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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1P.430/2002/ngu 
 
Arrêt du 18 octobre 2002 
Ire Cour de droit public 
 
Les juges fédéraux Aemisegger, président de la Cour et vice-président du Tribunal fédéral, 
Nay, Reeb, 
greffier Parmelin. 
 
X.________, 
recourant, représenté par Me Michel Dupuis, avocat, case postale 3860, 1002 Lausanne, 
 
contre 
 
Procureur général du canton de Vaud, rue de l'Université 24, case postale, 1014 Lausanne, 
Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud, route du Signal 8, 1014 Lausanne. 
 
art. 9 et 29 al. 2 Cst.; indemnité allouée au défenseur d'office 
 
recours de droit public contre l'arrêt de la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 13 juin 2002. 
 
Faits: 
A. 
Par jugement du 13 décembre 2001, le Tribunal criminel de l'arrondissement de La Broye et du Nord vaudois a condamné Y.________ à six ans de réclusion pour infractions graves à la loi fédérale sur les stupéfiants, à son expulsion du territoire suisse pour une durée de quinze ans et au paiement d'une créance compensatrice de 14'000 fr. en faveur de l'Etat de Vaud. 
Agissant par l'intermédiaire de son conseil d'office, Me X.________, Y.________ a recouru contre ce jugement en concluant à sa réforme dans le sens d'une réduction sensible de la peine. Il contestait en substance l'appréciation du tribunal suivant laquelle il aurait toujours vécu en marginal, se moquant des lois en vigueur dans les pays qui l'accueillaient; il insistait également sur la quantité de drogue finalement retenue à son encontre, largement inférieure à celle qui lui était initialement reprochée, de même que sur l'absence de nouvelles infractions commises depuis 1991, qui auraient dû amener les premiers juges à prononcer une peine moins sévère. 
Statuant par arrêt du 13 juin 2002, la Cour de cassation pénale du canton de Vaud (ci-après: la Cour de cassation pénale ou la cour cantonale) a rejeté le recours et confirmé le jugement attaqué; elle a mis les frais de deuxième instance, comprenant l'indemnité allouée au défenseur d'office par 275 fr., à la charge de Y.________. 
B. 
Agissant par la voie du recours de droit public pour violation des art. 9 et 29 al. 2 Cst., X.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt, en tant qu'il porte sur l'indemnité qui lui a été allouée à titre de défenseur d'office, et de renvoyer la cause à la Cour de cassation pénale pour nouvelle instruction et nouveau jugement dans le sens des considérants. Il voit une violation de son droit d'être entendu dans le fait que la cour cantonale n'a pas motivé sa décision sur ce point. Par ailleurs, le montant de l'indemnité qui lui a été accordée ne tiendrait pas compte de l'activité effectivement consacrée pour la rédaction du mémoire de recours, qu'il estime à quatre heures, et ne suffirait pas à couvrir ses frais généraux. 
Invitée à se déterminer, la Cour de cassation pénale a précisé que l'indemnité allouée au recourant avait été arrêtée en fonction du nombre de pages du mémoire de recours, à raison de 55 fr. par page, en l'absence de circonstances particulières justifiant un autre mode de fixation. Le Procureur général du canton de Vaud s'en remet à justice. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Le recourant est personnellement touché par l'arrêt attaqué qui confirme sa rémunération en violation, selon lui, des règles du droit cantonal lui garantissant une indemnité équitable; il a un intérêt personnel, actuel et juridiquement protégé à ce que cet arrêt soit annulé, et a, partant, qualité pour recourir selon l'art. 88 OJ. Formé en temps utile contre une décision finale rendue en dernière instance cantonale, le recours répond aux exigences des art. 86 al. 1 et 89 al. 1 OJ. La conclusion tendant à ce que l'affaire soit renvoyée à l'autorité intimée pour nouvelle instruction et nouveau jugement dans le sens des considérants est au surplus superfétatoire (cf. ATF 112 Ia 353 consid. 3c/bb p. 354). 
2. 
Le recourant prétend que l'indemnité qui lui a été allouée ne tiendrait pas compte de l'activité effectivement consacrée pour la rédaction du mémoire de recours, qu'il estime à quatre heures, et ne suffirait pas à couvrir ses frais généraux. 
2.1 Selon la jurisprudence rendue en application de l'art. 4 aCst., dont il n'y a pas lieu de se départir sous l'empire des art. 9 et 29 al. 3 Cst., l'avocat d'office a, contre l'Etat, une prétention de droit public à être rétribué dans le cadre des prescriptions cantonales applicables; il ne s'agit dès lors pas d'examiner à quelle rémunération l'avocat pourrait prétendre dans le cadre d'une activité librement consentie et pleinement rétribuée, mais de savoir ce que l'avocat peut exiger de l'Etat au titre de l'assistance judiciaire. Dans l'application des normes cantonales, l'autorité dispose d'un large pouvoir d'appréciation et l'avocat n'est protégé, en principe, que contre l'application arbitraire de ces normes. Toutefois, l'avocat d'office a droit au moins au remboursement intégral de ses débours, ainsi qu'à une indemnité tenant compte de la nature et de l'importance de la cause, des difficultés particulières que celle-ci peut présenter en fait et en droit, du temps que l'avocat lui a consacré, de la qualité de son travail, du nombre des conférences, audiences et instances auxquelles il a pris part, du résultat obtenu et de la responsabilité qu'il a assumée. 
A condition d'être équitable, il est admis que la rémunération de l'avocat d'office puisse être inférieure à celle du mandataire choisi. En principe, elle devrait couvrir les frais généraux de ce praticien, dont on estime qu'ils correspondent d'ordinaire à au moins quarante pour cent du revenu professionnel brut, voire à la moitié de celui-ci. Une indemnité qui ne correspond pas au moins à cette fraction des honoraires de l'avocat choisi, normalement destinée à couvrir les frais généraux de l'étude, doit en principe être considérée comme inéquitable (ATF 122 I 1 consid. 3a et 3c p. 2 ss et les références citées; voir aussi ATF 122 I 322 consid. 3b p. 325). Des différences de traitement peuvent toutefois se justifier suivant que le défenseur d'office est un avocat patenté ou un avocat stagiaire (ATF 109 Ia 107 consid. 3e p. 112/113). 
2.2 Les art. 27 à 30 du Tarif des frais judiciaires pénaux, adopté le 17 août 1999 par le Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le Tarif), fixent le montant de l'indemnité allouée au défenseur d'office. Selon l'art. 28 du Tarif, ce dernier reçoit, pour un recours à la Cour de cassation, une indemnité pouvant aller jusqu'à 2'000 francs. Suivant l'art. 29 du Tarif, l'indemnité allouée tient compte du fait que le défenseur d'office est un stagiaire ou un avocat breveté. A teneur de l'art. 30 du Tarif, le défenseur d'office soumet à l'autorité compétente, avant la décision statuant sur les frais, la liste détaillée de ses opérations et débours, lorsqu'il a dû déployer une activité telle que les indemnités ci-dessus sont manifestement insuffisantes (al. 1). L'autorité compétente fixe alors une indemnité équitable par décision brièvement motivée et communiquée au défenseur d'office (al. 2). 
2.3 En l'occurrence, le recourant ne prétend pas avoir dû déployer une activité telle qu'il se justifierait de s'écarter du montant maximum de 2'000 fr. prévu à l'art. 28 du Tarif en cas de recours à la Cour de cassation pénale. Le Tarif ne précise cependant pas de quelle manière l'indemnité due au défenseur d'office doit être fixée à l'intérieur de la fourchette prévue par cette disposition. Se référant à une pratique bien établie, la cour cantonale a estimé que l'indemnité allouée au défenseur d'office ayant déjà assisté son client en première instance pour la procédure de recours devait être fixée en fonction du nombre de pages du mémoire de recours, à raison de 55 fr. par page pour un avocat breveté et de 30 fr. pour un stagiaire, sauf circonstances particulières justifiant un autre mode de fixation. On peut douter de la pertinence de ce critère pour évaluer le travail consacré par l'avocat d'office à la rédaction du mémoire de recours. Cette question peut cependant demeurer ouverte, car le Tribunal fédéral n'annule une décision pour violation de l'art. 9 Cst. que si celle-ci se révèle arbitraire non seulement dans sa motivation, mais également dans son résultat (ATF 127 I 54 consid. 2b p. 56). Or, selon la jurisprudence, l'indemnité allouée au défenseur d'office doit, pour échapper au grief d'arbitraire, à tout le moins couvrir les frais généraux de l'étude, lesquels étaient estimés en 1993 à 165 fr. de l'heure dans le canton de Vaud (cf. Jean-Marc Reymond, Honoraires et concurrence, in: Avocat moderne, mélanges publiés par l'Ordre des Avocats Vaudois à l'occasion de son Centenaire, Bâle 1998, p. 29). Examiné sous cet angle, le montant de l'indemnité allouée au recourant revient en fait à admettre que ce dernier a consacré un peu moins de deux heures de travail à la préparation et à la rédaction du recours. Cette évaluation est manifestement trop basse, fût-ce pour un avocat breveté spécialisé dans le domaine pénal; eu égard aux vérifications que celui-ci devait entreprendre avant de décider de recourir; le chiffre de quatre heures que le recourant affirme, sans être contredit, avoir consacré à la procédure de recours, n'est pas excessif, même si ce dernier ne portait finalement que sur la quotité de la peine et ne soulevait pas de questions de fait ou de droit délicates. L'arrêt de la Cour de cassation pénale aboutit sur ce point à un résultat choquant et inéquitable, qui ne saurait être admis sous l'angle de l'art. 9 Cst. Il convient par conséquent d'admettre le recours pour ce motif et d'annuler l'arrêt attaqué, en tant qu'il porte sur les frais de deuxième instance (chiffre III du dispositif), sans qu'il soit nécessaire d'examiner le mérite du grief tiré de l'absence de motivation. 
3. 
Vu l'issue du recours, l'Etat de Vaud est dispensé des frais judiciaires (art. 156 al. 2 OJ); en revanche, il versera une indemnité de dépens au recourant, qui obtient gain de cause avec l'assistance d'un avocat (art. 159 al. 1 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est admis; le chiffre III du dispositif de l'arrêt rendu le 13 juin 2002 par la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud est annulé. 
2. 
Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire. 
3. 
Une indemnité de 1'500 fr. est allouée au recourant à titre de dépens, à la charge de l'Etat de Vaud. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, ainsi qu'au Procureur général et à la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
Lausanne, le 18 octobre 2002 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le président: Le greffier: