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[AZA 0/2] 
5C.73/2001 
 
IIe COUR CIVILE 
**************************** 
 
17 juillet 2001 
 
Composition de la Cour: MM. les juges Bianchi, juge présidant, 
Raselli et Merkli. Greffier: M. Abrecht. 
 
_________ 
 
Dans la cause civile pendante 
entre 
 
1. A.________, 
2. B.________, 
3. C.________, 
défendeurs et recourants, tous trois représentés par Me Denis Oswald, avocat à Neuchâtel, 
 
et 
D.________ et dame D.________, demandeurs et intimés, représentés par Me Jean-Claude Schweizer, avocat à Neuchâtel; 
 
(servitude de passage) 
Vu les pièces du dossier d'où ressortent 
les f a i t s suivants: 
 
A.- Les demandeurs D.________ et dame D.________ sont copropriétaires chacun pour moitié de l'article ddd du cadastre de X.________, lequel est entouré d'autres biens-fonds et ne dispose pas d'un accès direct au domaine public. 
Cet accès s'effectue notamment au nord à travers l'article ccc, propriété d'un tiers. 
 
Les défendeurs A.________, B.________ et C.________ sont propriétaires en main commune des parcelles aaa, aab, aac et aad du cadastre de X.________, qu'ils ont acquises en 1995 de l'hoirie Y.________ et qui sont toutes contiguës à la parcelle ddd. 
 
B.- Lors de leur achat en 1995 par les défendeurs, les parcelles aaa, aab et aac étaient affectées à un usage d'habitation. En revanche, la parcelle aad, bien que située en zone constructible, était alors affectée à un usage agricole; il s'y trouvait un rural non habité, mais encore exploité, en ce sens qu'il servait de grange à foin ou à paille et comprenait un poulailler. 
 
Après l'achat des parcelles précitées, les défendeurs ont conçu un projet de modification des immeubles, prévoyant en particulier de construire trois villas mitoyennes sur l'article aad, à la place du rural qui a été démoli. 
Ils ont déposé des plans relatifs à ce projet. Malgré l'opposition des demandeurs, ces plans ont finalement été sanctionnés par la commune de X.________, décision qui a été confirmée par les instances de recours sur le plan administratif. 
 
C.- En août 1985 avait été inscrite, en régularisation de la situation existante, une servitude de passage à pied et pour véhicules automobiles permettant l'accès à la parcelle ddd à travers la parcelle ccc, et - en prolongement de ce chemin - à la parcelle aad à travers les parcelles ccc et ddd. Le droit de passage au profit de l'article aad a été conservé en 1985 parce qu'il donnait accès à une porte de la grange sise sur cet article, bien qu'en pratique l'accès s'effectuât par l'autre côté; ce droit de passage n'était d'ailleurs pratiquement plus utilisé depuis de nombreuses années. 
 
D.- Le 17 mars 1997, D.________ et dame D.________ ont ouvert action devant la première Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel contre A.________, B.________ et C.________. Ils demandaient notamment à la cour de constater que le projet de construction des défendeurs aggrave de manière illicite la servitude de passage dont jouit l'article aad à charge de l'article ddd, et d'interdire aux défendeurs, ou à leurs successeurs juridiques, d'utiliser ce droit de passage. 
 
Par jugement du 29 janvier 2001, la cour cantonale a notamment constaté que le projet de construction des défendeurs aggrave de manière illicite la servitude de passage dont jouit l'article aad à charge de l'article ddd (chiffre 4 du dispositif) et interdit aux défendeurs, ou à leurs successeurs juridiques, d'utiliser ce droit de passage (chiffre 5 du dispositif); elle a en outre condamné les défendeurs aux frais et dépens (chiffres 8 et 9 du dispositif). 
 
