Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
2C_585/2023
Arrêt du 19 mars 2024
IIe Cour de droit public
Composition
Mme et MM. les Juges fédéraux
Hänni, Juge présidant, Donzallaz et Kradolfer.
Greffière : Mme Jolidon.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Serge Demierre, avocat,
recourant,
contre
Commission d'affermage du canton du Vaud, avenue des Jordils 1, 1006 Lausanne,
1. B.________,
représenté par Société rurale d'assurance de protection juridique FRV SA,
2. Direction générale de l'agriculture, de la viticulture et des affaires vétérinaires (DGAV), avenue de Marcelin 29a, case postale, 1110 Morges.
Objet
Dépens,
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, du 29 septembre 2023 (FO.2023.0001).
Faits :
A.
A.________ et B.________ ont été parties à une procédure qui s'est déroulée devant la Commission d'affermage du canton de Vaud, le premier ayant saisi cette autorité d'une demande en fixation du fermage licite d'un immeuble agricole. Par décision du 20 décembre 2022, ladite commission a constaté que le fermage convenu dépassait le fermage licite.
B.
Représenté par la Société rurale d'assurance de Protection juridique FRV SA, B.________ a recouru, à l'encontre de cette décision, devant la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal cantonal). Par arrêt du 29 septembre 2023, celle-ci a admis le recours de B.________. Elle a condamné A.________ à verser 2'000 fr., à titre de dépens, à B.________ qui obtenait gain de cause (ch. IV du dispositif de l'arrêt).
C.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler le ch. IV du dispositif de l'arrêt du 29 septembre 2023 du Tribunal cantonal lui imposant le versement de dépens d'un montant de 2'000 fr. et de le réformer en ce sens qu'il n'est pas alloué de dépens à B.________.
B.________ conclut à la confirmation du ch. IV de l'arrêt attaqué, sous suite de frais et dépens et au maintien des dépens qui lui ont été alloués par le Tribunal cantonal. La Commission d'affermage du canton de Vaud n'a pas déposé d'observations. Le Tribunal cantonal renonce à se déterminer et se réfère aux considérants de son arrêt. La Direction générale de l'agriculture, de la viticulture et des affaires vétérinaires du canton de Vaud s'en remet à justice.
A.________ a persisté dans ses conclusions, par écriture du 30 novembre 2023 et B.________ s'est encore prononcé le 8 décembre 2023.
Considérant en droit :
1.
La voie de recours ouverte sur les questions principales devant le Tribunal fédéral l'est en principe également sur les questions accessoires. Il en va notamment ainsi de celles qui portent sur les frais et les dépens. Les mêmes exigences de recevabilité s'appliquent (ATF 138 III 94 consid. 2.2; 134 I 159 consid. 1.1; arrêt 2C_547/2021 du 21 octobre 2021 consid. 1.1). En l'espèce, l'arrêt attaqué concerne le montant d'un fermage convenu, à savoir une cause de droit public (art. 82 let. a LTF), et ne tombe pas sous le coup des exceptions de l'art. 83 LTF.
Le recours, dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue par un tribunal supérieur statuant en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d et 2 LTF), a en outre été interjeté en temps utile (art. 100 LTF) et dans les formes prescrites (art. 42 LTF). Le recourant, destinataire de l'arrêt attaqué, est particulièrement atteint par la décision entreprise et a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification, de sorte qu'il a la qualité pour recourir (art. 89 al. 1 LTF).
2.
2.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Selon l'art. 99 al. 1 LTF, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente. Cette dernière exception vise les faits qui sont rendus pertinents pour la première fois par la décision attaquée; peuvent notamment être introduits des faits nouveaux concernant le déroulement de la procédure devant l'instance précédente, afin d'en contester la régularité (par exemple une violation du droit d'être entendu lors de mesures probatoires).
2.2. Le recourant, qui s'en prend exclusivement aux dépens mis à sa charge par l'autorité précédente, présente des faits en lien avec la Société rurale d'assurance de protection juridique FRV SA et les conditions générales de celle-ci, qui ne figurent pas dans l'arrêt attaqué. Le mémoire ne contient, toutefois, aucun grief en lien avec la constatation de faits par le Tribunal cantonal et ne prétend pas que l'invocation de ces faits nouveaux étaient rendue nécessaire par l'arrêt attaqué au sens de l'art. 99 al. 1 LTF, disposition qu'il ne cite même pas. Partant, le Tribunal fédéral ne peut pas prendre en compte les nouveaux faits mentionnés par le recourant et statuera sur la base de ceux constatés par l'autorité précédente. Il en va en particulier ainsi du fait voulant que la partie qui a obtenu gain de cause devant le Tribunal cantonal était représentée par un "mandataire professionnel", à savoir la Société rurale d'assurance de protection juridique FRV SA.
3.
Sauf exceptions non pertinentes en l'espèce (cf. art. 95 let. c, d et e LTF), le recours devant le Tribunal fédéral ne peut pas être formé pour violation du droit cantonal (ou communal) en tant que tel. Il est uniquement possible de faire valoir que l'application du droit cantonal ou communal viole le droit fédéral, en particulier qu'elle est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. ou contraire à d'autres droits constitutionnels (cf. ATF 145 I 108 consid. 4.4.1; 142 III 153 consid. 2.5; 140 III 385 consid. 2.3; 138 V 67 consid. 2.2). Le Tribunal fédéral n'examine toutefois le moyen tiré de la violation d'une norme de rang constitutionnel que si le grief a été invoqué et motivé par le recourant, à savoir exposé de manière claire et détaillée (art. 106 al. 2 LTF; cf. ATF 148 I 127 consid. 4.3; 146 IV 114 consid. 2.1; 143 IV 500 consid. 1.1).
