Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
6S.379/2006 /rod
Arrêt du 22 décembre 2006
Cour de cassation pénale
Composition
MM. les Juges Schneider, Président,
Kolly et Karlen.
Greffier: M. Oulevey.
Parties
X.________,
recourant,
contre
A.________,
B.________,
C.________,
intimés, tous trois représentés par Me Philippe Bauer, avocat,
Ministère public du canton de Neuchâtel, rue du Pommier 3, case postale 2672, 2001 Neuchâtel 1.
Objet
Abus d'autorité,
pourvoi en nullité contre l'arrêt de la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel du 17 juillet 2006.
Faits :
A.
Le 14 mai 2004, X.________ s'est rendu dans les locaux du Ministère public du canton de Neuchâtel pour se faire remettre copie d'une pièce. Il a ensuite réclamé le remboursement de ses frais de transport. Comme il refusait de quitter les lieux avant d'avoir obtenu satisfaction sur ce dernier point, le secrétaire du Ministère public a appelé la police locale, qui a dépêché sur place une patrouille composée des fonctionnaires D.________, C.________ et B.________, commandés par le caporal A.________. Après trente minutes de discussion, le caporal A.________ a pris la décision de faire sortir X.________ de force des locaux du Ministère public. Craignant que l'intéressé ne s'y réintroduise dès que la patrouille aurait le dos tourné, le caporal A.________ a en outre décidé d'emmener X.________ au poste. La manière dont cette décision a été exécutée a attiré l'attention d'un témoin, qui l'a jugée trop brutale, et donné lieu à une plainte pénale de X.________.
B.
Par ordonnance du 2 juin 2004, le Procureur général du canton de Neuchâtel a classé la plainte aux motifs que la police locale, intervenue à cause du refus du plaignant de quitter les lieux, n'avait pas fait un usage disproportionné de la force. Sur recours du plaignant, la Chambre d'accusation du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel a annulé ce classement.
Le 28 janvier 2005, le Procureur général a dès lors renvoyé C.________ et B.________ devant le Tribunal de police du district de Neuchâtel, sous les accusations de lésions corporelles simples (art. 123 CP), subsidiairement voies de fait (art. 126 CP), et d'abus d'autorité (art. 312 CP), en requérant toutefois leur acquittement. Statuant le 31 mars 2005, le tribunal saisi a acquitté les deux prévenus.
Sur pourvoi du plaignant, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel a, par arrêt du 28 septembre 2005, annulé ce jugement et renvoyé la cause au Tribunal de police du district du Val-de-Ruz. Elle a aussi invité le Ministère public à examiner la question du renvoi en justice du caporal A.________, responsable des agissements de sa patrouille.
C.
Par ordonnance du 7 novembre 2005, le Procureur général du canton de Neuchâtel a renvoyé A.________ devant le Tribunal de police du district du Val-de-Ruz, sous l'accusation d'abus d'autorité (art. 312 CP), en requérant également son acquittement. Cette nouvelle cause a été jointe sans décision formelle à celles de C.________ et de B.________.
Passant au jugement le 23 janvier 2006, le Tribunal de police du district du Val-de-Ruz a acquitté C.________, reconnu A.________ et B.________ coupables d'abus d'autorité, les condamnant tous deux à trois jours d'emprisonnement avec sursis pendant deux ans, et déclaré irrecevables les conclusions civiles prises par X.________. Sur ce dernier point, le Tribunal de police a considéré que les conclusions prises par le plaignant entraient en contradiction avec le régime de responsabilité défini par la loi neuchâteloise du 26 juin 1989 sur la responsabilité des collectivités publiques et de leurs agents (RS/NE 150.10), qui prive le lésé de toute action contre l'agent.
Par arrêt du 17 juillet 2006, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel a rejeté les pourvois exercés contre ce jugement par B.________ et A.________. Elle a rejeté le pourvoi de X.________ sur le plan pénal et l'a déclaré irrecevable en tant qu'il critiquait le refus du Tribunal de police d'entrer en matière sur les conclusions civiles.
D.
Par acte rédigé en italien, X.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt de seconde instance cantonale et de renvoyer la cause à la juridiction cantonale pour complément d'instruction et nouveau jugement.
Au préalable, il requiert d'être mis au bénéfice de l'assistance judiciaire.
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures.
Le Tribunal fédéral considère en droit:
1.
L'art. 37 al. 3 OJ prescrit au Tribunal fédéral de rendre son arrêt dans la langue de la décision attaquée. Il ne l'autorise à déroger à cette règle que si les parties parlent une autre langue officielle. Dans le cas présent, comme il n'est pas établi que les intimés comprennent l'italien, l'arrêt doit être rendu en français.
2.