E.- Contre ce jugement, les défendeurs exercent un recours en réforme au Tribunal fédéral, en prenant les conclusions suivantes: 
 
- principalement, le chiffre 4 du dispositif du jugement attaqué est réformé en ce sens qu'il est constaté que le projet de construction des défendeurs n'aggrave pas de manière illicite la servitude de passage dont jouit l'article aad à charge de l'article ddd; 
 
- subsidiairement, le chiffre 5 du dispositif du jugement attaqué est réformé en ce sens qu'il est fait interdiction aux défendeurs d'utiliser ce droit de passage de façon plus intense que jusqu'à présent, les modalités de cette utilisation étant fixées si approprié; 
 
Les défendeurs concluent en outre en tout état de cause à ce que les demandeurs soient condamnés à la moitié des frais et dépens de première instance, ainsi qu'aux frais et dépens de la procédure devant le Tribunal fédéral. 
 
Les demandeurs proposent le rejet du recours. 
 
Considérant en droit : 
 
1.- Les droits contestés dans la dernière instance cantonale - à savoir les droits encore litigieux devant celle-ci immédiatement avant qu'elle ne statue (Poudret, Commentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire, vol. 
II, 1990, n. 1.5 ad art. 46 OJ) - dépassent largement, d'après les constatations faites par la cour cantonale conformément à l'art. 51 al. 1 let. a OJ, la valeur d'au moins 8'000 fr. dont l'art. 46 OJ fait dépendre la recevabilité du recours en réforme dans les affaires pécuniaires autres que celles visées à l'art. 45 OJ. Le recours est donc recevable sous cet angle. Déposé en temps utile contre une décision finale prise en dernière instance cantonale, il est également recevable du chef des art. 54 al. 1 et 48 al. 1 OJ. 
 
2.- La cour cantonale a considéré, sur la base des faits exposés sous lettre C ci-dessus, que la construction projetée de trois maisons mitoyennes, en lieu et place d'un rural partiellement désaffecté, entraînerait l'utilisation du droit de passage litigieux pour des besoins fondamentalement nouveaux, et cela quand bien même l'accès aux villas par des véhicules se ferait par le nord (recte: par le sud). 
La demande était dès lors bien fondée, au regard de l'art. 739 CC et de la jurisprudence y relative (cf. ATF 122 III 358; 117 II 536), en tant qu'elle visait à interdire aux défendeurs et à leurs successeurs juridiques d'utiliser le droit de passage litigieux (jugement attaqué, consid. 4 p. 6/7). 
 
 
 
3.- a) Les défendeurs reprochent à la cour cantonale d'avoir considéré à tort que la servitude litigieuse serait utilisée dans un but autre que celui que les parties avaient en vue lors de sa constitution. En effet, l'inscription au Registre foncier, qui détermine avant tout le contenu de la servitude, est celle d'un droit de passage à pied et pour véhicules automobiles. Lors de cette inscription en 1985, la parcelle aad était déjà en zone à bâtir, de sorte qu'il fallait à l'époque déjà compter avec la construction de maisons d'habitation et les besoins qui en découleraient. 
Au vu notamment de l'ATF 88 II 252, il serait erroné en l'espèce de considérer que la construction projetée de trois maisons mitoyennes modifiait le but originaire de la servitude. 
 
Toujours selon les défendeurs, même si l'on admettait que l'intérêt du fonds dominant et la charge du fonds servant sont maintenant différents de ce qu'ils étaient au moment de la constitution de la servitude, il n'y aurait pas en l'espèce aggravation de la servitude au sens de l'art. 739 CC. En effet, selon les constatations du jugement attaqué, l'accès aux trois maisons mitoyennes par des véhicules se ferait par le sud, et il n'y aurait au nord que des pelouses d'agrément. Les habitants des futurs immeubles ne seraient ainsi susceptibles d'emprunter le droit de passage qu'en rapport avec l'utilisation de leurs pelouses. La présente espèce ne serait ainsi pas comparable à celle jugée à l'ATF 117 II 536, mais bien à celle jugée à l'ATF 122 III 358
 
 
b) Selon l'art. 739 CC, les besoins nouveaux du fonds dominant n'entraînent aucune aggravation de la servitude. 
L'aggravation d'une servitude est inadmissible, selon cette disposition, si elle est importante; pour en juger, il faut mettre l'intérêt du fonds dominant et la charge du fonds servant au moment de la constitution de la servitude en balance avec les intérêts respectifs actuels (ATF 122 III 358 consid. 2c et les références citées). 
 
Toutefois, en vertu du principe dit de l'identité de la servitude, celle-ci ne peut pas être utilisée dans un but différent de celui pour lequel elle a été constituée, même s'il n'en résulte aucune aggravation pour le propriétaire du fonds servant (ATF 117 II 536 consid. 4b; 107 II 331 consid. 3; 100 II 105 consid. 3b; 94 II 145 consid. 7; 92 II 89 consid. 4 et les références citées; arrêt non publié du 26 mai 1992, reproduit in SJ 1992 p. 597, consid. 2). 
 
 
c) En l'espèce, la cour cantonale a constaté, d'une manière qui lie le Tribunal fédéral (art. 63 al. 2 OJ), que le droit de passage au profit de l'article aad - qui n'était au demeurant pratiquement plus utilisé depuis de nombreuses années - a été conservé en 1985 parce qu'il donnait accès à une porte de la grange sise sur cet article, bien qu'en pratique l'accès s'effectuât par l'autre côté (jugement attaqué, consid. 4). En revanche, contrairement à ce qu'affirment les défendeurs, le jugement attaqué ne contient aucune constatation selon laquelle l'article aad était déjà en zone à bâtir lors de l'inscription de la servitude en 1985. Sur la base des constatations de fait du jugement attaqué, il appert ainsi que la servitude litigieuse a été constituée en 1985 dans le seul but de continuer à permettre l'accès à une porte de la grange qui était alors sise sur la parcelle aad et qui a été démolie après que les défendeurs eurent acquis cette parcelle en 1995. 
 
La servitude en question ne saurait donc être utilisée dans le but, radicalement différent, de permettre l'accès aux jardins d'agrément des trois villas mitoyennes que les défendeurs ont le projet d'ériger sur la parcelle aad. La démolition du rural et la construction de trois villas mitoyennes sur la parcelle aad faisant disparaître les besoins originaires de ce bien-fonds (cf. ATF 117 II 536 consid. 5), le jugement attaqué, en tant qu'il interdit purement et simplement aux défendeurs, ou à leurs successeurs juridiques, d'utiliser le droit de passage litigieux, se révèle conforme au droit fédéral dans son résultat. 
 
4.- En définitive, le recours en réforme des défendeurs se révèle mal fondé en tant qu'il est recevable au regard de l'art. 55 al. 1 let. c, 3e phrase, OJ - qui prohibe les griefs contre les constatations de fait ainsi que les faits nouveaux - et ne peut dès lors qu'être rejeté dans cette même mesure, ce qui entraîne la confirmation du jugement attaqué. Les défendeurs, qui succombent, supporteront solidairement entre eux (cf. art. 156 al. 7 et 159 al. 5 OJ) les frais judiciaires (art. 156 al. 1 OJ) ainsi que ceux engagés par les demandeurs pour leur brève réponse au recours (art. 159 al. 3 OJ). 
 
Par ces motifs, 
 
le Tribunal fédéral : 
 
1. Rejette le recours dans la mesure où il est recevable et confirme le jugement attaqué. 
 
2. Met à la charge solidaire des défendeurs: 
a) un émolument judiciaire de 3'000 fr.; 
b) une indemnité de 2'000 fr. à verser aux demandeurs à titre de dépens. 
 
3. Communique le présent arrêt en copie aux mandataires des parties et à la première Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel. 
 
__________ 
Lausanne, le 17 juillet 2001 ABR/moh 
 
Au nom de la IIe Cour civile 
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE : 
Le juge présidant, 
 
Le Greffier,