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[AZA 7] 
C 319/01 Mh 
 
Ière Chambre 
 
MM. les juges Schön, Président, Borella, Rüedi, Meyer et 
Frésard. Greffier : M. Métral 
 
Arrêt du 19 avril 2002 
 
dans la cause 
Caisse interprofessionnelle valaisanne d'allocations familiales, rue de Condémines 14, 1951 Sion, recourante, 
 
contre 
Caisse publique cantonale valaisanne de chômage, place du Midi 40, 1951 Sion, intimée, 
 
et 
Commission cantonale de recours en matière de chômage, Sion 
 
A.- P.________ travaillait au service de la société X.________ SA depuis le 14 septembre 1998. Les rapports de travail ont été interrompus le 19 avril 1999 en raison de la faillite de l'employeur. Le 5 mai 1999, P.________ a présenté une demande d'indemnité en cas d'insolvabilité. La Caisse publique cantonale valaisanne de chômage (ci-après : 
la caisse) lui a reconnu à ce titre une indemnité brute de 3111 fr. 85 pour la période du 1er avril au 19 avril 1999. 
L'assuré a par ailleurs demandé à la caisse de lui verser des allocations familiales, ce qu'elle a refusé par une décision du 6 août 1999. 
 
B.- P.________ a recouru contre cette décision. 
Statuant le 5 juillet 2001, la Commission cantonale valaisanne de recours en matière de chômage a rejeté le recours. 
 
C.- La Caisse interprofessionnelle valaisanne d'allocations familiales (CIVAF) interjette recours de droit administratif contre ce jugement, dont elle requiert l'annulation, en demandant au tribunal de constater que les allocations familiales pour la période en cause sont dues par la caisse de chômage. 
Dans ses déterminations, la commission de recours met en doute la qualité pour recourir de la CIVAF. Elle conclut, pour le surplus, au rejet du recours. La caisse déclare se rallier à la décision de la commission de recours, tandis que P.________ ne s'est pas déterminé sur le recours. Quant au Secrétariat d'Etat à l'économie (seco), il conclut au rejet du recours, dans la mesure où il est recevable. La CIVAF a déposé des déterminations complémentaires. 
 
Considérant en droit : 
 
1.- a) La qualité pour recourir de la CIVAF ne peut se déduire de l'art. 103 let. b OJ, qui ne concerne que les autorités fédérales. D'autre part, le droit fédéral ne lui donne pas la qualité pour interjeter un recours de droit administratif, de sorte qu'elle ne peut pas non plus fonder sa qualité pour agir sur l'art. 103 let. c OJ. 
Aux termes de l'art. 103 let. a OJ, a qualité pour recourir quiconque est atteint par la décision attaquée et a un intérêt digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée. La jurisprudence considère comme intérêt digne de protection, au sens de cette disposition, tout intérêt pratique ou juridique à demander la modification ou l'annulation de la décision attaquée que peut faire valoir une personne atteinte par cette dernière. L'intérêt digne de protection consiste ainsi en l'utilité pratique que l'admission du recours apporterait au recourant ou, en d'autres termes, dans le fait d'éviter un préjudice de nature économique, idéale, matérielle ou autre que la décision attaquée lui occasionnerait. L'intérêt doit être direct et concret; en particulier, la personne doit se trouver dans un rapport suffisamment étroit avec la décision; tel n'est pas le cas de celui qui n'est atteint que de manière indirecte ou médiate (ATF 127 V 3 consid. 1b, 82 consid. 3a/aa, 125 V 342 consid. 4a et les références). 
Les collectivités publiques ou les établissements publics peuvent se prévaloir de l'art. 103 let. a OJ s'ils sont atteints de la même manière que des administrés (ATF 127 II 38, 125 II 194 consid. 2a/aa). En revanche, l'intérêt public à une application correcte et uniforme du droit ne suffit pas à leur conférer la qualité pour recourir (ATF 123 V 116 consid. 5a et les références). L'intérêt digne de protection réside dans le fait que l'admission du recours serait de nature à éviter au recourant un inconvénient d'une certaine importance ou à lui procurer un avantage concret. Dans ce contexte, l'intérêt financier doit notamment être pris en considération (ATF 124 II 417 consid. 1e/bb, 123 V 116 consid. 5b). 
Quand le recourant n'est pas le destinataire de la décision, mais qu'il intervient comme tiers, sa qualité pour recourir dépend d'un intérêt juridique; cette condition est généralement remplie si le tiers a un intérêt immédiat et concret à l'annulation ou la modification de la décision attaquée (ATF 125 V 343 consid. 4a; SVR 2000 IV no 14 p. 42 consid. 2b). 
 
