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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
9C_657/2015  
   
   
 
 
 
Arrêt du 19 janvier 2016  
 
IIe Cour de droit social  
 
Composition 
Mmes les Juges fédérales Glanzmann, Présidente, Pfiffner et Moser-Szeless. 
Greffier : M. Bleicker. 
 
Participants à la procédure 
A.________, représenté par Me Eric Maugué, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Caisse cantonale genevoise de compensation, rue des Gares 12, 1202 Genève, 
intimée, 
 
B.________, France, 
C.________, France, 
tous les deux représentés par Me Marc Lironi, avocat. 
 
Objet 
Assurance-vieillesse et survivants (responsabilité de l'employeur), 
 
recours contre le jugement de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, du 30 juin 2015. 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. La société D.________ Sàrl, fondée en 1999, avait pour but statutaire le nettoyage et le revêtement de sols, ainsi que toutes opérations en relation. Elle était affiliée en tant qu'employeur pour le paiement des cotisations en matière d'assurance-vieillesse (AVS), d'assurance-invalidité (AI), d'allocations pour perte de gain (APG), d'assurance-chômage (AC), d'allocations familiales de droit cantonal (AF) et d'allocations cantonales en cas de maternité (AMat) auprès de la Caisse cantonale genevoise de compensation (actuellement: la Caisse genevoise de compensation; ci-après: la caisse de compensation). La faillite de la société a été prononcée le 5 octobre 2004 et elle a été radiée du Registre du commerce le 11 août 2006 à l'issue de la procédure de liquidation.  
Le 18 janvier 2006, la caisse de compensation a adressé à A.________, B.________ et C.________, en leur qualité d'associé gérant pour le premier et d'associés et d'organes de fait pour les deux autres, une décision de réparation du dommage portant sur un montant de 120'280 fr. 05. Cette somme correspondait au solde des cotisations sociales dues sur les salaires versés par la société D.________ Sàrl pour la période courant de janvier 2001 à juillet 2004, y compris les frais de sommation et les intérêts moratoires. Saisie d'oppositions de la part des trois associés, la caisse de compensation les a rejetées par décisions du 7 juin 2006. 
 
A.b. Dans l'intervalle, A.________ avait dénoncé en août 2004 ses deux associés au Ministère public du canton de Genève pour des faits d'appropriation illégitime, d'abus de confiance, de vol, d'escroquerie et de gestion déloyale commis au sein de la société D.________ Sàrl. Le Tribunal de police de la République et canton de Genève a, par jugement du 11 juillet 2013, acquitté B.________ des faits dénoncés contre lui et condamné C.________ pour gestion déloyale aggravée à une peine pécuniaire de 210 jours-amende avec sursis pour avoir utilisé de manière indue des ressources de la société D.________ Sàrl à son profit sur un chantier (le chantier E.________) à hauteur d'environ 50'000 francs, avoir éteint une dette personnelle de 10'000 francs au moyen des deniers de la société, sans contrepartie, et avoir utilisé à son profit des fonds sociaux à hauteur de 19'000 francs, annoncés comme de prétendus salaires.  
 
B.   
A.________, B.________ et C.________ ont porté les décisions sur opposition du 7 juin 2006 devant le Tribunal cantonal des assurances sociales de la République et canton de Genève (actuellement: la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales), qui a suspendu les procédures jusqu'à droit connu sur la dénonciation pénale déposée par A.________ contre ses associés. Après avoir pris connaissance du jugement du Tribunal de police de la République et canton de Genève du 11 juillet 2013, la caisse de compensation a recalculé le dommage en ne tenant pas compte des salaires détournés et arrêté le montant de celui-ci à 117'374 fr. 20. La Cour de justice a rendu le 30 juin 2015 un jugement dont le dispositif est le suivant: 
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES: 
 
Statuant 
 
A la forme :  
 
1. Déclare les recours recevables. 
 
Au fond :  
 
2. Rejette le recours de A.________ mais constate que le dommage dont réparation lui est demandée doit être réduit à 117'374 fr. 20. 
 
3. Admet très partiellement le recours de C.________. 
 
4. Renvoie la cause à l'intimée pour calcul du montant dû par C.________ compte tenu du fait que sa responsabilité a pris fin le 29 février 2004 et nouvelle décision en ce sens. 
 
5. Rejette le recours de C.________ pour le surplus. 
 
6. Admet le recours de B.________. 
 
7. Annule la décision du 18 janvier 2006 [recte: 7 juin 2006] rendue à son encontre par l'intimée. 
 
8. [...] 
 
 
C.   
A.________ interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement dont il demande l'annulation. Il conclut à ce que la caisse de compensation soit déboutée de toutes ses conclusions à son endroit. 
La caisse de compensation et C.________ ont conclu au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se prononcer. A.________ a déposé des observations finales. 
 
D.   
Par arrêt 9C_637/2015 du 22 octobre 2015, le Tribunal fédéral a déclaré irrecevable le recours formé par C.________ contre le jugement du 30 juin 2015 de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
La recevabilité du recours en matière de droit public contre un jugement statuant sur la responsabilité d'un employeur envers une caisse de compensation fondée sur l'art. 52 al. 1 LAVS n'est ouverte que si la valeur litigieuse atteint la somme de 30'000 francs (art. 85 al. 1 let. a LTF; ATF 137 V 51 consid. 4.3 p. 56; JEAN-MAURICE FRÉSARD, in Commentaire de la LTF, 2ème éd., 2014, n° 31 ad art. 113 LTF). En l'occurrence, les conclusions restées litigieuses devant l'autorité précédente (art. 51 al. 1 let. a LTF) s'élèvent à 117'374 fr. 20, de sorte que le recours est recevable de ce chef. 
 
2.   
Le recours en matière de droit public peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), n'étant limité ni par les arguments de la partie recourante, ni par la motivation de l'autorité précédente. Le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués, compte tenu de l'exigence de motivation prévue à l'art. 42 al. 2 LTF, et ne peut aller au-delà des conclusions des parties (art. 107 al. 1 LTF). Il fonde son raisonnement sur les faits retenus par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF) sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). La partie recourante qui entend s'écarter des faits constatés doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF sont réalisées, sinon un état de fait divergent ne peut être pris en considération (art. 97 al. 1 LTF). 
 
 
3.   
Le litige porte sur la responsabilité du recourant dans le préjudice subi par l'intimée en raison du non-paiement par D.________ Sàrl du solde des cotisations sociales paritaires afférentes à la période courant de janvier 2001 à juillet 2004. 
 
4.  
 
4.1. La cour cantonale a constaté que le recourant avait commis en sa qualité d'organe formel de la société faillie une négligence grave entraînant son obligation de réparer le dommage subi par la caisse de compensation, tout en le réduisant au vu du calcul produit par la caisse en cours de procédure à hauteur de 117'374 fr. 20. A.________ avait violé son obligation de diligence en n'exerçant aucune surveillance jusqu'à la fin de l'année 2003, alors même qu'il avait constaté en 2002 une explosion des charges salariales de la société. S'il avait correctement exercé son mandat, il aurait pu veiller au paiement des cotisations d'assurances sociales ou, à tout le moins, pu constater que des cotisations étaient impayées et exercer une pression sur ses associés qui dirigeaient en fait la société afin que ces derniers s'en acquittassent dans les meilleurs délais. Quant au fait qu'il avait été trompé par ses associés, cet élément n'était pas relevant. S'il s'était intéressé un tant soit peu aux comptes de la société, il aurait pu constater, comme l'avait du reste fait une secrétaire, qu'elle rencontrait des problèmes de trésorerie. De surcroît, sachant pertinemment quel était le montant des salaires versés, il aurait pu, par exemple, prendre directement contact avec la caisse de compensation pour s'assurer du paiement des cotisations sociales.  
 
4.2. Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir retenu que sa prétendue passivité dans l'administration de D.________ Sàrl était en relation de causalité naturelle et adéquate avec le dommage subi par l'intimée. L'ampleur de l'activité délictuelle des associés B.________ et C.________, laquelle avait causé à la société un préjudice de 236'913 fr. 80 et non de 55'000 francs comme retenu par l'autorité précédente, avait relégué au second plan toute éventuelle négligence de sa part. Aussi et contrairement à ce que la cour cantonale a retenu, les agissements des associés B.________ et C.________ avaient eu pour effet d'interrompre le lien de causalité adéquate entre les éventuels manquements qui pourraient lui être opposés et le dommage causé à l'intimée.  
 
5.  
 
5.1. En vertu de l'art. 52 al. 1 LAVS (entré en vigueur le 1er janvier 2003), l'employeur qui, intentionnellement ou par négligence grave, n'observe pas des prescriptions et cause ainsi un dommage à l'assurance, est tenu à réparation. L'art. 14 al. 1 LAVS, en corrélation avec les art. 34 ss RAVS, prescrit que l'employeur doit déduire, lors de chaque paie, les cotisations sociales fédérales du salarié et verser celles-ci à la caisse de compensation en même temps que sa propre cotisation. Les employeurs doivent remettre périodiquement aux caisses les pièces comptables concernant les salaires versés à leurs employés, de manière à ce que les cotisations paritaires puissent être calculées et faire l'objet de décisions. Par sa nature, l'obligation de l'employeur de percevoir les cotisations et de remettre les décomptes est une tâche de droit public prescrite par la loi. Organe d'exécution de la loi à raison de cette tâche, l'employeur supporte une responsabilité de droit public. Celui qui néglige d'accomplir cette tâche enfreint les prescriptions au sens de l'art. 52 LAVS et doit, par conséquent, réparer la totalité du dommage ainsi occasionné (ATF 137 V 51 consid. 3.2 p. 54 et les références).  
 
5.2. Si l'employeur est une personne morale, la responsabilité peut s'étendre, à titre subsidiaire, aux organes qui ont agi en son nom (ATF 137 V 51 consid. 3.1 p. 53; 132 III 523 consid. 4.5 p. 528). Selon la jurisprudence, les personnes qui sont - légalement ou formellement - organes d'une personne morale entrent en principe toujours en considération en tant que responsables subsidiaires aux conditions de l'art. 52 LAVS. Le Tribunal fédéral a ainsi reconnu la responsabilité non seulement des membres du conseil d'administration, mais également celle de l'organe de révision d'une société anonyme, du directeur d'une société anonyme disposant du droit de signature individuelle, du gérant d'une société à responsabilité limitée ainsi que du président, du directeur financier ou du gérant d'une association sportive (arrêt 9C_1086/2009 du 15 juillet 2010 consid. 4.2.1 et les références, in SVR 2011 AHV n° 4 p. 11).  
 
5.3. Les associés gérants d'une société à responsabilité limitée qui ont été formellement désignés en cette qualité, ainsi que les personnes qui exercent cette fonction en fait, sont soumis à des obligations de contrôle et de surveillance étendues, dont le non-respect peut engager leur responsabilité. Selon la jurisprudence, ils répondent selon les mêmes principes que les organes d'une société anonyme pour le dommage causé à une caisse de compensation ensuite du non-paiement de cotisations d'assurances sociales (ATF 126 V 237 consid. 4 p. 238; arrêt 9C_344/2011 du 3 février 2012 consid. 3.2). C'est ainsi qu'ils ont l'obligation de se faire renseigner périodiquement sur la marche des affaires, ce qui inclut notamment la surveillance du paiement des cotisations sociales paritaires; ils sont tenus en corollaire de prendre les mesures appropriées lorsqu'ils ont connaissance ou auraient dû avoir connaissance d'irrégularités commises dans la gestion de la société (ATF 114 V 219 consid. 4a p. 223 et les références; voir également arrêt 9C_152/2009 du 18 novembre 2009 consid. 6.1, in SVR 2010 AHV n° 4 p. 11).  
 
6.  
 
