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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
2A.734/2004/VIA/elo 
{T 0/2} 
 
Arrêt du 18 août 2005 
IIe Cour de droit public 
 
Composition 
MM. et Mme les Juges Merkli, Président, Yersin et Berthoud, Juge suppléant. 
Greffier: M. Vianin 
 
Parties 
X.________SA, en liquidation, recourante, 
représentée par Me Henri-Philippe Sambuc, avocat, 
 
contre 
 
Administration fédérale des contributions, Division principale de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), Schwarztorstrasse 50, 3003 Berne, 
 
Commission fédérale de recours en matière de contributions, avenue Tissot 8, 1006 Lausanne. 
 
Objet 
taxe sur la valeur ajoutée; modifications postérieures de la base imposable, 
 
recours de droit administratif contre la décision de la Commission fédérale de recours en matière de contributions du 22 novembre 2004. 
 
Faits: 
A. 
X.________ SA (ci-après: la Société ou la recourante), qui avait pour but la messagerie, le transport et tous autres services et activités en relation avec les transports locaux et internationaux, a été immatriculée en qualité d'assujettie au sens de l'art. 17 al. 1 de l'ordonnance du 22 juin 1994 régissant la taxe sur la valeur ajoutée (OTVA; RO 1994 1464 ss et les modifications ultérieures) du 1er janvier 1995 au 31 mars 1999. Elle décomptait selon les contre-prestations conve- nues. Elle a été dissoute par décision de son assemblée générale du 20 avril 1998. 
 
A la suite d'un contrôle fiscal, l'Administration fédérale des contributions, Division principale de la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après: l'Administration fédérale) a notifié à la Société, le 11 novembre 1998, une décision la condamnant à payer 39'997 fr. 88 à titre d'impôt et 3'022 fr. à titre d'intérêts moratoires. Cette imposition correspondait à certaines corrections opérées tant en faveur qu'en défaveur de la Société pour les périodes fiscales allant du 1er trimestre 1995 au quatrième trimestre 1996. 
 
Le 11 décembre 1998, la Société a interjeté une réclamation contre cette décision. Le 20 août 1999, elle a informé l'Administration fédérale de ce qu'une transaction était intervenue les 16 et 18 août 1999 dans le litige l'opposant à son partenaire contractuel, Y.________ AG. Selon cet accord, la Société renonçait à exiger le paiement du solde des factures adressées à Y.________ AG, à concurrence de 776'422 fr. 12 et Y.________ AG abandonnait la créance de 2'255'262 fr. 25 dont elle se prévalait à son égard. La Société a déduit de cette convention au plan de la TVA que chaque renonciation valait contre-prestation de l'autre et qu'elle était créancière de l'Administration fédérale à hauteur de 103'572 fr., subsidiairement de 53'058 fr. 
 
Par décision sur réclamation du 26 novembre 2002, l'Administration fédérale a admis partiellement la réclamation et réformé sa décision en ce sens qu'un montant de 7'389 fr. 37 devait être restitué à la Société. Elle a notamment annulé l'imposition du chiffre d'affaires de 776'422 fr. 12 auquel la Société avait renoncé (nouvel avis de crédit du 26 novembre 2002). En revanche, elle a pris en considération, à titre de correction de la déduction de l'impôt préalable, un montant de 137'645 fr. correspondant à 6,1033 % de la créance de 2'255'662 fr. 25 abandonnée par Y.________ AG, pour laquelle il fallait présumer que l'impôt préalable avait été déduit (chiffre 4 du dispositif, se référant au nouveau décompte complémentaire du 26 novembre 2002, relatif aux périodes fiscales allant du 1er janvier 1995 au 31 mars 1999). 
B. 
La Société a déféré cette décision à la Commission fédérale de recours en matière de contributions (ci-après: la Commission de recours), qui a rejeté le recours par décision du 22 novembre 2004. Analysant les conséquences en matière de TVA de la convention des 16 et 18 août 1999, cette autorité a retenu que l'accord en question entraînait une modification de la base d'imposition au sens des art. 31 et 35 OTVA nécessitant une régularisation de la TVA d'amont et d'aval. La Société n'ayant pas produit la facture portant sur le montant de 2'255'262 fr. 25 ni aucun document probant en relation avec la déduction de l'impôt préalable, la Commission de recours a confirmé que l'Administration fédérale était fondée à présumer que l'impôt préalable avait été déduit au moment de l'établissement de la facture, conformément à la méthode de décompte selon les contre-prestations convenues. La correction opérée par l'Administration fédérale le 26 novembre 2002 était en conséquence justifiée. 
C. 
Agissant par la voie du recours de droit administratif, la Société demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler la décision de la Commission de recours du 22 novembre 2004 et celle de l'Administration fédérale du 26 novembre 2002 et de condamner cette dernière à lui verser la somme de 90'258 fr. plus intérêt à 5% l'an dès le 1er septembre 1999. Elle dénonce la violation du principe de la bonne foi et du droit à la preuve et se plaint d'une appréciation arbitraire des faits constatés par la Commission de recours. 
 
La Commission de recours se réfère à sa décision et renonce à présenter des observations. L'Administration fédérale conclut au rejet du recours. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
1.1 Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 130 I 312 consid. 1 p. 317; 130 II 388 consid. 1 p. 389, 321 consid. 1 p. 324). 
1.2 Formé contre une décision au sens de l'art. 5 PA, prise par une Commission fédérale de recours (art. 98 lettre e OJ) et fondé sur le droit public fédéral, le présent recours, qui ne tombe sous aucune des exceptions mentionnées aux art. 99 à 102 OJ, est en principe recevable en vertu des art. 97 ss OJ ainsi que de la règle particulière des art. 54 al. 1 OTVA et 66 al. 1 de la loi fédérale du 2 septembre 1999 régissant la TVA (LTVA; RS 641.20). 
1.3 La Commission de recours ayant un plein pouvoir d'examen (art. 49 en relation avec l'art. 71a al. 2 PA), son prononcé se substitue à la décision de l'Administration fédérale (effet dévolutif complet; voir Fritz Gygi, Bundesverwaltungsrechtspflege, 2ème éd., Berne 1983, p. 189 s.). Dès lors, le recours devant l'instance de céans peut seulement avoir pour objet le prononcé en question et la conclusion tendant à l'annulation de la décision de l'Administration fédérale du 26 novembre 2002 est irrecevable. 
 
Sous cette réserve, le présent recours, déposé dans les formes et le délai requis, est recevable. 
2. 
2.1 Selon l'art. 104 lettre a OJ, le recours de droit administratif peut être formé pour violation du droit fédéral, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation. Le Tribunal fédéral revoit d'office l'application du droit fédéral, qui englobe notamment les droits constitutionnels (ATF 130 III 707 consid. 3.1. p. 709; 130 I 312 consid. 1.2 p. 318 et les arrêts cités). Comme il n'est pas lié par les motifs que les parties invoquent, il peut admettre le recours pour d'autres raisons que celles avancées par le recourant ou, au contraire, confirmer la décision attaquée pour d'autres motifs que ceux retenus par l'autorité intimée (art. 114 al. 1 in fine OJ; ATF 130 III 707 consid. 3.1 p. 709; 130 I 312 consid. 1.2 p. 318 et les arrêts cités). 
 
De surcroît, en matière de contributions publiques, le Tribunal fédéral peut aller au-delà des conclusions des parties, à l'avantage ou au détriment de celles-ci, lorsque le droit fédéral est violé ou lorsque des faits ont été constatés de manière inexacte ou incomplète (art. 114 al. 1 OJ). 
 
En revanche, lorsque le recours est dirigé, comme en l'occurrence, contre la décision d'une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral est lié par les faits constatés dans la décision, sauf s'ils sont manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils ont été établis au mépris de règles essentielles de procédure (art. 104 lettre b et 105 al. 2 OJ; ATF 130 II 149 consid. 1.2 p. 154; 128 II 145 consid. 1.2.1 p. 150). En outre, le Tribunal fédéral ne peut pas revoir l'opportunité de la décision entreprise, le droit fédéral ne prévoyant pas un tel examen en la matière (art. 104 lettre c ch. 3 OJ). 
2.2 Selon l'art. 93 al. 1 de la loi fédérale régissant la taxe sur la valeur ajoutée, entrée en vigueur le 1er janvier 2001, les dispositions abrogées et leurs dispositions d'exécution restent applicables, sous réserve d'exceptions non réalisées en l'espèce, à tous les faits et rapports juridiques ayant pris naissance au cours de leur durée de validité. 
 