Le recourant ne précise pas s'il entend exercer un pourvoi en nullité ou un recours de droit public. Il fait valoir que l'instruction était lacunaire, que six agents ont pris part à l'intervention litigieuse et non seulement quatre, que les autres fonctionnaires de police intervenus le 14 mai 2004 auraient aussi dû être poursuivis et sanctionnés, que l'on ne saurait considérer comme licites les actes de C.________ au seul motif que celui-ci n'avait fait qu'obéir à des ordres et, enfin, que ce serait à tort que le Tribunal de police s'est déclaré incompétent pour statuer sur les conclusions civiles, qui auraient dû être admises. En revanche, le recourant ne soutient pas que les juridictions cantonales auraient violé l'un ou l'autre de ses droits constitutionnels. Il convient dès lors de traiter le présent recours comme un pourvoi en nullité.
3.
Le lésé n'a qualité pour se pourvoir en nullité au Tribunal fédéral sur l'action pénale que s'il bénéficie du statut procédural de victime au sens de l'art. 2 al. 1 LAVI, s'il est déjà intervenu dans la procédure cantonale et si la violation qu'il invoque a ou peut avoir un effet sur le jugement de ses prétentions civiles (art. 270 let. e PPF). Ces conditions sont cumulatives, de sorte que si, pour les actes reprochés au prévenu, une collectivité publique assume une responsabilité de droit public exclusive de toute prétention civile, le lésé n'a pas qualité pour saisir le Tribunal fédéral d'un pourvoi en nullité sur l'action pénale (ATF 128 IV 188 consid. 2.2 p. 191 et les références; Gilbert Kolly, Le pourvoi en nullité au Tribunal fédéral, Berne 2004, p. 31/32).
Dans le canton de Neuchâtel, sous réserve des cas où le droit fédéral prévoit une responsabilité primaire de l'agent (cf. art. 426 et 427 CC pour les organes de la tutelle et art. 928 CO pour les préposés au registre du commerce), la loi cantonale du 26 juin 1989 sur la responsabilité des collectivités publiques et de leurs agents (RS/NE 150.10) institue une responsabilité exclusive des collectivités publiques pour les dommages que les personnes chargées par elles de l'accomplissement de tâches de droit public causent à des tiers dans l'exercice de leurs fonctions. Le lésé n'a pas d'action contre l'agent (art 9 de la loi; Alain Bauer, La responsabilité des collectivités publiques et de leurs agents, RJN 2005 p. 14 ss, spéc. p. 27). Faute de pouvoir élever une prétention civile en raison de l'intervention policière dont il a fait l'objet, le recourant n'a dès lors pas qualité pour se pourvoir en nullité dans la cause pénale des intimés.
Il s'ensuit que le pourvoi est irrecevable en tant qu'il vise l'action pénale.
4.
Dans la mesure où il critique les décisions d'irrecevabilité du premier juge et de la cour de cassation cantonale concernant ses conclusions civiles, le recourant, qui n'est pas assisté d'un avocat, entend manifestement se plaindre d'une violation de l'art. 9 al. 1 LAVI.
4.1 Le pourvoi en nullité au Tribunal fédéral est ouvert uniquement contre les jugements qui ne peuvent pas donner lieu à un recours cantonal pour violation du droit fédéral (cf. art. 268 ch. 1 PPF). En droit neuchâtelois, la Cour de cassation civile du Tribunal cantonal peut être saisie d'un recours contre la disposition d'un jugement pénal qui statue sur les conclusions civiles (Alain Bauer/Pierre Cornu, Code de procédure pénale neuchâtelois annoté, Neuchâtel 2003, n. 3 ad art. 227 p. 476/477). Dans la mesure où il remet directement en cause la décision d'irrecevabilité rendue par le premier juge sur les conclusions civiles, le présent pourvoi est dès lors irrecevable.
4.2 Par ailleurs, la cour de cassation cantonale a déclaré irrecevable le pourvoi cantonal du recourant quant à l'action civile, pour le motif que la décision du juge précédent sur ce point devait être attaquée par les voies de recours prévues dans le code de procédure civile, et non par celles instituées dans le code de procédure pénale (cf. art. 227 al. 3 CPP/NE). Comme la LAVI ne dispense pas la partie civile de respecter les dispositions légales cantonales qui régissent la forme de son intervention, la cour de cassation cantonale n'a pas violé le droit fédéral en refusant pour ce motif - dont le recourant ne conteste du reste pas le bien-fondé - d'entrer en matière sur le pourvoi cantonal en tant qu'il concernait l'action civile.
Aussi, dans la faible mesure où il est recevable, le présent pourvoi est-il mal fondé.
5.
Comme le pourvoi est apparu d'emblée dépourvu de chance de succès, la requête d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 152 al. 1 OJ). Le recourant, qui succombe, supportera donc les frais de justice, fixés à 800 fr. (art. 278 al. 1 PPF et 153a OJ).
Les intimés, qui n'ont pas été invités à se déterminer, n'ont pas droit à des dépens.
Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le pourvoi en nullité est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
La requête d'assistance judiciaire du recourant est rejetée.
3.
Un émolument judiciaire de 800 fr. est mis à la charge du recourant.
4.
Le présent arrêt est communiqué en copie au recourant, au mandataire des intimés, au Ministère public du canton de Neuchâtel et à la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel.
Lausanne, le 22 décembre 2006
Au nom de la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral suisse
Le président: Le greffier: