, par le biais du FNM, à vendre, qui plus est à vil prix, à PP.________ ses actions de la société MUS. La société suisse PP.________ avait payé à la République tchèque un prix de 650'000'000 CZK en contrepartie de la participation de 46,29% dans MUS détenue par cet Etat. L'enrichissement illégitime consistait en la différence entre la valeur réelle de cette participation (estimée à 2'891'462'441 CZK) et le prix effectivement payé (650'000'000 CZK), soit un montant de 2'241'462'441 CZK (valeur 97'336'600 fr. au 28 juillet 1999). Cet enrichissement illégitime s'était produit en Suisse, puisqu'il avait pris la forme d'une non-diminution de l'actif de la société PP.________, dont le siège était en Suisse. Il pouvait également être conçu comme la non-augmentation du passif sur la relation bancaire ouverte au nom de cette société auprès de la HHH.________, soit en Suisse (arrêt attaqué consid. 5.3.2).  
 
Dans le cadre de l'examen des griefs soulevés par le requérant en relation avec la compétence des autorités suisses pour poursuivre l'infraction d'escroquerie (arrêt attaqué consid. 5.3.3), le Tribunal fédéral a retenu que, selon le requérant, l'acte de disposition aurait consisté dans la transmission des actions MUS à PP.________. En l'absence de papiers valeurs physiques, celle-ci n'aurait eu lieu que par l'inscription dans le registre des actions de MUS et dans le SCP (c'est-à-dire le registre des valeurs tchèques), soit uniquement en République tchèque. Se référant à l'ATF 134 IV 210, le requérant prétendait que la non-diminution du passif de PP.________ ne serait qu'un avantage indirect du transfert des actions, transfert qui se serait déroulé en République tchèque. Le Tribunal fédéral a toutefois relevé que, conformément à ce qu'avait retenu le TPF, l'enrichissement consistait dans le fait que PP.________ avait acquis les actions MUS à vil prix. Ce n'était pas la simple acquisition des actions qui constituait son enrichissement mais bien le fait que cette acquisition avait eu lieu à vil prix. A cet égard, c'était à bon droit que le TPF avait estimé que l'enrichissement pouvait être appréhendé comme la non-diminution du patrimoine de PP.________, en particulier du montant sur le compte ayant servi au paiement du prix. En outre, contrairement à ce que prétendait le requérant, cet avantage patrimonial correspondait bien au désavantage patrimonial constituant le dommage, comme l'exigeait la jurisprudence (cf. ATF 134 IV 210 consid. 5.3 p. 213 s.). En effet, le TPF avait estimé que le dommage subi par la République tchèque consistait en la différence entre la valeur des actions MUS (46,29%) que la République tchèque via le FNM aurait conservées si la vente n'avait pas été conclue et leur prix de vente. Or, c'était bien cette différence de valeur qui n'avait pas été " débitée " du compte bancaire de PP.________. Dès lors que PP.________ était une société suisse dont le siège se trouvait dans ce pays et le paiement du prix s'était effectué à partir d'un compte en Suisse, le TPF pouvait considérer que le lieu de l'enrichissement se situait en Suisse. C'était par conséquent à juste titre que le TPF avait retenu sa compétence s'agissant de l'infraction d'escroquerie. 
 