 
b) La loi cantonale valaisanne sur les allocations familiales aux salariés et sur le fonds cantonal pour la famille du 20 mai 1949 (LAFS; RSV 836. 2) établit, à son article premier, le droit des salariés aux allocations familiales et l'obligation, pour les employeurs, de payer des contributions à une caisse de compensation pour allocations familiales. Les caisses privées - par opposition à la caisse cantonale de compensation prévue aux art. 21 ss LAFS, qui n'a jamais vu le jour - doivent être reconnues par le Conseil d'Etat, aux conditions des art. 14 et 15 LAFS. Les caisses versent aux enfants bénéficiaires des salariés une allocation pour enfant (AE), majorée pour le troisième enfant et les enfants suivants, une allocation de formation professionnelle (AFP) à laquelle donnent droit les enfants de 16 à 25 ans révolus qui poursuivent leurs études ou font un apprentissage, ainsi qu'une allocation de naissance ou d'accueil (art. 8 LAFS). Les cotisations sont des contributions de droit public. Leur affectation, déterminée par la loi, doit se faire exclusivement en faveur du versement d'allocations familiales, de la couverture des frais d'administration de la caisse et de la constitution d'un fonds de réserve légal (art. 19 al. 2 LAFS). Les caisses sont par ailleurs habilitées à rendre des décisions sujettes à recours devant le Tribunal cantonal des assurances (art. 26 LAFS). Lorsqu'elle agit dans le cadre des tâches et prérogatives de droit public mentionnées ci-dessus, une caisse d'allocations familiales reconnue - même de droit privé - se trouve donc dans une situation analogue à celle d'une corporation de droit public (arrêt non publié du Tribunal fédéral en la cause M. du 16 décembre 1997 [2P. 335/1997]. 
c) Dans le cas particulier, la caisse recourante, bien qu'étant une personne morale de droit privé, doit être assimilée à une entité de droit public, compte tenu notamment des tâches dont elle est à cet égard investie. Elle a un intérêt digne de protection à demander l'annulation de la décision attaquée, puisqu'elle pourrait être tenue, en vertu du droit cantonal et si cette décision était maintenue, de verser aux bénéficiaires les allocations familiales litigieuses. Dans cette mesure, elle est directement et immédiatement touchée dans ses intérêts pécuniaires, de sorte que sa qualité pour recourir doit être reconnue (comp. avec ATF 123 V 113). 
 
d) La décision attaquée porte sur le refus d'englober dans l'indemnité en cas d'insolvabilité selon les art. 51 ss LACI les allocations familiales de droit cantonal. Dans cette mesure, elle statue sur une prétention découlant du droit public fédéral des assurances sociales. Le recours de droit administratif est ainsi recevable au regard des art. 97, 98 let. b à h et 98a OJ, en corrélation avec l'art. 5 PA, ainsi que de l'art. 128 OJ
 
2.- a) Les dispositions des art. 51 ss LACI ont introduit une assurance perte de gain en cas d'insolvabilité d'un employeur, destinée à combler une lacune dans le système de protection sociale. Pour le législateur, le privilège conféré par la LP aux créances de salaire (art. 219 LP) ne donnait en effet pas une garantie suffisante au travailleur, si bien qu'il était nécessaire de lui assurer la protection par le droit public, à tout le moins pendant une période limitée et déterminée. Il s'est donc agi de protéger des créances de salaire du travailleur pour lui assurer les moyens d'existence et éviter que des pertes ne le touchent durement dans son existence (Message du Conseil fédéral concernant une nouvelle loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 2 juillet 1980, FF 1980 III 532 sv; Adrian Staehelin, Die zeitliche Begrenzung des von der Insolvenzentschädigung gedeckten Lohnes, in Mélanges en l'honneur de Jean-Louis Duc, Lausanne 2001, p. 315 sv; Thomas Nussbaumer, Arbeitslosenversicherung, in : Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], 1998, ch. 492). 
Par ailleurs, l'indemnité en cas d'insolvabilité ne couvre que des créances de salaire qui portent sur un travail réellement fourni (ATF 127 V 185 consid. 3b); par exemple, elle ne peut pas être octroyée pour des prétentions en raison d'un congédiement immédiat et injustifié du travailleur (ATF 125 V 494 consid. 3b et les arrêts et références cités). 
 
b) Selon l'art. 52 al. 1 LACI (dans sa version en vigueur jusqu'au 31 août 1999), l'indemnité en cas d'insolvabilité couvre les créances de salaire portant sur les six derniers mois du rapport de travail, jusqu'à concurrence, pour chaque mois, du montant maximum selon l'article 3, 1er alinéa. Les allocations dues au travailleur sont réputées partie intégrante du salaire. 
La référence à l'art. 3 al. 1 LACI (qui figure également dans la nouvelle rédaction de l'art. 52 al. 1 LACI, en vigueur depuis le 1er septembre 1999) signifie que par "créance de salaire" on entend le salaire déterminant au sens de la législation sur l'AVS (Nussbaumer, op. cit. , ch. 519; Gerhards, Kommentar zum Arbeitslosenversicherungsgesetz, note 6 ad art. 52). Il s'agit en règle ordinaire du salaire contractuel, plafonné jusqu'à concurrence du montant maximum du gain mensuel assuré dans l'assurance-accidents obligatoire (art. 3 al. 1 LACI en corrélation avec l'art. 22 al. 1 OLAA; voir aussi Gabriel Aubert, L'employeur insolvable, in : Journée 1992 du droit du travail et de la sécurité sociale, p. 133). Le montant plafonné comprend toutes les allocations dues au travailleur, y compris celles versées en compensation d'inconvénients liés à l'exécution du travail, soit notamment les suppléments de salaire pour le travail de nuit ou du dimanche, pour heures supplémentaires etc. (Aubert, loc. cit. ; cf. aussi Kurt Meier, Lohnforderungen im Arbeitgeber-Konkurs in : Plädoyer 2/1998, p. 44). 
 
c) Le salaire déterminant, au sens de l'art. 5 al. 2 LAVS, comprend toute rémunération pour un travail dépendant, fourni pour un temps déterminé ou indéterminé. Font partie de ce salaire déterminant, par définition, toutes les sommes touchées par le salarié, si leur versement est économiquement lié au contrat de travail; peu importe, à ce propos, que les rapports de service soient maintenus ou aient été résiliés, que les prestations soient versées en vertu d'une obligation ou à titre bénévole. On considère donc comme revenu d'une activité salariée, soumis à cotisations, non seulement les rétributions versées pour un travail effectué, mais en principe toute indemnité ou prestation ayant une relation quelconque avec les rapports de service, dans la mesure où ces prestations ne sont pas franches de cotisations en vertu de prescriptions légales expressément formulées (ATF 126 V 222 consid. 4a, 124 V 101 consid. 2 et la jurisprudence citée). 
Selon l'art. 5 al. 4 LAVS, le Conseil fédéral peut excepter du salaire déterminant les prestations sociales, ainsi que les prestations d'un employeur à ses employés ou ouvriers lors d'événements particuliers. Le Conseil fédéral a fait usage de cette délégation de compétence, notamment à l'art. 6 al. 2 let. f RAVS. Selon cette disposition réglementaire, ne sont pas comprises dans le revenu déterminant provenant d'une activité lucrative, les allocations familiales qui sont accordées conformément aux usages locaux ou professionnels, au titre d'allocation pour enfants et d'allocation de formation professionnelle, d'allocation de ménage ou d'allocation de mariage ou de naissance (voir aussi SVR 1995 AHV n° 50, p. 137). 
Dans la mesure où les allocations familiales ne font pas partie du salaire déterminant au sens du droit de l'AVS, elles ne sauraient, vu ce qui a été dit plus haut (supra consid. 2b), être portées en compte dans le salaire mensuel couvert par l'assurance en cas d'insolvabilité selon la LACI. 
 
d) Cette solution, du reste, est conforme au but et à la systématique de la loi, qui ne règle la question du droit aux allocations familiales que pour les périodes de chômage. En effet, selon l'art. 22 al. 1 LACI, l'indemnité journalière pleine et entière s'élève à 80 pour cent du gain assuré. L'assuré touche en outre un supplément qui correspond au montant, calculé par jour, des allocations légales pour enfants et formation professionnelle auxquelles il aurait droit s'il avait un emploi. Le supplément n'est versé que dans la mesure où les allocations pour enfants ne sont pas servies durant la période du chômage. 
Aux termes de l'art. 34 al. 1 OACI, le supplément correspondant aux allocations légales pour enfants et formation professionnelle est calculé d'après la loi régissant les allocations familiales dans le canton où l'assuré est domicilié. 
Ces dispositions visent à mettre la personne au chômage sur le même pied que le salarié en ce qui concerne les allocations familiales (ATF 124 V 141 consid. 5b). Si la LACI ne prévoit pas le versement d'allocations familiales en supplément de l'indemnité en cas d'insolvabilité, c'est précisément parce que cette indemnité concerne des périodes d'activité durant lesquelles l'assuré a fourni un travail et était de ce fait réputé salarié. 
e) La CIVAF fait valoir que les caisses de chômage sont considérées comme employeurs quand elles versent les indemnités en cas d'insolvabilité. En effet, selon la CIVAF, elles versent le salaire déterminant selon la LAVS. 
Par conséquent, elles seraient également tenues de payer les allocations familiales. 
Mais cette argumentation n'est pas pertinente. Dans les régimes cantonaux d'allocations familiales, les prestations en faveur des salariés sont financées par des cotisations des employeurs, fixées généralement en pour cent des salaires versés. La mise en oeuvre des régimes cantonaux est confiée, en règle ordinaire, à des caisses d'allocations familiales (voir à ce sujet, Pascal Mahon, Les allocations familiales, in : SBVR, ch. 60 et 61). En aucun cas, l'allocation familiale n'est versée par l'employeur au moyen de ses propres deniers. Dès lors, même si l'on admettait que la caisse d'assurance-chômage se substitue à l'employeur quand elle verse l'indemnité en cas d'insolvabilité, cela ne signifierait d'aucune manière qu'elle serait tenue de verser, en sus, les allocations familiales de droit cantonal. En réalité, la caisse prend plutôt la place du travailleur puisqu'elle est légalement subrogée dans les droits de l'assuré, en opérant le versement de l'indemnité, jusqu'à concurrence de l'indemnité versée et des cotisations des assurances sociales qu'elle aacquittées (art. 54 al. 1 LACI; voir ATF 123 V 75). 
 
3.- Il résulte de ce qui précède que le recours est mal fondé. Le litige opposant une caisse d'allocations familiales et une caisse d'assurance-chômage, la procédure n'est pas gratuite (cf. ATF 127 V 197 consid. 2). Il n'y a par ailleurs pas matière à dépens (art. 159 al. 1 et al. 2 OJ). 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances 
 
prononce : 
 
I. Le recours est rejeté. 
 
II. Les frais de la cause, d'un montant de 3000 fr., sont mis à la charge de la recourante et sont compensés avec l'avance de frais qu'elle a versée. 
 
 
III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à P.________, à la Commission cantonale valaisanne de recours en matière de chômage et au Secrétariat d'Etat 
 
 
à l'économie. 
Lucerne, le 19 avril 2002 
 
Au nom du 
Tribunal fédéral des assurances 
Le Président de la Ière Chambre : 
 
Le Greffier :