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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal  
 
 
 
 
 
2C_617/2022  
 
 
Arrêt du 21 mars 2024  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mmes et MM. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz, Hänni, Hartmann et Ryter. 
Greffière : Mme Vuadens. 
 
Participants à la procédure 
Administration fédérale des contributions, Service d'échange d'informations en matière fiscale SEI, 
Eigerstrasse 65, 3003 Berne, 
recourante, 
 
contre  
 
1. A.________ SA, 
2. B.________ SA, 
3. C.________ SA, 
4. D.________ SA, 
5. E.________ SA, 
6. F.________ SA, 
7. G.________ SA, 
8. H.________ SA, 
9. I.________ SA, 
10. J.________ SA, 
toutes représentées par Daniel Schafer, Benoît Biedermann et Stanislas Cramer, avocats, 
intimées. 
 
Objet 
Assistance administrative (MAC / CH-BE), dépens, 
 
recours contre la décision de radiation du Tribunal administratif fédéral, Cour I, du 12 juillet 2022 
(A-4897/2021). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Le 20 décembre 2019, le Service public fédéral Finances belge (ci-après: l'autorité requérante) a adressé cinq demandes d'assistance administrative internationale en matière fiscale à l'Administration fédérale des contributions (ci-après: l'Administration fédérale), fondées sur les art. 4, 5 et 28 de la Convention du 25 janvier 1988 du Conseil de l'Europe et de l'OCDE concernant l'assistance administrative mutuelle en matière fiscale (RS 0.652.1, communément abrégée "MAC" pour Convention on mutual administrative assistance in tax matters). Les demandes visaient l'obtention de renseignements concernant une dizaine de sociétés belges (ci-après: les Sociétés).  
 
A.b. Par cinq décisions finales du 6 octobre 2021, l'Administration fédérale a accordé l'assistance administrative requise.  
Les Sociétés ont recouru contre ces décisions finales auprès du Tribunal administratif fédéral, qui a joint les causes par décision incidente du 13 décembre 2021. 
Au cours de la procédure, les Sociétés ont présenté de nouveaux moyens de preuve au Tribunal administratif fédéral. Par ordonnance du 11 avril 2022, ce dernier a partant ordonné à l'Administration fédérale de demander à l'autorité requérante si les informations concernées par les demandes d'assistance administrative étaient toujours attendues. L'Administration fédérale s'est exécutée et, par courriel du 26 avril 2022, l'autorité requérante a répondu qu'elle retirait ses demandes. 
 
A.c. A la suite de ce retrait, l'Administration fédérale a, par décisions du 24 mai 2022, révoqué ses décisions finales et demandé le même jour au Tribunal administratif fédéral de déclarer la procédure sans objet, de rayer la cause du rôle, de renoncer aux frais de procédure et de ne pas allouer de dépens aux Sociétés. De leur côté, les Sociétés ont demandé au Tribunal administratif fédéral de rayer la cause du rôle, de mettre les frais à la charge de l'État et de leur allouer une indemnité de 40'000 fr. à titre de dépens.  
 
B.  
Par arrêt du 12 juillet 2022, le Tribunal administratif fédéral a constaté que, comme l'Administration fédérale avait révoqué ses décisions finales, la cause était devenue sans objet. S'agissant des dépens, il a jugé que, dans la mesure où la cause était devenue sans objet à la suite du retrait des demandes d'assistance administrative par l'autorité requérante, le comportement de cette dernière était imputable à l'Administration fédérale, qui devait partant verser des dépens aux Sociétés recourantes. 
En conséquence, le Tribunal administratif fédéral a radié la cause du rôle (chiffre 1 du dispositif), n'a pas perçu de frais de procédure (chiffre 2 du dispositif) et a alloué aux Sociétés une indemnité de 10'000 fr. à titre de dépens, à charge de l'Administration fédérale (chiffre 3 du dispositif). 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, l'Administration fédérale demande au Tribunal fédéral d'annuler le chiffre 3 du dispositif de l'arrêt du Tribunal administratif fédéral du 12 juillet 2022 en ce sens qu'aucune indemnité n'est allouée aux Sociétés à titre de dépens; subsidiairement, d'annuler le chiffre 3 du dispositif de l'arrêt attaqué et de renvoyer la cause au Tribunal administratif fédéral pour nouvel examen dans le sens des considérants. 
Le Tribunal administratif fédéral s'en tient à son arrêt. Les Sociétés concluent à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
L'arrêt attaqué est une décision finale (art. 90 LTF), rendue dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF) émanant du Tribunal administratif fédéral (art. 86 al. 1 let. a LTF). Seul un recours en matière de droit public est donc envisageable (cf. art. 113 LTF a contrario). 
 
1.1. Le litige concerne un domaine relevant de l'assistance administrative internationale en matière fiscale. Conformément à l'art. 84a LTF, le recours en matière de droit public n'est recevable que si une question juridique de principe se pose ou qu'il s'agit pour d'autres motifs d'un cas particulièrement important au sens de l'art. 84 al. 2 LTF.  
 
1.1.1. Selon la jurisprudence, la présence d'une question juridique de principe suppose que la décision en cause soit importante pour la pratique; cette condition est en particulier réalisée lorsque les instances inférieures doivent traiter de nombreuses causes analogues ou lorsqu'il est nécessaire de trancher une question juridique qui se pose pour la première fois et qui donne lieu à une incertitude caractérisée, laquelle appelle de manière pressante un éclaircissement de la part du Tribunal fédéral (ATF 139 II 404 consid. 1.3; arrêt 2C_289/2015 du 5 avril 2016 consid. 1.2.1 non publié in ATF 142 II 218).  
 
1.1.2. La recourante fait valoir que l'arrêt attaqué met en évidence une question d'importance majeure pour la conduite des procédures d'assistance administrative, qui consiste à savoir si, lorsque l'autorité étrangère retire sa demande d'assistance administrative alors qu'un recours est pendant devant le Tribunal administratif fédéral et sans que ce retrait n'ait été occasionné par la partie recourante, les actes de cette autorité étrangère sont imputables à l'Administration fédérale, comme le Tribunal administratif fédéral l'a retenu, avec pour conséquence que la partie recourante a droit à des dépens en vertu de l'art. 5 1e phrase du règlement du 21 février 2008 du Tribunal administratif fédéral concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral (FITAF; RS 173.320.2). Elle ajoute que répondre à cette question est important en pratique, car, lorsqu'une demande d'assistance administrative est retirée alors qu'un recours est pendant devant le Tribunal administratif fédéral, elle ne dispose pas "d'autres moyens lui permettant de réduire les coûts de la procédure contentieuse" que de révoquer sa décision finale, afin de rendre la procédure sans objet.  
 
1.1.3. Savoir dans quelle mesure le versement de dépens doit être supporté par une autorité administrative lorsqu'un litige perd son objet durant la procédure de recours est une question générale de procédure. Devant le Tribunal administratif fédéral, elle est réglée à l'art. 5 FITAF, consacré au sort des frais de procédure dans cette situation, mais applicable par analogie aux dépens en vertu du renvoi de l'art. 15 2e phrase FITAF. Cette question a toutefois une dimension particulière dans le domaine de l'assistance administrative internationale en matière fiscale, lorsqu'un recours devant le Tribunal administratif fédéral perd son objet parce que, à la suite du retrait de la demande par l'État requérant, l'Administration fédérale rend une nouvelle décision qui annule la décision finale attaquée. En effet, de par sa nature, l'assistance administrative suppose une collaboration entre autorités étrangère et nationale. Dans ce contexte, savoir si l'Administration fédérale peut se voir imputer le comportement de l'autorité requérante est une question qui relève non seulement de la procédure, mais qui revêt une signification spécifique en cette matière. Clarifier le sort des dépens dans cette hypothèse revêt une importance certaine, tant pour l'Administration fédérale que pour la partie qui recourt contre une décision finale auprès du Tribunal administratif fédéral. Cette situation peut en outre se présenter dans un nombre indéterminé de cas. Dans ces circonstances, il se justifie d'y apporter une réponse.  
 
1.1.4. Contrairement à ce que les intimées, qui concluent à l'irrecevabilité du recours, soutiennent, cette question n'a jamais été tranchée. Les arrêts 8C_60/2010 du 4 mai 2010 et 9C_624/2008 du 10 septembre 2008 qu'elles citent traitent des dépens lorsqu'un recours devient sans objet dans un autre contexte que celui de l'assistance administrative internationale en matière fiscale; en outre, dans l'arrêt publié aux ATF 139 II 404 qu'elles invoquent également, le Tribunal fédéral a certes appliqué l'art. 5 FITAF dans une cause concernant l'assistance administrative internationale en matière fiscale, mais pour déterminer si le Tribunal administratif fédéral pouvait mettre des frais de justice à la charge d'une partie recourante qui était décédée durant la procédure de recours (cf. consid. 13 de l'arrêt), soit dans un autre contexte que celui du cas d'espèce.  
C'est par ailleurs en vain que les intimées se prévalent du fait que le Tribunal fédéral a refusé à deux reprises d'entrer en matière sur les recours de l'Administration fédérale dans des affaires similaires. Dans chacune de ces causes (arrêts 2C_893/2017 du 23 octobre 2017 et 2C_917/2017 du 2 novembre 2017), le Tribunal fédéral a en effet déclaré le recours irrecevable non pas après avoir nié l'existence d'une question juridique de principe, mais parce que l'Administration fédérale n'avait pas contesté les deux motivations indépendantes que le Tribunal administratif fédéral avait développées pour justifier l'octroi de dépens à la partie recourante, afin de démontrer que chacune de ces motivations remplissait les conditions de l'art. 84a LTF. On ne se trouve au surplus pas dans cette situation en l'espèce, car le Tribunal administratif fédéral a mis des dépens à la charge de l'Administration fédérale sur la base d'une seule motivation et que l'Administration fédérale a démontré que celle-ci soulevait une question juridique de principe (supra consid. 1.1.3). 
 
1.1.5. Le recours remplit donc la condition de l'art. 84a LTF.  
 
1.2. Au surplus, l'Administration fédérale, qui a qualité pour recourir (arrêt 2C_1174/2014 du 24 septembre 2015 consid. 1.3 non publié in ATF 142 II 161), a agi en temps utile (art. 100 al. 2 let. b LTF) et dans les formes prescrites (art. 42 LTF).  
 
1.3. Il convient donc d'entrer en matière.  
 
2.  
Le litige porte sur le point de savoir si la partie recourante a droit à des dépens à la charge de l'Administration fédérale si celle-ci révoque sa décision finale parce que l'État requérant retire sa demande d'assistance administrative alors qu'un recours contre cette décision est pendant devant le Tribunal administratif fédéral. 
 
3.  
La question litigieuse nécessite de rappeler au préalable quelques étapes de la procédure en cas de demande d'assistance administrative internationale en matière fiscale. 
 
3.1. Dans le domaine de l'assistance administrative internationale en matière fiscale, l'échange de renseignements peut intervenir sur demande, de manière automatique ou spontanée (ATF 141 II 436 consid. 3.2; cf. art. 5 à 7 MAC). A la différence de ce qui prévaut en matière d'échange de renseignements automatique (cf. arrêt 2C_946/2021 du 6 juin 2023 consid. 4.3 destiné à la publication) ou spontané (cf. ATF 147 II 116 consid. 5.1), l'échange de renseignements sur demande se caractérise par le fait que la transmission de renseignements s'effectue en réponse à une demande correspondante de l'État requérant (cf. les art. 4 par. 1 et 5 par. 1 MAC lorsqu'une demande est fondée sur cette Convention, ainsi que l'art. 26 par. 1 du Modèle de Convention fiscale de l'OCDE sur le revenu et la fortune lorsque la demande repose sur la clause d'une convention de double imposition calquée sur ce Modèle). Il en découle que, si un État requérant retire sa demande alors que la procédure est en cours en Suisse, aucun renseignement ne sera transmis.  
 
3.2. En Suisse, la procédure administrative permettant de mettre en oeuvre les demandes d'assistance administrative étrangères est régie par la loi fédérale du 28 septembre 2012 sur l'assistance administrative internationale en matière fiscale (LAAF; RS 651.1; art. 1 al. 1 LAAF). Si la personne visée par la demande ne consent pas à la transmission de renseignements, l'Administration fédérale, autorité d'exécution de l'assistance administrative (cf. art. 2 al. 1 LAAF), rend une décision finale dans laquelle elle justifie de l'octroi de l'assistance administrative requise (art. 17 al. 1 LAAF). Cette décision peut faire l'objet d'un recours auprès du Tribunal administratif fédéral (art. 31 de la loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral [LTAF; RS 173.32]).  
 
3.3. La procédure de recours devant le Tribunal administratif fédéral est régie par la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative (PA; RS 172.021), pour autant que ni la LTAF ni la LAAF n'en disposent autrement (art. 37 LTAF et 19 al. 5 LAAF). En tant qu'autorité inférieure, l'Administration fédérale est partie à la procédure de recours et le Tribunal administratif fédéral lui impartit un délai pour présenter sa réponse si le recours n'est pas d'emblée irrecevable ou infondé (art. 57 al. 1 PA).  
 
3.3.1. Le recours auprès du Tribunal administratif fédéral a un plein effet dévolutif (cf. art. 54 PA). Toutefois, en vertu de l'art. 58 al. 1 PA, l'autorité inférieure peut, jusqu'à l'envoi de sa réponse, voire jusqu'à la fin des échanges d'écritures, choisir de procéder à un nouvel examen de la décision attaquée (ATF 130 V 138 consid. 4.2; 127 V 228 consid. 2b) bb); arrêt 5A_923/2018 du 6 mai 2019 consid. 3.2; ALEXANDRE PFLEIDERER, in Verwaltungsverfahrensgesetz, Praxiskommentar [ci-après: Praxiskommentar], 3e éd. 2023, n° 36 ad art. 58 PA; WIEDERKEHR/MEYER/BÖHME, VwVG, Bundesgesetz über das Verwaltungsverfahren mit weiteren Erlassen, Kommentar, 2022, n° 5 ad art. 58 PA). Dans ce cas, le Tribunal administratif fédéral continue de traiter le recours, dans la mesure où cette nouvelle décision ne l'a pas rendu sans objet (art. 58 al. 3 PA). Si la nouvelle décision rend la procédure sans objet, la cause est rayée du rôle (art. 23 al. 1 let. a LTAF). Si, en revanche, la nouvelle décision est rendue après la clôture de l'échange d'écritures, elle est en principe nulle selon la jurisprudence (ATF 130 V 138 consid. 4.2) et doit être traitée comme une requête adressée par l'autorité inférieure au tribunal (RHINOW/KOLLER/KISS/THURNHERR/BRÜHL-MOSER, Öffentliches Prozessrecht, 4e éd. 2021, § 1307; WIEDERKEHR/MEYER/BÖHME, op. cit., n° 5 ad art. 58 PA). La pratique du Tribunal administratif fédéral semble toutefois parfois plus large et admettre que l'autorité inférieure puisse procéder à un réexamen de sa décision après la fin de l'échange des écritures, jusqu'à ce que l'arrêt soit rendu (cf. BEUSCH/KNEUBÜHLER/KAYSER, Prozessieren vor dem Bundesverwaltungsgericht, 3e éd. 2022, §3.44 et note 270).  
 
3.3.2. Dans le domaine de l'échange de renseignements sur demande, si l'État requérant retire sa demande d'assistance administrative alors qu'un recours contre la décision finale de l'Administration fédérale est pendant devant le Tribunal administratif fédéral, aucun renseignement ne peut alors être transmis à l'autorité étrangère, puisque la transmission de renseignements ne peut intervenir qu'en réponse à une demande correspondante (supra consid. 3.1). Sous l'angle procédural, trois situations sont alors envisageables. Soit l'Administration fédérale recourt à l'art. 58 al. 1 PA et rend une nouvelle décision par laquelle elle révoque sa décision finale; le recours devient alors sans objet et le Tribunal administratif fédéral raye la cause du rôle. Soit l'Administration fédérale renonce à faire usage de l'art. 58 al. 1 PA; le Tribunal administratif fédéral doit alors trancher le litige au fond, constater l'absence de demande de l'État requérant à la suite de son retrait et, par conséquent, admettre le recours (cf. par exemple l'arrêt du Tribunal administratif fédéral A-2317/2016 du 21 mars 2017 consid. 2). Soit enfin l'Administration fédérale révoque sa décision finale après la clôture de l'échange d'écritures; la nouvelle décision doit en principe être qualifiée de nulle (supra consid. 3.3.1 in fine), ce qui implique également l'admission du recours.  
 
3.4. Reste à examiner les conséquences sur les dépens de ces différents cas de figure. Les dépens liés à la procédure devant le Tribunal administratif fédéral sont réglés à l'art. 64 PA, applicable par renvoi de l'art. 37 LTAF, ainsi que par le FITAF, conformément au renvoi de l'art. 64 al. 5 PA à l'art. 16 al. 1 let. a LTAF (arrêts 2C_26/2019 du 22 décembre 2021 consid. 22.2.1; 2C_343/2010 du 11 avril 2011 consid. 8.3.1 non publié in ATF 137 II 199). La réglementation des dépens est donc de la compétence du Tribunal administratif fédéral, dans le respect des principes posés par la PA (MOSER/BEUSCH/KNEUBÜHLER/KAYSER, op. cit., § 4.1; LUKAS MÜLLER, in Praxiskommentar, n° 4 ad art. 64 PA).  
 
3.4.1. Selon l'art. 64 al. 1 PA, l'autorité de recours peut allouer, d'office ou sur requête, à la partie ayant entièrement ou partiellement obtenu gain de cause une indemnité pour les frais indispensables et relativement élevés qui lui ont été occasionnés. Nonobstant la formulation potestative de cette disposition, il est admis qu'elle instaure un droit aux dépens dans les situations qu'elle vise (ATF 98 Ib 506 consid. 1; arrêts 2C_730/2017 du 4 avril 2018 consid. 3.1 et les références; 2C_172/2016 du 16 août 2016 consid. 4.2). Conformément à l'art. 64 al. 1 PA, l'art. 7 al. 1 FITAF prévoit que la partie qui obtient gain de cause a droit aux dépens pour les frais nécessaires causés par le litige. Par conséquent, lorsque le recours est admis, parce que l'Administration fédérale n'a pas rendu de décision à la suite du retrait de la demande d'assistance administrative ou que sa nouvelle décision doit être qualifiée de nulle, la partie recourante peut prétendre à des dépens en vertu de l'art. 64 al. 1 PA.  
 
3.4.2. Lorsque la procédure de recours devant le Tribunal administratif fédéral devient sans objet à la suite de la révocation de la décision de l'Administration fédérale en application de l'art. 58 al. 1 PA (cf. supra consid. 3.3.2) et que la cause est rayée du rôle, l'art. 64 PA ne règle pas la question des dépens. L'art. 15 FITAF prévoit dans ce cas que le tribunal examine s'il y a lieu d'allouer des dépens et que l'art. 5, qui concerne les frais de la procédure, s'applique par analogie à leur fixation. Selon l'art. 5 FITAF, lorsqu'une procédure devient sans objet, les frais sont en règle générale mis à la charge de la partie dont le comportement a occasionné cette issue (1 e phrase). Si la procédure est devenue sans objet, sans que cela soit imputable aux parties, les frais de procédure sont fixés au vu de l'état des faits avant la survenance du motif de liquidation (2 e phrase).  
 
3.4.3. Selon la jurisprudence, pour déterminer si le comportement de la partie a rendu la procédure sans objet au sens de l'art. 5 1e phrase FITAF, il faut se fonder sur des critères matériels (arrêts 9C_402/2022 du 14 novembre 2022 consid. 4.3.1; 2C_564/2013 du 11 février 2014 consid. 2.4). Savoir qui accomplit l'acte formel de procédure ayant conduit l'autorité de recours à classer l'affaire n'est pas relevant. Si l'autorité inférieure reconsidère sa décision et que la nouvelle décision rend la procédure sans objet, l'art. 5 1e phrase FITAF ne s'applique que si l'autorité inférieure a modifié sa décision de son propre chef, en raison d'une meilleure connaissance de la cause (par exemple parce qu'elle reconnaît que celle-ci était erronée dès le départ), et non pas dans le cas où elle le fait parce que la partie adverse a éliminé la circonstance qui a donné lieu à l'intervention (cf. arrêts 9C_402/2022 du 14 novembre 2022 consid. 4.3.1; 2C_564/2013 du 11 février 2014 consid. 2.4; 8C_60/2010 du 4 mai 2010 consid. 4.2.1). Des dépens doivent par exemple être accordés à la partie recourante en vertu de l'art. 5 1e phrase FITAF si l'autorité inférieure révoque la décision attaquée parce qu'elle réalise qu'elle n'était pas conforme à la jurisprudence du Tribunal fédéral et que le Tribunal administratif fédéral risquerait de l'annuler (arrêt 2C_564/2013 du 11 février 2014 consid. 2.5).  
Ce n'est que si la procédure est devenue sans objet sans que cela ne soit imputable aux parties que l'art. 5 2e phrase FITAF entre en ligne de compte et que les dépens doivent être fixés au vu de l'état des faits avant la survenance du motif de liquidation (arrêt 9C_402/2022 du 14 novembre 2022 consid. 4.3.1). L'octroi de dépens est dans ce cas déterminé par les perspectives du recours, sur la base d'un examen sommaire des faits (MOSER/BEUSCH/KNEUBÜHLER/KAYSER, op. cit., § 4.73). 
 
