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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
9C_117/2018  
 
 
Arrêt du 19 octobre 2018  
 
IIe Cour de droit social  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Meyer, Juge présidant, Parrino et Moser-Szeless. 
Greffier : M. Bleicker. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me David Métille, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, 
avenue du Général-Guisan 8, 1800 Vevey, 
intimé. 
 
Objet 
Assurance-invalidité (révision), 
 
recours contre le jugement du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des assurances sociales, du 10 novembre 2017 (AI 248/15 - 316/2017). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________, né en 1963, travaille comme conducteur de bus auprès de la B.________ SA depuis 1989. Il s'est vu octroyer par l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après: l'office AI) une demi-rente d'invalidité du 1 er janvier 2003 au 31 mars 2005, une rente entière du 1 er avril au 31 décembre 2005, puis une demi-rente dès le 1 er janvier 2006 (décisions du 26 février et du 10 avril 2007). En se fondant sur l'évaluation des médecins de son Service médical régional (SMR; rapport du 21 janvier 2006), l'administration a retenu que l'assuré souffrait - avec répercussion sur la capacité de travail - d'un épisode dépressif récurrent, épisode actuel d'intensité moyenne avec syndrome somatique, et qu'il pouvait travailler à 50 % comme conducteur de bus ou toute autre activité adaptée.  
Le 28 juillet 2010, l'office AI a, après avoir pris connaissance de l'avis du docteur C.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie et psychiatre traitant (du 23 février 2010), considéré que l'assuré continuait à avoir droit de bénéficier d'une demi-rente d'invalidité (degré d'invalidité: 50 %). 
 
A.b. Par jugement du 20 août 2013, le Tribunal de police de l'arrondissement de l'Est Vaudois a reconnu A.________ coupable d'abus de confiance, de tentative d'abus de confiance, de tentative d'escroquerie et de faux dans les titres, pour des faits s'étant déroulés du 5 mars au 3 mai 2010, et l'a condamné à une peine de 150 jours-amende avec sursis pendant deux ans. Initiant une révision à la suite de ce jugement, l'office AI a tout d'abord recueilli des informations auprès du psychiatre traitant (avis du 16 octobre 2013), puis suspendu le droit de l'assuré à une rente d'invalidité avec effet au 31 décembre 2013 (décision incidente du 9 décembre 2013). Il a ensuite soumis l'assuré à une expertise psychiatrique. Dans un rapport du 10 octobre 2014, le docteur D.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie, a diagnostiqué - avec répercussion sur la capacité de travail - un trouble dépressif récurrent (épisode actuel moyen). Le médecin a indiqué que A.________ avait été en rémission (au moins partielle) de sa pathologie dépressive entre le 1 er janvier 2010 et le 31 décembre 2013 (capacité de travail de 80 % au moins), puis avait souffert d'une symptomatologie dépressive réactionnelle à la suspension de son droit à une rente dès le 1 er janvier 2014. Par décision du 10 juillet 2015, l'office AI a supprimé la demi-rente d'invalidité de l'assuré avec effet au 1 er janvier 2010.  
 
B.   
A.________ a déféré cette décision au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des assurances sociales. Il a produit les conclusions d'une évaluation psychiatrique privée réalisée par le docteur E.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie (du 12 février 2016). Statuant le 10 novembre 2017, la Cour cantonale a rejeté le recours. 
 
C.   
A.________ forme un recours en matière de droit public contre ce jugement. Il conclut d'une part à ce qu'il ne soit "pas tenu de restituer les rentes d'invalidité perçues pour la période du 1 er janvier 2010 au 31 décembre 2013, celles-ci lui étant dues de manière définitives". D'autre part, il demande à ce que l'office AI rétablisse son droit au versement des rentes d'invalidité à partir du 1 er janvier 2014, faute de motif de révision.  
L'office AI conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. D'après l'art. 86 al. 1 let. d LTF, sous réserve d'une exception non réalisée en l'espèce, le recours en matière de droit public est recevable contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance. Ne peuvent par conséquent faire l'objet d'un recours en matière de droit public que les rapports juridiques à propos desquels l'autorité de dernière instance cantonale compétente s'est prononcée préalablement d'une manière qui la lie sous forme d'une décision (ATF 134 V 418 consid. 5.2.1 p. 426 et la référence).  
 
