Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet. Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
Zurück zur Einstiegsseite Drucken
Grössere Schrift
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
6B_34/2009 
 
Arrêt du 20 avril 2009 
Cour de droit pénal 
 
Composition 
MM. les Juges Favre, Président, 
Wiprächtiger et Mathys. 
Greffière : Mme Angéloz. 
 
Parties 
X.________, recourant, 
représenté par Maître Eduardo Redondo, avocat, 
 
contre 
 
Direction des Etablissements pénitentiaires de la Plaine de l'Orbe, 1350 Orbe, 
intimée. 
 
Objet 
Sanction disciplinaire, 
 
recours contre la décision de la Cheffe du Service pénitentiaire du canton de Vaud 
du 22 décembre 2008. 
 
Faits: 
 
A. 
Depuis le 31 mars 2008, X.________ exécute aux Etablissements pénitentiaires de la Plaine de l'Orbe (ci-après: EPO) deux peines privatives de liberté, respectivement de trois mois et trois ans. 
Le 1er décembre 2008 à 11 h 20, il a été pris à partie par un autre détenu, ensuite de quoi tous deux se sont battus et ont été précipités par terre, avant d'être séparés par des gardiens. A raison de ces faits, la Direction des EPO a infligé à X.________ cinq jours d'arrêts avec sursis partiel pendant deux jours, par décision du 3 décembre 2008, immédiatement notifiée et mise à exécution. 
 
B. 
Le 4 décembre 2008, X.________ a recouru contre cette décision auprès de la Cheffe du Service pénitentiaire du canton de Vaud. 
Par prononcé du 22 décembre 2008, cette dernière a déclaré le recours sans objet, en raison de l'exécution de la sanction dès le 3 décembre 2008. A l'appui, elle a relevé que le recours n'entraînait pas d'effet suspensif et que l'intéressé avait "refusé de signer l'autorisation de prélèvement de son compte libre de la somme de 100 fr. à titre d'émolument pour le traitement de son recours". 
 
C. 
X.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral. Il se plaint de n'avoir pas bénéficié en instance cantonale d'une voie de recours à un tribunal indépendant et impartial, en violation des art. 30 al. 1 Cst. et 6 ch. 1 CEDH. Il soutient en outre qu'il a été privé d'une voie de recours effective, en raison de l'absence d'effet suspensif et du fait que la sanction disciplinaire a été exécutée avant que l'autorité cantonale de recours ne se prononce sur son cas. Il conclut à l'annulation de la décision attaquée, en sollicitant l'assistance judiciaire. 
L'autorité intimée n'a pas répondu. Le Service pénitentiaire se réfère à la décision de sa Cheffe. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
1.1 La décision attaquée, qui porte sur l'exécution d'une peine et a été prise par une autorité statuant en dernière instance cantonale (cf. art. 36 de la loi vaudoise du 4 juillet 2006 sur l'exécution des condamnations pénales [LEP; RSV 340.01]), peut faire l'objet d'un recours en matière pénale (art. 78 al. 2 let. b et 80 al. 1 LTF). 
 
1.2 Dans le cadre de ce dernier, les moyens de droit constitutionnel et conventionnel soulevés par le recourant sont recevables, dès lors qu'ils respectent les exigences de motivation accrues de l'art. 106 al. 2 LTF (cf. ATF 135 IV 43 consid. 4 p. 47 et l'arrêt cité). 
 
1.3 Dans la mesure où le recourant a déjà exécuté 3 des 5 jours de la sanction qui lui a été infligée, il n'a plus d'intérêt actuel et pratique à l'admission de son recours. Il a néanmoins qualité pour l'interjeter, dès lors qu'il remplit les conditions auxquelles la jurisprudence renonce à une telle exigence, à savoir lorsque cette dernière fait obstacle au contrôle de la constitutionnalité d'un acte qui pourrait se reproduire en tout temps, dans des circonstances semblables, et qui, en raison de sa brève durée ou de ses effets limités dans le temps, échapperait ainsi toujours à la censure, et lorsqu'il existe un intérêt public important à résoudre la question de principe soulevée (ATF 127 I 164 consid. 1a p. 166 et les arrêts cités). En effet, le recourant doit exécuter, depuis le 31 mars 2008, des peines privatives de liberté de trois ans et trois mois, soit d'une durée encore longue, pendant laquelle un problème disciplinaire pourrait surgir. Au demeurant, le recourant conserve un intérêt actuel et pratique à l'admission de son recours autant que la sanction a été assortie d'un sursis partiel de deux jours, qui n'a pas été révoqué. 
 
1.4 Le recours est ainsi recevable. 
 
2. 
Dans un premier grief, le recourant se plaint d'une violation de l'art. 30 al. 1 Cst., respectivement de l'art. 6 ch. 1 CEDH, au motif que l'autorité cantonale de recours n'est pas un tribunal indépendant et impartial, mais le supérieur hiérarchique de la Direction des EPO. 
 
2.1 La question soulevée implique de rechercher, conformément à la jurisprudence relative aux art. 30 al. 1 Cst. et 6 ch. 1 CEDH, qui ont la même portée, si la sanction litigieuse revêt un caractère pénal, auquel cas une décision judiciaire est obligatoire (ATF 118 Ia 64 consid. 3s/bb p. 90; cf. aussi ATF 125 I 104 consid. 3b p. 110), ou si elle est de nature administrative. A cet égard, il y a lieu de tenir compte de la différence de but du droit pénal et du droit disciplinaire. Ce dernier vise uniquement au maintien de l'ordre dans les établissements et à l'exécution régulière des peines et mesures privatives de liberté, non pas à l'amendement de la personne condamnée, la mesure disciplinaire devant demeurer sans incidence sur la nature et la durée de la peine exécutée. 
 
2.2 En définissant les arrêts comme une restriction supplémentaire de la liberté, en cela qu'elle aggrave le régime de la détention dans le sens d'une plus grande rigueur, et non pas comme une peine privative de liberté, qui viendrait prolonger la détention, l'art. 91 al. 2 let. d CP reste dans le champ disciplinaire, soustrait à l'application des art. 6 ch. 1 CEDH et 30 al. 1 Cst., pour autant que la durée des arrêts soit de vingt jours au maximum (ATF 125 I 104 consid. 2 et 3 p. 107 ss et les références citées). 
 
2.3 La plupart des cantons ont retenu cette limite de vingt jours pour la sanction disciplinaire la plus grave. Dans ceux qui ont prévu une sanction menace de trente jours, un contrôle judiciaire est nécessaire. Tel est notamment le cas du canton de Vaud (cf. art. 26 al. 6 du règlement vaudois du 26 septembre 2007 sur le droit disciplinaire applicable aux détenus avant jugement et aux condamnés [RDD; RSV 340.07.01]), dans lequel un contrôle judiciaire est institué par l'art. 36 LEP, qui ouvre un recours auprès du juge d'application des peines pour les sanctions disciplinaires "au-delà de vingt jours". Tout cela sous réserve de l'application de l'art. 29a Cst. (ATF 130 I 312 consid. 4.2 p. 327 et les références), que le recourant, à juste titre, n'invoque pas (art. 86 al. 2 et 130 al. 2 et 3 LTF). 
 
2.4 Il découle de ce qui précède que le recourant ne pouvait exiger que sa cause soit traitée par une autorité judiciaire, la mesure de cinq jours d'arrêts, dont deux avec sursis, qui lui a été infligée n'étant pas assimilable à une sanction pénale. Partant, il n'y a eu aucune atteinte à la garantie qu'il invoque. Sur ce point, le recours doit en conséquence être rejeté. 
 
3. 
Dans un second moyen, le recourant fait valoir que la procédure a pour effet de le priver d'une voie de recours effective contre une décision disciplinaire dont la durée ne dépasse pas vingt jours. Il incrimine l'absence d'effet suspensif de l'art. 35 LEP et le fait qu'en l'espèce le recours a été déclaré sans objet parce que la sanction des trois jours d'arrêts fermes avait été subie avant que l'autorité cantonale de recours ne statue. 
 
3.1 Le recours cantonal a essentiellement été considéré comme devenu sans objet au motif que, faute d'effet suspensif de celui-ci, la sanction avait déjà été subie. L'autorité cantonale a en outre relevé que le recourant avait refusé de signer l'autorisation de prélever sur son compte la somme de 100 fr., à titre d'émolument pour le traitement de son recours, sans toutefois en tirer de conséquences quant à la recevabilité de ce dernier. En particulier, elle n'a pas justifié son refus d'entrer en matière par le fait que le recourant ne se serait pas acquitté en temps utile de l'avance de frais de 100 fr. prévue par le droit cantonal. 
 
3.2 Contrairement à l'opinion de l'autorité cantonale, l'exécution de la mesure disciplinaire - même indépendamment de son fractionnement en une partie ferme et une partie avec sursis - ne supprime pas forcément l'intérêt juridique actuel au traitement du recours. L'auteur de ce dernier peut notamment avoir un intérêt à ce que la peine disciplinaire soit rapportée ou réduite et, le cas échéant, à ce que la sanction nouvellement déterminée figure dans son dossier administratif. Au demeurant, les motifs de droit constitutionnel qui conduisent à renoncer à l'intérêt actuel au recours peuvent être transposés en droit administratif cantonal, avec la même incidence sur la recevabilité des recours et, une fois celle-ci reconnue, sur leur examen au fond (ATF 124 I 231 consid. 1b p. 233 et les arrêts cités). 
 
3.3 La rectification du dossier administratif du détenu en ce qui concerne la sanction contestée est importante pour la fixation d'une éventuelle mesure en cas de commission d'une autre infraction disciplinaire, la sanction prononcée constituant un élément d'appréciation des antécédents de l'intéressé. Elle joue aussi un rôle dans le cadre de la procédure de libération conditionnelle (art. 22 LEP). Lorsque, comme en l'espèce, la sanction disciplinaire a été assortie d'un sursis partiel, il est également important de savoir si elle maintenue, modifiée ou annulée, dans la perspective éventuelle de la révocation de ce sursis en cas de nouvelle infraction disciplinaire (art. 27 al. 4 RDD). Dans l'hypothèse de l'octroi d'un sursis partiel, l'écoulement du délai de suspension ou d'épreuve (art. 27 al. 3 et 4 RDD) ne suffit pas à faire tomber l'intérêt juridique actuel au recours lorsque le bien-fondé et/ou la quotité de la mesure disciplinaire sont mis en cause (cf. supra, consid. 3.2). 
 
3.4 Sur le vu de ce qui précède, le refus de l'autorité cantonale d'entrer en matière sur le recours, au motif que ce dernier serait devenu sans objet, consacre un déni de justice formel (ATF 135 I 6 consid. 2.1 p. 9 et l'arrêt cité; 124 V 130 consid. 4 p. 133 et les références), dont la constatation entraîne l'admission du recours et l'annulation de la décision attaquée. 
La cause sera ainsi retournée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants, laquelle, en cas de déboutement du recourant, pourra fixer un émolument administratif conformément au droit applicable. A défaut d'un avis formel subordonnant expressément la recevabilité du recours au paiement de l'avance de frais, celle-là devra être admise, conformément à la jurisprudence exigeant qu'une protection juridique efficace soit garantie aux détenus par des voies de recours accessibles et dépourvues d'ambiguïté (cf. arrêt 1P.29/2004 du 5 août 2004, consid. 2.5 et les références). 
 
4. 
Vu l'issue du recours, il ne sera pas perçu de frais et le canton de Vaud sera condamné à payer une indemnité de dépens en faveur du recourant, dont la requête d'assistance judiciaire devient ainsi sans objet. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est partiellement admis, la décision attaquée annulée et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
 
2. 
Il n'est pas perçu de frais. 
 
3. 
Le canton de Vaud est condamné à payer une indemnité de dépens de 2'000 fr. en faveur du recourant. 
 
4. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cheffe du Service pénitentiaire du canton de Vaud. 
 
Lausanne, le 20 avril 2009 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
Le Président: La Greffière: 
 
Favre Angéloz