Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
5A_609/2023
Arrêt du 18 décembre 2024
IIe Cour de droit civil
Composition
MM. les Juges fédéraux Herrmann, Président,
Bovey et Hartmann,
Greffière : Mme Bouchat.
Participants à la procédure
A.A.________,
recourant,
contre
B.A.________,
représentée par Me Youri Widmer, avocat,
intimée,
1. C.A.________,
2. D.A.________,
tous les deux représentés par Me Vanessa Chambour, avocate,
Objet
mesures provisionnelles (divorce),
recours contre l'arrêt du Juge unique de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 27 juillet 2023 (TD20.037505-231027 302).
Faits :
A.
B.A.________, née en 1993, et A.A.________, né en 1988, se sont mariés en 2016. Deux enfants sont issus de leur union : C.A.________ et D.A.________, nés respectivement en 2016 et 2018.
Le 28 septembre 2022, l'épouse a déposé une demande unilatérale en divorce.
B.
Statuant le 11 juillet 2023 par voie de mesures provisionnelles, la Présidente du Tribunal civil de l'arrondissement de La Côte, E.________ (ci-après : la présidente du tribunal), a confirmé l'attribution de la garde des deux enfants à la mère (I), réglé le droit de visite du père (II), confirmé la curatelle d'assistance éducative et de surveillance des relations personnelles au sens de l' art. 308 al. 1 et 2 CC et la désignation d'une assistance sociale en qualité de curatrice (III) et fixé à la Direction générale de l'enfance et de la jeunesse du canton de Vaud un délai au 13 octobre 2023 pour adresser à la présidente du tribunal un bref rapport écrit sur le déroulement du droit de visite médiatisé et les perspectives d'évolution (IV).
Par acte du 21 juillet 2023, le père a interjeté appel contre l'ordonnance précitée, en concluant notamment à son annulation (II), à la constatation de la violation de ses droits à dire de justice, de la nullité de l'expertise pédopsychiatrique rendue le 3 juillet 2023 par l'institut de psychiatrie légale du canton de Vaud et de la " violation de l'exhortati on faite à [son épouse] par prononcé partiel " (III à V), à la " confirmation " de la récusation de la présidente du tribunal (VI) et à l'allocation d'une indemnité de 1'500 fr. pour réparation du tort moral (XII).
Par arrêt du 27 juillet 2023, le Juge unique de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal vaudois (ci-après : le juge cantonal ou l'autorité cantonale) a déclaré irrecevable, faute de conclusions et de motivation suffisantes (art. 311 al. 1 CPC), l'appel de l'ex-époux et déclaré irrecevable sa requête de mesures superprovisionnelles en lien avec son droit de visite et la récusation de la présidente du tribunal, pour défaut de motivation suffisante.
C.
Par acte du 22 août 2023, A.A.________ (ci-après : le recourant) a interjeté un recours auprès du Tribunal fédéral contre l'arrêt précité, en concluant à son annulation, son appel du 21 juillet 2023 étant selon lui recevable, et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvel-le décision dans le sens des considérants. Il a également sollicité l'assistance judiciaire, l'attribution de l'effet suspensif au recours et des mesures provisionnelles et superprovisionnelles.
Le 24 août 2023, le recourant a déposé une écriture intitulée " adjonction au recours ", en lien avec sa requête de mesures " superprovisionnel les et provisionnelles" tendant notamment à la récusation de la présidente du tribunal. Le 1er septembre suivant, le recourant a " modifié " les conclusions de ladite requête.
Invités à se déterminer sur ces requêtes, le juge cantonal s'en est rapporté à justice, alors que l'intimée et la curatrice des enfants s'y sont opposées. Toutes deux ont requis l'assistance judiciaire pour la procédure fédérale.
Par courrier du 4 septembre 2023, le recourant a déposé un " complément d'allégués " à l'appui de son recours et de sa requête de mesures provisionnelles et requis la mise en oeuvre d'une " expertise de crédibilité " à l'endroit notamment de l'intimée.
D.
Par ordonnance présidentielle du 27 septembre 2023, le Président de la Cour de céans a déclaré la requête d'effet suspensif ainsi que la requête de mesures provisionnelles irrecevables.
Parallèlement, l'intéressé a également formé un recours devant la Cour de céans contre l'arrêt de la Cour administrative du Tribunal cantonal vaudois rejetant la demande de récusation concernant notamment la présidente du tribunal (cause 5A_981/2023).
Le 30 janvier 2024, le recourant a requis la jonction des deux causes.
Des déterminations sur le fond n'ont pas été requises.
Considérant en droit :
1.
1.1. Le recourant requiert la jonction de la présente cause avec celle portant la référence 5A_981/2023 précitée. Dans la mesure où les causes opposent des parties distinctes (le recourant vs son épouse et ses enfants d'une part et le recourant vs les juges dont la récusation est demandée d'autre part), la requête doit être rejetée (art. 24 PCF en relation avec l'art. 71 LTF).
1.2. L'écriture du recourant est traitée comme un recours en matière civile au sens de l'art. 72 al. 1 LTF. Il n'y a pas lieu d'examiner les autres conditions de recevabilité, ce procédé étant voué à l'échec.
