Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet. Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
Zurück zur Einstiegsseite Drucken
Grössere Schrift
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_319/2021  
 
 
Arrêt du 18 juillet 2022  
I  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Hohl, Présidente, Rüedi et May Canellas. 
Greffière: Monti. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Philippe Girod, avocat, 
demandeur et recourant, 
 
contre  
 
1. Entreprise E.________, 
2. Assurance A.________, 
représentés par Me Stefano Fabbro, avocat, 
défendeurs et intimés. 
 
Objet 
responsabilité civile, limitation de la procédure, 
 
recours en matière civile contre l'arrêt rendu le 27 avril 2021 par la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève (C/15664/2018, ACJC/517/2021). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Le 7 février 2017, un autobus de l'Entreprise E.________ (ci-après l'entreprise de transport) est entré en collision avec la voiture conduite par A.________ et l'a propulsée contre une glissière de sécurité. La tête du prénommé (ci-après le demandeur) a heurté la vitre de son véhicule.  
Légèrement blessé, le demandeur s'est plaint de douleurs cervicales et a été conduit à l'hôpital. Selon son médecin généraliste, il a subi un traumatisme crânien et une entorse cervicale. 
Poursuivi pénalement, le chauffeur de l'autobus a été reconnu coupable de lésions corporelles par négligence. 
L'entreprise de transport a reconnu sa responsabilité civile et la faute du conducteur d'autobus. Son assureur en responsabilité civile (Assurance A.________, ci-après la compagnie d'assurances) a couvert l'intégralité des frais médicaux du demandeur. 
 
A.b. Depuis l'accident, le demandeur souffre de cervicalgies, de céphalées, de vertiges, d'acouphènes et d'un état dépressif. De nombreux certificats médicaux ont attesté de son incapacité totale de travailler.  
Il a réclamé l'indemnisation de sa perte de gain. Au moment de l'accident, il était sans emploi et bénéficiait de l'aide sociale (Hospice général). La compagnie d'assurances a proposé un forfait de 5'000 fr. pour solde de tout compte. 
 
B.  
 
B.a. Le 3 juillet 2018, le demandeur a attrait en conciliation l'entreprise de transport et la compagnie d'assurances devant le Tribunal de première instance du canton de Genève. Il a ensuite déposé une demande en paiement de 110'000 fr. à titre de perte de gain pour la période du 1er mars 2017 au 31 décembre 2018. Il requérait une expertise sur les atteintes physiques et psychiques à sa santé, ainsi que sur son incapacité de gain.  
A l'audience du 8 mai 2019, le Tribunal a décidé, "d'entente entre les parties", de limiter la procédure à la question de "l'existence d'un cas de responsabilité civile"; le dommage serait abordé ultérieurement. 
Par ordonnance du 23 septembre 2019, dite autorité a statué sur les différentes offres de preuves et a rejeté la requête d'expertise qui ne lui paraissait pas pertinente vu les faits restant à prouver. 
Divers témoins ont été entendus, ainsi que le demandeur. 
Ce dernier a expliqué que le jour de l'accident, il venait d'effectuer l'examen théorique nécessaire pour devenir chauffeur professionnel. Il avait échoué pour la deuxième fois, commettant cinq erreurs alors que trois seulement étaient tolérées. Il s'était réinscrit à la session devant se tenir deux jours plus tard. L'accident l'avait empêché de se présenter et il n'était désormais plus en mesure de le faire à cause de son état de santé. Sans cet événement, il aurait pu réussir l'examen et réaliser un revenu mensuel d'au moins 5'000 fr. comme chauffeur de taxi indépendant. 
Citée comme témoin, l'assistante sociale en charge de son dossier auprès de l'Hospice général n'a pas pu être entendue, faute d'avoir été déliée de son secret de fonction. Sur quoi, le tribunal a sommé le demandeur de produire un curriculum vitae, toutes pièces attestant de son parcours professionnel, ainsi que les décomptes de l'Hospice relatifs aux aides allouées depuis 2003. L'intéressé s'est contenté de transmettre les attestations de cet organisme relatives aux années 2016 à 2020. 
Par jugement du 1er octobre 2020, le Tribunal de première instance a rejeté la demande, faute pour son auteur d'avoir établi un lien de causalité naturelle entre l'accident et les atteintes à la santé dont il souffrait. "Pour le surplus", et bien que la procédure eût été limitée "à la question de l'existence du lien de causalité", le demandeur n'avait pas prouvé qu'il subissait un dommage du fait de l'accident et que sans celui-ci, il aurait été en mesure de subvenir à ses besoins. 
 
B.b. Le 27 avril 2021, la Cour de justice genevoise, par sa Chambre civile, a rejeté l'appel formé par le demandeur. Ses considérants peuvent se résumer comme il suit:  
 
- Le demandeur était sans conteste atteint dans sa santé physique (cervicalgies, céphalées, vertiges, acouphènes) et psychique (état dépressif). Il en découlait une incapacité de travail totale. 
Toutefois, il présentait un état maladif antérieur à l'accident, composé d'une discopathie sévère et d'un état dépressif depuis 2005. Si l'accident avait joué un rôle déclencheur dans l'apparition des symptômes douloureux, il n'était pas la cause unique des troubles actuels du demandeur. Son état antérieur y avait contribué. 
Cela étant, il était superflu de déterminer dans quelle mesure les séquelles actuelles étaient dues à l'accident ou à l'état antérieur. Car un autre motif commandait de rejeter la demande - privant ainsi d'objet l'expertise pluridisciplinaire sollicitée. 
- Le demandeur prétendait subir un manque à gagner. Or, il avait échoué à établir un lien de causalité naturelle entre les atteintes à la santé subies à la suite de l'accident et le dommage allégué. 
Le demandeur qualifiait lui-même son parcours professionnel de "chaotique"; il n'avait travaillé que de manière discontinue, se trouvant régulièrement à l'aide sociale - ce qui était à nouveau le cas depuis le 1er mai 2016. Il n'y avait pas matière à pronostiquer qu'il aurait très probablement obtenu sa licence de chauffeur de taxi, trouvé un emploi dans ce domaine ou exercé une activité suffisamment rémunératrice pour lui procurer un revenu et lui permettre de sortir de l'aide sociale. On ne pouvait affirmer que sans accident, sa situation aurait pu se distinguer de celle qui prévalait auparavant. 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière civile, le demandeur a renouvelé devant le Tribunal fédéral ses conclusions en paiement de 110'000 fr. à titre de perte de gain, en l'invitant subsidiairement à "renvoyer la cause aux Juges cantonaux pour nouvelle instruction et décision au sens des considérants". 
Sa demande d'assistance judiciaire a été admise par ordonnance du 8 février 2022. 
Les deux parties intimées ont conclu à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet, ce qui a suscité une réplique du recourant, à laquelle elles ont dupliqué. 
L'autorité précédente s'est référée à son arrêt. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Les conditions de recevabilité du recours en matière civile sont réalisées sur le principe, notamment celles afférentes à la valeur litigieuse minimale de 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF) et au délai de recours (art. 100 al. 1 LTF). 
 
2.  
Le demandeur reproche principalement à la Cour de justice d'avoir tranché une question sortant du cadre défini le 8 mai 2019, date à laquelle "l'instruction de la cause a[vait] été limitée à la question de l'existence d'un cas de responsabilité civile", tandis que la problématique du dommage devait être abordée ultérieurement. En statuant sur ce dernier point sans lui avoir permis de se déterminer, la Cour aurait enfreint l'art. 125 let. a CPC et son droit d'être entendu, y compris son droit à la preuve. 
 
2.1. Selon l'art. 52 CPC, "quiconque participe à la procédure doit se conformer aux règles de la bonne foi". Cette obligation vaut pour les parties comme pour le juge (arrêt 4A_590/2016 du 26 janvier 2017 consid. 2.1; cf. aussi art. 9 Cst., s'agissant du juge). Elle concrétise le droit à un procès équitable et le droit à l'égalité des armes (arrêt 4A_267/2014 du 8 octobre 2014 consid. 4.1 et les réf. citées; ISABELLE CHABLOZ, in Petit commentaire, Code de procédure civile, 2020, n° 5 ad art. 52 CPC).  
 
2.2.  
 
2.2.1. La responsabilité civile de l'entreprise de transport, en tant que détenteur de l'autobus conduit par son employé fautif, n'était pas discutée (art. 58 al. 1 et 4 LCR [RS 741.01]). Il restait au demandeur à prouver que l'accident lui avait causé des lésions corporelles diminuant ou supprimant sa capacité de travail, et qu'il en résultait une perte de gain (art. 46 al. 1 CO). Pour déterminer les conséquences pécuniaires de l'incapacité de travail, il faut estimer le revenu qu'aurait réalisé la victime sans l'accident. Le dommage résulte de la différence entre ce revenu hypothétique et le revenu qui peut être réalisé après l'accident (ATF 131 III 360 consid. 5.1; arrêt 4A_310/2014 du 10 octobre 2014 consid. 2.2).  
Dans ce contexte, le litige pouvait se découper en deux séquences: 
 
- l'accident avait-il provoqué des lésions corporelles entraînant une incapacité de travail? Et si oui, 
- dans quelle mesure le demandeur subissait-il de ce fait une perte de gain? 
En application de l'art. 125 let. a CPC, qui vise à "simplifier le procès", le premier juge a décidé dans un premier temps de limiter la procédure à " l'existence d'un cas de responsabilité civile ". Comme il l'explique dans son jugement, il s'agissait plus exactement de résoudre la question du lien de causalité naturelle entre l'accident et les atteintes à la santé (invalidantes) dont souffrait le demandeur. En cas de réponse affirmative, il "abord[erait] ultérieurement" la question du dommage et rechercherait alors si et dans quelle mesure l'incapacité de travail imputable à l'accident avait généré une perte de gain.  
Les atteintes à la santé et l'incapacité de travail n'ont semble-t-il guère prêté à discussion. En revanche, vu les pathologies antérieures du demandeur, il s'est révélé nettement plus délicat de déterminer dans quelle mesure l'incapacité de travail était influencée par l'accident. L'arrêt attaqué indique que l'intéressé présentait déjà une discopathie sévère mais asymptomatique, ainsi qu'un état dépressif depuis 2005. La première avait contribué de façon importante aux douleurs et difficultés actuelles. Le second avait été suivi d'un déconditionnement physique - sédentarisation et prise de poids -, et ce tableau avait encore aggravé les souffrances et ralenti le processus de guérison. En bref, constataient les juges d'appel, les atteintes à la santé reposaient sur un concours de causes. 
Cela impliquait de déterminer si et dans quelle mesure l'incapacité de travail du demandeur présentait encore un lien avec l'accident, ou si le status quo sine avait été atteint (moment auquel l'état de santé redevient similaire à celui qui existerait même sans l'accident, par suite de l'évolution "ordinaire" des pathologies antérieures; cf. ATF 146 V 51 consid. 5.1; arrêts 8C_520/2020 du 3 mai 2021 consid. 6.1.2; 4A_558/2020 du 18 mai 2021 consid. 7 ab principio).  
Le premier juge s'est fait fort de répondre à cette question. Sur la base des renseignements médicaux recueillis, il a considéré que l'accident n'influait plus sur les douleurs encore ressenties par le demandeur. Rappelant que la procédure avait été limitée à cette question de causalité, il a ajouté "pour le surplus", soit à titre superfétatoire, que la preuve du dommage n'était pas apportée. Il a ensuite renoncé à cette précision oratoire pourtant importante dans sa synthèse finale, où il rejette la demande en invoquant d'une part l'absence de preuve du dommage, d'autre part l'absence de causalité entre l'accident et les atteintes à la santé.  
 
2.2.2. Le point de bascule a en revanche clairement été franchi par l'autorité d'appel. Confrontée à la délicate question médicale de la causalité entre l'accident et les atteintes à la santé invalidantes du demandeur, voulant aussi éviter l'écueil d'une expertise, la Cour de justice a préféré écarter cette question ou, pour reprendre ses mots, renoncer à dire "dans quelle mesure les séquelles actuelles [étaie]nt dues à l'accident ou à l'état antérieur" du demandeur. Elle s'est alors appuyée sur l'absence de preuve du dommage (cf. let. B.b infra), jugeant probablement l'argument plus expéditif et plus sûr.  
 
2.3. On concédera aux juges genevois que prima facie, il était plus logique de commencer par élucider la question du lien de causalité entre l'accident et les pathologies du demandeur, respectivement l'incapacité de travail en découlant (consid. 2.2.1 supra). Toutefois, l'instruction a finalement révélé qu'il était plus simple et rapide de résoudre la seconde question afférente au dommage. De fait, déterminer le lien de causalité entre l'accident et le status d'un patient présentant un état maladif antérieur n'est pas chose aisée, notamment en présence d'un traumatisme crânio-cérébral évoluant vers un syndrome douloureux chronique (cf. arrêt p. 5 let. m i.f.); ce genre de question divise typiquement les médecins. Et la mise en oeuvre d'une expertise entraînerait sans conteste une prolongation de la procédure. Aussi le revirement esquissé par le premier juge, et assumé par la Cour de justice, n'apparaît pas critiquable en soi. C'est bien plutôt la manière dont il s'est opéré qui fait tressaillir.  
Telle qu'elle a été décidée le 8 mai 2019, la limitation de la procédure signifiait que le juge commencerait par élucider la question de la causalité entre l'accident et les atteintes à la santé invalidantes, puis traiterait au besoin la thématique du dommage dans une étape ultérieure. Les parties, et en particulier le demandeur, pouvaient légitimement s'attendre à ce qu'il statue uniquement sur le lien de causalité entre l'accident et l'état de santé du demandeur (respectivement son incapacité de travail), à l'exclusion du dommage. Etonnamment, le premier juge a aussi fait porter l'instruction sur des éléments concernant la perte de gain, et il ne semble pas que le demandeur ait réagi à ce sujet. Néanmoins, vu la limitation de la procédure, il pouvait de bonne foi penser que cette question ne serait pas définitivement tranchée - et le premier juge s'y est tenu, proposant un argument superfétatoire. 
La Cour de justice, et dans son sillage les parties adverses, semblent considérer qu'elle s'est confinée dans le cadre prédéfini le 8 mai 2019 en traitant une autre question de causalité, soit celle du rapport entre l'acte générateur de responsabilité (ou les atteintes à la santé consécutives) et le préjudice allégué (arrêt attaqué, p. 12 i.f.et p. 13 consid. 2 i.f.). Il n'en est rien. Elle est bel et bien sortie du programme annoncé à la date précitée en traitant du dommage, et a tranché définitivement cette question en considérant qu'il n'avait pas été prouvé.  
Or, la Cour de justice ne pouvait adopter un procédé aussi abrupt - quand bien même elle jugeait l'instruction suffisante et rejetait les griefs visant à la compléter. A vrai dire, la lecture des décisions ne renseigne pas sur la manière précise dont l'instruction a été conduite, en particulier sur le point de savoir si elle a couvert tous les allégués et moyens de preuves proposés à propos de cette question, qui était provisoirement réservée. De toute façon, avant d'opérer un revirement et de statuer sur la question du dommage, il eût fallu formellement élargir la procédure en ce sens et permettre aux parties de rebondir. 
En agissant sans crier gare et en ne respectant pas les assurances découlant de la décision de limiter la procédure au "cas de responsabilité civile", à l'exclusion du dommage, la Cour de justice a privé les parties des garanties d'un procès équitable, et notamment du droit au respect des règles de la bonne foi. 
 
3.  
 
3.1. Pour ces motifs, le recours doit être admis et l'arrêt attaqué annulé. La cause sera renvoyée à l'autorité précédente, qui décidera librement si, en fin de compte, elle veut déterminer "dans quelle mesure les séquelles actuelles sont dues à l'accident ou à l'état antérieur" du demandeur, respectivement si elle juge nécessaire de recueillir une expertise pluridisciplinaire (elle avait laissé cette question en suspens), ou si elle juge plus expédient de statuer sur la question du dommage, auquel cas la procédure devra être élargie formellement et les parties dûment interpellées. La Cour de justice choisira aussi (arrêt 4A_431/2017 du 2 mai 2018 consid. 4.2) si elle donne suite elle-même à cet arrêt de renvoi ou si elle juge opportun de transmettre la cause au premier juge.  
 
3.2. Vu ce qui précède, le traitement des autres griefs est prématuré. En particulier, il serait inopportun de se prononcer à ce stade sur l'appréciation des preuves. Cela étant, les critiques du demandeur concernant l'instruction de la perte de gain appellent déjà un commentaire.  
L'intéressé reproche au premier juge de ne pas avoir fait usage de son droit d'interpeller directement l'Hospice général, qui se serait abstenu de lui remettre son dossier sur la période 2011-2016. En outre, le magistrat aurait dû insister pour obtenir la levée du secret de fonction de l'assistante sociale; s'il est vrai que cette dernière n'avait rien à dire sur l'accident, elle pouvait en revanche attester de ses efforts de réinsertion. 
Sauf erreur, le premier point n'a pas été soulevé dans l'appel, ce qui pourrait déjà couper court au grief. Au demeurant, il faut garder à l'esprit la possibilité de renoncer à des mesures probatoires par appréciation anticipée. En l'occurrence, on ne discerne prima facie guère l'utilité d'interpeller directement l'Hospice général, sachant que le demandeur prétend tout au plus avoir exercé dans ce laps de temps des emplois non déclarés et reste muet sur les revenus qu'il a pu en retirer (recours, p. 5).  
Pour le surplus, la Cour de justice a simplement pris acte du refus de laisser témoigner l'assistante sociale, en disculpant le premier juge. Si, réellement, le motif du refus tenait au fait que cette dernière n'avait été "témoin d'aucun fait en lien avec le litige" (recours p. 5), on concédera au demandeur que le juge eût pu renouveler sa requête en l'étayant davantage. On ignore si le demandeur a réagi à l'époque. De toute façon, la cour d'appel gardait dans sa panoplie la possibilité d'y renoncer, par appréciation anticipée des preuves. L'arrêt attaqué souffre peut-être simplement d'une motivation trop concise sur ce point. 
 
4.  
Le recourant obtient gain de cause. Aussi les deux parties adverses supporteront-elles l'émolument judiciaire, à parts égales et solidairement (art. 66 al. 1 et 5 LTF). Quant à l'indemnité de dépens pour les frais de défense du recourant (art. 68 al. 1 et 2 LTF), elles la verseront à son avocat d'office (arrêts 5A_825/2021 du 31 mars 2022 consid. 5; 4A_376/2018 du 7 août 2019 consid. 7; GRÉGORY BOVEY, in Commentaire de la LTF, 3e éd. 2022, n° 65 ad art. 64 LTF). Si celui-ci ne parvient pas à la recouvrer, la Caisse du Tribunal fédéral y suppléera. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis. L'arrêt attaqué est annulé et la cause renvoyée à la cour cantonale afin qu'elle rende une nouvelle décision dans le sens des considérants. 
 
2.  
Les frais de justice, fixés à 4'000 fr., sont mis à la charge des intimés, solidairement entre eux. 
 
3.  
Les intimés, débiteurs solidaires, verseront à l'avocat d'office du recourant une indemnité de 5'000 fr. à titre de dépens. Au cas où ceux-ci ne pourraient pas être recouvrés, la Caisse du Tribunal fédéral versera ce montant au mandataire. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 18 juillet 2022 
 
Au nom de la I re Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Hohl 
 
La Greffière : Monti