Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
4C.217/2005 /ech
Arrêt du 20 février 2006
Ire Cour civile
Composition
MM. et Mme les Juges Corboz, Président, Favre et Romy, Juge suppléante.
Greffière: Mme Crittin.
Parties
X.________ SA,
défenderesse et recourante, représentée par Me William Dayer, avocat, case postale, 1211 Genève 3,
contre
Y.________ SA,
demanderesse et intimée, représentée par Me Marc Mathey-Doret.
Objet
contrat d'entreprise,
recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève du 13 mai 2005.
Faits:
A.
A.a La société X.________ SA, dont le siège est à Genève, a pour but la fabrication et la commercialisation d'appareils médicaux.
Y.________ SA (ci-après: Y.________) est une société vaudoise spécialisée dans la fabrication d'appareils de précision et de haute technologie destinés notamment à l'usage médical.
A.b X.________ SA a développé un micro-endoscope, dénommé "W.________", pour généralistes. N'étant pas en mesure de procéder elle-même à la fabrication de l'endoscope en question, X.________ SA s'est adressée à Y.________. Un endoscope est un appareil médical muni d'un dispositif d'éclairage, destiné à être introduit dans le corps humain.
Le 16 juin 1997, X.________ SA et Y.________ ont signé un document dans lequel X.________ SA confiait l'industrialisation et la production du micro-endoscope à Y.________, qui offrait les prestations suivantes: service technique, industrialisation, fabrication, approvisionnements industriels, assemblage, tests, distribution, logistique, SAV/maintenance. Y.________ devait établir un dossier technique et de production/fabrication et procéder à la fabrication de trente prototypes d'endoscopes pour fin septembre 1997 (phase I). Y.________ s'engageait en outre à procéder à la fabrication d'une première série de cinq mille pièces livrables jusqu'à fin 1998 l'unité (phase II).
Les 22 et 30 avril 1998, les parties ont contresigné deux cahiers des charges en vue de la réalisation d'une présérie d'endoscopes. Le second de ces deux documents mentionnait que le mécanisme de flexion du ressort fonctionnait bien et n'avait pas présenté de défaillance. La régularité du rayon de flexion d'un ressort à l'autre devait toutefois encore être améliorée, de même que le retour droit.
La production de la présérie d'endoscopes a débuté dans le courant de l'année 1998. En octobre 1998, aucun appareil ne présentait toutes les fonctionnalités. Ce résultat négatif n'a pas permis de passer à la phase des essais cliniques et à la présentation du produit pour des fins commerciales.
Au début de l'année 1999, X.________ SA a décidé de renoncer à la version Z.________ de l'endoscope au profit d'une version destinée aux médecins-anesthésistes, ce qui a nécessité la modification de différents éléments.
A.c Le 17 février 1999, il a été convenu entre les parties qu'en cas de non-conformité des produits, les réclamations des clients seraient reçues par X.________ SA, qui mettait le produit sur le marché et devait transmettre à Y.________ une demande de traitement de non-conformité, s'il s'avérait que celle-ci était liée à la fabrication.
Le 12 mars 1999, Y.________ a indiqué qu'elle ne pouvait en aucun cas accepter de fabriquer des pièces ou d'acheter des composants avant que la situation contractuelle et technique ne soit finalisée. Elle relevait en outre que la phase du développement n'était pas terminée et qu'elle déclinait toute responsabilité du produit qui serait fabriqué dans ces circonstances. La planification présentée par X.________ SA pour la commercialisation serait totalement irréaliste. Le cahier des charges de X.________ SA évoluait de jour en jour, de sorte que l'avancement du développement était fortement affecté. Y.________ ajoutait: "De lancer dans l'urgence une première série de produits avec des dessins dont les dernières modifications ne sont même pas terminées est une opération qui peut s'avérer dramatiquement coûteuse. Ce risque ne sera pas assumé par Y.________".
Des remarques similaires ressortent également d'un courrier adressé le même jour par Y.________ à X.________ SA. Y.________ y relevait que les étapes normales d'un développement n'étaient pas respectées; le risque d'échec du projet était ainsi élevé. Le cahier des charges était encore en évolution, ce qui impliquait des modifications de la conception. Or, chaque modification de la conception devait faire l'objet d'une validation, puis d'une présérie pour tests et vérifications.
A.d Y.________ a procédé à différents tests techniques - résistance des éléments au désinfectant et au nettoyage à haute température, résistance des collages, étanchéité des appareils, tests de flexibilité du ressort, qualité de vision et quantité de lumières notamment - dont elle a transmis les résultats à X.________ SA.
Il appartenait en revanche à X.________ SA de procéder aux tests de bio-compatibilité et aux tests cliniques, ce qu'elle n'a pas fait. Selon la direction de X.________ SA, il fallait avancer rapidement et mettre l'appareil sur le marché en espérant que tout se passerait bien.
B.
B.a Le 11 mai 1999, les parties ont signé une nouvelle convention mettant fin à celle du 16 juin 1997, constatant que la production en série d'un nouveau micro-endoscope allait débuter. Les 17 et 18 mai 1999, elles ont conclu un contrat intitulé "contrat de fourniture". Il y était précisé que X.________ SA était le concepteur du produit, qu'elle devait définir son cahier des charges et s'engageait à fournir à Y.________ une acceptation écrite de la conception et du dossier technique élaboré par Y.________, prenant ainsi officiellement la responsabilité du produit pour sa mise sur le marché. Y.________, responsable de l'industrialisation du produit, devait réaliser les endoscopes et les livrer à X.________ SA, selon des spécificités techniques définies et validées par celle-ci.
Selon cette convention, Y.________ garantissait à X.________ SA que tous les produits qu'elle lui vendait étaient conformes aux spécifications convenues et que les produits étaient exempts de défauts de matériaux et de main-d'oeuvre pour une année après la livraison de Y.________. La responsabilité de Y.________ était strictement limitée aux défauts de fabrication et n'incluait en aucun cas les dommages dus à la conception, aux instructions d'emploi erronées ou à la mauvaise utilisation du produit. De son côté, X.________ SA, en sa qualité de "fabricant" mettant le produit sur le marché, était responsable de la sécurité de la conception dans le sens de l'ordonnance sur les installations et instruments médicaux.
B.b En raison de problèmes liés au flexible orientable du "W.________", les parties ont, d'un commun accord, pris la décision de stopper la production des endoscopes le 12 août 1999. Les tests de fonctionnement effectués par Y.________ avec un nouveau ressort étaient bons. Les résultats ont été communiqués à X.________ SA le 9 novembre 1999.
En septembre 1999, alors que le problème du flexible orientable n'était pas encore résolu, X.________ SA a présenté, pour la première fois, l'endoscope "W.________" à un congrès médical. Cette présentation a provoqué jusqu'à la fin de l'année 1999 plusieurs centaines de commandes.
Au début de l'année 2000, différents distributeurs de X.________ SA ont retourné à cette dernière les endoscopes, considérant qu'ils étaient défectueux. Ces défauts portaient soit sur l'étanchéité, soit sur la rupture du fil-arête qui avait transpercé la gaine plastique. Ces défauts ont obligé X.________ SA à cesser toute commercialisation du produit.
Y.________ a accepté de procéder à des tests d'étanchéité sur un certain nombre d'endoscopes faisant partie du stock en possession de X.________ SA. Elle a également examiné deux endoscopes retournés en raison de la cassure de l'arête dorsale.
B.c X.________ SA n'a plus eu aucun contact avec Y.________ à partir de juillet 2000. En septembre 2000, elle a pris contact avec le professeur A.________ et le Dr B.________ de l'EPFL, afin que ceux-ci identifient les causes de la cassure de l'arête dorsale. Selon eux, le problème ne résidait pas tant dans le choix des matériaux que dans le concept de l'appareil lui-même, qui manquait d'élasticité, raison pour laquelle la soudure cassait. Par ailleurs, l'appareil ne présentait pas les performances requises, car il manquait d'amplitude au niveau du débattement.
C.
C.a Par acte déposé le 29 novembre 2000, Y.________ (ci-après: la demanderesse) a assigné X.________ SA (ci-après: la défenderesse) devant les tribunaux genevois en paiement de la somme de 217'061 fr.85, avec intérêts à 6% l'an dès le 22 juin 2000, correspondant à des factures impayées. S'y ajoutaient les montants de 2'814 fr.20, correspondant aux intérêts dus sur la somme précitée jusqu'au 22 juin 2000, et de 3'923 fr.75 à titre de dommages supplémentaires réclamés sur la base de l'art. 106 CO. La demanderesse requérait également la mainlevée définitive de l'opposition formée par la défenderesse au commandement de payer qu'elle lui avait fait notifier.
La défenderesse a conclu au déboutement de l'adverse partie et, reconventionnellement, à sa condamnation au paiement de 650'000 fr., pour les frais de remise en état des endoscopes et les charges salariales qu'elle avait dû supporter en raison d'une situation de chômage technique consécutive aux manquements de la demanderesse.
C.b Par jugement du 25 novembre 2004, le Tribunal de première instance du canton de Genève a condamné la défenderesse à payer à la demanderesse la somme de 217'061 fr.85, avec intérêts à 5% l'an dès le 2 septembre 2000, ainsi que la somme de 3'923 fr.75, et a prononcé la mainlevée de l'opposition au commandement de payer à concurrence de 217'061 fr.85, avec intérêts à 5% l'an dès le 2 septembre 2000. Le Tribunal de première instance a débouté la défenderesse de toutes ses conclusions.
Ce jugement a été confirmé par la Cour de justice du canton de Genève par arrêt du 13 mai 2005.
D.
La défenderesse exerce un recours en réforme au Tribunal fédéral. Elle conclut, principalement, à l'annulation de l'arrêt attaqué et au déboutement de la demanderesse, avec suite de frais et dépens et, à titre subsidiaire, au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision afin de fixer le montant des dommages consécutifs aux défauts. La demanderesse conclut, avec suite de dépens, au rejet du recours.
Parallèlement au recours en réforme au Tribunal fédéral de la défenderesse, la demanderesse a fait opposition à l'état des dépens. Par arrêt du 18 novembre 2005, la Cour de justice a suspendu la procédure d'opposition à taxe dans l'attente de l'arrêt du Tribunal fédéral.
Le Tribunal fédéral considère en droit:
1.
1.1 Interjeté par la partie qui a succombé dans ses conclusions et dirigé contre un jugement final rendu en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 48 al. 1 OJ) sur une contestation civile dont la valeur litigieuse atteint le seuil de Fr. 8'000 (art. 48 OJ), le recours est recevable, puisqu'il a été formé en temps utile (art. 54 al. 1 OJ) dans les formes requises (art. 55 OJ).
1.2 Le recours en réforme peut être formé pour violation du droit fédéral, à l'exclusion des droits constitutionnels et du droit cantonal (art. 43 al. 1 OJ; ATF 127 III 248 consid. 2c). Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits contenus dans la décision attaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuves n'aient été violées, qu'il y ait lieu à rectification de constatations reposant sur une inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille compléter les constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu compte de faits pertinents, régulièrement allégués et clairement établis (art. 64 OJ; ATF 130 III 102 consid. 2.2, 136 consid. 1.4; ATF 127 III 248 consid. 2c).
1.3 Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des parties, mais il n'est pas lié par les motifs qu'elles invoquent (art. 63 al. 1 OJ) ni par l'argumentation juridique retenue par la cour cantonale (art. 63 al. 3 OJ; ATF 130 III 136 consid. 1.4). Le Tribunal fédéral peut donc admettre un recours pour d'autres motifs que ceux invoqués par la partie recourante et il peut également le rejeter en adoptant une autre argumentation juridique que celle retenue par la cour cantonale (ATF 130 III 297 consid. 3.1).
2.
Dans la mesure où la défenderesse fonde une partie de son argumentation juridique sur des faits nouveaux ou qui s'écartent des constatations de l'autorité cantonale, sans toutefois invoquer à leur égard une inadvertance manifeste (art. 55 al. 1 let. d OJ) ou une violation des dispositions fédérales en matière de preuve (art. 63 al. 2 OJ), il n'est pas possible d'en tenir compte et les griefs qui s'appuient sur ces éléments de fait ne peuvent être que déclarés irrecevables.
3.