1.2. La décision attaquée porte en l'espèce uniquement sur la révision du droit du recourant à des prestations de l'assurance-invalidité et non pas sur la restitution des rentes perçues du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2013. La décision du 10 juillet 2015 n'a en particulier fait que mentionner la prise d'une décision ultérieure à ce propos. Sont par conséquent irrecevables la conclusion et les développements que le recourant consacre à la restitution de ces prestations.  
 
2.   
Le recours en matière de droit public peut être formé notamment pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF), que le Tribunal fédéral applique d'office (art. 106 al. 1 LTF), n'étant limité ni par les arguments de la partie recourante, ni par la motivation de l'autorité précédente. Le Tribunal fédéral fonde son raisonnement sur les faits retenus par la juridiction de première instance (art. 105 al. 1 LTF) sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). 
 
3.   
Le litige porte sur la suppression par la voie de la révision du droit du recourant à une demi-rente de l'assurance-invalidité à partir du 1 er janvier 2010. A cet égard, l'autorité précédente a exposé de manière complètes les dispositions légales applicables en matière de révision du droit à la rente (art. 17 et 53 LPGA), si bien qu'il suffit de renvoyer sur ce point au jugement attaqué.  
 
4.  
 
4.1. En se fondant sur les conclusions de l'expertise du docteur D.________, laquelle revêtait toutes les qualités pour que lui soit reconnue une pleine valeur probante, la juridiction cantonale a considéré que l'état de santé du recourant s'était amélioré depuis le 1er janvier 2010. L'assuré avait en particulier été capable, en plus de son activité de conducteur de bus à 50 %, de conceptualiser et de planifier un projet d'escroquerie relativement complexe. A cette occasion, il avait selon l'expert psychiatre fait preuve de compétences pour contourner la loi, s'adapter à l'évolution de la situation, analyser ce qui se passait et prendre des décisions en conséquence. Il n'avait par ailleurs pas manqué d'endurance, dès lors qu'il avait été à même d'assurer le suivi d'actes délictueux qui nécessitaient une certaine énergie et de s'affirmer notamment dans une agence bancaire qui lui refusait le prélèvement d'argent sur le compte de sa victime. La commission des différents délits attestait ainsi de ressources peu compatibles avec un épisode dépressif déclaré comme incapacitant à l'époque. Ni le psychiatre traitant ni le docteur E.________ n'avaient pas ailleurs mis en évidence d'éléments susceptibles de remettre en cause les conclusions de l'expert.  
 
4.2. Invoquant une violation des art. 17 LPGA, 77 et 88a RAI, le recourant reproche à la juridiction cantonale d'avoir retenu que les conditions d'une révision étaient réunies en l'occurrence. Il soutient que la juridiction cantonale a tout d'abord omis de constater que le docteur D.________ avait confirmé le diagnostic prévalant en 2010, soit un trouble dépressif récurrent (épisode actuel moyen). Il n'existait dès lors aucun motif d'ordre médical susceptible de conduire à réviser son droit à des prestations d'invalidité. Les conclusions de l'expert n'étaient ensuite qu'une nouvelle appréciation de sa situation examinée en 2010, basée sur des actes ponctuels et s'étant déroulés sur deux mois.  
 
5.   
Il s'agit en l'occurrence d'examiner si la juridiction cantonale a violé le droit en constatant, sur la base des conclusions de l'expertise du docteur D.________ du 10 octobre 2014, l'existence d'une modification sensible de l'état de santé du recourant propre à influencer son degré d'invalidité dès le 1 er janvier 2010.  
 
5.1. En vertu de l'art. 17 LPGA, si le taux d'invalidité du bénéficiaire de la rente subit une modification notable, la rente est, d'office ou sur demande, révisée pour l'avenir, à savoir augmentée ou réduite en conséquence, ou encore supprimée. La rente d'invalidité peut ainsi être révisée non seulement en cas de modification sensible de l'état de santé, mais aussi lorsque celui-ci est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité de gain ont subi un changement important (ATF 141 V 281 consid. 3.7.3 p. 296; 136 V 279 consid. 3.2.1 p. 281).  
 
5.2. Dans le contexte d'une révision au sens de l'art. 17 LPGA, le juge doit vérifier l'existence d'un changement important de circonstances propre à justifier l'augmentation, la réduction ou la suppression de la rente. Or un tel examen ne peut intervenir qu'à la faveur d'une comparaison entre deux états de fait successifs (arrêt 8C_441/2012 du 26 juillet 2013 consid. 6.1.2). Méconnaissant le sens de cette jurisprudence, la juridiction cantonale s'est contentée de procéder à un bref descriptif des différentes procédures qui se sont succédé depuis l'octroi initial de la demi-rente d'invalidité à l'intimé. Les premiers juges n'ont dès lors pas précisé expressément quelle était la décision entrée en force qu'ils jugeaient pertinente pour procéder à la comparaison des états de fait. Il convient de compléter sur ce point l'état de fait cantonal (art. 105 al. 2 LTF).  
Selon le descriptif établi par la juridiction cantonale, l'office AI a procédé à un examen matériel initial du droit à la rente du recourant en février 2007 (décision du 26 février 2007), puis considéré que l'assuré continuait à avoir droit à une demi-rente d'invalidité (degré d'invalidité: 50 %) au terme d'une procédure de révision initiée en décembre 2009 (correspondance du 28 juillet 2010). A cette occasion, l'office intimé n'a cependant pas procédé à une évaluation matérielle de la situation du recourant, en dépit des mesures d'instruction effectuées. La communication du 28 juillet 2010 ne repose de plus pas sur des pièces médicales qui auraient été propres à justifier une augmentation de la rente, si le résultat de l'appréciation eût été différente (cf. arrêt 8C_441/2012 cité consid. 6.2). Il faut ainsi constater que la décision du 26 février 2007 constitue le point de départ temporel pour l'examen de la révision. 
 
5.3. La juridiction cantonale a consacré ensuite l'essentiel de la motivation de la décision entreprise à examiner la valeur probante de l'expertise du docteur D.________. Elle n'explique nullement les motifs pour lesquels cette appréciation rétrospective mettrait en évidence une modification sensible de l'état de santé du recourant au sens de l'art. 17 LPGA par rapport à février 2007.  
 
5.4. Comme le soutient à juste titre le recourant, pareille conclusion ne ressort par ailleurs pas de l'expertise psychiatrique. Les conclusions du docteur D.________ ne constituent objectivement qu'une appréciation clinique différente de la situation médicale - demeurée inchangée - du recourant.  
 
5.4.1. Le diagnostic de trouble dépressif récurrent (épisode actuel moyen) vient tout d'abord confirmer celui de trouble dépressif récurrent (épisode actuel d'intensité moyenne avec syndrome somatique) mis en évidence précédemment par le SMR (rapport du 21 janvier 2006), comme le souligne d'ailleurs l'expert. Il n'est donc pas nouveau.  
 