L'ordonnance régissant la taxe sur la valeur ajoutée, en vigueur jusqu'au 31 décembre 2000, s'applique dès lors au présent litige, qui porte sur les périodes fiscales allant du premier trimestre 1995 au premier trimestre 1999. 
3. 
3.1 La recourante soutient que la créance de Y.________ AG de 2'255'262 fr. 25 correspond à une "prétention en dédommagement" qui n'a jamais fait l'objet ni d'une facture ni d'un crédit de la TVA y afférente, qu'il incombait à l'Administration fédérale, en application du principe de la bonne foi et du droit à la preuve au sens des art. 2 et 8 CC, de requérir expressément la production des pièces propres à établir cette absence de facture et de déclaration TVA l'incluant et que la présomption retenue par l'autorité intimée est sans fondement et, partant, illicite. 
3.2 D'une manière générale, la procédure administrative est régie, s'agissant de l'établissement des faits, par la maxime inquisitoriale selon laquelle l'autorité appelée à statuer établit les faits d'office (André Grisel, Traité de droit administratif, tome II, Neuchâtel 1984, p. 929; Alfred Kölz/Isabelle Häner, Verwaltungsverfahren und Verwaltungsrechtspflege des Bundes, 2ème éd., Zurich 1998, p. 37; Xavier Oberson, Le contentieux fiscal, in: OREF [édit.], Les procédures en droit fiscal, Berne et autres 1997, p. 136). Ce principe est tempéré, notamment en droit fiscal, par l'obligation des parties de collaborer à l'établissement des faits. En particulier, on peut attendre du contribuable qu'il allègue les faits de nature à diminuer la charge fiscale et qu'il donne les renseignements et produise les documents propres à les établir, surtout s'il est seul à les détenir (2A.507/2002, RDAF 2004 II p. 136 consid. 3.3; Oberson, op. cit., p. 136 s.). Une telle règle est conforme au principe général de la répartition du fardeau de la preuve prévu par l'art. 8 CC
3.3 En l'espèce, l'Administration fédérale a expressément requis de la recourante, par lettre du 9 avril 2002, une copie de la facture de Y.________ AG portant sur la somme de 2'255'262 fr. 25 ainsi qu'un extrait de sa comptabilité concernant l'enregistrement de la TVA relative à ce montant. La recourante ne s'est pas exécutée. Elle n'a jamais fourni les documents requis, que ce soit en procédure devant l'Administration fédérale, devant la Commission de recours ou dans le cadre de la présente procédure de recours. Son affirmation selon laquelle la créance de Y.________ AG constituerait en fait une "prétention en dédommagement" n'est étayée par aucune explication sur la nature du dédommagement invoqué. La seule pièce produite à cet égard est un courrier du conseil de Y.________ AG du 3 juin 1998 dans lequel celui-ci fait bien mention d'un dédommagement lié au contrat de "franchisage" et de coopération conclu entre parties le 29 décembre 1994; il déclare toutefois se référer à ce sujet aux différentes factures originales de Y.________ AG en possession de la recourante. La recourante détenait donc apparemment les factures permettant d'établir le fondement de la prétention de Y.________ AG et il lui incombait de les produire, indépendamment des intentions qu'elle pouvait prêter à l'Administration fédérale. Les principes de répartition du fardeau de la preuve lui imposaient également de renseigner l'Administration fédérale au sujet de l'impôt préalable déduit, en détaillant de manière précise les factures se rapportant à cet impôt. Cette manière de faire lui aurait permis, le cas échéant, de démontrer que l'impôt préalable déduit ne comprenait pas celui relatif à la facture de 2'255'262 fr. 25 de Y.________ AG ou aux différentes factures composant ce montant. 
 
L'absence de collaboration de la recourante autorisait l'Administration fédérale à présumer que l'impôt préalable avait été déduit, conformément à la méthode de décompte appliquée par la recourante, soit selon les prestations convenues. L'autorité intimée n'a donc pas violé les principes de la bonne foi et de la répartition du fardeau de la preuve en confirmant la licéité de cette présomption. 
4. 
4.1 Invoquant une "violation arbitraire de la Commission fédérale de recours des faits constatés par elle", la recourante qualifie l'attitude de l'autorité intimée de contradictoire: celle-ci aurait confirmé la présomption que la recourante avait déduit l'impôt préalable afférent au montant de 2'255'262 fr. 25, tout en admettant qu'elle ne pouvait pas avoir déduit l'impôt préalable relatif à la fois à cette créance et à une autre créance de Y.________ AG, d'un montant de 1'800'000 fr., l'impôt préalable correspondant à ces deux créances étant en effet supérieur à la somme des montants ressortant des décomptes établis pour les années 1995 et 1996. 
4.2 L'existence d'une prétention de Y.________ AG de 1'800'000 fr. ressort exclusivement d'un courrier de la recourante du 11 juillet 1996, où celle-ci a indiqué à l'Administration fédérale que Y.________ AG lui avait facturé 1'800'000 fr. pour ses prestations, montant contesté mais comptabilisé jusqu'à droit jugé. Cette somme de 1'800'000 fr. ne se retrouve pas comme telle dans les comptes de la recourante. L'Administration fédérale s'y est notamment référée, dans sa décision du 26 novembre 2002, pour retenir que si la recourante avait comptabilisé l'impôt préalable afférent à cette facture, il n'existait pas de raison objective de penser qu'elle aurait agi différemment avec la facture de 2'255'262 fr. 25. L'Administration fédérale a donc émis l'hypothèse de l'existence de deux créances de Y.________ AG à l'encontre de la recourante. La Commission de recours a critiqué cette hypothèse, en relevant qu'il était impossible que la recourante ait réclamé l'impôt préalable relatif à deux factures de cette ampleur; en effet, le montant de l'impôt préalable réclamé aurait alors été supérieur au montant global ressortant des décomptes relatifs aux années 1995 et 1996. L'autorité intimée a donc implicitement nié l'hypothèse de l'existence de deux prétentions distinctes de Y.________ AG. Il est en effet vraisemblable que le montant de 1'800'000 fr. articulé par la recourante constituait un ordre de grandeur des prétentions de Y.________ AG qui se sont finalement élevées à 2'255'262 fr. 25. C'est à bon droit que l'autorité intimée a retenu que la prétention de Y.________ AG a atteint la somme de 2'255'262 fr. 25 à la fin du premier semestre 1996. En effet, dans sa lettre du 3 juin 1998, le conseil de Y.________ AG a précisé que la créance de sa cliente, par 2'255'262 fr. 25, portait intérêt à 5% l'an dès le 30 juin 1996. Or, l'impôt préalable que la recourante a pu réclamer est compatible, pour une telle créance, avec le montant global ressortant des décomptes produits pour 1995 et 1996. C'est donc en vain que la recourante se prévaut d'une contradiction dans le raisonnement de l'intimée: s'il est exact que la recourante n'aurait pu réclamer un impôt préalable relatif à deux factures totalisant 4'055'262 fr. 25 (1'800'000 fr. + 2'255'262 fr. 25), elle était en mesure de le faire pour une facture de 2'255'262 fr. 25 ou pour plusieurs factures correspondant globalement à cette somme. 
 
Pour le surplus, la présomption de l'Administration fédérale, confirmée par la Commission de recours, aurait pu, le cas échéant, être renversée par la production de la facture (ou des factures) de Y.________ AG et de l'ensemble des factures correspondant au montant total de l'impôt préalable déduit pour 1995 et 1996. Faute d'avoir collaboré utilement à l'établissement des faits propres à fonder son point de vue, la recourante ne peut pas se plaindre d'une appréciation arbitraire de ces faits et s'opposer à la présomption que l'impôt préalable a été déduit, conformément à la méthode de décompte qui lui était applicable. 
5. 
Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
Succombant, la recourante doit supporter les frais judiciaires (art. 156 al. 1, 153 et 153a OJ). Il n'y a pas lieu de lui allouer de dépens. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
2. 
Un émolument judiciaire de 5'000 fr. est mis à la charge de la recourante. 
3. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire de la recourante, à l'Administration fédérale des contributions, Division principale de la taxe sur la valeur ajoutée, ainsi qu'à la Commission fédérale de recours en matière de contributions. 
Lausanne, le 18 août 2005 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: Le greffier: