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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
4A_336/2012  
   
   
 
 
 
Arrêt du 20 novembre 2013  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes et M. les juges Klett, présidente, Niquille et 
Ch. Geiser, juge suppléant. 
Greffier: M. Thélin. 
 
Participants à la procédure 
L.________, 
représenté par Me Mathias Burnand, 
défendeur et recourant, 
 
contre  
 
B.________, 
représenté par Me Alain Dubuis, 
demandeur et intimé. 
 
Objet 
responsabilité civile du notaire 
 
recours contre l'arrêt rendu le 10 février 2012 par la Chambre des recours du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Faits:  
 
A.   
H.X.________, décédé le 4 juin 2012, a exercé la profession de notaire dans le canton de Vaud. Le 17 novembre 1988, il a instrumenté une vente d'immeuble conclue entre A.________ et B.________. 
La venderesse avait entrepris de faire ériger plusieurs bâtiments sur un bien-fonds de la commune de Puidoux. Un compte de construction lui était ouvert par la Banque N.________ à Genève et le remboursement de ce compte était garanti par deux cédules hypothécaires constituées sur l'immeuble. 
B.________ acquérait l'un des bâtiments en construction, soit une halle de stockage, sur une parcelle à détacher du bien-fonds qui par ailleurs restait à la venderesse. Sans plus de précisions, l'acte de vente prévoyait que le compte de construction serait « remboursé » et que les cédules hypothécaires, désormais reportées sur la parcelle vendue, seraient remises à l'acquéreur. Le prix de vente était fixé à 1'500'000 francs. B.________ a remis en paiement deux chèques, l'un de 600'000 fr., l'autre de 400'000 fr.; le solde du prix devait être acquitté au plus tard le 30 novembre 1988. 
Le 29 de ce mois, B.________ a fait virer par sa propre banque 3'600'000 fr. à la Banque N.________ pour solder le compte de construction et libérer ainsi les cédules. Il a agi sur le conseil et avec le concours de Me H.X.________. Par la suite, A.________ lui a restitué le chèque de 600'000 fr. qu'elle avait reçu le jour de la vente. 
En définitive, B.________ a donc versé au total 4'000'000 de francs pour l'acquisition d'un immeuble qui ne valait, selon la convention des parties, que 1'500'000 francs. A ses dires, il a de plus supporté des frais de travaux au total de 500'000 fr. pour l'achèvement de la halle, alors que ces travaux incombaient à la venderesse. 
 
B.   
Le 6 mars 2000, B.________ a ouvert action contre Me H.X.________ devant le Tribunal cantonal du canton de Vaud, et il a plus tard amplifié ses conclusions. Le défendeur devait être condamné à payer 3'499'603 fr. à titre de dommages-intérêts, avec intérêts au taux de 5% par an dès le 29 novembre 1988. 
Le défendeur a conclu au rejet de l'action. Subsidiairement, il a opposé en compensation une créance d'honoraires au montant de 34'000 francs. 
La Cour civile du Tribunal cantonal s'est prononcée le 17 novembre 2010. Accueillant partiellement l'action, elle a condamné le défendeur à payer 1'944'223 fr.90 avec intérêts au taux de 5% par an dès le 1er août 2000, sous déduction de 34'000 fr. « valeur 11 décembre 1991 ». La Cour a communiqué le dispositif de son jugement le 7 décembre 2010 puis l'expédition complète le 13 octobre 2011. 
La Chambre des recours du Tribunal cantonal a statué le 10 février 2012 sur le recours du défendeur. Elle a rejeté ce recours et confirmé le jugement. Elle a communiqué l'expédition complète de son arrêt le 4 mai 2012; le conseil du défendeur l'a reçue le 7 du même mois. 
 
C.   
Le 4 juin 2012, le défendeur a souscrit une procuration en faveur de l'avocat Mathias Burnand, tendant au dépôt d'un recours devant le Tribunal fédéral. Me Burnand a déposé ce recours le lendemain 5 juin mais son mandant était entretemps décédé. Le 6 juin, Me Burnand a déposé un recours similaire au nom de F.X.________, l'épouse du défendeur; elle était semble-t-il sa seule héritière connue. 
Par ordonnance du 19 juin 2012, la Présidente de la Ire Cour de droit civil du Tribunal fédéral a ordonné la suspension de la cause jusqu'à droit connu sur l'acceptation de la succession de feu H.X.________. 
Le 2 mai 2013, le Juge de paix compétent a ordonné la liquidation officielle de la succession et il a désigné le notaire L.________ en qualité de liquidateur. Le 22 août 2013, Me L.________ a déclaré adhérer aux conclusions des deux recours introduits aux noms de H.X.________ et F.X.________. 
Ces conclusions tendent à la réforme de l'arrêt de la Chambre des recours, en ce sens que l'action en dommages-intérêts soit entièrement rejetée et que le demandeur soit condamné à payer 34'000 fr. à titre d'honoraires, avec intérêts au taux de 5% par an dès le 11 décembre 1991. 
Invité à répondre, le demandeur a conclu au rejet des deux recours, dans la mesure où ils sont recevables. 
 
 
Considérant en droit:  
 
1.   
Dans le délai de recours de trente jours fixé par l'art. 100 al. 1 LTF, Me Burnand a saisi le Tribunal fédéral d'un recours au nom de H.X.________. 
La procuration jointe à ce recours ne prévoyait pas qu'elle déploierait ses effets aussi après la mort de son auteur, or celui-ci était décédé. 
Plus tard, Me L.________ a valablement ratifié la démarche de Me Burnand à titre de liquidateur officiel de la succession. Dans le procès et pour le compte des ayants droit, il s'est ainsi substitué au défunt en qualité de défendeur (ATF 130 III 97 consid. 2.3 p. 99/100). 
Au regard de cette situation, les deux recours respectivement introduits au nom de H.X.________ et de F.X.________ peuvent être assimilés à un recours unique. 
 
2.   
Devant la Cour civile du Tribunal cantonal, Me H.X.________ n'a pas pris de conclusions reconventionnelles tendant au paiement de ses honoraires. Au regard de l'art. 452 al. 1 CPC vaud., ces conclusions étaient manifestement irrecevables en tant qu'elles ont été prises pour la première fois devant la Chambre des recours. Au regard de l'art. 99 al. 2 LTF, elles sont également nouvelles, donc irrecevables devant le Tribunal fédéral. 
Sous cette réserve, les conditions de recevabilité du recours en matière civile sont en principe satisfaites. 
 
3.   
Il est constant que la responsabilité de Me H.X.________ puis de sa succession, à raison de ses services liés à la vente d'immeuble du 17 novembre 1988, est régie par l'art. 111 al. 1 et 3 de la loi vaudoise du 10 décembre 1956 sur le notariat, dans l'intervalle remplacée par d'autres dispositions. La succession peut donc être recherchée pour tout dommage que Me H.X.________ a causé dans l'exercice de ses activités ministérielles et professionnelles, soit intentionnellement, soit par négligence (art. 111 al. 1); les règles du code des obligations sont pour le surplus applicables (art. 111 al. 3) à titre de droit cantonal supplétif (ATF 127 III 248 consid. 1b p. 251/252). Cette responsabilité est soumise au droit cantonal aussi à raison des services du notaire exorbitants de sa fonction strictement ministérielle (ATF 126 III 370 consid. 6b p. 373). 
Le recours n'est pas recevable pour violation du droit cantonal, hormis les droits constitutionnels cantonaux (art. 95 let. c LTF) et certaines dispositions sans pertinence en matière civile (art. 95 let. d LTF). Le recours est en revanche recevable pour violation de la Constitution fédérale (art. 95 let. a LTF); la succession invoque notamment la protection contre l'arbitraire conférée par l'art. 9 Cst. 
 
4.   
Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou contredit d'une manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si sa décision apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, adoptée sans motifs objectifs ou en violation d'un droit certain. En outre, il ne suffit pas que les motifs de la décision soient insoutenables; il faut encore que celle-ci soit arbitraire dans son résultat. Il ne suffit d'ailleurs pas non plus qu'une solution différente de celle retenue par l'autorité cantonale puisse être tenue pour également concevable ou apparaisse même préférable (ATF 138 I 305 consid. 4.3 p. 319; 137 I 1 consid. 2.4 p. 5; 136 III 552 consid. 4.2 p. 560). 
Selon la jurisprudence relative aux recours formés pour violation de droits constitutionnels (art. 106 al. 2 ou 116 LTF), celui qui se plaint d'arbitraire doit indiquer de façon précise en quoi la décision qu'il attaque est entachée d'un vice grave et indiscutable; à défaut, le grief est irrecevable (ATF 133 II 249 consid. 1.4.3 p. 254; 133 II 396 consid. 3.2 p. 400; 136 II 489 consid. 2.8 p. 494). 
 
5.   
En l'état de la cause, il n'est plus contesté que Me H.X.________ ait fautivement manqué à son devoir de diligence et engagé sa responsabilité en déterminant le demandeur à exposer 3'600'000 fr. pour solder le compte de construction ouvert à sa cocontractante. 
Les autorités précédentes ont retenu un dommage initial de 2'500'000 fr. correspondant à ce que le demandeur a payé en sus du prix de vente, le coût de l'achèvement du bâtiment étant toutefois exclu. Elles ont augmenté ce dommage initial des frais et intérêts courus jusqu'à la fin de juillet 2000 et elle l'ont réduit en considération d'une remise partielle de dette accordée par l'établissement bancaire du demandeur. Elles ont enfin appliqué une réduction d'un tiers pour faute concomitante du lésé. La faute ainsi retenue consiste en ce que le demandeur a contribué à créer une situation d'urgence parce qu'il avait grande hâte d'acquérir une halle de stockage; elle consiste également en ce qu'il a accepté de verser une somme considérable sans demander d'explications ni rechercher de solution alternative. 
 
6.   
A l'encontre de ce jugement, la succession soutient à titre principal que le demandeur n'a pas subi de dommage parce que dans son patrimoine, l'engagement supplémentaire de 3'600'000 fr. contracté envers sa propre banque, par suite du virement opéré sur son ordre en faveur de la Banque N.________, s'est trouvé compensé par une créance de même importance à faire valoir contre A.________. La débitrice était alors solvable, prétendument, et la créance n'a perdu toute valeur que par suite de l'inaction du demandeur durant plus de dix ans. 
En vertu de l'art. 44 al. 1 CO, il incombe au lésé de réduire le dommage autant que l'on peut raisonnablement l'attendre de lui (Franz Werro, in Commentaire romand, 2e éd., n° 30 ad art. 44 CO). Selon l'argumentation présentée, ce devoir imposait au demandeur d'entreprendre une poursuite pour dette ou une action en justice contre A.________. 
D'abord, la prétention à élever contre cette dernière est douteuse, ce qui est explicitement reconnu dans le mémoire de recours. L'argumentation présentée fait état d'un prêt dont le demandeur pouvait censément exiger le remboursement; toutefois, la Chambre des recours n'a pas constaté, entre lui et A.________, les manifestations de volonté réciproques et concordantes portant sur l'octroi d'un prêt destiné à l'amortissement du compte de construction. Quoique la décision attaquée rapporte certains témoignages paraissant à cet égard concluants, la Chambre des recours n'a pas non plus constaté que A.________ ait sollicité le demandeur d'avancer les fonds nécessaires à la libération des cédules hypothécaires. Le fondement contractuel d'une créance contre elle n'est donc pas établi avec certitude. Pour le surplus, dans le cadre du grief tiré de l'art. 9 Cst., le Tribunal fédéral n'a pas à rechercher d'office si le demandeur eût pu se prévaloir des règles de l'enrichissement illégitime ou de la gestion d'affaires sans mandat. 
Ensuite, il est affirmé dans le mémoire que A.________ « était loin d'être insolvable à fin novembre 1988 ». Ce fait étant invoqué à l'encontre de l'action en dommages-intérêts, il eût incombé à Me H.X.________, plutôt qu'au demandeur, d'en apporter la preuve (cf. ATF 130 III 321 consid. 3.1 p. 323; 128 III 271 consid. 2a/aa p. 273; 132 III 183 consid. 8.3 p. 206). Devant la Chambre des recours, le notaire recherché ne s'est toutefois prévalu que d'éléments sans pertinence ou inconsistants, tels que « le procès-verbal d'audition de A.________ [du] 14 mai 1991 ne donne pas l'impression que [sa] situation ait alors été obérée ». La succession n'est donc pas fondée à se plaindre, parce que la Chambre des recours a au contraire retenu que A.________ était insolvable et s'est abstenue de préciser depuis quand, d'une appréciation arbitraire des preuves ni d'une décision insuffisamment motivée. 
Ainsi, la succession ne parvient pas à mettre en évidence une application manifestement erronée de l'art. 44 al. 1 CO en rapport avec des démarches que le demandeur eût dû entreprendre contre A.________. 
 
7.   
A titre subsidiaire, il est fait grief aux autorités précédentes de n'avoir pas opéré une réduction des dommages-intérêts plus importante à raison de la faute concomitante du demandeur. La réduction d'un tiers effectivement opérée est tenue pour insuffisante; il aurait censément fallu appliquer un taux plus élevé qui est laissé à l'appréciation du Tribunal fédéral. 
Les effets d'une faute concomitante du lésé sont eux aussi régis par l'art. 44 al. 1 CO (Werro, op. cit., n° 12 ad art. 44 CO) : la faute peut entraîner la réduction ou le refus des dommages-intérêts. 
Selon l'argumentation présentée, le 17 novembre 1988 qui est le jour de la vente de l'immeuble, A.________ avait épuisé ou s'apprêtait à épuiser totalement le compte de construction ouvert auprès de la Banque N.________; le demandeur le savait mais il l'a tu à Me H.X.________. Si celui-ci en avait au contraire été informé, il aurait mis le demandeur en garde ou pris d'autres dispositions propres à le garantir de la perte ensuite survenue. Le silence du demandeur est une faute concomitante que la Chambre des recours a omis de prendre en considération sans indiquer aucun motif. 
Il n'est pas d'emblée évident que Me H.X.________ eût agi différemment s'il avait su que la dette garantie par les cédules hypothécaires correspondait à la totalité plutôt qu'à une partie seulement du crédit ouvert par la banque. La Chambre des recours a certes admis ce fait hypothétique, toutefois sans apporter aucune explication. Le mémoire soumis au Tribunal fédéral ne contient également que de simples affirmations. Dans ces conditions, le silence prétendument fautif du demandeur n'est pas invoqué d'une manière suffisamment développée aux regard des exigences relatives à la motivation du grief d'arbitraire. 
La succession voit encore deux autres fautes concomitantes que la Chambre des recours n'a pas prises en considération. D'une part, durant près de dix ans, le demandeur n'a entrepris aucune démarche efficace afin de se faire rembourser par A.________; d'autre part, durant le même laps, il n'a jamais informé Me H.X.________ qu'il se tenait pour créancier de celle-ci et qu'il envisageait de se retourner contre lui s'il ne parvenait pas à se faire rembourser. 
Il n'est pas précisé, dans cette argumentation, de quelle manière Me H.X.________ aurait censément pu remédier aux conséquences de sa négligence lors du remboursement du compte de construction. Il y est seulement suggéré que le notaire aurait pu encourager le demandeur à agir contre A.________. Dans la mesure où le moyen tiré de ces fautes concomitantes est suffisamment motivé, il se confond donc avec celui déjà discuté ci-dessus, tiré d'une violation du devoir de réduire le dommage. 
La succession échoue donc aussi à mettre en évidence une sous-estimation flagrante de la réduction des dommages-intérêts à appliquer par suite de la faute concomitante du demandeur. Par ailleurs, contrairement aux protestations élevées devant le Tribunal fédéral, il n'apparaît pas que les constatations de fait ou que la motivation de la décision attaquée soient lacunaires sur des points importants. 
 
8.   
Le recours se révèle privé de fondement, dans la mesure où les conclusions et les griefs présentés sont recevables. A titre de partie qui succombe, le défendeur doit acquitter l'émolument à percevoir par le Tribunal fédéral et les dépens auxquels l'autre partie peut prétendre. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:  
 
1.   
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
 
2.   
Le défendeur acquittera un émolument judiciaire de 15'000 francs. 
 
3.   
Le défendeur versera une indemnité de 17'000 fr. au demandeur, à titre de dépens. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre des recours du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 20 novembre 2013 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La présidente: Klett 
 
Le greffier: Thélin