6.1. Le recourant se plaint d'une constatation incomplète du montant du préjudice occasionné par C.________ à la société D.________ Sàrl lors du chantier E.________. La société avait été privée de l'intégralité du chiffre d'affaires réalisé à l'occasion de ce chantier (soit la somme de 236'913 fr. 80) alors qu'elle avait dû en supporter les charges, notamment salariales et de matériaux. L'ampleur des détournements effectués au détriment de la société par C.________ ne pouvait dès lors découler de la seule prise en compte par l'autorité précédente du bénéfice net réalisé à cette occasion (soit la somme de 55'000 francs au maximum).  
Ce faisant, le recourant ne démontre pas en quoi la constatation formelle de ces éléments permettait d'influer sur le sort du litige (supra consid. 2). L'autorité précédente n'a mentionné le montant de 55'000 francs qu'à l'appui d'un bref résumé des considérants essentiels du jugement pénal. En réalité, en tant qu'il est reproché à la juridiction cantonale de n'avoir pas suffisamment tenu compte de l'ampleur des détournements de C.________, le grief se confond avec le point de savoir si, selon le cours hypothétique qu'auraient pris les événements au cas où le recourant avait agi conformément à ses devoirs (voir ATF 139 V 176 consid. 8.4.2 p. 190), la survenance du dommage aurait pu être empêchée. Il doit dès lors être examiné sous cet angle. 
 
6.2. La condamnation pénale de C.________ et le préjudice financier occasionné à la société D.________ Sàrl par ses actes de gestion déloyale aggravée ne sont en l'espèce pas susceptibles d'interrompre le lien de causalité entre les omissions du recourant et la survenance du dommage de l'intimée. Le recourant était tenu d'opérer en sa qualité d'associé gérant les contrôles nécessaires sur l'activité concrète des employés de la société et sur la marche des affaires (supra consid. 5.3). Ayant observé une explosion des charges salariales en 2002 (jugement attaqué, consid. 13 p. 22), il était tenu de prendre les mesures appropriées pour s'assurer du règlement des cotisations sociales en souffrance et à venir. Or le recourant s'est contenté de prendre note des déclarations "rassurantes" de ses associés. Il s'agit donc d'une situation caractéristique dans laquelle l'associé gérant doit répondre en vertu de l'art. 52 al. 1 LAVS des conséquences du défaut de paiement par la société des cotisations paritaires auquel sa passivité a grandement contribué. Il en irait différemment s'il avait été trompé par des manoeuvres fallacieuses à son endroit, telles la présentation de comptes falsifiés, visant à lui cacher le défaut de paiement à l'égard de la caisse de compensation et qui l'auraient empêché de respecter ses obligations (arrêt 9C_135/2011 du 11 avril 2011 consid. 4.3.2 et les références; voir également MARCO REICHMUTH, Die Haftung des Arbeitgebers und seiner Organe nach Art. 52 AHVG, 2008, n° 794, p. 190), ce qui n'est pas le cas en l'espèce.  
 
6.3. Sur le vu de ce qui précède, c'est à bon droit que l'autorité précédente a tenu le recourant pour responsable du dommage subi par l'intimée en raison du non-paiement du solde des cotisations sociales dues sur les salaires déclarés par la société D.________ Sàrl pour la période courant du mois de janvier 2001 au mois de juillet 2004.  
 
7.   
Mal fondé, le recours doit être rejeté. Le recourant, qui succombe, supportera les frais de la procédure (art. 66 al. 1 LTF). Ceux-ci sont arrêtés en fonction de la valeur litigieuse, s'agissant d'un cas de responsabilité de l'employeur au sens de l'art. 52 LAVS (art. 51 al. 1 let. a et 65 al. 2 LTF; ch. 1 du Tarif du 31 mars 2006 des émoluments judiciaires du Tribunal fédéral [RS 173.110.210.1]). B.________ qui n'a pas été invité à répondre au recours n'a pas droit à des dépens. 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 5'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.   
Le recourant versera à C.________ la somme de 1'000 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à B.________, à C.________, à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, et à l'Office fédéral des assurances sociales. 
 
 
Lucerne, le 19 janvier 2016 
 
Au nom de la IIe Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Glanzmann 
 
Le Greffier : Bleicker