2.
2.1. La décision attaquée portant sur des mesures provisionnelles au sens de l'art. 98 LTF, la partie recourante ne peut dénoncer que la violation de droits constitutionnels. Le Tribunal fédéral n'examine de tels griefs que s'ils ont été invoqués et motivés par le recourant (" principe d'allégation "; art. 106 al. 2 LTF), c'est-à-dire s'ils ont été expressément soulevés et exposés de manière claire et détaillée (ATF 146 IV 114 consid. 2.1; 144 II 313 consid. 5.1). Une décision ne peut être qualifiée d'arbitraire (art. 9 Cst.) que si elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité; il ne suffit pas qu'une autre solution paraisse concevable, voire préférable; pour que cette décision soit annulée, encore faut-il qu'elle se révèle arbitraire non seulement dans ses motifs, mais aussi dans son résultat (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1; 144 III 145 consid. 2).
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autori-té précédente (art. 105 al. 1 LTF). Le recourant qui entend invoquer que les faits ont été établis de manière manifestement inexacte ne peut obtenir la rectification ou le complètement des constatations de fait de l'arrêt cantonal que s'il démontre la violation de droits constitutionnels, conformément au principe d'allégation susmentionné (cf.
supra consid. 2.1). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 143 IV 500 consid. 1.1 et la référence). Le recourant ne peut pas se borner à contredire les constatations litigieuses par ses propres allégations ou par l'exposé de sa propre appréciation des preuves; il doit indiquer de façon précise en quoi ces constatations sont arbitraires au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 133 II 249 consid. 1.4.3). Une critique des faits qui ne satisfait pas à cette exigence est irrecevable (ATF 141 IV 249 consid. 1.3.1; 140 III 264 consid. 2.3 et les références).
3.
Le recourant se plaint notamment de formalisme excessif, constitutif d'un déni de justice, et d'arbitraire dans l'application du droit, en tant que l'autorité cantonale a déclaré irrecevable son appel pour défaut de motivation et conclusions déficientes.
3.1. L'autorité cantonale a estimé que les conclusions de l'appel, lesquels étaient confuses, n'avaient pas de rapport immédiat avec l'ordonnance de première instance, l'époux sollicitant pêle-mêle "la constatation de la violation" de ses droits, la récusation de la présidente du tribunal ou encore l'octroi d'une indemnité pour tort moral. Elle a également relevé qu'il avait conclu à l'annulation pure et simple de l'ordonnance de première instance sans prendre de conclusions en réforme sur les points tranchés et ne précisait en particulier pas ce qu'il souhaitait obtenir s'agissant de l'organisation de son droit de visite. Par ailleurs, il n'expliquait aucunement en quoi l'ordonnance contestée serait erronée et se contentait d'exposer - de manière prolixe et peu claire - sa propre version des faits en s'attardant sur des procédures annexes (devant la justice de paix et les autorités pénales) et en invoquant comme moyen de preuve principal "l'appréciation du tribunal", sans préciser en quoi il y aurait lieu de compléter l'état de fait de l'ordonnance entreprise. Elle a encore relevé, s'appuyant sur la jurisprudence topique, que même rédigé par un non-juriste, l'appel devait permettre de comprendre sur quels points la décision attaquée serait erronée et que l'exigence d'une motivation minimale ne saurait constituer une violation du droit d'être entendu ou de l'interdiction du formalisme excessif. Elle a ainsi considéré qu'à défaut de conclusions et de motivation suffisantes, au sens de l'art. 311 al. 1 CPC, l'appel devait être déclaré irrecevable.
3.2. Le recourant fait grief au juge cantonal de n'avoir pas tenu compte, dans le cadre de l'examen de la recevabilité de son appel, du fait qu'il n'était pas assisté d'un avocat et lui reproche un formalisme excessif, constitutif d'un déni de justice. Quant à l'absence de conclusions en réforme, il expose notamment qu'il était aisé de comprendre que son recours tendait, s'agissant de ses relations personnelles, à la restitution de son droit de visite coutumier dès lors qu'il avait, selon lui, indiqué vouloir "reprendre sa position avant la décision querellée", et invoque à ce titre le principe de la bonne foi et l'interdiction de l'arbitraire. Il émet également diverses critiques relatives d'une part à l'expertise, dont il a demandé "l'annulation" en appel, et d'autre part aux agissements de la curatrice de représentation des enfants. Il reproche encore un manque de motivation de la part du juge cantonal qui n'aurait pas expliqué la raison pour laquelle les procédures annexes et les griefs développés à leur sujet ne pouvaient pas être pris en considération. Il conteste enfin l'irrecevabilité de la requête de mesures superprovisionnelles - portant sur son droit de visite et la récusation de la présidente du tribunal - prononcée par le juge cantonal.
3.3. En l'espèce, force est de relever que le moyen tiré de la référence au simple fait qu'il n'était pas assisté d'un avocat est irrecevable, en tant que le recourant ne s'en prend nullement à la motivation de l'arrêt entrepris (cf.
supra consid. 2.1; art. 106 al. 2 LTF), dont il ressort que l'exigence d'une motivation
minimale imposée à un non-juriste qui rédige lui-même son acte ne saurait constituer une violation du droit d'être entendu ou de l'interdiction du formalisme excessif. Il en va de même du grief relatif au manque de motivation concernant l'absence de traitement de certains griefs en lien avec les procédures annexes (justice de paix et autorités pénales), faute de répondre aux réquisits légaux (cf.
supra consid. 2.1; art. 106 al. 2 LTF).
Le même sort doit être réservé aux critiques concernant ses conclusions jugées déficientes. Il appartenait au recourant, qui conteste le fait de ne pas avoir exposé ce qu'il souhaitait obtenir s'agissant en particulier de l'organisation de son droit de visite, d'indiquer de façon claire et détaillée, soit conformément aux exigences légales (cf.
supra consid. 2.2), en quoi cette constatation était arbitraire (art. 9 Cst.). Au lieu de cela, il se contente de contredire ce qui précède par ses propres allégations - en expliquant avoir demandé à reprendre sa position qui était la sienne avant l'ordonnance de mesures provisionnelles - sans désigner l'acte ni les passages précis auxquels il se réfère. Pour le surplus, le recourant ne prétend pas que l'autorité cantonale aurait appliqué de manière insoutenable l'art. 311 al. 1 CPC (art. 42 al. 2 et 106 al. 2 LTF)
Il n'y a pas non plus lieu d'entrer en matière sur les moyens portant sur le fond du litige (expertise et agissements de la curatrice) ni ordonner la mesure d'instruction requise (" expertise de crédibilité " à l'endroit notamment de l'intimée); en effet, lorsque la décision attaquée est une décision d'irrecevabilité, comme c'est le cas ici, les motifs développés dans le mémoire de recours doivent uniquement porter sur la question de la recevabilité traitée par l'autorité précédente (arrêts 4D_4/2024 du 21 février 2024 consid. 6.1 et les références; 5A_734/2023 du 18 décembre 2023 consid. 2.1 et les références).
Enfin, les divers moyens soulevés en lien avec l'irrecevabilité de la requête de mesures superprovisionnelles - portant sur son droit de visite et la récusation de présidente du tribunal - prononcée par le juge cantonal dans l'arrêt querellé, sont irrecevables, dès lors qu'une telle décision n'est pas susceptible d'un recours en matière civile, sous réserve d'exceptions non pertinentes en l'espèce (ATF 140 III 289 consid. 1.1 et les références; 139 III 86 consid. 1.1.1; 137 III 417 consid. 1.2).
4.
En définitive, le recours est irrecevable. Celui-ci étant voué à l'échec, la requête d'assistance judiciaire déposée par le recourant doit être rejetée (art. 64 al. 1 LTF) et les frais judiciaires seront mis à sa charge (art. 66 al. 1 LTF). Il versera en outre des dépens à l'intimée, qui s'est déterminée sur la requête d'effet suspensif et de mesures provisionnelles ( art. 68 al. 1 et 2 LTF ). Ce qui précède rend en principe sans objet sa requête d'assistance judiciaire; il convient néanmoins de l'admettre et de prévoir l'indemnisation de son conseil, Me Youri Widmer, par la Caisse du Tribunal fédéral pour le cas où les dépens ne pourraient être recouvrés (art. 64 al. 2 LTF; arrêt 5A_633/2022 du 8 mars 2023 consid. 9). Me Vanessa Chambour, curatrice de représentation des enfants, sera quant à elle indemnisée à hauteur des dépenses nécessaires pour ses déterminations. Son indemnité, qui sera intégrée aux frais judiciaires (arrêts 5A_359/2024 du 14 octobre 2024 consid. 9; 5A_895/2022 du 17 juillet 2023 consid. 10.4.2; 5A_954/2021 du 3 janvier 2022 consid. 6 et la référence), est fixée à 500 francs.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
La requête de jonction des causes 5A_609/2023 et 5A_981/2023 est rejetée.
2.
Le recours est irrecevable.
3.
La requête d'assistance judiciaire du recourant est rejetée.
4.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., y compris les frais de représentation des enfants par 500 fr., sont mis à la charge du recourant.
5.
La requête d'assistance judiciaire de l'intimée est admise dans la mesure où elle n'est pas sans objet, et Me Youri Widmer, avocat à Lutry, lui est désigné comme conseil d'office.
6.
Une indemnité de 500 fr., à verser à l'intimée à titre de dépens est mise à la charge du recourant; au cas où les dépens ne pourraient pas être recouvrés, la Caisse du Tribunal fédéral versera au conseil de l'intimée une indemnité de 400 fr. à titre d'honoraires d'avocat d'office.
7.
Une indemnité de 500 fr. est allouée à Me Vanessa Chambour, curatrice de représentation des enfants, à titre d'honoraires, et lui sera payée par la Caisse du Tribunal fédéral.
8.
Le présent arrêt est communiqué aux participants à la procédure et au Juge unique de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
Lausanne, le 18 décembre 2024
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Herrmann
La Greffière : Bouchat