Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet. Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
Zurück zur Einstiegsseite Drucken
Grössere Schrift
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
2C_1068/2013  
   
   
 
 
 
Arrêt du 17 avril 2014  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Seiler, Juge présidant, Donzallaz et Stadelmann. 
Greffier: M. Tissot-Daguette. 
 
Participants à la procédure 
A.________ GmbH, 
représentée par Me Raphaël Tinguely, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Service de l'emploi, Contrôle du marché du travail et protection des travailleurs, rue Caroline 11, 1014 Lausanne.  
 
Objet 
Travail au noir; sanction, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, du 11 octobre 2013. 
 
 
Faits:  
 
A.   
A.________ Sàrl (ci-après: la société) est une société à responsabilité limitée inscrite au registre du commerce du Canton de Fribourg, active dans le domaine de la construction. B.________ en est l'associé-gérant avec signature individuelle. En date du 2 novembre 2010, les inspecteurs du Service de l'emploi du canton de Vaud ont procédé à un contrôle sur le chantier du bâtiment " C.________ ", à U.________, sur lequel la société était engagée. A cette occasion, le Service de l'emploi a constaté la présence de D.________, originaire du Kosovo, qui ne bénéficiait d'aucune autorisation de travail et s'était légitimé au moyen d'un document établi au nom de E.________. Invitée par le Service de l'emploi à se déterminer à ce sujet par lettre du 30 novembre 2010, la société a fait valoir, par correspondance du 7 décembre 2010, n'avoir jamais employé le dénommé D.________. Le 14 décembre 2010, le Service de l'emploi a indiqué à la société qu'il ressortait de l'instruction du dossier que D.________ aurait été employé sans autorisation et lui a imparti un délai pour se déterminer sur ces faits. Le 20 décembre 2010, la société a nié avoir jamais employé l'intéressé. 
 
B.   
Par décision du 19 janvier 2011, le Service de l'emploi a sommé A.________ Sàrl de respecter les procédures applicables en cas d'engagement de main d'oeuvre étrangère, dit que toute demande d'admission de travailleurs étrangers par elle formulée serait rejetée pour une durée de trois mois, mis à sa charge un émolument administratif de 500 fr. et a indiqué la dénoncer aux autorités pénales. Par décision du 19 janvier 2011 également, le Service de l'emploi a mis à la charge de A.________ Sàrl les frais du contrôle s'élevant à 1'375 fr., correspondant au temps consacré au contrôle (13 h 45 à 100 fr. l'heure). Il ressort de la décision que, lors de l'instruction du dossier, des infractions au droit des étrangers ainsi qu'au droit des assurances sociales ont été constatées. Sur recours de la société, les décisions précitées ont été confirmées, par la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud, dans des arrêts du 14 juin 2012. 
 
 A.________ Sàrl, dans un acte unique, a contesté ces arrêts devant le Tribunal fédéral, lequel a, par arrêt du 19 novembre 2012 (causes 2C_778/2012 et 2C_779/2012), admis les recours, dans la mesure de leur recevabilité, annulé les arrêts cantonaux entrepris et renvoyé les causes au Tribunal cantonal pour nouvelles décisions au sens des considérants. Le Tribunal fédéral a, en résumé, jugé que l'instance précédente avait violé le droit d'être entendu de la société, le Tribunal cantonal ne pouvant pas tout à la fois retenir une présomption de fait contre A.________ Sàrl, mettre à la charge de celle-ci la preuve du fait négatif consistant à établir qu'elle n'était pas l'employeur de D.________ et la priver de tout moyen de preuve pour établir sa situation réelle. 
 
C.   
Le Tribunal cantonal a réouvert l'instruction des causes sous une référence unique PE.2012.0418 et procédé à une audience d'instruction le 19 mars 2013. A cette occasion, le Tribunal cantonal a entendu F.________, responsable du personnel de A.________ Sàrl, G.________, H.________ et I.________, tous employés de A.________ Sàrl, ainsi que J.________, inspecteur des chantiers auprès de la Fédération K.________. 
 
 Par arrêt du 11 octobre 2013, le Tribunal cantonal a rejeté les recours formés par A.________ Sàrl et confirmé les décisions rendues le 19 janvier 2011 par le Service de l'emploi. 
 
D.   
A.________ Sàrl forme un recours en matière de droit public à l'encontre de l'arrêt rendu le 11 octobre 2013 par le Tribunal cantonal. Outre l'effet suspensif, elle requiert principalement l'annulation de l'arrêt cantonal; subsidiairement, elle demande l'annulation de l'arrêt attaqué et le renvoi de la cause au Tribunal cantonal pour nouvelle décision au sens des considérants, le tout sous suite de frais et dépens. 
 
 Par ordonnance du 19 novembre 2013, le Tribunal fédéral a sursis à l'exécution de l'arrêt entrepris au titre de mesures superprovisoires. 
 
 Le Tribunal cantonal se réfère à l'arrêt attaqué et s'en remet à justice quant à la requête d'octroi d'effet suspensif. Le Service de l'emploi conclut au rejet du recours et s'en remet à l'appréciation du Tribunal fédéral quant à la requête d'octroi d'effet suspensif. 
 
 
Considérant en droit:  
 
1.   
L'arrêt attaqué est une décision finale (art. 90 LTF), rendue en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF) dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF) ne tombant pas sous le coup des exceptions de l'art. 83 LTF. La voie du recours en matière de droit public est donc en principe ouverte. Déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes prescrites (art. 42 LTF) par l'un des destinataires de l'acte entrepris qui a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification, de sorte qu'il faut lui reconnaître la qualité pour recourir (art. 89 al. 1 LTF), le recours est recevable. 
 
2.   
Aux termes de l'art. 91 al. 1 de la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers (LEtr, RS 142.20), avant d'engager un étranger, l'employeur doit s'assurer qu'il est autorisé à exercer une activité lucrative en Suisse en examinant son titre de séjour ou en se renseignant auprès des autorités compétentes. Le non respect de cette obligation expose l'employeur à la sanction prévue par l'art. 122 LEtr. L'arrêt attaqué a tenu pour établi que la recourante était l'employeur de D.________ et que ce dernier ne disposait d'aucune autorisation de travail. 
 
3.   
Invoquant l'art. 9 Cst., la recourante fait valoir que l'instance précédente a mal apprécié les preuves à disposition et méconnu les règles en matière de répartition du fardeau de la preuve. 
 
3.1. Bien qu'elle fasse référence au fardeau de la preuve, la recourante conteste en réalité le manque de preuve à disposition de l'instance précédente pour retenir un rapport de travail entre D.________ et elle-même. C'est donc uniquement sous l'angle de l'arbitraire dans l'appréciation des faits qu'il convient d'examiner ces griefs.  
 
3.2. L'appréciation des preuves est arbitraire lorsqu'elle est manifestement insoutenable, en contradiction avec le dossier, ou contraire au sens de la justice et de l'équité ou lorsque l'autorité ne tient pas compte, sans raison sérieuse, d'un élément propre à modifier la décision, se trompe sur le sens et la portée de celui-ci ou, se fondant sur les éléments recueillis, en tire des constatations insoutenables. Il appartient à la partie recourante de démontrer le caractère arbitraire par une argumentation répondant aux exigences accrues de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62; 133 II 249 consid. 1.4.3 p. 254 s.). En particulier, le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur des critiques de type appellatoire portant sur l'état de fait ou l'appréciation des preuves (ATF 139 II 404 consid. 10.1 p. 444 et les arrêts cités).  
 
3.3. Pour admettre l'existence d'un rapport de travail entre la recourante et D.________, le Tribunal cantonal s'est exclusivement fondé sur les déclarations de l'inspecteur des chantiers, que ce soit celles qu'il a formulées par écrit dans son rapport relatif au contrôle du 2 novembre 2010, ou celles qu'il a tenues en audience, le 19 mars 2013, ce que la recourante considère à juste titre comme arbitraire. En effet, lors de leurs auditions, les témoins ont été rendus attentifs aux conséquences d'un faux témoignage, passible d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus (art. 307 CP), de sorte que le Tribunal cantonal ne pouvait pas, sans tomber dans l'arbitraire, considérer que les déclarations effectuées par les employés de la recourante auditionnés ne présentaient qu'une valeur probante réduite, à tout le moins sans autres motifs concrets. L'instance précédente est aussi tombée dans l'arbitraire en considérant que les déclarations de l'inspecteur des chantiers suffisaient pour reconnaître l'existence d'un rapport de travail entre la recourante et D.________. Tout d'abord, l'inspecteur des chantiers s'est contredit en affirmant dans son rapport se fonder sur les déclarations de D.________ quant à l'activité de celui-ci, alors qu'en audience il est apparu qu'il n'avait jamais interrogé cette personne à ce sujet. Ensuite, il n'a été qu'un témoin indirect des informations données par D.________, n'ayant fait que reproduire des déclarations d'un collègue qui n'avait même pas vu D.________ travailler. Enfin, nonobstant le fait que le Tribunal fédéral a déjà considéré la force probante des déclarations de D.________ comme réduite (cf. arrêt 2C_778/2012 et 2C_779/2012 du 19 novembre 2012 consid. 3.4), force est de constater que l'instance précédente ne pouvait, sans tomber dans l'arbitraire, accorder plus de poids aux premières déclarations de D.________ faites dans une langue étrangère qu'à celles qui ont été formulées, le même jour, avec l'aide d'un interprète, dans le cadre d'un interrogatoire de police.  
 
 Partant, c'est de manière arbitraire que le Tribunal cantonal a apprécié les preuves en se fondant sur les seules affirmations contradictoires et incomplètes de l'inspecteur des chantiers. Pour cette raison, le recours doit être admis. 
 
3.4. Au vu du sort du recours, il n'est pas nécessaire d'examiner les autres griefs de la recourante.  
 
4.   
Compte tenu de ce qui précède, le recours en matière de droit public doit être admis et l'arrêt du 11 octobre 2013 rendu par le Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, annulé. La requête d'effet suspensif est sans objet. Il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure devant le Tribunal fédéral (art. 66 al. 4 LTF). Ayant obtenu gain de cause avec l'aide d'un mandataire professionnel, la recourante a droit à des dépens (art. 68 al. 1 et 2 LTF). Il y a lieu de renvoyer l'affaire au Tribunal cantonal pour qu'il statue à nouveau sur les frais et dépens de la procédure cantonale. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:  
 
1.   
Le recours est admis. Partant, l'arrêt attaqué est annulé. 
 
2.   
La cause est renvoyée à l'instance précédente pour qu'elle statue sur les frais et dépens de la procédure cantonale. 
 
3.   
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
4.   
Une indemnité de dépens, arrêtée à 3'000 fr., est allouée à la recourante à la charge du canton de Vaud. 
 
5.   
Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, au Service de l'emploi et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public. 
 
 
Lausanne, le 17 avril 2014 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Juge présidant: Seiler 
 
Le Greffier: Tissot-Daguette