3.1 Selon le contrat du 16 juin 1997, la demanderesse était chargée de l'industrialisation et de la production du micro-endoscope; elle devait notamment établir un dossier technique et de fabrication et fabriquer trente prototypes dans une première phase, puis une première série de cinq mille pièces livrables dans une seconde phase, le tout moyennant rémunération. Ce contrat a pris fin, d'un commun accord, par convention du 11 mai 1999. Les 17 et 18 mai 1999, les parties ont conclu un nouveau contrat, selon lequel la demanderesse s'est engagée à réaliser les endoscopes selon les spécificités techniques définies et validées par la défenderesse et à les livrer à cette dernière, selon un prix fixé par unité.
Comme l'a admis avec raison l'autorité cantonale, les relations entre les parties sont régies par les règles sur le contrat d'entreprise au sens des art. 363 ss CO (ATF 127 III 543). Cette qualification n'est d'ailleurs pas remise en cause par les parties. Il n'est pas non plus contesté que l'endoscope en question présentait des défauts en raison de la faiblesse du ressort. En revanche, la question litigieuse est de savoir si ces défauts sont bien imputables à la demanderesse, comme le soutient la défenderesse, et s'ils étaient d'une gravité telle que cette dernière pouvait refuser la réception de l'ouvrage et, partant, le paiement du prix, voire demander des dommages-intérêts.
3.2
3.2.1 Aux termes de l'art. 368 al. 1 CO, lorsque l'ouvrage est si défectueux ou si peu conforme à la convention que le maître ne puisse en faire usage ou être équitablement contraint à l'accepter, le maître a le droit de le refuser, et, si l'entrepreneur est en faute, de demander des dommages-intérêts. L'art. 369 CO prévoit cependant que le maître ne peut invoquer les droits résultant pour lui des défauts de l'ouvrage, lorsque l'exécution défectueuse lui est personnellement imputable, soit à raison des ordres qu'il a donnés contrairement aux avis formels de l'entrepreneur, soit pour toute autre cause. L'entrepreneur est ainsi libéré de sa responsabilité si le défaut est le fait du maître, notamment en raison des instructions données par le maître, des modes et moyens d'exécution ou encore du choix de la technique proposée (Pierre Tercier, Les contrats spéciaux, 3e éd., Zurich 2003, no 4110 ss). Il faut en outre que l'entrepreneur ait donné un avis formel au maître pour le rendre attentif aux risques qui peuvent découler de ses instructions et au fait qu'il dégage sa responsabilité pour le cas où un défaut résulterait des instructions que le maître maintient (ATF 116 II 305 consid. 2c/bb; 95 II 43 consid. 3c). Finalement, le fait imputé au maître doit être une cause adéquate du défaut de l'ouvrage. Si elle en constitue la cause unique, l'entrepreneur est entièrement libéré (Tercier, op. cit., no 4115; François Chaix, Commentaire romand, no 22 ad art. 369 CO).
3.2.2 En substance, la cour cantonale a considéré que, selon le contrat des 17 et 18 mai 1999, qui s'est substitué à la convention du 16 juin 1997, la défenderesse était le concepteur du produit, que la phase de développement était arrivée à son terme et que la défenderesse prenait, dès l'acceptation écrite de la conception et du dossier technique élaboré par la demanderesse, la responsabilité du produit. La juridiction cantonale a relevé que, bien que le dossier ne comportait pas de document contenant l'acceptation écrite de la conception et du dossier technique, la défenderesse avait expressément admis avoir validé les aspects techniques, en particulier les dessins de conception. La responsabilité du produit était donc passée à la défenderesse, qui devait répondre de la conception même de l'endoscope, à défaut d'avoir établi que la demanderesse ne s'était pas conformée aux protocoles de fabrication et d'assurance de qualité convenus.
Par ailleurs, la cour cantonale a considéré qu'il incombait à la défenderesse d'effectuer des tests de bio-compatibilité, lesquels auraient permis de déceler la faiblesse du ressort. Or, ces tests n'ont pas été réalisés, la défenderesse voulant absolument aller de l'avant dans la production et la commercialisation des endoscopes, malgré les mises en garde de la demanderesse, qui estimait que les tests nécessaires n'avaient pas ou pas complètement été effectués. La demanderesse a signalé à la défenderesse, de manière très claire, que si cette dernière souhaitait prendre le risque de lancer une série avant l'achèvement complet du développement, elle pouvait le faire, mais qu'elle-même en déclinerait toute responsabilité.
