Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet. Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
Zurück zur Einstiegsseite Drucken
Grössere Schrift
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1B_720/2011 
 
Arrêt du 18 janvier 2012 
Ire Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges Aemisegger, Juge présidant, Eusebio et Chaix. 
Greffier: M. Rittener. 
 
Participants à la procédure 
A.________, représenté par Me Yann Arnold, avocat, 
recourant, 
 
contre 
 
Ministère public du canton de Genève, case postale 3565, 1211 Genève 3. 
 
Objet 
détention pour des motifs de sûreté, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice du 
canton de Genève, Chambre pénale de recours, 
du 22 novembre 2011. 
 
Faits: 
 
A. 
A.________, ressortissant lituanien, est en détention depuis le 8 novembre 2009 sous la prévention d'infraction grave à la loi fédérale sur les stupéfiants (LStup; RS 812.121). En substance, il lui est reproché d'avoir participé en bande organisée à un trafic international portant sur 27 kilos de cocaïne. Il lui est en particulier fait grief d'avoir recruté des transporteurs lituaniens avec un comparse pour le compte de B.________, qui prenait des mesures pour organiser ce trafic entre l'Amérique latine et la Suisse. Cette dernière aurait en outre fait transférer d'importantes sommes d'argent à la dénommée C.________ pour financer ledit trafic. En Équateur, B.________ aurait également agi de concert avec C.________, qui assurait le contact avec le fournisseur de la drogue. La détention provisoire de A.________ a été régulièrement prolongée en raison notamment des risques de fuite et de réitération. Le Ministère public du canton de Genève a rendu un acte d'accusation le 17 mars 2011, renvoyant A.________ et quatre de ses comparses devant le Tribunal criminel du canton de Genève. Statuant sur recours de B.________, le Tribunal fédéral a constaté une violation du principe de célérité, un délai de huit mois entre l'ordonnance de renvoi et l'audience de jugement étant contraire à ce principe (arrêt 1B_419/2011 du 13 septembre 2011). 
 
B. 
Le 2 septembre 2011, C.________ a été extradée d'Équateur en Suisse. L'audience de jugement initialement "réservée au 21 novembre 2011" a été fixée au 28 novembre 2011. Par courrier du 22 septembre 2011, la direction de la procédure du Tribunal criminel du canton de Genève a informé les parties que C.________ serait entendue en qualité de personne appelée à donner des renseignements lors de cette audience. Elle s'est ravisée par courrier du 14 octobre 2011, considérant que la procédure ouverte contre C.________ devait être jointe à la procédure visant notamment A.________, en application de l'art. 29 du code de procédure pénale suisse (CPP; RS 312.0). L'audience de jugement était donc reportée à la semaine du 12 au 16 mars 2012. 
A.________ a demandé sa libération immédiate à la direction de la procédure et conclu subsidiairement au maintien de l'audience de jugement initialement prévue. La direction de la procédure a rejeté cette requête et transmis la cause au Tribunal des mesures de contrainte (Tmc). Par ordonnance du 31 octobre 2011, cette autorité a rejeté la demande de mise en liberté, en relevant que le report d'audience était justifié par l'interpellation de C.________. A.________ a contesté cette décision auprès de la Cour de justice, qui a rejeté son recours par arrêt du 22 novembre 2011. En substance, la dernière instance cantonale a confirmé l'appréciation du Tmc, considérant qu'il y avait lieu de juger tous les prévenus ensemble, conformément à l'art. 29 CPP. Selon elle, les "inconvénients" résultant d'une prolongation de la détention du recourant ne constituaient pas une violation du principe de la célérité. 
 
C. 
Agissant sans avocat, A.________ a contesté une première fois cet arrêt le 6 décembre 2011. Ce recours a été joint au recours formé par B.________ contre un arrêt identique rendu à son encontre. Par arrêt du 21 décembre 2011, le Tribunal fédéral a admis partiellement ces recours, en constatant une nouvelle violation du principe de célérité et en ordonnant au Tribunal criminel du canton de Genève de tenir l'audience de jugement avant le 15 février 2012 (arrêt 1B_684 et 686/2011 du 21 décembre 2011). 
 
D. 
Le 23 décembre 2011, A.________, agissant par l'intermédiaire d'un avocat, a formé un nouveau recours contre l'arrêt rendu le 22 novembre 2011 par la Cour de justice. L'arrêt précité du 21 décembre 2011 ne lui avait pas encore été notifié. Le recourant conclut à l'annulation de l'arrêt du 22 novembre 2011, à la constatation d'une violation du principe de célérité et des art. 221 et 237 CPP ainsi qu'à sa mise en liberté provisoire. Il requiert en outre l'octroi de l'assistance judiciaire. La Cour de justice et le Ministère public du canton de Genève n'ont pas présenté d'observations. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
Selon l'art. 78 LTF, le recours en matière pénale est ouvert contre les décisions rendues en matière pénale, dont font partie les décisions rendues en matière de détention provisoire ou pour des motifs de sûreté au sens des art. 212 ss CPP (ATF 137 IV 22 consid. 1 p. 23). Selon l'art. 81 al. 1 let. a et let. b ch. 1 LTF, l'accusé a qualité pour agir. Le recourant a déjà contesté l'arrêt attaqué devant la Cour de céans, par un premier recours qui a été partiellement admis le 21 décembre 2011 (arrêt 1B_684 et 686/2011). Dans la mesure où cet arrêt constate une violation du principe de célérité, la conclusion prise en ce sens dans le nouveau recours et les griefs formulés à cet égard sont dépourvus d'objet. En revanche, le recourant conserve un intérêt au traitement des conclusions tendant à sa mise en liberté et des griefs contestant le bien-fondé de la détention. Le recours est donc recevable de ce point de vue, dès lors qu'il a été formé dans le délai de trente jours prévu par l'art. 100 al. 1 LTF
 
2. 
Une mesure de détention préventive n'est compatible avec la liberté personnelle (art. 10 al. 2 Cst. et 5 CEDH) que si elle repose sur une base légale (art. 31 al. 1 et art. 36 al. 1 Cst.), soit en l'espèce l'art. 221 CPP. Elle doit en outre correspondre à un intérêt public et respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 2 et 3 Cst.; ATF 123 I 268 consid. 2c p. 270). Pour que tel soit le cas, la privation de liberté doit être justifiée par les besoins de l'instruction, un risque de fuite ou un danger de collusion ou de réitération (cf. art. 221 al. 1 let. a, b et c CPP). Préalablement à ces conditions, il doit exister à l'égard de l'intéressé des charges suffisantes, soit de sérieux soupçons de culpabilité (art. 221 al. 1 CPP; art. 5 par. 1 let. c CEDH; arrêt 1B_63/2007 du 11 mai 2007 consid. 3 non publié in ATF 133 I 168). Le Tribunal fédéral examine librement ces questions, sous réserve toutefois de l'appréciation des faits, revue sous l'angle restreint des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF (ATF 135 I 71 consid. 2.5 p. 73 s. et les références). 
 
3. 
Le recourant ne remet pas en cause le caractère suffisant des charges qui pèsent sur lui, mais il conteste notamment l'existence du risque de fuite retenu par l'autorité précédente. 
 
3.1 Le risque de fuite doit s'analyser en fonction d'un ensemble de critères tels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources, ses liens avec l'État qui le poursuit ainsi que ses contacts à l'étranger, qui font apparaître le risque de fuite non seulement possible, mais également probable (ATF 117 Ia 69 consid. 4a p. 70 et la jurisprudence citée). La gravité de l'infraction ne peut pas, à elle seule, justifier la prolongation de la détention, même si elle permet souvent de présumer un danger de fuite en raison de l'importance de la peine dont le prévenu est menacé (ATF 125 I 60 consid. 3a p. 62, 117 Ia 69 consid. 4a p. 70, 108 Ia 64 consid. 3 p. 67). Il est sans importance que l'extradition du prévenu puisse être obtenue (ATF 123 I 31 consid. 3d p. 36 s.). 
 
3.2 Selon le Tmc, le risque de fuite est patent eu égard à la nationalité lituanienne du recourant - pays où il est censé résider - l'absence d'attaches avec la Suisse et la peine concrètement encourue. Le recourant se borne à alléguer qu'il est "ressortissant européen" et que le risque de fuite n'est "pas suffisamment concret et intense", ce qui ne contredit pas de manière convaincante l'appréciation de l'autorité précitée. Il est au demeurant évident qu'il existe un risque important de voir le recourant prendre la fuite, la nationalité de l'intéressé, l'absence totale d'attaches avec la Suisse et l'importance de la peine encourue concrètement en cas de condamnation étant suffisantes pour démontrer ce risque. Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de rechercher si le maintien en détention peut également être motivé par un risque de récidive voire un risque de collusion, comme le mentionne l'arrêt attaqué. 
 
3.3 Le recourant propose encore diverses mesures de substitution prévues par l'art. 237 CPP, à savoir le dépôt de son passeport, l'interdiction de quitter le territoire suisse et l'obligation de se présenter périodiquement aux autorités suisses. Ces mesures sont cependant clairement insuffisantes pour pallier l'important risque de fuite et on ne voit pas quelle autre mesure pourrait atteindre le même but que la détention. 
 
4. 
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté, dans la mesure de sa recevabilité. Dès lors que le recourant est dans le besoin et que ses conclusions n'étaient pas d'emblée vouées à l'échec, l'assistance judiciaire doit lui être accordée (art. 64 al. 1 LTF). Il y a lieu de désigner Me Yann Arnold en qualité d'avocat d'office et de fixer d'office ses honoraires, qui seront supportés par la caisse du Tribunal fédéral (art. 64 al. 2 LTF). Le recourant est en outre dispensé des frais judiciaires (art. 64 al. 1 LTF). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
 
2. 
La demande d'assistance judiciaire est admise. Me Yann Arnold est désigné comme défenseur d'office du recourant et ses honoraires, supportés par la caisse du Tribunal fédéral, sont fixés à 1'500 francs. 
 
3. 
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
4. 
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Ministère public et à la Cour de justice du canton de Genève, Chambre pénale de recours. 
 
Lausanne, le 18 janvier 2012 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Juge présidant: Aemisegger 
 
Le Greffier: Rittener