5.4.2. Selon le jugement du Tribunal de police de l'arrondissement de l'Est Vaudois du 20 août 2013, le recourant a ensuite été condamné pour abus de confiance, pour s'être procuré un enrichissement illégitime en distrayant les valeurs patrimoniales (66'000 fr.) qui lui avait été confiées de leur but initial, pour tentative d'abus de confiance, pour s'être présenté le 16 avril 2010 au guichet d'une succursale d'un établissement bancaire sans être au bénéfice d'une procuration, pour faux dans les titres, pour avoir fabriqué une fausse attestation de donation de la somme de 66'000 fr., ainsi que de faux contrats de prêt et de vente, et pour tentative d'escroquerie, pour avoir tenté de d'obtenir des prestations complémentaires à l'AVS en faveur de ses dupes afin de préserver leur fortune dont il était appelé à hériter à leur décès. Comme l'ont relevé les juges pénaux, le recourant a donc essentiellement usé du rapport de confiance qu'il avait établi dans le cadre de son activité de concierge pour satisfaire son appât du gain au détriment d'un couple de personnes âgées. Aussi blâmable que puisse apparaître ce comportement, il ne permet cependant pas, à lui seul, de démontrer une amélioration sensible de l'état de santé du recourant au sens de l'art. 17 LPGA.  
Lors de la décision initiale d'octroi d'une demi-rente d'invalidité du 26 février 2007, l'office AI avait en particulier déjà connaissance du fait que le recourant disposait de ressources, physiques et psychiques, susceptibles de lui permettre - à tout le moins pour des périodes de temps limitées - d'exercer des activités plus étendues que son activité professionnelle habituelle de conducteur de bus à mi-temps. A cette époque, le recourant complétait en effet déjà ses revenus par des travaux de conciergerie, même s'il ne pouvait plus assumer, selon les faits constatés par la juridiction cantonale, la tâche qui lui incombait dans la répartition des charges du couple, c'est-à-dire de tondre le gazon et de balayer les feuilles mortes. Dans une note établie le 13 mars 2006, un collaborateur de l'office AI a de plus relevé que le taux d'occupation du recourant était de 60 % depuis février 2006 (contrat de travail de 20 %, accompagné d'un 40 % sous forme d'heures supplémentaires), alors que les médecins du SMR avaient retenu qu'il ne pouvait exercer une activité à un taux supérieur de 50 % (rapport du 21 janvier 2006). Aussi, le fait que l'assuré a été capable selon le docteur D.________, en plus de son activité de conducteur de bus à 50 % et durant un temps limité (du 5 mars au 3 mai 2010), de conceptualiser, de planifier et de réaliser ces infractions pénales, ainsi que de faire preuve de compétences pour s'adapter à l'évolution de la situation, analyser ce qui se passait et prendre des décisions en conséquence n'apparaît pas nouveau. On ne saisit en outre pas à la lecture de l'expertise en quoi l'état dépressif du recourant lui aurait permis de manoeuvrer un bus dans le trafic routier, mais l'aurait empêché de se rendre par exemple à une succursale bancaire pour y retirer de l'argent au détriment de sa dupe ou fabriquer de faux documents en dehors de son horaire de travail. En affirmant que l'assuré disposait de ressources peu compatibles avec un épisode dépressif déclaré comme incapacitant dès le 1er janvier 2010, au motif qu'il avait été le personnage-clé de ces différentes infractions pénales, l'expert n'apporte par conséquent aucun argument objectif au soutien d'une amélioration sensible de l'état de santé du recourant. 
 
5.5. Dans ces conditions, en l'absence d'un motif de révision au sens de l'art. 17 LPGA, la juridiction cantonale n'était pas en droit de confirmer la décision par laquelle l'office intimé a modifié sa décision d'octroi de prestations.  
 
6.   
Ensuite des considérations qui précèdent, le recours se révèle bien fondé. Vu l'issue du litige, les frais et les dépens de la procédure fédérale doivent être mis à la charge de l'office intimé (art. 66 al. 1 et 68 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est admis dans la mesure où il est recevable. La décision du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des assurances sociales, du 10 novembre 2017 et la décision de l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud du 10 juillet 2015 sont annulées. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de l'intimé. 
 
3.   
L'intimé versera au recourant la somme de 2'800 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral. 
 
4.   
La cause est renvoyée au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des assurances sociales pour nouvelle décision sur les frais et les dépens de la procédure antérieure. 
 
5.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des assurances sociales, et à l'Office fédéral des assurances sociales. 
 
 
Lucerne, le 19 octobre 2018 
 
Au nom de la IIe Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Juge présidant : Meyer 
 
Le Greffier : Bleicker