1.4.2. S'il est certes exact que le versement à la République tchèque du prix d'achat des actions MUS de 650'000'000 CZK a été effectué depuis un compte dont PP.________ était titulaire auprès d'une banque tchèque, il n'en demeure pas moins que l'argent  provenait bien de ses comptes ouverts auprès de la HHH.________, en Suisse. En effet, il ressort du considérant de l'arrêt du TPF et des pièces cités par le requérant lui-même que l'argent ayant servi au paiement du prix d'achat des actions MUS provenait du sous-compte en CZK de PP.________ auprès de la HHH.________ (jugement du TPF p. 71; pièces n o 07-01-26-132 à 134). Ainsi, le 17 juin 1999, un premier montant de 8'000'000 CZK avait été transféré depuis le sous-compte en CZK de PP.________ auprès de la HHH.________ vers le compte dont cette société disposait auprès de la HHHHHH.________. Puis, le 13 août 1999, un montant de 643'000'000 CZK, soit la quasi-totalité du prix d'achat, avait été transféré du même sous-compte en CZK de PP.________ auprès de la HHH.________ vers son compte auprès de la banque tchèque. Le 19 août 1999, soit moins d'une semaine après le versement de 643'000'000 CZK, le prix de vente des actions MUS avait été payé à la République tchèque depuis le compte auprès de la HHHHHH.________. Au vu de ces éléments, le TPF et le Tribunal fédéral ont retenu que l'argent ayant servi au paiement du prix de vente provenait du compte de PP.________ auprès de la HHH.________, sis en Suisse, ce qui est exact. Ainsi, les pièces citées par le requérant ne changent rien à cet état de fait et le Tribunal fédéral n'a commis aucune inadvertance en ne s'y référant pas. Un motif de révision au sens de l'art. 121 let. d LTF fait par conséquent défaut. Pour le surplus, l'argumentation du requérant porte sur l'appréciation juridique des faits, ce qui ne constitue pas un motif de révision.  
 
1.5. Dans un second moyen, toujours en relation avec l'infraction d'escroquerie, le requérant se plaint de ce que le Tribunal fédéral a rejeté une partie de ses griefs portant sur l'établissement des faits en les déclarant irrecevables car appellatoires (arrêt attaqué consid. 17.1 et sous-considérants). Il tente ainsi de revenir sur les motifs retenus par le TPF comme ayant conduit l'Etat tchèque à vendre sa part des actions MUS. Le requérant ne fait toutefois que reprendre en grande partie les éléments factuels déjà exposés dans son recours en affirmant que s'il en avait été tenu compte il n'aurait pas été possible de retenir les faits tels qu'ils l'ont été par le TPF et le Tribunal fédéral. Conformément à la jurisprudence (cf. consid. 1.2 supra), celui qui ne motive pas suffisamment le moyen tiré de l'art. 105 al. 2 LTF ne saurait reprocher ensuite au Tribunal fédéral, par la voie d'une demande de révision, de n'avoir pas rectifié d'office une constatation de fait de l'autorité précédente, quand bien même cette constatation reposerait sur une inadvertance manifeste de l'autorité précédente. En d'autres termes, le requérant ne peut pas utiliser la voie de la révision pour discuter à nouveau des faits ou tenter de présenter à nouveau ses moyens alors que ceux-ci étaient insuffisants dans son recours. Le Tribunal fédéral n'a ainsi pas ignoré par inadvertance les faits présentés par le requérant dans son recours mais a estimé que son grief ne remplissait pas les exigences de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF. En outre, le requérant reproche au TPF et au Tribunal fédéral de s'être notamment référé à une pièce qui ne figurerait pas à la procédure pour retenir les motifs ayant conduit l'Etat tchèque à vendre sa part des actions MUS. L'" exposé introductif " en question figure toutefois au dossier (pièce n° 05-00-00-0817) comme cela ressort du jugement du TPF (consid. 2.5 p. 139 renvoyant au consid. 2.3.2/c p. 132-133) auquel se réfère l'arrêt du Tribunal fédéral (arrêt attaqué consid. 17.1.1). Au vu de ce qui précède, il n'y a pas eu d'inadvertance, si bien qu'un motif ne révision de l'art. 121 let. d LTF fait défaut.  
 
2.   
La demande de révision doit dès lors être rejetée sans qu'il y ait lieu de procéder à un échange d'écritures (cf. art. 127 LTF). Le requérant supporte les frais de la procédure. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
La demande de révision est rejetée. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 8000 fr., sont mis à la charge du requérant. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal pénal fédéral, Cour des affaires pénales. 
 
 
Lausanne, le 16 août 2018 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Denys 
 
La Greffière : Livet