Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
5A_672/2020
Arrêt du 19 janvier 2022
IIe Cour de droit civil
Composition
MM. les Juges fédéraux Herrmann, Président,
Marazzi et Bovey.
Greffière : Mme Jordan.
Participants à la procédure
A.________,
représentée par Mes Elios Suffiotti et Tania Naef, avocats,
recourante,
contre
Cour de justice du canton de Genève, Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites, place du Bourg-de-Four 1, 1204 Genève,
intimée,
Office cantonal des poursuites de Genève, rue du Stand 46, 1204 Genève,
1. B.________,
représenté par Me Mitra Sohrabi, avocate,
2. C.________ SA,
Objet
communication de l'état des charges pendant une suspension au sens de l'art. 62 LP, validité,
recours contre la décision de la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites de la Cour de justice du canton de Genève du 6 août 2020 (A/1032/2020-CS, DCSO/239/20).
Faits :
A.
A.________, aujourd'hui domiciliée en Italie, et D.________, aujourd'hui domicilié en Israël, sont copropriétaires à raison d'une moitié chacun des parcelles nos 1'058 et 1'059 de la Commune de U.________.
Les parcelles nos 1'058 et 1'059 sont collectivement grevées - en premier rang - d'une cédule hypothécaire au porteur d'un montant nominal de 4'000'000 fr. détenue par C.________ SA (ci-après : la banque). Les parts de copropriété appartenant à A.________ (immeubles nos 1'058-2 et 1'059-2) sont en outre collectivement grevées en premier rang d'une cédule hypothécaire au porteur d'un montant nominal de 500'000 fr. détenue par B.________.
B.
B.a. La banque a engagé à l'encontre de A.________ et D.________ les poursuites en réalisation de gage immobilier nos xx xxxxxx T et yy yyyyyy S. Dans le cadre de la première de ces deux poursuites, elle a requis la vente de l'objet du gage le 3 septembre 2018. Dans le cadre de la poursuite en réalisation de gage immobilier no zz zzzzzz G, B.________ a quant à lui requis la réalisation de l'objet du gage le 19 février 2019.
Tant les parts de copropriété de A.________ (immeubles nos 1'058-2 et 1'059-2) que celles de D.________ (immeubles nos 1'058-1 et 1'059-1) ont par ailleurs été saisies dans le cadre de poursuites ordinaires introduites à l'encontre de l'une ou de l'autre par des créanciers chirographaires (séries nos xx xx xxxxxx A, xx xx xxxxxx M, xx xx xxxxxx K, xx xx xxxxxx J, xx xx xxxxxx V, xx xx xxxxxx Z et xx xx xxxxxx V pour A.________; xx xx xxxxxx U et xx xx xxxxxx E pour D.________), dont plusieurs ont déjà formé des réquisitions de vente.
B.b. Par avis daté du 7 février 2020, publié le 14 février 2020 dans la Feuille officielle suisse du commerce (FOSC) et les 21 et 28 février 2020 dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève, l'Office cantonal des poursuites (ci-après : l'Office) a fixé au 29 septembre 2020 à 10h00 la vente aux enchères forcées des parcelles n
os 1'058 et 1'059 et fixé aux créanciers gagistes et aux titulaires de charges foncières un délai au 5 mars 2020 pour produire leurs créances. La publication indiquait que les conditions de vente et l'état des charges seraient déposés auprès de l'Office à compter du 19 mars 2020.
Sous réserve d'une légère diminution du montant des intérêts moratoires - non contestée par les intéressés - les productions de la banque et de B.________ ont été admises telles quelles par l'Office et conséquemment portées à l'état des charges à hauteur de 5'611'028 fr. 60 pour la banque et de 684'236 fr. 10 pour B.________.
B.c. Par ordonnance du 18 mars 2020, le Conseil fédéral, en raison de la pandémie de coronavirus affectant la Suisse, a décrété une suspension générale des poursuites au sens de l'art. 62 LP, du 19 mars 2020 à 7h00 au 4 avril 2020 à 24h00.
B.d. Par courrier recommandé du 19 mars 2020, l'Office a adressé au conseil de A.________, qui les a reçus le 23 mars 2020, l'état des charges relatif aux parcelles nos 1'058 et 1'059 ainsi que les conditions de vente. L'attention de la poursuivie était attirée sur le fait que les charges portées à l'état des charges seraient réputées reconnues quant à leur existence, leur échéance, leur étendue et leur rang à moins qu'elle ne les conteste dans les dix jours auprès de l'Office.
C.
Le 27 mars 2020, A.________ a formé une plainte devant la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites du canton de Genève (ci-après: la Chambre de surveillance), d'une part, contre la communication intervenue le 19 mars 2020, concluant à sa nullité, subsidiairement à son annulation, motif pris qu'elle violait l'ordonnance du Conseil fédéral du 18 mars 2020 et, d'autre part, contre l'état des charges lui-même, contestant à cet égard les montants des créances garanties par gage retenues pour la banque et B.________. Déclarant contester les conditions de vente, elle a par ailleurs requis qu'une nouvelle expertise des immeubles soit ordonnée et qu'un délai au 31 juillet 2020 lui soit octroyé pour présenter une offre de vente de gré à gré au sens de l'art. 143b LP.
Par arrêt du 26 mai 2020, le Tribunal fédéral a rejeté le recours interjeté par A.________ contre l'ordonnance du 30 mars 2020 de la Chambre de surveillance refusant d'accorder l'effet suspensif à la plainte (arrêt 5A_266/2020).
Statuant le 6 août 2020, la Chambre de surveillance a déclaré la plainte formée le 27 mai 2020 par A.________ dans la poursuite en réalisation de gage no xx xxxxyx T (recte : xx xxxxxx T), " à la forme ", recevable en tant qu'elle était dirigée contre la communication de l'état des charges et des conditions de vente, partiellement recevable en tant qu'elle était dirigée contre l'état des charges et irrecevable pour le surplus. " Au fond ", elle l'a rejetée dans la mesure de sa recevabilité.
D.
Par écriture du 21 août 2020, rédigée en italien, A.________ exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Elle conclut à la réforme de la décision cantonale en ce sens que la communication, le 19 mars 2020, de l'état des charges qu'elle a reçu le 23 mars 2020 dans la poursuite en réalisation de gage no xx xxxxxx T est principalement déclarée nulle et, subsidiairement, annulée. Elle demande, plus subsidiairement, l'annulation de la décision de la Chambre de surveillance et le renvoi pour nouvelle décision.
Sur le fond, B.________ propose que la recourante soit déboutée de ses conclusions et condamnée aux frais et dépens de la procédure fédérale et, subsidiairement, si elle devait obtenir gain de cause, à ce que l'État de Genève les supporte; la Chambre de surveillance déclare ne pas avoir d'observations à formuler et se réfère aux considérants de sa décision. L'Office se détermine uniquement sur la requête d'effet suspensif. La banque n'a pas procédé dans le délai imparti.
E.
Par ordonnance du 14 septembre 2020, le Président de la IIe Cour de droit civil a accordé l'effet suspensif au recours.
Considérant en droit :
1.
Bien que le recours soumis à l'examen du Tribunal fédéral ait été rédigé en italien comme le permet l'art. 42 al. 1 LTF, le présent arrêt est rendu en français, langue de la décision attaquée, conformément à l'art. 54 al. 1 LTF.
2.
Le recours a été déposé dans le délai légal compte tenu des féries d'été (art. 46 al. 1 let. b et 100 al. 2 let. a LTF) à l'encontre d'une décision finale (art. 90 LTF), prise en matière de poursuite pour dettes et de faillite (art. 72 al. 2 let. a LTF) par une autorité de surveillance statuant en dernière (unique) instance cantonale ( art. 75 al. 1 et 2 LTF ). Il est ouvert sans égard à la valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. c LTF). La recourante, qui a succombé en instance cantonale, a qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF).
3.
3.1. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 s. LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF); cela étant, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l' art. 42 al. 1 et 2 LTF , il n'examine en principe que les griefs soulevés (ATF 142 III 364 consid. 2.4 et les références). Le recourant doit par conséquent discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 142 I 99 consid. 1.7.1; 142 III 364 consid. 2.4 et la référence).
3.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été constatés de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influencer le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).
4.
Le présent recours porte uniquement sur la question de savoir si en communiquant l'état des charges pendant la période de suspension des poursuites ordonnée par le Conseil fédéral en application de l'art. 62 LP, l'Office a violé l'art. 56 ch. 3 LP.
4.1. Selon l'art. 62 LP, en cas d'épidémie, de calamité publique ou de guerre, le Conseil fédéral ou, avec son assentiment, le gouvernement cantonal peut ordonner la suspension des poursuites sur une portion du territoire ou au profit de certaines catégories de personnes.
En raison de la pandémie de Covid-19, le Conseil fédéral a, par ordonnance du 18 mars 2020, arrêté que la suspension des poursuites au sens de l'art. 62 LP s'appliquerait à l'ensemble du territoire de la Confédération suisse (RS 281.241; RO 2020 839). Cette ordonnance est entrée en vigueur le 19 mars 2020 à 7 heures et était valable jusqu'au 4 avril 2020 à 24 heures. Les féries de poursuite selon l'art. 56 ch. 2 LP (sept jours avant et sept jours après Pâques) ont suivi, de sorte que la suspension des poursuites a duré jusqu'au 19 avril 2020 et la prolongation des délais dont la fin coïncidait avec un jour des féries ou de la suspension jusqu'au 22 avril 2020 (cf. arrêt 5A_103/2021 du 18 octobre 2021 consid. 2.1).
Dans le cas particulier, l'Office a communiqué l'état des charges relatif aux parcelle nos 1'058 et 1'059 dans la poursuite no xx xxxxxx T, par pli recommandé du 19 mars 2020, reçu par la recourante le 23 mars suivant, alors que la suspension des poursuites ordonnée par le Conseil fédéral était en vigueur depuis le 19 mars 2020 à 7 heures. La recourante soutient que, ce faisant, il a violé l'art. 56 ch. 3 LP, selon lequel, sauf en cas de séquestre ou de mesures conservatoires urgentes, il ne peut être procédé à aucun acte de poursuite lorsque le débiteur est au bénéfice de la suspension (art. 57 à 62).
4.2. L'art. 56 ch. 3 LP suppose que l'état des charges puisse être qualifié d'acte de poursuite, ce que l'autorité cantonale a admis sans être critiquée par la recourante, à bon droit.
Selon la jurisprudence, constitue en effet un acte de poursuite au sens de cette disposition toute mesure officielle d'un organe de l'exécution forcée ayant pour effet de rapprocher le créancier de son but et affectant la situation juridique du débiteur (ATF 121 III 88 consid. 6c/aa et les références; 115 III 11 consid. 1b; arrêts 5A_834/2015 du 20 janvier 2017 consid. 2.1; 5A_448/2011 du 31 octobre 2011 consid. 2.5; cf. aussi : GILLIÉRON, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, Articles 1-88, no 28 ad art. 56 LP, selon lequel la notification ou la communication doit en outre faire courir un délai pour agir que doit observer le poursuivant, le poursuivi ou un tiers). La communication de l'état des charges au débiteur (cf. art. 37 al. 1 ORFI) répond à ces conditions, dès lors qu'elle fait partir le délai de 10 jours dans lequel, s'il entend contester l'existence, l'étendue, le rang ou l'exigibilité d'un droit inscrit à l'état des charges, il doit formuler l'opposition qui déclenchera la procédure d'épuration de l'état des charges des art. 106 à 109 LP et, à défaut de laquelle, le droit sera considéré comme reconnu par lui pour la poursuite en cause (art. 140 al. 2 LP et 37 al. 2 ORFI; cf. arrêt 5A_852/2014 du 23 mars 2015 consid. 4.2; dans le sens d'une telle qualification : SCHMID/BAUER, in : Basler Kommentar, Bundesgesetz über Schulbetreibungs- und Konkursrecht, 3e éd. 2021, no 37 ad art. 56 LP; WYSSEN, Geschlossene Zeiten, Betreibungsferien und Rechtsstillstand (Art. 56 ff. SchKG), 1995, p. 82; JAEGER, Das Bundesgesetz betreffend Schuldbetreibung und Konkurs, vol. I, 3e éd. 1911, no 3 ad art. 56 LP; cf. aussi : AMONN/WALTHER, Grundriss des Schuldbetreibungs- und Konkursrechts, 9e éd. 2013, § 11, no 41, selon lesquels " die Verwertung (SchKG 116 ff.) ", soit la réalisation, fait partie des actes de poursuite; GILLIÉRON, op. cit., no 29 ad art. 56 LP qui compte dans les actes de poursuite " les actes préparatoires à la réalisation "; JAEGER/WALDER/KULL/KOTTMANN, Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, Band I, Art. 1-158, 4e éd. 1997, no 6 ad art. 56 LP, qui cite la réalisation des immeubles, art. 133-143b; implicitement : SARBACH, in : KurzKommentar SchKG, 2e éd. 2014, nos 17 et 28 ad art. 56 LP, pour lequel toute mesure visant à la réalisation des biens est, sous réserve de certaines exceptions parmi lesquelles il ne cite pas la communication de l'état des charges, un acte de poursuite).
4.3. La loi ne prévoit pas quelles conséquences entraîne pour l'acte de poursuite concerné la violation de l'interdiction prévue à l'art. 56 ch. 3 LP.
4.3.1. La Chambre de surveillance a considéré à cet égard que l'intérêt public poursuivi par l'art. 62 LP consiste à soulager la population bénéficiant de la suspension de la pression que représenterait pour elle l'obligation de donner suite immédiatement à des actes de poursuite, de telle sorte que sa réalisation paraissait a priori compatible avec un simple report, au terme de la période de suspension (et le cas échéant de la période de féries consécutive), des effets de l'acte de poursuite intervenu en temps inopportun. Elle a jugé que cette considération s'imposait d'autant plus qu'en l'espèce, l'acte en question n'avait eu aucune conséquence concrète pour la plaignante, ses effets se bornant à faire courir un délai et que la même solution s'imposerait s'il fallait retenir qu'en décrétant une suspension de deux semaines, le Conseil fédéral poursuivait le but d'accorder un sursis aux débiteurs dont la situation patrimoniale était supposée atteinte par la pandémie. Dans la mesure en effet où la date de vente avait en l'occurrence déjà été fixée, celle de la communication de l'état des charges et des conditions de vente n'était pas de nature à modifier cette échéance. L'autorité cantonale a donc conclu qu'il n'y avait pas lieu de constater la nullité de la communication de l'état des charges et des conditions de vente. Elle a par ailleurs rejeté les conclusions de la plaignante en annulation de ladite communication faute d'intérêt légitime à la répétition de cet acte. L'intéressée ne contestait en effet pas avoir reçu l'état des charges et les conditions de vente et avait dûment fait valoir ses droits, de telle sorte qu'elle ne pourrait tirer aucun bénéfice d'une nouvelle communication.
4.3.2. La recourante plaide principalement la nullité de la communication de l'état des charges. Elle conteste la pertinence, en l'espèce, du raisonnement de la Chambre de surveillance fondée sur l'opinion selon laquelle les effets de l'acte de poursuite intervenu en temps inopportun sont simplement reportés au terme de la période de suspension. Elle soutient que cette pratique ne s'applique que dans le cas d'un acte de poursuite entrepris pendant les temps prohibés de l'art. 56 ch. 1 LP et les féries de poursuite de l'art. 56 ch. 2 LP, et non pendant la suspension au sens de l'art. 62 LP visée par l'art. 56 ch. 3 LP. Elle se réfère en particulier à l'avis de divers auteurs selon lesquels une telle suspension sert l'intérêt public avec pour conséquence que tout acte de poursuite accompli durant cette période est frappé de nullité (SCHMIDT/BAUER, op. cit., no 1 ad art. 62 LP et no 59 ad art. 57 LP; PENON/WOHLGEMUTH, in : Kommentar zum Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs [SchKG], 4e éd. 2017, no 11 ad art. 62 LP; FOEX/JEANDIN, in : Commentaire romand, Poursuite et faillite, 2005, no 12 ad art. 62 LP; GILLIÉRON, op. cit., no 21 ad art. 62 LP; WYSSEN, op. cit., p. 135). Elle fait valoir plus singulièrement que subordonner la nullité de l'acte de poursuite aux circonstances de chaque cas d'espèce et à une pondération des intérêts en présence, ainsi que l'a considéré l'autorité cantonale, crée une insécurité juridique et contrevient à la ratio legis de l'art. 62 LP.
4.3.3. Selon l'art. 22 al. 1 LP, sont nulles les mesures contraires à des dispositions édictées dans l'intérêt public ou dans l'intérêt de personnes qui ne sont pas parties à la procédure.
Dans un arrêt récent, le Tribunal fédéral a jugé que l'acte de poursuite entrepris pendant une suspension ordonnée en application de l'art. 62 LP est nul au sens de cette disposition (arrêt 5A_103/2021 du 18 octobre 2021 consid. 2.3). Il a souligné l'objectif de protection supra-individuelle visé par cette suspension (consid. 2.3.4). S'écartant de l'opinion de certains auteurs (EICHEL/TURTSCHI, Der Rechtsstillstand nach Art. 62 SchKG, in AJP 2020 p. 1019; NEUENSCHWANDER, Le Pangolin ébranle la LP, JdT 2021 II p. 26), il a en outre considéré que cet intérêt public à la protection générale des débiteurs et des créanciers en raison de la pandémie (cf. consid. 2.4.5) l'emportait sur l'intérêt public à un bon fonctionnement du système de poursuites, à savoir au maintien d'un rythme de travail régulier et à l'évitement d'une surcharge des offices et le retard qui serait induit par la répétition, au terme de la période de suspension, d'actes de poursuite nuls (consid. 2.3.5).
4.3.4. La simple affirmation de l'intimé B.________ selon laquelle la recourante aurait " tout mis en oeuvre pour repousser le désintéressement de ses créanciers depuis des années " ne suffit pas, en l'absence d'autres circonstances, à retenir qu'elle commettrait un abus de droit manifeste en se prévalant de la nullité de la communication de l'état des charges pendant la suspension de l'art. 62 LP (cf. sur la notion d'abus de droit, parmi plusieurs : ATF 144 III 407 consid. 4.2.3; 143 III 279 consid. 3.1). L'arrêt non publié 7B.76/2005 du 25 mai 2005 auquel le prénommé se réfère n'est à cet égard pas pertinent. Il visait la situation d'un débiteur qui, dans le seul but de retarder la procédure, était allé quérir un commandement de payer conformément à l'invitation à retirer l'envoi (dans les sept jours) précisément le jour de son unique journée de service militaire, et pas avant ni après alors qu'il en avait la possibilité, procédé auquel il avait déjà recouru auparavant (consid. 3).
4.4. Vu ces considérations, en niant que la communication de l'état des charges pendant la suspension des poursuites au sens de l'art. 62 LP était nulle et en rejetant la plainte de la recourante sur ce point, l'autorité cantonale a violé le droit fédéral.
L'issue du recours sur ce grief rend sans objet l'autre moyen soulevé dans la plainte, lequel avait été traité au considérant 3 de la décision cantonale.
5.
Cela étant, le recours doit être admis, la décision cantonale annulée et réformée en ce sens que la plainte du 27 mai 2020 dans la poursuite en réalisation de gage no xx xxxxxx T est admise et qu'il est constaté la nullité de la communication de l'état des charges intervenue le 19 mars 2020. La procédure de plainte étant gratuite, il n'y a pas lieu de renvoyer la cause à la Chambre de surveillance sur la question des frais judiciaires et des dépens de la procédure qui s'est déroulée devant elle. Les frais judiciaires de la procédure fédérale sont mis à la charge solidaire des créanciers parties à la procédure en réalisation de gage, soit C.________ SA et B.________, qui succombent ( art. 66 al. 1 et 5 LTF ). Ces derniers verseront en outre, solidairement entre eux, des dépens à la recourante ( art. 68 al. 1, 2 et 4 LTF ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours en matière civile est admis et la décision de la Chambre de surveillance du 6 août 2020 est annulée et réformée en ce sens que la plainte du 27 mai 2020 dans la poursuite en réalisation de gage no xx xxxxxx T est admise et qu'il est constaté la nullité de la communication de l'état des charges intervenue le 19 mars 2020.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 5'000 fr., sont mis à la charge de C.________ SA et B.________, solidairement entre eux.
3.
Une indemnité de 5'500 fr., à verser à la recourante à titre de dépens est mise à la charge de C.________ SA et B.________, solidairement entre eux.
4.
Le présent arrêt est communiqué à la recourante, à la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites de la Cour de justice du canton de Genève, à l'Office cantonal des poursuites de Genève, à B.________ et à C.________ SA.
Lausanne, le 19 janvier 2022
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Herrmann
La Greffière : Jordan