La défenderesse ne saurait ainsi valablement reprocher à la demanderesse de ne pas avoir suffisamment testé le "W.________". L'art. 369 CO s'applique et la défenderesse ne peut donc faire valoir aucun droit résultant de l'art. 368 CO.
3.3 A l'appui de son recours, la défenderesse invoque tout d'abord une violation des art. 364, 365 CO et 8 CC. Elle fait valoir que la cour cantonale aurait violé ces dispositions "en estimant qu'il appartenait à X.________ de se disculper sur des tests mécaniques alors qu'il appartenait à Y.________ de les effectuer. En effet, ce faisant, la Cour a retenu en faveur de celui qui a le fardeau de la preuve des faits non prouvés (...) à savoir que Y.________ n'avait pas violé ses obligations contractuelles. Il appartenait à Y.________ après vérification par des tests techniques, de la non-fiabilité du système d'orientation, conformément à l'art. 365 al. 3 CO, d'informer immédiatement X.________ sous peine d'en supporter les conséquences. Y.________ n'a pas effectué de tests mécaniques concluants".
Dans un grief séparé, qui porte également sur la question de savoir quelle partie aurait dû effectuer des "tests mécaniques", la défenderesse invoque une violation de l'art. 8 CC en relation avec l'art. 51 OJ. Elle fait valoir en substance "qu'il incombe à celui qui affirme avoir accompli son obligation de l'établir", relevant que les constatations de la cour, selon lesquelles les tests mécaniques auraient dû être effectués par la défenderesse, sont inconciliables avec la déclaration du témoin-expert de l'EPFL qu'elle avait fait citer.
Ces deux griefs relatifs aux mêmes constatations de fait seront examinés conjointement.
3.3.1 On peut se demander tout d'abord si le recours sur ces points satisfait aux exigences de l'art. 55 al. 1 let. c OJ. La motivation de la défenderesse est des plus succinctes et ne met pas en évidence les points sur lesquels le raisonnement de la cour cantonale violerait le droit fédéral, en particulier l'art. 8 CC. En outre, la défenderesse ne motive nullement en quoi l'art. 51 OJ serait violé, se contentant d'affirmer que les constatations de fait de la cour cantonale sont inconciliables avec la déposition du témoin-expert. On peut toutefois laisser cette question ouverte, ces griefs étant de toute manière infondés.
3.3.2 Pour autant que l'argumentation confuse de la défenderesse permette de le comprendre, la demanderesse aurait dû effectuer des tests mécaniques lors de la mise au point des prototypes avant mars 1999, ce qu'elle n'aurait pas fait, et la cour cantonale aurait renversé le fardeau de la preuve, et partant violé l'art. 8 CC, en considérant que c'est la défenderesse qui "devait se disculper sur des tests mécaniques".
L'art. 8 CC répartit le fardeau de la preuve pour toutes les prétentions fondées sur le droit fédéral et détermine, sur cette base, laquelle des parties doit assumer les conséquences de l'échec de la preuve (ATF 127 III 519 consid. 2a; 126 III 189 consid. 2b, 315 consid. 4a). On en déduit également un droit à la preuve et à la contre-preuve (ATF 126 III 315 consid. 4a), à la condition qu'il s'agisse d'établir un fait pertinent (ATF 126 III 315 consid. 4a; 123 III 35 consid. 2b), qui n'est pas déjà prouvé (ATF 127 III 519 consid. 2a; 126 III 315 consid. 4a), par une mesure probatoire adéquate (cf. ATF 90 II 224 consid. 4b) qui a été régulièrement offerte selon les règles de la loi de procédure applicable (ATF 126 III 315 consid. 4a; 122 III 219 consid. 3c).