Le Tribunal fédéral ne revoit l'interprétation et l'application du droit cantonal que sous l'angle de l'arbitraire (art. 9 Cst.). Il ne s'écarte de la solution retenue que si celle-ci se révèle insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, ou si elle a été adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. Il ne suffit pas que la motivation de la décision critiquée soit insoutenable; encore faut-il que celle-ci se révèle arbitraire dans son résultat. En outre, il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'une autre solution que celle adoptée par l'autorité intimée serait concevable, voire préférable (ATF 148 II 106 consid. 4.6.1; 145 II 32 consid. 5.1; 144 I 170 consid. 3; 144 I 113 consid. 7.1).
4.
4.1. Le recourant qualifie l'arrêt attaqué d'arbitraire en tant qu'il met des dépens à sa charge. Il souligne que l'art. 55 de la loi vaudoise du 28 octobre 2008 sur la procédure administrative (LPA-VD; RS/VD 173.36) prévoit l'allocation de dépens à la partie qui obtient gain de cause "en remboursement des frais qu'elle a engagé pour défendre ses intérêts". Or, B.________ était représenté par la Société rurale d'assurance de Protection juridique FRV SA et sa défense ne lui aurait rien coûté.
4.2. L'arrêt attaqué n'indique pas la raison pour laquelle des dépens ont été octroyés à B.________, qui avait obtenu gain de cause, si ce n'est que celui-ci "l'emport[ait] avec le concours d'un mandataire professionnel". Le Tribunal cantonal n'a pas expliqué sa pratique en la matière dans ses observations déposées devant le Tribunal fédéral.
4.3. A teneur de l'art. 55 LPA-VD, en procédure de recours et de révision, l'autorité alloue une indemnité à la partie qui obtient totalement ou partiellement gain de cause, en remboursement des frais qu'elle a engagés pour défendre ses intérêts (al. 1); cette indemnité est mise à la charge de la partie qui succombe (al. 2). Les dépens alloués à la partie qui obtient gain de cause comprennent les frais d'avocat ou d'autres représentants professionnels (art. 10 du tarif du 28 avril 2015 des frais judiciaires et des dépens en matière administrative [TFJDA/VD; RS/VD 173.36.5.1]).
La jurisprudence reconnaît à l'autorité cantonale de recours un large pouvoir d'appréciation dans la fixation et la répartition des frais et dépens de la procédure cantonale, s'agissant d'une matière qui relève de la législation cantonale de procédure applicable à la cause (cf. ATF 134 II 117 consid. 7). Le Tribunal fédéral n'intervient que si cette autorité a interprété ou appliqué de manière arbitraire le droit cantonal concerné ou si elle a abusé de son pouvoir d'appréciation, notamment si la décision ne peut se justifier par des raisons objectives (ATF 98 Ib 506 consid. 2; cf. ATF 147 I 241 consid. 6.2.1; arrêt 1C_351/2022 du 20 janvier 2023 consid. 2.1).
4.4. Devant le Tribunal cantonal, le recourant, qui participait à la procédure en tant que "tiers intéressé" a succombé, le recours ayant été admis. Il devait donc, en principe, prendre en charge l'indemnité de dépens due à la partie qui a obtenu gain de cause, sur la base de l'art. 55 LPA-VD. Le recourant ne conteste pas qu'une assurance de protection juridique constitue un "représentant professionnel" au sens de l'art. 10 TFJDA/VD. Dans cette mesure, on ne discerne aucune application arbitraire de l'art. 55 LPA-VD. En outre, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, il est arbitraire de refuser à une partie qui a obtenu gain de cause dans une procédure administrative, civile ou pénale une indemnisation au motif que la partie est assurée auprès d'une protection juridique (ATF 142 IV 42 consid. 2.3; 135 V 473 consid. 3.1; 122 V 278 consid. 3.e.aa; 117 Ia 295 consid. 3; cf. aussi arrêt 6B_450/2022 du 29 mars 2023 consid. 2.4). Pour le reste, les arguments du recourant reposent sur des faits qui ne ressortent pas de l'arrêt attaqué et ils ne peuvent pas être pris en considération (cf. supra consid. 2). Au regard de ce qui précède, en octroyant des dépens à la partie qui l'a emporté et qui était représentée par une assurance de protection juridique à la charge du tiers intéressé, les juges précédents n'ont pas appliqué l'art. 55 LPA-VD de façon insoutenable. Partant, le grief est rejeté.
5.
Le recours doit ainsi être rejeté.
Le recours était d'emblée dénué de chances de succès, de sorte que la demande d'assistance judiciaire est rejetée (cf. art. 64 al. 1 LTF). Succombant, le recourant doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). L'intimé 1, qui obtient gain de cause avec l'assistance de la Société rurale d'assurance de Protection juridique FRV SA, a droit à des dépens (arrêt 1C_96/2019 du 27 mai 2020 consid. 6) à la charge du recourant (art. 68 al. 2 LTF). Tel n'est pas le cas de l'intimé 2 (art. 68 al. 3 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
La demande d'assistance judiciaire est rejetée.
3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
4.
Une indemnité de 1'500 fr., à payer à l'intimé 1 à titre de dépens, est mise à la charge du recourant.
5.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au représentant de B.________, à la Commission d'affermage du canton du Vaud, à la Direction générale de l'agriculture, de la viticulture et des affaires vétérinaires (DGAV) et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public.
Lausanne, le 19 mars 2024
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
La Juge présidant : J. Hänni
La Greffière : E. Jolidon