Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
6B_271/2024, 6B_316/2024
Arrêt du 17 septembre 2024
Ire Cour de droit pénal
Composition
MM. les Juges fédéraux
Denys, Juge présidant, Muschietti et von Felten.
Greffière : Mme Corti.
Participants à la procédure
6B_271/2024
A.A.________,
représentée par Me Aba Neeman, avocat,
recourante,
et
6B_316/2024
B.A.________,
recourant,
contre
1. Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD,
2. D.D.________,
3. E.D.________,
4. F.D.________,
tous les trois représentés par Me Jérôme Bénédict, avocat,
intimés.
Objet
6B_271/2024
Tentative de contrainte; présomption d'innocence;
frais; indemnités,
6B_316/2024
Tentative de contrainte; présomption d'innocence;
frais; indemnités,
recours contre le jugement de la Cour d'appel
pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud,
du 4 décembre 2023 (n° 445 PE21.011550-EBJ/SSM).
Faits :
A.
Par jugement du 31 mai 2023, le Tribunal de police de l'arrondissement de l'Est vaudois a reconnu A.A.________, C.A.________ et B.A.________ (coprévenus) coupables de tentative de contrainte. Pour ce qui concerne A.A.________, le tribunal a révoqué le sursis qui lui avait été accordé le 22 novembre 2019 et l'a condamnée à une peine pécuniaire d'ensemble, et partiellement complémentaire à celle du 22 novembre 2019, de 180 jours-amende à 30 fr. le jour. Pour ce qui concerne B.A.________, le tribunal l'a condamné à une peine pécuniaire de 60 jours-amende à 30 fr. le jour. Le tribunal a également dit que les trois coprévenus sont les débiteurs solidaires de D.D.________, F.D.________ et E.D.________ et leur doivent immédiat paiement de 11'078 fr. 35 à titre de juste indemnité au sens de l'art. 433 CPP et a mis les frais de la cause, par 1'090 fr. chacun, à la charge de A.A.________ et de B.A.________ et par 545 fr. à la charge de C.A.________.
B.
Par jugement du 4 décembre 2023, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois a partiellement admis l'appel de A.A.________ et de B.A.________ en ce sens qu'elle a réduit la peine, pour la première, à 110 jours-amende à 30 fr. le jour et, pour le second, à 30 jours-amende à 30 fr. le jour. Elle a, pour le surplus, confirmé le jugement du 31 mai 2023 concernant les frais de la procédure de première instance ainsi que l'indemnité due aux intimés au sens de l'art. 433 CPP. Elle a également alloué aux intimés une indemnité réduite pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure d'appel d'un montant de 2'283 fr. 25 à la charge de B.A.________ et de A.A.________, solidairement entre eux, et mis les frais d'appel, par 2'790 fr., à la charge de ces derniers par un tiers chacun, le solde étant laissé à la charge de l'État.
Les faits pertinents qui ressortent du jugement cantonal sont les suivants:
B.a. Dès le 1er juillet 2011, D.D.________ et son époux G.D.________ (décédé le 30 novembre 2020) ont loué à A.A.________ et à sa fille, C.A.________, des locaux commerciaux sis chemin de U.________ à V.________, en vue d'y exploiter un restaurant sous la raison sociale H.________ Sàrl.
B.b. En été 2011, A.A.________ et C.A.________ ont entamé des travaux de réaménagement desdits locaux - notamment effectués par la société A.________ Sàrl, dont A.A.________ est l'associée gérante et son époux, B.A.________, l'associé gérant président - sans l'accord préalable de D.D.________ et de G.D.________.
B.c. Le 17 novembre 2012, B.A.________ a initié de nouveaux travaux sans l'accord préalable de D.D.________ et de G.D.________. Il a ainsi détruit une partie de la façade du bâtiment afin de créer une seconde issue de secours, condition à l'obtention d'une licence d'exploitation pour plus de 50 personnes, laquelle avait été requise par A.A.________ et C.A.________, respectivement H.________ Sàrl. Dits travaux ont été interrompus suite à l'intervention de la police, alertée par G.D.________. Le 19 novembre 2012, B.A.________ les a repris en présence de son épouse et de sa fille, faisant ainsi fi des oppositions des propriétaires. Dits travaux ont encore une fois été interrompus. Divers litiges d'ordre civil et pénal ont par la suite opposé D.D.________ et G.D.________ à B.A.________, A.A.________ et C.A.________. Une requête en indemnité a notamment été adressée au Tribunal des baux du canton de Vaud par H.________ Sàrl, le 27 août 2019, au titre de la plus-value qui aurait été apportée aux locaux précités à la suite des travaux effectués en 2011, dite indemnité ayant été estimée à 100'000 francs.
B.d. À W.________, par réquisition de poursuite du 21 novembre 2019, A.A.________ et C.A.________, en leur qualité respective d'associée gérante présidente et d'associée gérante de H.________ Sàrl en liquidation, ont fait notifier, le 3 janvier 2020, par l'Office des poursuites du district de la Riviera Pays d'Enhaut, à D.D.________ et à G.D.________, des commandements de payer d'un montant de 177'435 fr. 75 (avec intérêts au taux de 5 % l'an, dès le 5 août 2016), au motif de " travaux de restructuration dans l'établissement de 2011 à 2020".
D.D.________ et G.D.________ ont formé opposition totale le 6 janvier 2020. Le 7 février 2020, les poursuites en question ont été radiées par l'office des poursuites précité, la masse en faillite de H.________ Sàrl, représentée par l'Office des faillites de l'arrondissement de l'Est vaudois, les ayant retirées.
B.e. À W.________, B.A.________ et A.A.________, en leur qualité respective d'associé gérant président et d'associée gérante de A.________ Sàrl, ont fait notifier, le 11 décembre 2020, par l'Office des poursuites du district de la Riviera Pays-d'Enhaut, à D.D.________ et à feu G.D.________, des commandements de payer injustifiés d'un montant de 177'435 fr. 75 (avec intérêts au taux de 5 % l'an, dès le 11 novembre 2018), au prétendu motif de "travaux de restructuration".
D.D.________ a formé opposition totale le 11 décembre 2020 et a déposé plainte le 8 janvier 2021.
B.f. À W.________, par réquisition de poursuite du 8 avril 2021, B.A.________ et A.A.________, en leur qualité respective d'associé gérant président et d'associée gérante de A.________ Sàrl, ont fait notifier, le 5 mai 2021, par l'Office des poursuites du district de la Riviera-Pays-d'Enhaut, à D.D.________ (héritière de feu G.D.________) ainsi qu'à F.D.________ et à E.D.________ (enfants de D.D.________ et de feu G.D.________) des commandements de payer injustifiés d'un montant de 177'435 fr. 75 (avec intérêts au taux de 5 % l'an, dès le 11 novembre 2018), au prétendu motif de " travaux de restructuration ".
D.D.________, F.D.________ et E.D.________ ont formé opposition totale le 5 mai 2021. Ils ont déposé plainte le 7 mai 2021.
B.g. À W.________, par réquisition de poursuite du 2 juin 2022, alors même que la présente procédure était en cours, B.A.________ et A.A.________ ont fait notifier, le 20 juin 2022, par l'Office des poursuites du district de la Riviera Pays d'Enhaut, à D.D.________, un commandement de payer injustifié d'un montant de 177'435 fr. 75 (avec intérêts au taux de 5 % l'an, dès le 11 novembre 2018), au prétendu motif de " travaux de restructuration ".
D.D.________ a formé opposition le 20 juin 2022 et a déposé plainte le 21 juin 2022.
B.h. A.A.________ est née en 1958 en Italie, pays dont elle est originaire et où elle a effectué sa scolarité obligatoire. Elle n'a aucun titre de formation professionnelle. Elle est venue en Suisse dans les années 1980 et séjourne dans notre pays au bénéfice d'une autorisation d'établissement de type C. Elle exploite actuellement, en qualité d'associée-gérante, les sociétés A.________ Sàrl et A.________ Construction Sàrl. Mariée au coprévenu, B.A.________, elle vit avec lui et leur fille, C.A.________, également coprévenue, dans un appartement situé dans un immeuble dont elle est copropriétaire avec son mari.
B.i. Le casier judiciaire de A.A.________ contient les inscriptions suivantes:
- 11 juin 2015, peine pécuniaire de 30 jours-amende à 30 fr. le jour, avec sursis pendant 2 ans, prononcée par la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois pour dommages à la propriété;
- 22 novembre 2019, peine pécuniaire de 80 jours-amende à 30 fr. le jour, avec sursis pendant 3 ans, et amende de 480 fr., prononcées par le Tribunal de police de l'arrondissement de l'Est vaudois pour dénonciation calomnieuse.
B.j. B.A.________ est né en 1957 en Italie, pays dont il est originaire et dans lequel il a été scolarisé jusqu'en 5ème année. || n'a pas de formation professionnelle. Il est venu en Suisse à l'âge de 18 ans et séjourne toujours dans notre pays au bénéfice d'une autorisation d'établissement de type C. Marié à la coprévenue, A.A.________, il vit avec elle et leur fille, C.A.________, également coprévenue, dans un appartement situé dans un immeuble dont il est copropriétaire avec son épouse.
B.k. Le casier judiciaire de B.A.________ contient les inscriptions suivantes:
- 12 janvier 2015, peine pécuniaire de 20 jours-amende à 50 fr. le jour avec sursis pendant 2 ans (révoqué le 28 septembre 2016) et amende de 300 fr., prononcées par le Ministère public de l'arrondissement de l'Est vaudois, pour menaces;
- 11 juin 2015, peine pécuniaire de 30 jours-amende à 30 fr. le jour, avec sursis pendant 2 ans (révoqué le 28 septembre 2016), prononcée par la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois, pour dommages à la propriété;
- 28 septembre 2016, peine pécuniaire de 30 jours-amende à 30 fr. le jour, prononcée par le Ministère public de l'arrondissement de l'Est vaudois, pour menaces.
C.
C.a. A.A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre le jugement du 4 décembre 2023. Elle conclut, principalement, avec suite de frais et dépens, à la réforme du jugement précité en ce sens qu'elle est libérée du chef d'infraction de tentative de contrainte, que le sursis accordé le 22 novembre 2019 n'est pas révoqué et qu'elle est libérée de toute peine et sanction. Elle conclut également, pour les procédures de première et deuxième instances, à ce que les frais de la cause sont laissés à la charge de l'État, à ce qu'aucune indemnité au sens de l'art. 433 CPP n'est due aux intimés et à ce qu'une indemnité lui est due au sens de l'art. 429 CPP. Subsidiairement, elle conclut à l'annulation du jugement attaqué et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
Invités à se déterminer sur le recours, la cour cantonale et le ministère public y ont renoncé, se référant à la décision attaquée, tandis que les intimés ont conclu au rejet du recours.
A.A.________ a répliqué et persisté dans les conclusions prises dans son recours.
C.b. B.A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre le jugement du 4 décembre 2023. Il conclut, avec suite de frais, à la réforme du jugement précité en ce sens qu'il est libéré du chef d'infraction de tentative de contrainte et de toute peine. Il conclut également à ce que les frais de la cause sont laissés à la charge de l'État et à ce qu'aucune indemnité au sens de l'art. 433 CPP n'est due aux intimés.
Invités à se déterminer sur le recours, le ministère public y a renoncé, se référant à la décision attaquée, la cour cantonale n'a pas déposé de déterminations dans le délai fixé, tandis que les intimés ont conclu au rejet du recours.
B.A.________ n'a pas répliqué.
Considérant en droit :
1.
Les deux recours ont pour objet la même décision. Ils ont trait au même complexe de faits et portent dans une large mesure sur les mêmes questions de droit. Il y a lieu de joindre les causes et de les traiter dans un seul arrêt (art. 24 al. 2 PCF et 71 LTF).
2.
Les recourants contestent l'infraction de tentative de contrainte retenue à leur encontre. Ils invoquent aussi une violation du principe de la présomption d'innocence à cet égard.
2.1.
2.1.1. Conformément à l'art. 181 CP, se rend coupable de contrainte celui qui, en usant de violence envers une personne ou en la menaçant d'un dommage sérieux, ou en l'entravant de quelque autre manière dans sa liberté d'action, l'oblige à faire, à ne pas faire ou à laisser faire un acte.
La menace d'un dommage sérieux est un moyen de pression psychologique consistant à annoncer un dommage futur dont la réalisation est présentée comme dépendante de la volonté de l'auteur, sans toutefois qu'il soit nécessaire que cette dépendance soit effective (ATF 117 IV 445 consid. 2b; 106 IV 125 consid. 2a) ni que l'auteur ait réellement la volonté de réaliser sa menace (ATF 122 IV 322 consid. 1a; 105 IV 120 consid. 2a). La loi exige un dommage sérieux, c'est-à-dire que la perspective de l'inconvénient présenté comme dépendant de la volonté de l'auteur soit propre à entraver le destinataire dans sa liberté de décision ou d'action. La question doit être tranchée en fonction de critères objectifs, en se plaçant du point de vue d'une personne de sensibilité moyenne (ATF 122 IV 322 consid. 1a; 120 IV 17 consid. 2a/aa). Il peut également y avoir contrainte lorsque l'auteur entrave sa victime " de quelque autre manière " dans sa liberté d'action. Cette formule générale doit être interprétée de manière restrictive. N'importe quelle pression de peu d'importance ne suffit pas. Il faut que le moyen de contrainte utilisé soit, comme pour la violence ou la menace d'un dommage sérieux, propre à impressionner une personne de sensibilité moyenne et à l'entraver d'une manière substantielle dans sa liberté de décision ou d'action. Il s'agit donc de moyens de contrainte qui, par leur intensité et leur effet, sont analogues à ceux qui sont cités expressément par la loi (ATF 141 IV 437 consid. 3.2.1; 137 IV 326 consid. 3.3.1; arrêts 6B_1407/2021 du 7 novembre 2022 consid. 2.1; 6B_637/2022 du 29 septembre 2022 consid. 5.1.2; 6B_1396/2021 du 28 juin 2022 consid. 3.1).
Selon la jurisprudence, la contrainte n'est contraire au droit que si elle est illicite, soit parce que le moyen utilisé ou le but poursuivi est illicite, soit parce que le moyen est disproportionné pour atteindre le but visé, soit encore parce qu'un moyen conforme au droit utilisé pour atteindre un but légitime constitue, au vu des circonstances, un moyen de pression abusif ou contraire aux moeurs (ATF 141 IV 437 consid. 3.2.1; 137 IV 326 consid. 3.3.1; 134 IV 216 consid. 4.1). Pour une personne de sensibilité moyenne, faire l'objet d'un commandement de payer pour une importante somme d'argent est, à l'instar d'une plainte pénale, une source de tourments et de poids psychologique, en raison des inconvénients découlant de la procédure de poursuite elle-même et de la perspective de devoir peut-être payer le montant en question. Un tel commandement de payer est ainsi propre à inciter une personne de sensibilité moyenne à céder à la pression subie, donc à l'entraver d'une manière substantielle dans sa liberté de décision ou d' action (arrêts 6B_637/2022 précité consid. 5.1.3; 6B_1396/2021 précité consid. 3.1; 6B_458/2021 du 3 mars 2022 consid. 1.4.1). Certes, faire notifier un commandement de payer lorsqu'on est fondé à réclamer une somme est licite. En revanche, utiliser un tel procédé comme moyen de pression est clairement abusif, donc illicite (ATF 115 III 18 consid. 3; arrêts 6B_637/2022 précité consid. 5.1.3; 6B_1396/2021 précité consid. 3.1; 6B_1116/2021 du 22 juin 2022 consid. 2.1). Autrement dit, il y a une contrainte illicite lorsque la poursuite est abusive (arrêts 6B_1396/2021 précité consid. 3.1; 6B_28/2021 du 29 avril 2021 consid. 2.3; 6B_979/2018 du 21 mars 2019 consid. 1.2.5).
2.1.2. Sur le plan subjectif, il faut que l'auteur ait agi intentionnellement, c'est-à-dire qu'il ait voulu contraindre la victime à adopter le comportement visé en étant conscient de l'illicéité de son propre comportement; le dol éventuel suffit (ATF 120 IV 17 consid. 2c; arrêt 6B_458/2021 précité consid. 1.4.1).
2.1.3. Lorsque la victime ne se laisse pas intimider et n'adopte pas le comportement voulu par l'auteur, ce dernier est punissable de tentative de contrainte (art. 22 al. 1 CP; ATF 129 IV 262; 106 IV 125 consid. 2b). Pour qu'il y ait tentative de contrainte, il faut que l'auteur ait agi avec conscience et volonté, soit au moins qu'il ait accepté l'éventualité que le procédé illicite employé entrave le destinataire dans sa liberté de décision (ATF 120 IV 17 consid. 2c).
2.1.4. Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle les faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'elles n'aient été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, à savoir, pour l'essentiel, de façon arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation mais aussi dans son résultat (ATF 148 IV 409 consid. 2.2; 146 IV 88 consid. 1.3.1; sur la notion d'arbitraire, voir ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2 et les arrêts cités). Le Tribunal fédéral n'entre en matière sur les moyens fondés sur la violation de droits fondamentaux, dont l'interdiction de l'arbitraire, que s'ils ont été invoqués et motivés de manière précise (art. 106 al. 2 LTF). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 148 IV 409 consid. 2.2; 147 IV 73 consid. 4.1.2 et les arrêts cités).