En revanche, l'art. 8 CC ne dicte pas au juge la manière dont il doit forger sa conviction. Ainsi, lorsque l'appréciation des preuves convainc le juge qu'un fait est établi à satisfaction de droit ou réfuté, la question de la répartition du fardeau de la preuve ne se pose plus et le grief tiré de la violation de l'art. 8 CC devient sans objet. Il s'agit alors d'une question de pure appréciation des preuves; celle-ci ne peut être soumise au Tribunal fédéral que par la voie d'un recours de droit public pour arbitraire (ATF 129 III 18 consid. 2.6; 127 III 519 consid. 2a).
Contrairement à ce que semble soutenir la défenderesse, l'arrêt attaqué ne retient nullement qu'il lui incombait d'effectuer des "tests mécaniques pour se disculper". La cour cantonale a soigneusement défini les obligations qui incombaient à chacune des parties en ce qui concerne les tests à effectuer; à cet égard, il n'est nulle part fait mention de "tests mécaniques". Ainsi, la cour cantonale a retenu que la demanderesse a procédé à différents tests techniques, notamment des tests de flexibilité du ressort, dont elle a transmis les résultats à la défenderesse. En revanche, il appartenait à celle-ci de procéder aux tests de bio-compatibilité et aux tests cliniques, ce qu'elle n'a pas fait, ou seulement de manière incomplète. La cour cantonale a également considéré que "tous les témoins interrogés à cet égard ont estimé qu'il appartenait à l'appelante (X.________) d'effectuer les tests de bio-compatibilité, sur des mannequins, voire des patients", et que "ces tests auraient effectivement permis de déceler la faiblesse du ressort". La cour cantonale s'est ainsi forgé une conviction quant à la question de savoir quelle partie devait, selon l'accord réel des parties, effectuer les tests propres à déceler le défaut en question et elle est parvenue à la conclusion qu'il s'agissait de la défenderesse. Il s'agit là de constatations de fait, résultant d'une appréciation des preuves, qui lient le Tribunal fédéral. Pour les motifs invoqués plus haut, cette appréciation des preuves ne peut pas être remise en question en invoquant une violation de l'art. 8 CC.
Pour les mêmes raisons, la défenderesse n'est pas admise à remettre en cause ces constatations de fait au motif qu'elles seraient inconciliables avec les dépositions faites par un expert en cours de procédure.
3.3.3 La défenderesse fait également valoir une violation des art. 364 et 365 CO . Toutefois, elle n'apporte pas le moindre argument pour démontrer en quoi l'art. 364 CO serait applicable ni en quoi il aurait été violé. Le recours n'est donc pas recevable sur ce point (art. 55 al. 1 let. c OJ).
Par ailleurs, dans une argumentation des plus sommaires, la défenderesse prétend que la cour cantonale aurait violé l'art. 365 al. 3 CO. La demanderesse aurait dû vérifier par des tests techniques la non-fiabilité du système d'orientation - ce qu'elle n'aurait pas fait - et en informer immédiatement la défenderesse sous peine d'en supporter les conséquences.
Ce grief ne résiste pas davantage à l'examen.
En premier lieu, comme constaté ci-dessus (consid. 3.3.2), il n'appartenait pas à la demanderesse d'effectuer de son propre chef des tests de bio-compatibilité qui auraient permis de déceler la faiblesse du ressort. Ces tests incombaient à la défenderesse.
Il reste cependant à examiner si la demanderesse avait une obligation d'informer la défenderesse de la non-fiabilité du ressort et, cas échéant, si cette obligation a correctement été exécutée.
La défenderesse semble fonder une telle obligation sur l'art. 365 al. 3 CO. Or, cette disposition ne s'applique pas en l'espèce. En effet, l'art. 365 CO vise les devoirs de l'entrepreneur en rapport avec la matière nécessaire à l'exécution de l'ouvrage. A teneur de l'art. 365 al. 3 CO, l'entrepreneur est tenu d'informer immédiatement le maître, sous peine de supporter les conséquences, si, dans le cours des travaux, la matière fournie par le maître ou le terrain désigné par lui est reconnu défectueux, ou s'il survient telle autre circonstance qui compromette l'exécution régulière ou ponctuelle de l'ouvrage. En l'espèce, la matière utilisée par la demanderesse n'a pas été fournie par la défenderesse, de sorte que l'art. 365 al. 3 CO ne s'applique pas. En outre, selon les constatations de fait qui lient le Tribunal fédéral, le défaut du "W.________" provient de la conception erronée du produit à l'origine - dont la défenderesse était seule responsable -, et non du choix du matériau.