4.  
En l'espèce, l'autorité requérante a retiré ses demandes d'assistance administrative alors que la procédure de recours était pendante devant le Tribunal administratif fédéral. L'Administration fédérale a fait usage de l'art. 58 al. 1 PA et rendu une nouvelle décision, par laquelle elle a révoqué ses décisions finales. Le Tribunal administratif fédéral a partant constaté que la procédure était devenue sans objet et rayé en conséquence la cause du rôle, comme le demandait à juste titre l'Administration fédérale. S'agissant des dépens, il a jugé que, dans la mesure où la cause était devenue sans objet à la suite du retrait des demandes par l'autorité requérante, le comportement de cette dernière était imputable à l'Administration fédérale, de sorte que cette dernière devait verser des dépens aux Sociétés en application de l'art. 5 1e phrase FITAF par analogie, en vertu du renvoi de l'art. 15 FITAF
 
4.1. L'Administration fédérale fait valoir que l'arrêt attaqué viole les art. 5 et 15 FITAF en lui imputant le comportement de l'autorité requérante. Elle soutient qu'elle ne joue qu'un rôle d'intermédiaire dans la procédure d'assistance administrative, qu'elle n'a aucune prise sur la procédure qui se déroule à l'étranger et que, par conséquent, il n'est pas possible de lui attribuer la responsabilité de la décision de l'État requérant de retirer sa demande. Elle en conclut que la question des dépens ne doit pas être réglée en application de l'art. 5 1e phrase FITAF, mais de l'art. 5 2e phrase FITAF, avec pour conséquence qu'aucun dépens ne doit être alloué aux Sociétés, car, si l'autorité requérante n'avait pas retiré ses demandes, les recours auraient été rejetés.  
 
4.1.1. Il n'est pas contestable que seul l'État requérant peut prendre la décision de retirer la demande d'assistance administrative qu'il a formée. Cela ne signifie pas pour autant que l'on ne puisse pas imputer matériellement, en vertu de l'art. 5 1e phrase FITAF, ce comportement à l'Administration fédérale, qui révoque sa décision initiale, ce qui rend la procédure sans objet (cf. art. 58 al. 1 PA). L'Administration fédérale est en effet partie à la procédure de recours devant le Tribunal administratif fédéral. Elle est invitée à y répondre et peut, aux conditions de l'art. 58 al. 1 PA, décider de réexaminer et de révoquer sa décision finale en fonction de l'évolution des circonstances. Si elle décide de le faire parce que l'État requérant retire sa demande alors que le recours est pendant, c'est parce qu'en raison d'une meilleure connaissance de la cause et de son propre chef (supra consid. 3.4.2), elle décide de tirer directement les conséquences du retrait de la demande d'assistance administrative sur le sort de la procédure litigieuse pendante devant le Tribunal administratif fédéral, et qui aboutirait, sans ce retrait, à une admission du recours (cf. supra consid. 3.3.2), l'État requérant renonçant à obtenir des informations. A cela s'ajoute qu'aucun élément de fait constaté dans l'arrêt attaqué ne permet de retenir que ce serait le comportement des recourants qui, matériellement, serait à l'origine du renoncement par l'État requérant à demander des informations à l'autorité intimée. C'est donc bien le comportement de l'Administration fédérale au sens de l'art. 5 1e phrase FITAF (cf. supra consid. 3.4.2) qui rend la procédure de recours sans objet.  
 
4.1.2. Il serait par ailleurs contraire à l'équité de priver de dépens la partie recourante uniquement parce que l'Administration fédérale fait le choix procédural de recourir à l'art. 58 al. 1 PA, alors qu'elle obtiendrait gain de cause et aurait droit à des dépens sans un tel réexamen, en application des art. 64 al. 1 PA et 7 al. 1 FITAF (supra consid. 3.4.1). Cette partie se trouve en effet matériellement dans la même situation que si le Tribunal administratif fédéral avait admis son recours parce que l'Administration fédérale n'a pas recouru à l'art. 58 al. 1 PA ou qu'elle y a recouru tardivement (cf. supra consid. 3.3.2).  
 
4.1.3. Le Tribunal administratif fédéral n'a donc pas violé les art. 5 et 15 FITAF en condamnant l'Administration fédérale au versement de dépens.  
 
4.2. La recourante soutient également que l'arrêt attaqué viole les art. 58 et 63 PA, mais sans véritablement expliquer en quoi consisterait la violation de ces dispositions et celle-ci est loin d'être manifeste. Ainsi, eu égard aux éléments qui précèdent, on ne voit pas que l'arrêt attaqué s'avérerait contraire à l'art. 58 PA, qui au demeurant ne règle pas la questions des dépens. Quant à l'art. 63 PA, il concerne les frais de la procédure et non les dépens, qui font l'objet de l'art. 64 PA. Ce n'est pas parce que l'art. 5 FITAF, qui concerne les frais, s'applique par analogie aux dépens en cas de retrait, par renvoi de l'art. 15 FITAF, qu'il conviendrait d'appliquer l'art. 63 PA. Seule importe que l'allocation de dépens ne contrevienne pas à l'art. 64 PA, ce qui est le cas, puisque cette disposition ne règle pas la question des dépens lorsque la cause devient sans objet (cf. consid. 3.4.2).  
 
4.3. La recourante fait encore valoir que le risque de devoir supporter des dépens si la demande est retirée alors qu'un recours est pendant devant le Tribunal administratif fédéral l'obligerait à demander systématiquement à l'État requérant s'il maintient ou non sa demande avant de rendre une décision finale, ce qui serait contraire à la diligence à laquelle elle est tenue dans l'exécution des demandes d'assistance administrative et au principe de la proportionnalité. Elle y voit une violation des art. 4 et 5 MAC.  
Il ressort en substance des art. 4 et 5 MAC que l'État requis fournit, à la demande de l'État requérant, tout renseignement vraisemblablement pertinent pour l'administration ou l'application de sa législation interne relatives aux impôts visés par la Convention. On ne voit donc pas, et la recourante n'explique pas, en quoi l'arrêt attaqué contreviendrait à ces dispositions. Par ailleurs, la présomption de bonne foi dont bénéficie l'État requérant implique certes que l'État requis ne peut en principe pas mettre en doute les allégations de l'État requérant (principe de la confiance). Le principe de la confiance ne fait toutefois pas obstacle à la possibilité pour l'État requis de demander un éclaircissement à l'État requérant si des éléments qui apparaissent en cours de procédure font naître des doutes sérieux quant à l'utilité des renseignements requis pour l'État requérant (cf. ATF 143 II 202 consid. 8.7.1). Le sort de la procédure dépend alors de la réponse de l'État requérant (cf. par exemple ATF 144 II 206 consid. 4.5 et 4.6). 
Au surplus, le fait que l'Administration fédérale doive verser des dépens à la partie recourante si l'autorité requérante retire sa demande en cours de procédure de recours devant le Tribunal administratif fédéral ne l'oblige nullement à demander systématiquement à tout État requérant s'il maintient ou non sa demande avant de rendre une décision finale, et ce d'autant moins que l'Administration fédérale ne soutient nullement que les retraits de demande alors qu'une procédure est pendante devant le Tribunal administratif fédéral seraient fréquents. 
 
5.  
Ce qui précède conduit au rejet du recours. 
 
6.  
Au vu de l'issue du recours, il y a lieu de mettre les frais judiciaires à la charge de la Confédération, dont l'intérêt patrimonial est en jeu (cf. art. 66 al. 1 et 4 LTF). Les intimées ont droit à des dépens (art. 68 al. 1 LTF). Les frais et dépens seront fixés en fonction de la valeur litigieuse devant le Tribunal fédéral, qui est de 10'000 fr. (supra let. B). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de l'Administration fédérale des contributions. 
 
3.  
L'Administration fédérale des contributions versera aux intimées, créancières solidaires, une indemnité de 2'500 fr. à titre de dépens. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué à l'Administration fédérale des contributions, Division d'échange d'informations en matière fiscale, aux mandataires des intimées et au Tribunal administratif fédéral, Cour I. 
 
 
Lausanne, le 21 mars 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
La Greffière : S. Vuadens