La présomption d'innocence, garantie par les art. 10 CPP, 32 al. 1 Cst., 14 par. 2 Pacte ONU II et 6 par. 2 CEDH, ainsi que son corollaire, le principe in dubio pro reo, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 145 IV 154 consid. 1.1; 144 IV 345 consid. 2.2.3.1; 127 I 38 consid. 2a). En tant que règle sur le fardeau de la preuve, elle signifie, au stade du jugement, que le fardeau de la preuve incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. Comme règle d'appréciation des preuves (sur la portée et le sens précis de la règle sous cet angle, cf. ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3), la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective. Lorsque l'appréciation des preuves et la constatation des faits sont critiquées en référence au principe in dubio pro reo, celui-ci n'a pas de portée plus large que l'interdiction de l'arbitraire (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1; 144 IV 345 consid. 2.2.3.3).
2.2. La cour cantonale a tout d'abord indiqué que, sans préjuger du bien-fondé des prétentions dont se prévalaient les prévenus, il résultait de façon évidente des éléments au dossier que les travaux en question ne pouvaient qu'éventuellement donner lieu à une créance en faveur de H.________ Sàrl - locataire -, à titre de plus-value. Il n'était en tous les cas aucunement établi que D.D.________ et feu son époux auraient commandé les travaux en question, et il résultait du reste de l'état de fait retenu dans l'arrêt du Tribunal fédéral du 24 octobre 2018 que tel n'était pas le cas, les travaux ayant seulement été tolérés. Cela étant, dans la mesure où une requête en indemnité fondée sur le droit du bail avait été déposée en août 2019 - de même qu'une procédure de mainlevée jusqu'au Tribunal fédéral -, on n'aurait su considérer que le premier commandement de payer que la recourante et C.A.________ avaient fait notifier à D.D.________ et feu son époux en leur qualité d'associées gérantes de H.________ Sàrl en liquidation aurait été constitutif d'une tentative de contrainte, quand bien même le montant dudit commandement de payer était supérieur à ce qui était réclamé en procédure civile. Le défenseur de la recourante avait, à cet égard, plaidé de façon convaincante à l'audience d'appel qu'il s'agissait d'une conclusion provisoire dès lors qu'une expertise avait été demandée et, il résultait en outre de la requête en indemnité que la plus-value était, en l'état, estimée à 100'000 fr. " sous réserve de modification ". La cour cantonale a ainsi conclu que le premier commandement de payer notifié aux intimés (cf.
supra consid. B.d en fait) ne fondait pas - en soi - une tentative de contrainte et que C.A.________, concernée par ce seul cas, devait être libérée du chef d'accusation de tentative de contrainte.
La cour cantonale a ensuite considéré qu'il résultait de façon incontestable du dossier, et plus particulièrement de leurs différentes auditions successives jusqu'encore à l'audience d'appel, que les prévenus étaient intimement convaincus que les montants qu'ils avaient engagés dans les travaux en cause leur étaient dus, lesdits travaux ayant été réalisés et les propriétaires en ayant finalement profité. Pour ce motif et au bénéfice d'un léger doute, on ne pouvait pas exclure que les recourants eussent agi de bonne foi lorsqu'ils avaient fait notifier deux commandements de payer subséquents les 11 décembre 2020 et 5 mai 2021. Certes, lesdits commandements de payer avaient été déposés au nom de A.________ Sàrl, qui ne pouvait pas être créancière, puisqu'elle n'était pas locataire des locaux loués par les intimés et qu'il n'était pas établi que ceux-ci auraient commandé les travaux litigieux. Cela étant, il résultait du dossier que les recourants n'avaient aucune formation juridique ni n'étaient rompus aux affaires, d'une part, et qu'il existait une confusion de fait entre leurs sociétés, d'autre part. En effet, il apparaissait que si c'était formellement H.________ Sàrl qui louait les locaux dans le but d'exploiter le restaurant, et qui avait probablement commandé les travaux, c'était la société A.________ Sàrl qui avait procédé auxdits travaux ou qui les avait fait sous-traiter. À cela s'ajoutait qu'à l'époque, il existait une relation de proximité et, semble-t-il, de confiance entre les prévenus et les intimés qui avait pu conforter les premiers dans cette confusion dans le cadre de discussions entre eux. Quoi qu'il en soit, il ne pouvait pas être exclu que les recourants eussent agi de bonne foi et en parfaite méconnaissance des principes juridiques applicables lors du dépôt du deuxième commandement de payer (faisant suite à la liquidation de H.________ Sàrl) et probablement encore lors du dépôt du troisième (faisant suite au décès de G.D.________ et qui avait donc été dirigé contre ses héritiers), étant encore une fois rappelé qu'il ne faisait aucun doute que les intéressés étaient convaincus, comme ils le sont encore à ce jour, - peu importe que ce soit à tort ou à raison - que les montants en cause leurs étaient dus. Ces deux commandements de payer n'étaient ainsi pas non plus - en soi - constitutifs de tentative de contrainte (cf.
supra consid. B.e et B.f en fait).
L a cour cantonale a enfin retenu que les recourants ne pouvaient pas soutenir qu'ils avaient encore agi de bonne foi lors de la notification d'un nouveau commandement de payer le 2 juin 2022, alors que la présente procédure était en cours. En effet, quand bien même ils étaient convaincus que les intimés leur devaient paiement des travaux litigieux, ils ne pouvaient plus à cette époque ignorer que la notification d'un quatrième commandement de payer serait juridiquement infondée et abusive, vu la procédure pénale initiée par les intimés et dès lors qu'ils étaient alors représentés par un avocat. La multiplication des poursuites adressées aux parties plaignantes, ainsi que la notification dans les circonstances qui viennent d'être décrites d'un nouveau commandement de payer, témoignait d'un acharnement certain qui traduisait à ce stade une volonté de nuire, respectivement d'obtenir des intimés le paiement d'un montant qu'ils savaient désormais - ou devaient savoir - ne pas pouvoir obtenir par ce biais. Cette nouvelle démarche ne pouvait qu'avoir pour but, intentionnel ou par dol éventuel à tout le moins, d'exercer des pressions sur la famille Truscello, ce qui était susceptible de l'entraver dans sa liberté d'action. Les recourants s'étaient donc rendus coupables de tentative de contrainte en raison de cet ultime commandement de payer et leur condamnation pour ce chef d'accusation devait donc être confirmée.
2.3. Il s'agit ainsi uniquement d'examiner si la notification de ce dernier commandement de payer aux intimés constitue une tentative de contrainte au sens de l'art. 181 CP, ce que les recourants contestent.
En vertu de la jurisprudence citée
supra ( cf. consid. 2.1.1), l'envoi d'un commandement de payer pour une importante somme d'argent est propre à inciter une personne de sensibilité moyenne à céder à la pression subie, donc à l'entraver d'une manière substantielle dans sa liberté d'action. Un tel envoi constitue en conséquence bel et bien un moyen de contrainte au sens de l'art. 181 CP, ce que les recourants ne remettent du reste pas explicitement en cause. Ils contestent en revanche le fait que, dans le cadre de la notification du quatrième commandement de payer, ce moyen de contrainte puisse être qualifié d'illicite, alors que, d'après eux, la cour cantonale avait reconnu la licéité des trois premières notifications.
Il est vrai que la cour cantonale semble avoir retenu comme licite la notification du premier commandement de payer provenant de H.________ Sàrl, en liquidation. Il n'en va en revanche pas de même des suivants, les recourants ayant en effet été acquittés en lien avec les deux commandements de payer du 11 décembre 2020 et 5 mai 2021 uniquement car un léger doute subsistait quant au fait qu'ils eussent agi de bonne foi et en parfaite méconnaissance des principes juridiques applicables. Cependant, malgré un doute en lien avec la réalisation de l'élément subjectif de l'infraction, il faut admettre, à l'instar de la cour cantonale, que la notification de ces commandements de payer aux intimés était injustifiée (cf.
supra consid. B.e et B.f en fait). Tout d'abord, les recourants n'avaient pas démontré, d'une manière vraisemblable, que le montant réclamé aux intimés leur était dû. Il ressort en effet du jugement cantonal, sans que les recourants en démontrent l'arbitraire, qu'aucun accord pour les travaux effectués n'avait été obtenu auprès des propriétaires des locaux, et que, malgré leur opposition, les coprévenus avaient continué lesdits travaux, lesquels ne pouvaient qu'éventuellement donner lieu à une créance en faveur de H.________ Sàrl, locataire, à titre de plus-value. Certes, celui qui introduit une poursuite ne doit pas forcément être au bénéfice d'un jugement définitif et exécutoire ou d'un titre à la mainlevée démontrant le bien-fondé de ses prétentions pour éviter que ses démarches soient taxées d'illicites au sens de l'art. 181 CP. En revanche, il doit être en mesure de démontrer, à l'issue d'un examen sommaire, que la poursuite n'est pas abusive et qu'il est fondé à exiger la créance réclamée. Il est vrai que, comme retenu par la cour cantonale, une requête en indemnité fondée sur le droit du bail avait été déposée en août 2019, de même qu'une procédure de mainlevée jusqu'au Tribunal fédéral, ce qui ne permettait pas de considérer que la notification du premier commandement de payer était constitutive d'une tentative de contrainte. Cependant, ce raisonnement ne saurait être suivi pour les commandements de payer suivants notifiés aux intimés, et à plus forte raison pour le quatrième. La nature abusive se déduit en effet de la multiplication des poursuites pour une unique et même créance. Le caractère abusif résulte également du fait que les deuxième, troisième et quatrième commandements de payer ont été notifiés par A.________ Sàrl, laquelle n'avait pas de légitimation active pour engager une poursuite contre les intimés (cf. arrêt 6B_1396/2021 du 28 juin 2022 consid. 3.4). En effet, comme constaté sans arbitraire par les juges cantonaux (cf. consid. 2.2
supra), le contrat de bail était conclu entre H.________ Sàrl et les intimés, si bien que A.________ Sàrl - malgré le fait qu'elle ait procédé à des travaux sans l'accord des propriétaires - ne pouvait pas en tirer des droits à titre personnel et engager des poursuites à son propre nom.
Compte tenu de ce qui précède, il ne fait aucun doute que la notification du quatrième commandement de payer aux intimés devait être considérée comme un moyen de contrainte illicite.
2.4. Il reste finalement à examiner la réalisation de l'élément subjectif en lien avec ce dernier commandement de payer.
Les recourants soutiennent qu'ils étaient de bonne foi, car ils restaient convaincus que le montant en cause leur était dû. Ainsi, ils nient toute conscience et volonté de procéder à une tentative de contrainte, comme cela était le cas lors de la notification des trois premiers commandements de payer.
Il y a lieu de rappeler que définir ce que l'auteur savait, voulait ou l'éventualité à laquelle il consentait relève de l'établissement des faits (ATF 141 IV 336 consid. 2.4.1; 137 IV 1 consid. 4.2.3). Par conséquent, dans la mesure où les recourants se prévalent du fait que l'ouverture de la procédure pénale et l'intervention d'un avocat n'avaient pas remis en cause leur conviction - selon laquelle il convenait de procéder de cette manière pour parvenir à encaisser le montant qui leur revenait - pour chercher à montrer leur absence de volonté délictuelle, ils s'en prennent à des constatations de fait de la cour cantonale sans toutefois montrer, par une argumentation satisfaisant aux exigences de l'art. 106 al. 2 LTF, que celles-ci seraient insoutenables.
Il faut ainsi donner raison à la cour cantonale lorsqu'elle relève que la notification du quatrième commandement de payer témoignait d'un acharnement certain qui traduisait une volonté de nuire, respectivement d'obtenir des intimés le paiement d'un montant que les recourants savaient désormais - ou devaient savoir - ne pas pouvoir obtenir par ce biais. La cour cantonale pouvait dès lors retenir, sans arbitraire ni violation du principe de la présomption d'innocence, que cette nouvelle démarche ne pouvait qu'avoir pour but, intentionnel ou par dol éventuel à tout le moins, d'exercer des pressions sur les intimés, ce qui était susceptible de les entraver dans leur liberté d'action.
2.5. C'est dès lors à bon droit que la cour cantonale a considéré que l'envoi du quatrième commandement de payer aux intimés était constitutif d'une tentative de contrainte.
3.
Invoquant une violation des art. 426 al. 2 CPP, 32 al. 1 Cst. et 6 par. 2 CEDH, les recourants contestent la mise à leur charge des frais. Ils se plaignent également de devoir verser aux intimés une juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure.
3.1.
3.1.1. Le sort des frais de la procédure à l'issue de celle-ci est régi par les art. 422 ss CPP. En principe, ils sont mis à la charge de la Confédération ou du canton qui a conduit la procédure, les dispositions contraires du CPP étant réservées (art. 423 al. 1 CPP).
3.1.2. La répartition des frais de procédure de première instance repose sur le principe selon lequel celui qui a causé les frais doit les supporter. Ainsi, le prévenu doit supporter les frais en cas de condamnation (art. 426 al. 1, 1re phrase, CPP), car il a occasionné, par son comportement, l'ouverture et la mise en oeuvre de l'enquête pénale (ATF 138 IV 248 consid. 4.4.1).
Lorsque la condamnation n'est que partielle, les frais ne doivent être mis à sa charge que de manière proportionnelle, en considération des frais liés à l'instruction des infractions pour lesquelles un verdict de culpabilité a été prononcé. Il s'agit de réduire les frais, sous peine de porter atteinte à la présomption d'innocence, si le point sur lequel le prévenu a été acquitté a donné lieu à des frais supplémentaires et si le prévenu n'a pas, de manière illicite et fautive, provoqué l'ouverture de la procédure ou rendu plus difficile la conduite de celle-ci (cf. art. 426 al. 2 CPP). Sur ce dernier point, seul un comportement fautif et contraire à une règle juridique, qui soit en relation de causalité avec les frais imputés, entre en ligne de compte. Pour déterminer si le comportement en cause est propre à justifier l'imputation des frais, le juge peut prendre en considération toute norme de comportement écrite ou non écrite résultant de l'ordre juridique suisse pris dans son ensemble, dans le sens d'une application par analogie des principes découlant de l'art. 41 CO. Le fait reproché doit constituer une violation claire de la norme de comportement. Une condamnation aux frais ne peut se justifier que si, en raison du comportement illicite du prévenu, l'autorité était légitimement en droit d'ouvrir une enquête. Elle est en tout cas exclue lorsque l'autorité est intervenue par excès de zèle, ensuite d'une mauvaise analyse de la situation ou par précipitation. La mise des frais à la charge du prévenu en cas d'acquittement ou de classement de la procédure doit en effet rester l'exception (ATF 144 IV 202 consid. 2.2 et les arrêts cités). Par ailleurs, le juge ne peut fonder sa décision que sur des faits incontestés ou déjà clairement établis (ATF 112 Ia 371 consid. 2a; arrêts 6B_113/2024 du 14 juin 2024 consid. 1.2.3 et les arrêts cités; 6B_1003/2021 du 8 septembre 2022 consid. 1.1; 6B_1090/2020 du 1er avril 2021 consid. 2.1.1).
Comme il est difficile de déterminer avec exactitude les frais qui relèvent de chaque fait imputable ou non au condamné, une certaine marge d'appréciation doit être laissée à l'autorité cantonale (arrêts 6B_259/2023 du 14 août 2023 consid. 3.1; 6B_780/2022 du 1er mai 2023 consid. 5.1.1 et les arrêts cités).
3.1.3. Aux termes de l'art. 428 al. 1, 1re phrase, CPP, les frais de la procédure de recours sont mis à la charge des parties dans la mesure où elles ont obtenu gain de cause ou succombé. L'art. 428 al. 2 CPP régit les cas dans lesquels les frais de la procédure peuvent être mis à la charge de la partie recourante qui obtient une décision qui lui est plus favorable. Pour déterminer si une partie succombe ou obtient gain de cause, il faut examiner dans quelle mesure ses conclusions sont admises en deuxième instance (arrêts 6B_1130/2020 du 14 avril 2021 consid. 4.1.2; 6B_701/2019 du 17 décembre 2020 consid. 2.3; 6B_1192/2019 du 28 février 2020 consid. 3.1).
3.1.4. Aux termes de l'art. 433 al. 1 CPP, la partie plaignante peut demander au prévenu une juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure si elle obtient gain de cause (let. a) ou si le prévenu est astreint au paiement des frais conformément à l'art. 426 al. 2 CPP (let. b).
3.1.5. Selon l'art. 112 al. 1 let. b LTF, les décisions qui peuvent faire l'objet d'un recours au Tribunal fédéral doivent indiquer les motifs déterminants de fait et de droit sur lesquels l'autorité s'est fondée. Il doit ressortir clairement de la décision quels sont les faits constatés sur lesquels l'autorité précédente s'est fondée et quel est le raisonnement juridique qu'elle a suivi (ATF 146 IV 231 consid. 2.6.1; 141 IV 244 consid. 1.2.1). Si la décision attaquée ne satisfait pas à ces exigences, le Tribunal fédéral peut soit la renvoyer à l'autorité cantonale en invitant celle-ci à la parfaire, soit l'annuler (art. 112 al. 3 LTF). Cette disposition concrétise le droit d'être entendu (art. 3 al. 2 let. c CPP, art. 29 al. 2 Cst. et art. 6 par. 1 CEDH) dont la jurisprudence a déduit le devoir pour l'autorité de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse la comprendre, la contester utilement s'il y a lieu et que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle. Pour répondre à ces exigences, il suffit que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision (ATF 146 II 335 consid. 5.1; 143 III 65 consid. 5.2; 139 IV 179 consid. 2.2).
3.2. La cour cantonale a considéré que c'était à tort que les recourants ainsi que C.A.________ concluaient à être libérés du paiement des frais de la procédure de première instance et d'une indemnité en faveur des intimés. Ils étaient en effet, de par leur comportement civilement répréhensible, responsables de l'ouverture de la procédure pénale, dès lors qu'ils avaient géré leurs affaires et leurs sociétés de façon fort peu diligente, qu'ils avaient agi de façon contraire à l'art. 97 CO, qu'ils n'avaient pas tenu leur comptabilité correctement et qu'ils avaient produit des factures postdatées avec des numéros de TVA erronés, tout cela ayant d'ailleurs contribué à allonger la procédure.
3.3.
3.3.1. Comme on vient de le voir, la jurisprudence souligne que, lorsqu'il est question de retenir une faute civile - dans le sens d'une application par analogie des principes découlant de l'art. 41 CO - susceptible de justifier la mise des frais à la charge du prévenu au sens de l'art. 426 al. 2 CPP, le juge ne peut fonder sa décision que sur des faits incontestés ou déjà clairement établis (cf.
supra consid. 3.1.2). À cet égard, la cour cantonale se limite à retenir que les prévenus auraient agi de façon contraire à l'art. 97 CO, mais ne précise aucunement en quoi cette norme aurait été transgressée. Pour le reste, la cour cantonale relève que les prévenus auraient géré leurs affaires et leurs sociétés de façon fort peu diligente, n'auraient pas tenu de comptabilité correctement et auraient produit des factures postdatées avec des numéros de TVA erronés, sans plus de développements ni de précisions sur les normes qui auraient été transgressées. La cour cantonale n'expose pas non plus en quoi et à quel titre les manquements évoqués seraient en l'occurrence imputables aux recourants. En ce sens, le jugement attaqué ne permet pas de retenir la violation d'une norme de comportement spécifique justifiant, pour ce motif, une mise à la charge des recourants des frais de procédure de première instance sur la base de l'art. 426 al. 2 CPP.
Ainsi, sauf à considérer que les recourants auraient eu un comportement illicite permettant de mettre à leur charge les frais de la procédure de première instance au sens de l'art. 426 al. 2 CPP - ce que, comme on vient de voir, ne se justifiait pas en l'espèce - le jugement attaqué ne permet pas d'expliquer pourquoi la répartition des frais est demeurée la même que dans la décision de première instance, alors que les recourants ont obtenu partiellement gain de cause en appel et que C.A.________ a obtenu entièrement gain de cause et a été acquittée de toute infraction la concernant. Du reste, la cour cantonale ne développe en rien les raisons pour lesquelles il se justifiait de faire exception au principe selon lequel, en cas d'acquittement partiel, les frais de la procédure de première instance ne sont mis à la charge du prévenu que d'une manière proportionnelle.
En conséquence, faute d'une motivation suffisante, il se justifie d'admettre le recours sur ce point, d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il porte sur les frais de procédure de première instance et de renvoyer la cause à la cour cantonale pour qu'elle complète sa décision dans ce sens (cf. art. 112 al. 3 LTF).
3.3.2. Quant aux frais de deuxième instance, la cour cantonale a estimé que les recourants devaient supporter, par un tiers chacun, les frais de la procédure d'appel, étant donné qu'ils n'obtenaient en définitive qu'une réduction de la peine et qu'ils succombaient donc pour l'essentiel (cf. jugement attaqué consid. 6 p. 25). Les recourants ne s'en prennent pas à cette motivation sous l'angle de l'art. 428 CPP, leur grief est irrecevable (art. 42 al. 2 LTF). Au demeurant, compte tenu des conclusions en appel des recourants, la cour cantonale pouvait, sans violer l'art. 428 al. 1 CPP, considérer que ceux-ci avaient succombé pour l'essentiel et mettre, par un tiers chacun, les frais d'appel à leur charge.
3.3.3. Dans la mesure où il n'a pas été démontré que la condamnation des recourants aux frais est conforme à l'art. 426 al. 2 CPP, ces derniers ne sauraient être condamnés à verser une juste indemnité aux intimés, en application de l'art. 433 al. 1 let. b CPP. Ils peuvent en revanche être condamnés sur la base de l'art. 433 al. 1 let a CPP, ce qui a été fait en l'espèce pour la procédure de deuxième instance. En effet, la cour cantonale a considéré que les intimés, qui avaient obtenu partiellement gain de cause, avaient droit à une indemnité, réduite, de deux tiers pour l'exercice raisonnable de leurs droits de procédure, laquelle a été mise à la charge des recourants, solidairement entre eux. Cette manière de procéder est conforme au droit fédéral et ne prête pas le flanc à la critique.
3.3.4. En suivant le même raisonnement, il appartiendra ainsi à la cour cantonale de définir l'indemnité qui sera due pour la procédure de première instance, en tenant compte de l'acquittement partiel des recourants ainsi que de l'acquittement total de C.A.________. Le recours doit donc être admis aussi sur ce point, le jugement attaqué annulé et la cause renvoyée à l'autorité cantonale afin qu'elle indique pour quels motifs et dans quelle mesure les recourants doivent être condamnés à payer aux intimés une indemnité à titre de dépens pour la procédure de première instance (cf. art. 112 al. 3 LTF).
4.
La recourante soutient encore qu'elle aurait dû se voir allouer une indemnité pour ses dépens à titre de l'art. 429 CPP.
4.1.
4.1.1. Dans le cadre d'un recours en matière pénale, le Tribunal fédéral contrôle uniquement l'application correcte par l'autorité cantonale du droit fédéral en vigueur au moment où celle-ci a statué (ATF 145 IV 137 consid. 2.6 ss; 129 IV 49 consid. 5.3). Le jugement attaqué ayant été rendu le 4 décembre 2023, il n'y a pas lieu en l'état de prendre en compte les modifications du Code de procédure pénale entrées en vigueur le 1er janvier 2024 (arrêts 6B_113/2024 du 14 juin 2024 consid. 1.1; 6B_987/2023 du 21 février 2024 consid. 2.2.1; 7B_1008/2023 du 12 janvier 2024 consid. 2.2), en particulier celles concernant l'art. 429 CPP.
4.1.2. Selon l'art. 429 al. 1 let. a aCPP, si le prévenu est acquitté totalement ou en partie ou s'il bénéficie d'une ordonnance de classement, il a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure.
Aux termes de l'art. 436 al. 1 CPP, les prétentions en indemnités et en réparation du tort moral dans la procédure de recours, respectivement d'appel, sont régies par les art. 429 à 434 CPP. Selon l'art. 436 al. 2 CPP, si ni un acquittement total ou partiel, ni un classement de la procédure ne sont prononcés mais que le prévenu obtient gain de cause sur d'autres points, il a droit à une juste indemnité pour ses dépenses.
La question de l'indemnisation du prévenu (art. 429 CPP) doit être traitée en relation avec celle des frais (art. 426 CPP). Si le prévenu supporte les frais en application de l' art. 426 al. 1 ou 2 CPP , une indemnité est en règle générale exclue (ATF 137 IV 352 consid. 2.4.2; arrêts 6B_457/2021 du 22 octobre 2021 consid. 6.4; 6B_2/2021 du 25 juin 2021 consid. 1.1.1; 6B_1047/2020 précité consid. 2). Si le prévenu est libéré d'un chef d'accusation et condamné pour un autre, les frais relatifs à sa condamnation seront mis à sa charge et il aura respectivement droit à une indemnité correspondant à son acquittement partiel (arrêts 6B_1047/2020 du 5 mai 2021 consid. 2.1; 6B_110/2015 du 16 février 2016 consid. 2). Dans ce dernier cas, les autorités pénales doivent avoir renoncé à poursuivre le prévenu ou à le condamner pour une partie des infractions envisagées ou des faits retenus dans l'acte d'accusation et ces infractions ou ces faits doivent être à l'origine des dépenses et des dommages subis par le prévenu. L'indemnité sera due si les infractions abandonnées par le tribunal revêtent, globalement considérées, une certaine importance et que les autorités de poursuite pénale ont ordonné des actes de procédure en relation avec les accusations correspondantes (arrêts 6B_1047/2020 précité consid. 2.1; 6B_1379/2019 du 13 août 2020 consid. 9.2; 6B_572/2018 du 1er octobre 2018 consid. 5.1.3).
4.1.3. En vertu de l'art. 430 al. 1 let. a CPP, l'autorité pénale peut réduire ou refuser l'indemnité ou la réparation du tort moral lorsque le prévenu a provoqué illicitement et fautivement l'ouverture de la procédure ou a rendu plus difficile la conduite de celle-ci. L'art. 430 al. 1 let. a CPP est le pendant de l'art. 426 al. 2 CPP en matière de frais. La question de l'indemnisation doit être tranchée après la question des frais. Dans cette mesure, la décision sur les frais préjuge de la question de l'indemnisation. Il en résulte qu'en cas de condamnation aux frais, il n'y a pas lieu d'octroyer de dépens ou de réparer le tort moral (ATF 137 IV 352 consid. 2.4.2). Lorsque la condamnation aux frais n'est que partielle, la réduction de l'indemnité devrait s'opérer dans la même mesure (arrêts 6B_501/2020 du 15 décembre 2020 consid. 4.1.2; 6B_1238/2017 du 12 avril 2018 consid. 2.1; 6B_556/2017 du 15 mars 2018 consid. 2.5).
4.2. Sur ce point également, le jugement attaqué ne permet pas de comprendre pourquoi, malgré un acquittement partiel, la recourante n'a pu obtenir aucune indemnité, ni en première ni en deuxième instance, fondée sur l'art. 429 al. 1 let. a aCPP. Il appartiendra ainsi également à l'autorité cantonale de compléter sa motivation à cet égard (cf. art. 112 al. 3 LTF). Il y a dès lors lieu de renvoyer la cause à la cour cantonale pour qu'elle statue à nouveau sur une éventuelle indemnité de défense de la recourante pour la procédure de première instance, suivant en cela la nouvelle décision sur la répartition des frais (cf.
supra consid. 3.3.1). Il lui appartiendra également de statuer sur une éventuelle indemnité de deuxième instance en expliquant pour quels motifs et dans quelle mesure la recourante en aurait ou pas droit.
5.
Au vu de ce qui précède, les recours 6B 271/2024 et 6B_316/2024 doivent être partiellement admis et le jugement attaqué partiellement annulé dans le sens des considérants qui précèdent. Pour le reste, les recours doivent être rejetés dans la mesure où ils sont recevables.
Les recourants, qui succombent dans une large mesure, (art. 66 al. 1 LTF), supporteront une partie des frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). La recourante peut prétendre à des dépens réduits, à la charge du canton de Vaud, s'agissant de l'aspect du recours pour lequel elle obtient gain de cause. Le recourant n'a pas droit à des dépens dès lors qu'il n'est pas assisté par un avocat et qu'il n'a pas démontré avoir engagé d'autres frais pour le dépôt de son recours (art. 68 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Les causes 6B_271/2024 et 6B_316/2024 sont jointes.
2.
Les recours sont partiellement admis, le jugement attaqué est annulé et la cause est renvoyée à l'autorité précédente pour nouvelle décision. Pour le surplus, les recours sont rejetés dans la mesure où ils sont recevables.
3.
Une partie des frais judiciaires est mise à la charge des recourants à raison de 2'000 fr. chacun.
4.
Le canton de Vaud versera à la recourante une indemnité de 1'000 fr. à titre de dépens réduits pour la procédure devant le Tribunal fédéral.
5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
Lausanne, le 17 septembre 2024
Au nom de la Ire Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Juge présidant : Denys
La Greffière : Corti