En revanche, le Tribunal fédéral appliquant le droit d'office, la question de savoir si la demanderesse devait informer la défenderesse des problèmes constatés par un avis formel doit être examinée à la lumière de l'art. 369 CO. Selon cette disposition, l'entrepreneur est libéré de sa responsabilité si le défaut est le fait du maître, notamment en raison des instructions données par ce dernier, des modes et moyens d'exécution ou encore du choix de la technique proposée, notamment à raison des ordres donnés contrairement aux avis formels de l'entrepreneur. Cet avis doit être précis, clair et sans équivoque: il doit manifester sans malentendu possible que le mode d'exécution préféré par le maître pourrait, selon l'entrepreneur, entraîner des dommages et que si le maître persistait dans ses intentions, il prendrait le risque sur lui (ATF 116 II 305 consid. 2c/bb; 95 II 43 consid. 3c).
En l'espèce, selon les constatations cantonales qui lient le Tribunal fédéral, la demanderesse, en mars 1999, a formellement mis en garde la défenderesse contre l'insuffisance de la phase de développement et quant au risque d'échec du produit. La demanderesse a expressément averti la défenderesse qu'elle n'assumerait pas le risque de cet échec. Cet avertissement est conforme aux exigences posées par la jurisprudence fédérale précitée: il s'agit bien là d'un avertissement formel duquel il ressort que, de l'avis de la demanderesse, les instructions données par la défenderesse peuvent conduire à la survenance d'un défaut et que la demanderesse refuse toute responsabilité à cet égard. Les conditions d'application de l'art. 369 CO sont ainsi bien remplies et la défenderesse est déchue de ses droits à la garantie.
4.
La défenderesse invoque également une violation de l'art. 100 CO. A nouveau, la motivation du recours sur ce point est peu claire et peu compréhensible. La défenderesse semble remettre en cause la portée de la clause contenue dans le contrat des 17 et 18 mai 1999 selon laquelle, d'une part, la défenderesse se déclare responsable de la conception du produit et, d'autre part, la demanderesse rejette toute responsabilité à cet égard. Cette clause d'exclusion ne serait pas valide en raison de la faute grave de la demanderesse qui aurait dû examiner, par des tests mécaniques, que le "ressort cassait lorsqu'on le contraignait", défaut qui serait préexistant à la nouvelle convention de 1999.
A nouveau, la défenderesse remet en cause, de manière inadmissible dans le recours en réforme, les constatations de fait de la cour de justice qui lient le Tribunal fédéral (art. 63 al. 2 OJ). La juridiction cantonale a retenu en fait que la défenderesse a validé les aspects techniques de l'endoscope après la conclusion du contrat des 17 et 18 mai 1999. En outre, comme mentionné précédemment, il appartenait à la défenderesse et non à la demanderesse de vérifier la solidité du ressort par des tests de bio-compatibilité. La cour cantonale a ainsi jugé à bon droit que la responsabilité de la demanderesse n'est pas engagée pour le défaut du "W.________". La responsabilité de la demanderesse n'étant pas engagée, la question de la validité de la clause d'exclusion de responsabilité formulée dans le contrat du 11 mai 1999 ne se pose pas. A titre superfétatoire, on relèvera néanmoins qu'aucun élément, dans l'arrêt attaqué, ne permet de douter de la validité d'une telle clause. En outre, on ne saurait reprocher à la demanderesse d'avoir commis une faute grave, rendant nulle la stipulation tendant à la libérer de sa responsabilité, au motif qu'elle n'aurait pas effectué des tests pour vérifier la solidité du ressort, puisque ces tests ne lui incombaient justement pas.
5.
La défenderesse reproche à l'instance cantonale d'avoir violé les art. 372 al. 1 CO et 82 CO en n'ayant pas examiné l'exception invoquée par ses soins, à savoir le droit de refuser de payer le prix à la suite de la livraison de l'ouvrage défectueux.
Le recours doit également être rejeté sur ce point. La cour cantonale a considéré à bon droit que la défenderesse ne pouvait pas invoquer les droits à la garantie puisqu'elle était elle-même responsable du défaut du "W.________" allégué. Par conséquent, elle a également jugé à juste titre que la demanderesse était en droit de réclamer le paiement de ses obligations contractuelles, en relevant que la défenderesse n'avait pas contesté le détail des factures impayées ni la réalité des prestations effectuées. Il s'ensuit que la défenderesse n'était nullement en droit de refuser le paiement du prix, comme elle l'invoque, et la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral sur ce point.
6.
Finalement, la défenderesse prétend que la constatation de la cour cantonale, selon laquelle la défenderesse a su, en octobre 1998, qu'il y avait une faiblesse au niveau de l'arête, est fausse et inconciliable avec les éléments de la cause. Elle se réfère à cet égard notamment à diverses pièces du dossier et invoque une inadvertance manifeste.
Il n'y a inadvertance manifeste au sens de la jurisprudence fédérale, susceptible d'être rectifiée d'office par le Tribunal fédéral selon l'art. 63 al. 2 OJ, que lorsque l'autorité cantonale a omis de prendre en considération une pièce déterminée, ou l'a mal lue, s'écartant par mégarde de sa teneur exacte, en particulier de son vrai sens littéral (ATF 115 II 399 consid. 2a; ATF 109 II 159 consid. 2b). Il n'y a en revanche pas d'inadvertance manifeste lorsque l'autorité cantonale a retenu ou écarté un fait à la suite d'un raisonnement ou d'un choix dans l'appréciation des preuves (ATF 121 IV 104 consid. 2b). Dès l'instant où une constatation de fait repose sur l'appréciation, même insoutenable d'une preuve ou d'un ensemble de preuves ou d'indices, une inadvertance est exclue (Jean-François Poudret, COJ II, n. 5.4 ad art. 63 OJ).
La défenderesse s'en prend, sous couvert d'inadvertance manifeste, à l'appréciation des preuves opérée par la cour cantonale. Dans l'arrêt attaqué, la cour cantonale relève qu'en octobre 1998, aucun appareil ne présentait toutes les fonctionnalités et que dès mille flexions l'arête dorsale du flexible transperçait la gaine de silicone, la soudure ne tenant pas. Elle se fonde à cet égard sur diverses pièces produites par les parties. Toujours sur la base de ces pièces, la cour cantonale retient qu'au début de l'année 1999, la défenderesse a décidé de renoncer à la version Z.________ de l'endoscope au profit d'une version destinée aux médecins-anesthésistes, laquelle a également présenté des problèmes liés au flexible orientable du "W.________". Les difficultés rencontrées ont conduit les parties a stoppé d'un commun accord la production des endoscopes le 12 août 1999. En septembre 1999, alors que le problème du flexible orientable n'était pas encore résolu, la défenderesse a présenté l'endoscope "W.________" à un congrès médical; cette présentation a donné lieu à plusieurs centaines de commandes. Au début 2000, différents distributeurs ont retourné à la défenderesse des endoscopes défectueux. La défenderesse cherche en réalité à remettre en cause les constatations de fait telles qu'arrêtées par la cour cantonale et résultant de l'appréciation des preuves à laquelle a procédé cette autorité. Ce moyen est irrecevable dans le cadre du recours en réforme.
Même s'il l'était, on relèvera que la rectification n'a lieu que si le point de fait est pertinent pour l'issue du litige (ATF 95 II 503 consid. 2a). Cette dernière condition n'est pas remplie. En effet, la défenderesse était responsable de la conception de l'endoscope. Les problèmes rencontrés par le "W.________" provenaient précisément de la conception défectueuse imputable à la défenderesse. Que la défenderesse ait eu connaissance des faiblesses de l'arête dorsale en 1998 ou plus tard ne change en rien la solution de ce litige.
7.
Le recours doit ainsi être rejeté dans la mesure où il est recevable. La défenderesse, qui succombe, paiera l'émolument judiciaire et versera à la demanderesse une indemnité à titre de dépens (art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable.
2.
Un émolument judiciaire de 10'000 fr. est mis à la charge de la recourante.
3.
La recourante versera à l'intimée une indemnité de 12'000 fr. à titre de dépens.
4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.
Lausanne, le 20 février 2006
Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse
Le président: La greffière: