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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_306/2023  
 
 
Arrêt du 17 juillet 2024  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Haag, Juge présidant, 
Chaix et Merz. 
Greffière : Mme Arn. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Marc-Etienne Favre, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
B.________ SA, 
représentée par Me Luc Pittet, avocat, 
intimée, 
 
Municipalité de Lussy-sur-Morges, 
route de Lully 2, 1167 Lussy-sur-Morges, 
représentée par Me Benoît Bovay, avocat, 
 
Objet 
Permis de construire, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, du 17 mai 2023 (AC.2022.0184). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Le territoire de la commune de Lussy-sur-Morges est régi par un plan des zones et par un règlement communal sur le plan d'extension et la police des constructions (ci-après: RPE), lequel est en vigueur depuis le 21 septembre 1994. La zone artisanale "En Blacon" - seule zone artisanale comprise sur le territoire communal -, régie par les art. 24 ss RPE, est située en périphérie du territoire communal, au Nord-Est. Entourée par des terrains en zone agricole et de l'aire forestière, elle est bordée au Nord par la route de Lully et à l'Ouest par le chemin de la Vignette. La zone artisanale "En Blacon" est composée de cinq biens-fonds issus d'une division parcellaire de la parcelle d'origine n° 33, soit les parcelles n os 33, 358, 441, 442 et 443, actuellement toutes bâties à l'exception de la parcelle n° 442, d'une surface de 1'954 m 2, propriété de la société B.________ SA.  
Le 16 janvier 2019, B.________ SA a déposé une demande de permis de construire sur la parcelle n° 442 un "immeuble de bureaux" d'une surface au sol de 567,46 m 2. Par décision du 30 septembre 2019, la Municipalité de Lussy-sur-Morges (ci-après: la municipalité) a refusé de délivrer le permis de construire. Cette décision a été confirmée par la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal (ci-après: cour cantonale ou Tribunal cantonal), par arrêt du 24 août 2020 (AC.2019.0341). La cour cantonale a considéré que le projet litigieux n'était pas conforme à la zone artisanale; au vu des caractéristiques des locaux et des aménagements prévus autour du bâtiment projeté, celui-ci était en réalité plutôt destiné à accueillir des activités du secteur tertiaire (bureaux ou locaux administratifs) et non des activités artisanales.  
 
B.  
B.________ SA a soumis à l'enquête publique du 12 février au 13 mars 2022 un nouveau projet de construction sur la parcelle n° 442 tendant à la "construction d'un immeuble pour espaces d'activités et logements". Le bâtiment projeté, en forme de "L", comprend un sous-sol, un rez-de-chaussée et un étage, ainsi qu'un parking souterrain de 21 places et des places extérieures. Le rez-de-chaussée est divisé en deux lots avec une hauteur au plafond de 3 m. Un escalier mène à l'étage pour chacun des lots, un ascenseur de service étant aussi prévu. Chaque lot dispose d'un accès livraison depuis le chemin de la Vignette. Il ressort de la demande de permis de construire que la surface bâtie est de 568 m 2 et la surface brute utile des planchers de 1'118 m 2, dont 294 m 2 affectés au logement, soit deux logements de 4 pièces prévus à l'étage; ces logements sont reliés par une porte aux surfaces d'activité sises au même niveau.  
Par décision du 11 mai 2022, la municipalité - après avoir reçu la synthèse de la Centrale des autorisations en matière de construction (CAMAC) du 11 avril 2022 - a délivré le permis de construire et levé les oppositions, dont celle de A.________ (propriétaire de la parcelle voisine n° 443). 
Par arrêt du 17 mai 2023, la cour cantonale a confirmé la décision de la municipalité et rejeté le recours de A.________. Elle a notamment considéré qu'il n'y avait pas lieu de procéder à un contrôle incident ou préjudiciel de la réglementation communale régissant la zone artisanale "En Blacon" et que les deux logements d'artisan projetés respectaient les exigences du règlement communal, en particulier l'art. 24 RPE. 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande principalement au Tribunal fédéral de réformer l'arrêt attaqué en ce sens que le recours cantonal est admis et l'autorisation de construire refusée. Subsidiairement, il conclut au renvoi de la cause à l'instance précédente pour complément d'instruction et nouvelle décision dans le sens des considérants. Il requiert également l'effet suspensif, accordé par ordonnance du 7 juillet 2023. 
Le Tribunal cantonal se réfère aux considérants de son arrêt, tout en formulant quelques observations. L'intimée et la municipalité concluent au rejet du recours, aux termes de leurs observations respectives. Le recourant réplique. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Dirigé contre une décision finale (art. 90 TF) prise en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF) dans le domaine du droit public des constructions (art. 82 let. a LTF), le recours est en principe recevable comme recours en matière de droit public (art. 82 ss LTF). En sa qualité de propriétaire voisin du projet litigieux, le recourant a la qualité pour recourir (art. 89 al. 1 let. a à c LTF). 
Il y a dès lors lieu d'entrer en matière. 
 
2.  
Le Tribunal fédéral statue en principe sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. Selon l'art. 97 al. 1 LTF, la partie recourante ne peut critiquer la constatation de faits qui importent pour le jugement de la cause que si ceux-ci ont été établis en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire, ce qu'il lui appartient de démontrer par une argumentation répondant aux exigences de l'art. 42 al. 2 LTF, respectivement de l'art. 106 al. 2 LTF. Le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur des critiques de type appellatoire portant sur l'état de fait ou sur l'appréciation des preuves (cf. ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2; 145 I 26 consid. 1.3; 142 III 364 consid. 2.4; 139 II 404 consid. 10.1). 
Dans les parties de son écriture intitulées "Rappel de quelques faits" et "Préambule - les zones d'activité dans la LAT", le recourant présente certains faits qui ne ressortent pas de l'arrêt attaqué ou qui s'en écartent. En lien avec ces faits, le recourant ne développe toutefois aucune argumentation remplissant les exigences de motivation précitées. Il en va ainsi notamment lorsqu'il affirme que la planification de la zone artisanale date de 1981; cet élément n'apparaît quoiqu'il en soit pas déterminant in casu (consid. 4.2 ci-dessous). Le recourant ne conteste par ailleurs pas que le RPE est en vigueur depuis le 21 septembre 1994. Dans ces circonstances, il n'y a pas lieu de s'écarter des faits établis par les juges cantonaux. 
 
3.  
Le recourant se plaint d'une constatation arbitraire des faits et d'une violation de son droit d'être entendu en lien avec le refus de la cour cantonale de procéder à l'interpellation de l'Association de la région Cossonay-Aubonne-Morges (ARCAM) qui coordonne la mise en place de la stratégie régionale de gestion des zones d'activités pour une partie du territoire du district de Morges. 
 
3.1. Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. comprend notamment le droit de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 148 II 73 consid. 7.3.1; 145 I 167 consid. 4.1). De jurisprudence constante, l'autorité peut renoncer à procéder à des mesures d'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1; 144 II 427 consid. 3.1.3). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle tire des conclusions insoutenables (ATF 148 IV 39 consid. 2.3.5; 143 IV 500 consid. 1.1).  
Dans ce contexte, la partie recourante est soumise aux exigences accrues de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 146 I 62 consid. 3). 
 
3.2. En l'espèce, le Tribunal cantonal a constaté que la mesure D12 - Zones d'activités - du Plan directeur cantonal (PDCn) prévoit certes que les organes de gestion des zones d'activités régionales émettent des préavis consultatifs sur les permis de construire. Il a précisé que ce principe avait toutefois été introduit dans le cadre de la seconde partie de l'adaptation 4ter du PDCn approuvée par le Conseil fédéral le 7 juillet 2022, soit postérieurement à l'octroi du permis de construire. Il n'y avait dès lors pas lieu, selon le Tribunal cantonal, de donner suite à la requête du recourant tendant à ce que l'ARCAM soit interpellée dès lors que cette nouvelle règle prescrite par la mesure D12 du PDCn n'était pas applicable au permis de construire litigieux.  
En l'occurrence, le recourant ne démontre pas le caractère arbitraire du refus de l'instance précédente d'interpeller l'ARCAM. Il se contente en effet d'affirmer que cette mesure d'instruction devait permettre de vérifier l'avancement des travaux relatifs à la stratégie de gestion des zones d'activités ainsi que la conformité du projet litigieux aux planifications envisagées et était donc "susceptible de modifier le résultat du jugement, par l'application de l'art. 47 LATC et l'effet anticipé négatif des plans d'affectation en cours d'élaboration". Le recourant affirme en outre de manière appellatoire, sans aucune référence légale ou jurisprudentielle, que la cour cantonale devait appliquer le PDCn en vigueur (en particulier la mesure D12) au jour de son jugement, en raison de l'effet dévolutif du recours cantonal. Ce faisant, la brève argumentation présentée par le recourant ne répond pas aux exigences accrues de motivation découlant des art. 42 al. 2 et 106 al. 2 LTF et la critique est donc irrecevable. 
Au demeurant, l'appréciation de l'instance précédente n'apparaît pas insoutenable, pour les motifs exposés ci-dessous (consid. 4.2). Par ailleurs, il ressort de l'arrêt cantonal - sans que cela ne soit contesté par le recourant - que le principe selon lequel les organes de gestion des zones d'activités régionales émettent des préavis consultatifs sur les permis de construire a été introduit dans le PDCn postérieurement à la délivrance du permis de construire litigieux. Or, de jurisprudence constante, l'autorité de recours doit appliquer le droit en vigueur au jour où l'autorité de première instance a statué (ATF 144 II 326 consid. 2.1.1). Dans ces conditions, c'est sans arbitraire que la cour cantonale a considéré que le permis de construire ne pouvait pas être remis en cause, en raison de l'absence d'un tel préavis consultatif. 
 
4.  
Le recourant reproche ensuite à la cour cantonale de ne pas avoir procédé à un contrôle incident de la planification communale (art. 21 al. 2 LAT) et se plaint simultanément d'une application arbitraire du PDCn et de l'art. 47 de la loi cantonale sur l'aménagement du territoire et les constructions du 4 décembre 1985 (LATC; RS/VD 700.11). Il conviendrait, selon le recourant, de supprimer la possibilité offerte par le règlement communal (art. 24 RPE) de réaliser des logements dans la zone artisanale. 
 
4.1.  
 
4.1.1. Selon la jurisprudence, le contrôle incident ou préjudiciel d'un plan d'affectation dans le cadre d'une procédure relative à un acte d'application est en principe exclu. Un tel contrôle est néanmoins admis, à titre exceptionnel, lorsque les conditions d'un réexamen des plans au sens notamment de l'art. 21 al. 2 LAT sont réunies (ATF 144 II 41 consid. 5.1; 121 II 317 consid. 12c). Aux termes de cette disposition, les plans d'affectation feront l'objet des adaptations nécessaires lorsque les circonstances se sont sensiblement modifiées. Pour apprécier l'évolution des circonstances et la nécessité d'adapter un plan d'affectation, une pesée des intérêts s'impose (ATF 148 II 417 consid. 3.2; 140 II 25 consid. 3.1). Selon la jurisprudence, l'entrée en vigueur le 1 er mai 2014 du nouvel art. 15 LAT - en particulier l'obligation de réduire les zones à bâtir ancrée à son al. 2 - ne constitue à elle seule pas une modification sensible des circonstances justifiant d'entrer en matière sur une demande de révision, respectivement de contrôle préjudiciel d'un plan d'affectation dans le cadre d'une procédure d'autorisation de construire. Il faut que s'y ajoutent d'autres circonstances. Parmi celles-ci se trouvent notamment la localisation de la parcelle par rapport à la zone à bâtir existante, son niveau d'équipement, ou encore l'ancienneté du plan (cf. ATF 148 II 417 consid. 3.3 et les arrêts cités; 144 II 41 consid. 5.2).  
 
4.1.2. Aux termes de l'art. 47 al. 1 LATC, la municipalité peut refuser un permis de construire lorsqu'un projet de construction, bien que conforme, compromet une modification de plan envisagée, non encore soumise à l'enquête publique.  
La nature potestative de l'art. 47 LATC confère, comme l'indique le Tribunal cantonal, un pouvoir d'appréciation important à l'autorité communale, que l'instance cantonale de recours ne contrôle qu'avec retenue (cf. art. 2 al. 3 LAT; arrêt 1C_212/2022 du 30 mars 2023 consid. 3.1.2). Dans la mesure où la décision communale repose sur une appréciation adéquate des circonstances pertinentes, l'autorité de recours doit la respecter. 
 
4.1.3. Quant à l'art. 24 RPE, il prévoit que la zone artisanale "En Blacon" doit permettre l'implantation de petites entreprises artisanales non gênantes pour le voisinage et la construction du logement de l'artisan, pour autant qu'il fasse partie intégrante du bâtiment d'exploitation (al. 1). Le volume utilisé par l'habitation ne doit représenter qu'une faible partie du volume total de la construction (al. 2).  
 
4.2. Le recourant soutient que l'ensemble des circonstances du cas d'espèce (l'ancienneté de la planification, la révision engagée du plan d'affectation communale [PACom], la tertiarisation de la zone artisanale, la pénurie de surfaces pour des activités dans la région) imposerait de procéder à un contrôle incident du plan et de supprimer la possibilité offerte par le règlement communal (art. 24 RPE) de réaliser des logements dans la zone artisanale. La réglementation actuelle en lien avec les logements en zone artisanale ne serait plus en phase avec la politique cantonale. Le recourant critique le fait que la révision de la planification communale, qui serait à un stade avancé, n'inclut pas le périmètre de la zone artisanale; le recourant affirme qu'il est nécessaire de procéder à une révision globale de toutes les zones à bâtir. Il ne conteste toutefois pas en soi l'affectation en zone artisanale de la parcelle en cause.  
En l'occurrence, il ressort de l'arrêt cantonal que la Commune de Lussy-sur-Morges fait partie de l'ARCAM qui coordonne actuellement l'établissement d'une stratégie régionale de gestion des zones d'activités (SRGZA). Dès lors, on ne saurait reprocher à la municipalité d'avoir décidé d'exclure la zone artisanale "En Blacon" du projet de révision du PACom mis à l'enquête publique, et d'attendre le résultat de l'examen de l'ARCAM. Cette dissociation est d'autant moins critiquable qu'il s'agit de types de zones différents et de secteurs géographiquement bien distincts. En particulier, les besoins en zones d'activités doivent être établis sur la base de critères différents de ceux prévalant en matière de zone d'habitation: pour mettre à disposition des surfaces et des locaux demandés par l'économie, il faut en particulier faire appel à des critères qualitatifs et tenir compte d'une vue d'ensemble régionale (cf. arrêt 1C_308/2017 du 4 juillet 2018 consid. 3.2.2; Directives techniques sur les zones à bâtir, approuvées par le DETEC le 17 mars 2014, ch. 4 ss p. 10 ss; cf. également FRANZISKA WASER, L'obligation de réduire la zone à bâtir surdimensionnée au niveau de la planification d'affectation, in Droit de la construction 2020, p. 58). 
La révision actuelle du PACom ne constitue donc pas, quoi qu'en pense le recourant, une modification des circonstances justifiant un contrôle préjudiciel de la zone artisanale. Comme relevé par la cour cantonale, le fait que la commune doive redimensionner ses zones à bâtir en application de la mesure A11 du PDCn - qui concerne les zones d'habitation et mixtes et non pas les zones d'activités - n'imposait pas à la municipalité de refuser le permis de construire. Comme rappelé ci-dessus, le dimensionnement intervient en principe séparément par type de zone à bâtir en raison de la diversité de leurs affectations (cf. FRANZISKA WASER, op. cit., p. 58). Contrairement à ce que pense le recourant, cette situation de surdimensionnement de la zone d'habitation et mixte n'empêchait pas la municipalité d'octroyer un permis de construire dans le cas très particulier du logement de l'artisan dans une zone artisanale. La cour cantonale pouvait considérer qu'il s'agissait d'une situation différente de celle des logements qui pourraient être érigés dans une zone à bâtir affectée principalement à l'habitation (comme une zone villa) ou dans une zone mixte (comme une zone village), qui étaient concernés en premier lieu par l'exigence de réduction des zones à bâtir surdimensionnées (art. 15 al. 2 LAT) et par la mesure A11 du PDCn. 
De surcroît, le recourant n'avance aucun élément décisif qui justifierait de s'écarter de l'appréciation de l'instance précédente selon laquelle il n'y a aucune certitude que l'examen de la zone artisanale "En Blacon" aboutira à la modification de la réglementation de cette zone dans le sens de la suppression du droit de réaliser des logements. S'il ressort certes de l'examen préalable du projet de PACom effectué par la Direction générale du territoire et du logement (DGTL) du 13 décembre 2021 que l'intention de la municipalité était alors de supprimer dans la réglementation future de la zone artisanale la possibilité de réaliser des logements, force est de constater que la municipalité n'a pas fait usage de l'art. 47 LATC pour refuser le permis de construire litigieux et qu'elle a de surcroît dans l'intervalle choisi de dissocier le traitement de la zone artisanale de celui des autres zones du PACom dans l'attente des études en cours de l'ARCAM. La faculté de réaliser des logements de fonction n'entre par ailleurs pas nécessairement en conflit avec l'exigence relative à une utilisation rationnelle des zones d'activité et avec l'objectif consistant à garantir une offre en zones d'activités régionales et locales adaptées aux besoins de l'économie (cf. art. 30a al. 2 OAT et Mesure D12 du PDCn). Il en va ainsi dans le cas d'espèce dès lors que, selon les constatations de l'instance précédente - dont il n'y a pas lieu de s'écarter (cf. consid. 2) -, le volume des logements projetés correspondait à environ 10 % du volume total. La cour cantonale pouvait ainsi sans arbitraire considérer que le volume utilisé pour l'habitation ne représentait qu'une faible partie du volume total de la construction, conformément à l'exigence de l'art. 24 RPE. 
Enfin, pour répondre à la critique du recourant concernant la crainte d'une tertiarisation de la zone artisanale, il sied de relever que la cour cantonale a constaté - sans que cela ne soit contesté par le recourant -, que le nouveau projet présenté par la constructrice était, au vu de ses caractéristiques, susceptible d'accueillir des activités artisanales, soit des activités en rapport avec la production, la fabrication ou la transformation de biens matériels conforme à la zone artisanale; contrairement au précédent projet, il n'était pas destiné à accueillir des activités du secteur tertiaire (bureaux ou locaux administratifs). 
 
4.3. Il apparaît dès lors que les conditions d'un examen préjudiciel au sens de l'art. 21 al. 2 LAT ne sont pas réunies en l'espèce, de sorte que le grief du recourant doit être rejeté.  
Quant à la critique du recourant tirée d'une application arbitraire du droit cantonal, en particulier de l'art. 47 al. 1 LATC, elle ne satisfait pas aux exigences accrues de motivation en matière d'application arbitraire du droit cantonal (cf. ATF 145 II 32 consid. 5.1). Au demeurant, compte tenu des motifs exposés ci-dessus (consid 4.2), la critique aurait dû être rejetée. 
 
5.  
Sur le vu de ce qui précède, le recours en matière de droit public est rejeté dans la mesure où il est recevable, aux frais du recourant qui succombe (art. 66 al. 4 LTF). Le recourant versera en outre une indemnité de dépens à l'intimée qui obtient gain de cause avec l'assistance d'un avocat (art. 68 al. 1 et 2 LTF). Il n'est pas alloué de dépens à la commune (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 fr. sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Une indemnité de 3'000 fr. est allouée à l'intimée B.________ SA à titre de dépens, à la charge du recourant. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties, à la Municipalité de Lussy-sur-Morges et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public. 
 
 
Lausanne, le 17 juillet 2024 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Juge présidant : Haag 
 
La Greffière : Arn