Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
2C_87/2023
Arrêt du 23 février 2024
IIe Cour de droit public
Composition
Mmes et MM. les Juges fédéraux
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz,
Hänni, Ryter et Kradolfer.
Greffière : Mme Kleber.
Participants à la procédure
Eglise évangélique de A.________,
représentée par Maîtres Olivier Bigler-de Mooij et Daniel Hirschi-Duckert, avocats,
recourante,
contre
Département de la sécurité, de la population et de la santé du canton de Genève (DSPS), rue de l'Hôtel-de-Ville 14, 1204 Genève.
Objet
Liberté religieuse; usage accru du domaine public,
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de
la République et canton de Genève, Chambre administrative, du 20 décembre 2022
(ATA/1277/2022).
Faits :
A.
L'Eglise évangélique de A.________ (ci-après: l'Eglise) est une association au sens des art. 60 ss CC, qui a pour but de réunir, de soutenir et de favoriser l'activité de ses membres pour vivre le message de la Bonne Nouvelle en Jésus, le Christ et en témoigner; rechercher les principes bibliques et les faire connaître pour le bien de chacun et de la région; développer la communion, l'unité et la solidarité et exprimer la solidarité humaine par un engagement social (art. 2 des Statuts).
Le 23 mai 2022, l'Eglise, représentée par B.________, pasteur, a déposé une demande d'autorisation de manifestation auprès du Département de la sécurité, de la population et de la santé de la République et canton de Genève (ci-après: le Département), en vue de la célébration du baptême d'un adulte, par immersion dans le lac Léman le dimanche 3 juillet 2022 entre 8h45 et 9h45, à la plage de la C.________ (ci-après: la plage), située sur la commune de D.________, en présence des proches amis et de la famille du baptisé (total annoncé de 75 participants), avec des explications sur le baptême, déclaration de foi du baptisé, éventuellement prière pour le baptisé ainsi que courts chants
a capella, étant précisé que la célébration du culte suivrait dans la chapelle de l'Eglise.
Le 31 mai 2022, la police municipale des communes de E.________, F.________, D.________, G.________, H.________, I.________ et J.________ (ci-après: la police municipale) a délivré à l'Eglise une autorisation en vue de cette manifestation en vertu de la législation cantonale sur la restauration, le débit de boissons, l'hébergement et le divertissement, avec la précision que ni la musique ni un amplificateur de son n'étaient autorisés.
B.
Par décision du 27 juin 2022, le Département a refusé la demande d'autorisation pour la manifestation cultuelle du 3 juillet 2022 formée par l'Eglise et interdit tout rassemblement qui se formerait à cette fin, au motif que l'Eglise ne faisait pas partie des organisations religieuses admises à des relations avec l'Etat au sens du droit cantonal.
Par arrêt du 20 décembre 2022, la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève (ci-après: la Cour de justice) a rejeté le recours formé par l'Eglise contre la décision du 27 juin 2022.
C.
Contre l'arrêt du 20 décembre 2022, l'Eglise, agissant par B.________, forme un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral. Elle conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de l'arrêt attaqué et, principalement, à être autorisée à célébrer des baptêmes conformément aux autorisations délivrées par la police municipale, ainsi que, subsidiairement, au renvoi de la cause à la Cour de justice pour nouvelle décision au sens des considérants.
La Cour de justice s'en rapporte à justice quant à la recevabilité du recours et persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. Le Département conclut au rejet du recours dans la mesure de sa recevabilité, sous suite de frais. L'Eglise a déposé d'ultimes observations, en maintenant ses conclusions.
Considérant en droit :
1.
1.1. Le recours, formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes prescrites (art. 42 LTF), est dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF), rendue par un tribunal supérieur de dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF). Le litige, qui porte sur une demande d'autorisation de manifestation religieuse sur le domaine public, relève du droit public (art. 82 let. a LTF) et ne tombe sous le coup d'aucune des exceptions de l'art. 83 LTF. La voie du recours en matière de droit public est donc ouverte.
1.2. Aux termes de l'art. 89 al. 1 LTF, a qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire (let. a), est particulièrement atteint par la décision attaquée (let. b) et a un intérêt digne de protection à l'annulation ou à la modification de celle-ci (let. c).
En l'occurrence, en tant qu'association au sens des art. 60 ss CC disposant de la personnalité juridique, la recourante a la capacité d'être partie et d'ester en justice. Elle est en outre valablement représentée dans le cadre de la présente procédure. Elle est la destinataire de l'arrêt attaqué et a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification, étant relevé que les personnes morales poursuivant un but religieux ou ecclésiastique peuvent se prévaloir de la liberté de conscience et de croyance (ATF 145 I 121 consid. 1.4; 142 I 195 consid. 5.2; 125 I 369 consid. 1b).
1.3. De jurisprudence constante, l'intérêt digne de protection doit par ailleurs être actuel. Le Tribunal fédéral fait exceptionnellement abstraction de l'exigence d'un intérêt actuel, lorsque la contestation peut se reproduire en tout temps dans des circonstances identiques ou analogues, que sa nature ne permet pas de la trancher avant qu'elle ne perde son actualité et que, en raison de sa portée de principe, il existe un intérêt public suffisamment important à la solution de la question litigieuse (ATF 146 II 335 consid. 1.3; 142 I 135 consid. 1.3.1).
La recourante n'a en l'occurrence plus d'intérêt actuel au recours, dès lors que l'objet de la contestation porte sur la possibilité de procéder, sur le domaine public, à un baptême qui était prévu pour le 3 juillet 2022. Un litige relatif à l'organisation d'un événement ponctuel sur le domaine public est toutefois un cas typique de cause qui risque de ne pas être jugée définitivement avant la date annoncée de la manifestation. La cause pourrait en outre se représenter, car la recourante souhaite continuer à célébrer des baptêmes d'adulte dans le lac Léman. Enfin, si le Tribunal fédéral s'est prononcé récemment, dans le cadre d'un contrôle abstrait, sur la loi genevoise sur la laïcité de l'Etat du 26 avril 2018 (LLE; rsGE A 2 75; ci-après également: loi sur la laïcité) et notamment sur son art. 6 relatif aux manifestations religieuses sur le domaine public (cf. ATF 148 I 160), il n'a pas tranché dans un cas concret le point de savoir si l'autorité peut refuser d'examiner une demande d'autorisation de célébrer un culte sur le domaine public au motif qu'elle émane d'une organisation non admise à des relations avec le canton de Genève selon le droit cantonal applicable. Cette question revêt une portée de principe en lien avec l'exercice de la liberté religieuse sur le domaine public, de sorte qu'il se justifie de renoncer à l'exigence d'un intérêt actuel.
1.4. Il convient donc d'entrer en matière sur le recours, sous la réserve qui suit. La recourante conclut à être autorisée à célébrer "des baptêmes", conformément "aux autorisations" délivrées par la police municipale. Cette conclusion n'est pas admissible. La décision à l'origine de la présente cause porte sur l'octroi d'une autorisation précise pour le baptême d'un adulte dans le lac Léman le 3 juillet 2022 en vertu de la législation sur la laïcité. Le fait qu'une autorisation ait été obtenue en lien avec la législation sur la restauration et les débits de boisson ne saurait l'emporter. Une autorisation générale irait en outre au-delà de l'objet du litige. De plus, dès lors que le litige n'est plus actuel, le Tribunal fédéral peut seulement en l'espèce, en cas d'admission du recours, annuler l'arrêt attaqué et constater la violation des droits de la recourante dans le cadre du refus du Département du 27 juin 2022, confirmé par la Cour de justice, de donner suite à sa demande d'autorisation (cf. arrêt 1C_360/2019 du 15 janvier 2020 consid. 4).
2.
2.1. Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral contrôle librement le respect du droit fédéral, qui comprend les droits de nature constitutionnelle, du droit international, ainsi que des droits constitutionnels cantonaux (art. 95 let. a à c; art. 106 al. 1 LTF). Sauf dans les cas cités expressément à l'art. 95 LTF, un tel recours ne peut toutefois pas être formé pour violation du droit cantonal en tant que tel. Il est néanmoins possible de faire valoir que l'application du droit cantonal consacre une violation du droit fédéral, en particulier qu'elle est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. ou contraire à un autre droit constitutionnel (ATF 145 I 108 consid. 4.4.1 et les arrêts cités). Le Tribunal fédéral n'examine le moyen tiré de la violation de droits fondamentaux et de dispositions de droit cantonal que si ce grief a été invoqué et motivé de manière précise par la partie recourante (art. 106 al. 2 LTF; cf. ATF 143 II 283 consid. 1.2.2).
2.2. En l'espèce, parmi les droits invoqués, la recourante cite l'art. 14 CEDH, qui interdit la discrimination dans la jouissance des droits et libertés reconnus dans la CEDH, mais n'y consacre aucun développement. Cette disposition et la jurisprudence y relative ne seront donc pas abordées.
3.
Il convient de commencer par exposer le cadre légal et circonscrire l'objet du litige.
3.1. L'art. 72 al. 1 Cst. prévoit que la réglementation des rapports entre l'Eglise (terme qui doit être compris comme se référant à toutes les religions) et l'Etat est du ressort des cantons (ATF 148 I 160 consid. 5).
Pour ce qui est du canton de Genève, celui-ci a opté depuis le début du siècle passé pour une séparation très nette entre l'Eglise et l'Etat (ATF 148 I 160 consid. 5) et a formellement inscrit le principe de la laïcité de l'Etat dans sa Constitution. Ainsi, selon l'art. 3 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst./GE; RS 131.234), l'Etat est laïque. Il observe une neutralité religieuse (al. 1). Il ne salarie ni ne subventionne aucune activité cultuelle (al. 2). Les autorités entretiennent des relations avec les communautés religieuses (al. 3).
3.2. La loi genevoise sur la laïcité de l'Etat du 26 avril 2018 (LLE; rsGE A 2 75; ci-après également: loi sur la laïcité), qui a pour buts de "protéger la liberté de conscience, de croyance et de non-croyance", "préserver la paix religieuse" et "définir le cadre approprié aux relations entre les autorités et les organisations religieuses" (cf. art. 1 LLE), est l'expression de cette "approche genevoise" attachant une grande importance à la laïcité de l'Etat (ATF 148 I 160 consid. 5).
Le chapitre II LLE, comprenant les art. 4 à 9, est consacré aux relations entre autorités et organisations religieuses.
D'après l'art. 4 LLE, dans le cadre de l'accomplissement des tâches publiques, l'Etat peut entretenir des relations avec des organisations religieuses (al. 1). Le Conseil d'Etat fixe par voie réglementaire les conditions à ces relations, notamment sous l'angle du respect des droits fondamentaux et de l'ordre juridique suisse en général (al. 2). La loi ne fonde pas un droit des organisations religieuses à entretenir des relations avec les autorités (al. 3).
L'art. 6 LLE régit plus spécifiquement les manifestations religieuses sur le domaine public. Cette disposition distingue les manifestations religieuses cultuelles (al. 1 et 2) et non cultuelles (al. 3). Dans sa teneur entrée en vigueur le 9 mars 2019, l'art. 6 al. 2 LLE prévoyait ce qui suit: "A titre exceptionnel, les manifestations religieuses cultuelles peuvent être autorisées sur le domaine public. Dans ces cas-là, les dispositions de la loi sur les manifestations sur le domaine public, du 26 juin 2008 [LMDPu; rsGE F 3 10], s'appliquent". Dans son arrêt du 23 décembre 2021, le Tribunal fédéral a considéré que, tel qu'il était libellé, l'art. 6 al. 2 LEE revenait à prévoir une interdiction de principe des manifestations religieuses cultuelles sur le domaine public, ce qui était incompatible avec l'art. 15 Cst. (ATF 148 I 160 consid. 11). Il a partant annulé la condition "à titre exceptionnel" figurant à l'art. 6 al. 2 LLE (consid. 15.1). La modification de l'art. 6 LLE est entrée en vigueur immédiatement. Depuis le 23 décembre 2021, l'art. 6 LLE a ainsi la teneur suivante: "Les manifestations religieuses cultuelles se déroulent sur le domaine privé (al. 1). Les manifestations religieuses cultuelles peuvent être autorisées sur le domaine public. Dans ces cas-là, les dispositions de la LMDPu s'appliquent (al. 2). Les manifestations religieuses non cultuelles sur le domaine public sont soumises aux dispositions de la LMDPu (al. 3). L'autorité compétente tient compte des risques que la manifestation peut faire courir à la sécurité publique, à la protection de l'ordre public, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (al. 4) ".
Les autres dispositions du chapitre II LLE relatif aux relations entre autorités et organisations religieuses concernent la perception d'une contribution religieuse volontaire (art. 5), les restrictions relatives aux signes religieux extérieurs (art. 7), l'accompagnement philosophique, spirituel ou religieux (art. 8) et la gestion des biens incamérés (biens étatisés puis restitués aux églises) (art. 9).
3.3. Sur la base de l'art. 4 LLE, le Conseil d'Etat genevois a édicté le règlement d'application de la loi sur la laïcité de l'Etat du 17 juin 2020, entré en vigueur le 24 juin 2020 (RLE; rsGE A 2 75.01) et qui a abrogé le règlement d'application de la LLE relatif à la contribution religieuse volontaire du 11 décembre 2019 (art. 16 RLE).
D'après l'art. 3 RLE, une organisation religieuse souhaitant entretenir des relations avec l'Etat au sens des art. 5, 6, 8 et 9 LLE doit remplir les conditions générales suivantes: a) être formellement organisée sur le territoire du canton de Genève sous la forme d'une association ou d'une fondation au sens des dispositions du code civil suisse; b) participer à la cohésion sociale au sein de la société genevoise; c) avoir signé et respecter la déclaration d'engagement visée à l'art. 4.
L'art. 4 RLE précise que la déclaration d'engagement fixe les exigences en matière de respect des droits fondamentaux et de l'ordre juridique suisse par les organisations religieuses souhaitant entretenir une relation avec l'Etat. Ces exigences sont les suivantes : a) respecter et soutenir la paix religieuse; b) accepter la diversité des approches philosophiques, spirituelles ou religieuses; c) exclure tout acte de violence physique ou psychologique, tout acte d'abus spirituel, ainsi que tout propos incitant à la haine; d) rejeter toute forme de discrimination ou de dénigrement à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes, en raison notamment de leurs convictions, de leurs origines ethniques ou nationales, de leur sexe, de leur orientation ou de leur identité sexuelle, de leur identité ou de leur expression de genre; e) collaborer à la prévention des radicalisations; f) respecter la liberté de conscience de chaque individu, son droit à adhérer au système de croyance de son choix, ainsi que son droit à le quitter; g) respecter la liberté d'opinion et d'information, dans les limites posées par le droit, y compris le droit à la satire et à la critique; h) reconnaître la primauté de l'ordre juridique suisse sur toute obligation religieuse qui lui serait contraire, en particulier s'agissant du droit de la famille.
Les art. 5 et 6 RLE règlent la procédure d'admission. L'organisation religieuse doit déposer une demande écrite au Conseil d'Etat, qui statue sur la demande et, en cas de décision négative, sur réclamation. Le Département tient une liste des organisations religieuses admises à des relations avec l'Etat (art. 6 al. 5 RLE).
3.4. En l'espèce, saisi de la demande de la recourante tendant à être autorisée à célébrer un baptême d'adulte par immersion dans le lac Léman le 3 juillet 2022, le Département a considéré qu'il n'y avait pas lieu de vérifier si les conditions d'octroi d'une autorisation de manifester selon l'art. 6 LLE et la LMDPu étaient réunies, car la recourante n'était pas une organisation religieuse admise à des relations avec l'Etat selon les critères fixés aux art. 3 et 4 RLE.
Dans son arrêt, la Cour de justice a, en substance, considéré que la condition préalable d'admission à des relations avec l'Etat selon les règles fixées dans le RLE opposée à la recourante pour refuser sa demande d'autorisation portait atteinte à la liberté religieuse, mais reposait sur une base légale valable, poursuivait un intérêt public et respectait le principe de proportionnalité, de sorte que l'atteinte était admissible.
3.5. Le litige porte ainsi sur le point de savoir si le fait de subordonner l'examen de la demande d'autorisation d'usage accru du domaine public de la recourante à la condition préalable d'une admission à des relations avec l'Etat selon les critères fixés dans le RLE est conforme aux droits invoqués dans le recours.
4.
Se prévalant de l'art. 8 al. 2 Cst., la recourante dénonce une violation de l'interdiction de la discrimination fondée sur les convictions religieuses et du devoir de neutralité de l'Etat. Selon elle, "entretenir une relation avec l'Etat" serait contraire à sa foi évangélique et cette condition préalable à la possibilité de demander une autorisation en vue d'organiser une manifestation religieuse sur le domaine public entraînerait donc une discrimination à son encontre. L'engagement à reconnaître la primauté de l'ordre juridique suisse sur toute obligation religieuse qui lui serait contraire (art. 4 let. h RLE) la placerait en particulier sans nécessité dans un conflit de conscience, qui ne serait justifié par aucun intérêt pratique. D'après elle, cette condition servirait à justifier une suspicion généralisée envers les communautés évangéliques. La recourante se plaint aussi d'une hostilité du Conseil d'Etat à son égard et allègue que celui-ci refuserait, si elle la demandait, sa reconnaissance au sens du RLE.
4.1. Selon l'art 8 al. 2 Cst., nul ne doit subir de discrimination du fait notamment de ses convictions religieuses. L'interdiction de la discrimination ne protège en principe que les personnes physiques (cf. ATF 139 I 242 consid. 5.3); une exception est cependant envisageable pour les personnes morales poursuivant un but idéal, telles que les organisations à but religieux (cf. SCHWEIZER/FANKHAUSER, in St. Galler Kommentar, Die schweizerische Bundesverfassung, 4e éd. 2023, no 19 ad art. 8 al. 2 Cst.; VINCENT MARTENET, in Commentaire romand de la Constitution fédérale, 2021, no 53 ad art. 8 Cst. et les références citées).
L'interdiction de la discrimination au sens du droit constitutionnel suisse ne rend pas absolument inadmissible le fait de se fonder sur l'un des critères prohibés énumérés de manière non exhaustive par l'art. 8 al. 2 Cst. L'usage d'un tel critère fait toutefois naître une présomption de différenciation inadmissible qui ne peut être renversée que par une justification qualifiée: la mesure litigieuse doit poursuivre un intérêt public légitime et primordial, être nécessaire et adéquate et respecter dans l'ensemble le principe de la proportionnalité (ATF 147 I 89 consid. 2.1; 147 I 1 consid. 5.2; 145 I 73 consid. 5.1; 143 I 129 consid. 2.3.1).
L'art. 8 al. 2 Cst. interdit non seulement la discrimination directe, mais également la discrimination indirecte. Il y a discrimination indirecte lorsqu'une réglementation, sans désavantager directement un groupe déterminé, défavorise particulièrement, par ses effets et sans justification objective, les personnes appartenant à ce groupe (ATF 145 I 73 consid. 5.1).
4.2. L'interdiction de la discrimination fondée sur la religion, ainsi que la liberté de conscience et de croyance inscrite à l'art. 15 Cst., obligent l'Etat à observer une neutralité confessionnelle et religieuse (ATF 142 I 49 consid. 3.3; 139 I 292 consid. 8.2.3; 118 Ia 46 consid. 4e). L'Etat doit s'abstenir, dans les actes publics, de toute considération confessionnelle ou religieuse. Cette neutralité confessionnelle vise à préserver la liberté de religion des individus, mais aussi à maintenir, dans un esprit de tolérance, la paix confessionnelle (ATF 123 I 296 consid. 4b/bb). Le devoir de neutralité interdit à l'Etat de prendre parti en faveur ou au détriment d'une religion déterminée (ATF 142 I 49 consid. 3.5; 139 I 292 consid. 8.2.3).
4.3. En l'occurrence, la condition d'admission à des relations avec l'Etat comme préalable à l'examen d'une demande d'autorisation d'usage accru du domaine public s'applique à toutes les organisations religieuses (cf. la cause 2C_66/2023 concernant un refus d'autorisation par les autorités genevoises pour l'organisation d'une manifestation intitulée "procession fête-dieu", émanant d'une organisation religieuse qui n'est pas évangélique).
Les critères à remplir pour cette admission (art. 3 et 4 RLE) sont en outre neutres. L'admission ne dépend pas des convictions de l'organisation religieuse, mais du respect des conditions fixées aux art. 3 et 4 RLE. Aucune organisation religieuse n'est ainsi favorisée ou désavantagée par rapport à une autre et l'admission est ouverte à toutes. Le critère fixé à l'art. 4 let. h RLE, selon lequel l'organisation religieuse doit reconnaître la primauté de l'ordre juridique suisse sur toute obligation religieuse qui lui serait contraire, qui est critiqué par la recourante, ne vise pas, ni directement ni indirectement, les communautés évangéliques en particulier. Que la recourante se sente atteinte dans sa liberté par cette exigence ne démontre pas encore que celle-ci entraînerait une différence de traitement fondée sur les convictions pour les communautés évangéliques et que l'Etat prendrait position en faveur d'autres communautés religieuses.
Quant à la question du sort qui serait réservé à une demande d'admission formulée par la recourante, elle dépasse le cadre du litige et n'a donc pas à être examinée. A teneur de l'arrêt attaqué, la recourante n'a, en effet, pas entrepris les démarches pour être admise à des relations avec l'Etat. Il n'appartient en outre pas au Tribunal fédéral de se prononcer en l'espèce sur le fait qu'une éventuelle décision négative du Conseil d'Etat s'agissant d'une demande d'admission ne serait pas susceptible de recours (cf. art. 5 et 6 RLE), comme le dénonce la recourante.
4.4. En conclusion, on ne décèle pas de discrimination entre communautés religieuses et à l'encontre en particulier de la recourante du fait de la condition de l'admission à des relations avec l'Etat comme préalable à l'examen d'une demande d'autorisation d'usage accru du domaine public. Le grief en ce sens est rejeté.
5.
La recourante se plaint d'une violation de sa liberté de conscience et de croyance (art. 15 Cst., art. 9 Cst.; ci-après aussi: liberté religieuse) et de sa liberté de réunion (art. 22 Cst.; art. 11 CEDH). La liberté religieuse constitue une
lex specialis par rapport à la liberté de réunion (ATF 49 I 138 consid. 4). Elle sera donc seule examinée.
5.1. L'art. 15 Cst. prévoit que la liberté de conscience et de croyance est garantie (al. 1); toute personne a le droit de choisir librement sa religion ainsi que de se forger ses convictions philosophiques et de les professer individuellement ou en communauté (al. 2); toute personne a le droit d'adhérer à une communauté religieuse ou d'y appartenir et de suivre un enseignement religieux (al. 3; portée positive de cette liberté); nul ne peut être contraint d'adhérer à une communauté religieuse ou d'y appartenir, d'accomplir un acte religieux ou de suivre un enseignement religieux (al. 4; portée négative de cette liberté) (cf. ATF 148 I 160 consid. 7.1 et les arrêts cités). La liberté de conscience et de croyance protège toutes les religions, quel que soit le nombre de leurs fidèles en Suisse (ATF 148 I 160 consid. 7.2 et les arrêts cités). Les personnes morales qui poursuivent un but religieux ou ecclésiastique, ce qui est le cas de la recourante, peuvent s'en prévaloir (ATF 145 I 121 consid. 1.4; 142 I 195 consid. 5.2 et les arrêts cités).
La liberté de conscience et de croyance protège toute personne contre les ingérences de l'Etat qui seraient de nature à gêner ses convictions religieuses. Elle confère à toute personne le droit d'exiger que l'Etat n'intervienne pas de façon injustifiée en édictant des règles limitant l'expression et la pratique de ses convictions religieuses (ATF 148 I 160 consid. 7.2; 142 I 195 consid. 5.1; 118 Ia 46 consid. 3b). Cette liberté comporte la liberté intérieure de croire, de ne pas croire et de modifier en tout temps sa religion et ses convictions philosophiques. La liberté de religion comprend également la liberté extérieure d'exprimer, de pratiquer et de communiquer ses convictions religieuses ou sa vision du monde, dans certaines limites, ou de ne pas les partager. Cela englobe le droit pour toute personne de se comporter conformément aux enseignements de sa foi et d'agir selon ses croyances intérieures - y compris celle de ne pas suivre les préceptes d'une religion (cf. ATF 148 I 160 consid. 7.2; 145 I 121 consid. 5.1; 142 I 195 consid. 5.1; 142 I 49 consid. 3.4).
La liberté de conscience et de croyance confère un droit, conditionnel (
bedingter Anspruch), à l'usage accru du domaine public (défini comme l'ensemble des biens qui peuvent être utilisés librement par tout un chacun; cf. ATF 143 I 37 consid. 6.1), notamment pour y célébrer des manifestations religieuses (ATF 125 I 300 consid. 3a; 97 I 221 consid. 4d; cf. aussi en ce sens ATF 148 I 160 consid. 11; 108 Ia 41; cf. THIERRY TANQUEREL, L'expression religieuse sur le domaine public, in Frédéric Bernard et al. [édit.], Etudes en l'honneur de Tristan Zimmermann, 2017, p. 245 ss, p. 247 et note de bas de page 16).
La liberté de conscience et de croyance peut être restreinte aux conditions prévues par l'art. 36 Cst. (ATF 148 I 160 consid. 7.6). La restriction doit être fondée sur une base légale suffisante (al. 1), justifiée par un intérêt public ou par la protection d'un droit fondamental d'autrui (al. 2), proportionnée au but visé (al. 3) et ne pas violer le noyau intangible du droit fondamental (al. 4).
5.2. Selon l'art. 9 par. 1 CEDH, toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et l'accomplissement des rites (cf. arrêts de la CourEDH
S.A.S c. France du 1er juillet 2014 [req. n° 43835/11], § 123 ss;
Leyla Sahin c. Turquie du 10 novembre 2005 [req. n° 44774/98], § 105). La portée de cette disposition est ici pratiquement identique à celle de l'art. 15 Cst. (ATF 148 I 160 consid. 7.1). Les églises et communautés religieuses jouissent aussi de la garantie de l'art. 9 CEDH (arrêt de la CourEDH
Cha'are Shlaom Ve Tsedek c. France du 27 juin 2000 [req. no 27417/95], § 72; ATF 142 I 195 consid. 5.2). Selon la jurisprudence de la CourEDH, le refus de l'Etat de reconnaître une organisation religieuse constitue une ingérence dans le droit à la liberté religieuse de l'organisation lorsque l'exercice de droits garantis par l'art. 9 CEDH dépend de cette reconnaissance (cf. arrêts de la CourEDH
Izzettin Dogan et autres c. Turquie du 26 avril 2016 [req. no 62649/10], § 127 ss, § 135;
Eglise métropolitaine de Bessarabie et autres c. Moldova du 13 décembre 2001 [req. no 45701/99], § 105 et les arrêts cités).
En vertu de l'art. 9 par. 2 CEDH, la liberté de manifester sa religion ou ses convictions peut faire l'objet de restrictions, pour autant qu'elles soient prévues par la loi et constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l'ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (cf. arrêt de la CourEDH
Kokkinakis c. Grèce, Série A n. 260-A, § 33).
5.3. En l'occurrence, le droit cantonal genevois subordonne l'examen de la demande d'autorisation d'usage accru du domaine public de la recourante en vue de célébrer un baptême dans le lac Léman à la condition que celle-ci soit admise à des relations avec l'Etat. La recourante expose dans son mémoire qu'il serait contraire à ses convictions d'être une organisation "admise à des relations avec l'Etat" au sens du droit genevois. La condition d'admission à des relations avec l'Etat porte ainsi directement atteinte à la liberté religieuse de la recourante. En outre, tant que la recourante ne demande pas son admission, elle ne peut pas célébrer de baptêmes sur le domaine public. Par ricochet, la condition de l'admission à des relations avec l'Etat entraîne ainsi une atteinte à la liberté religieuse en tant que celle-ci protège le droit de manifester sa religion ou ses convictions collectivement en public. Le fait qu'il existe une alternative, consistant pour la recourante à exercer sa liberté religieuse sur le domaine privé, ne supprime pas cette atteinte comme le prétend le Département, puisque l'expression de la religion collectivement en public est une des facettes de la liberté religieuse (cf. ATF 148 I 160 consid. 11; cf. aussi déjà ATF 108 Ia 41 consid. 3a). Il n'est en revanche pas contesté que la recourante ne subit aucune autre restriction à sa liberté religieuse et qu'elle peut exercer tous les autres droits garantis par l'art. 15 Cst. et l'art. 9 CEDH sans être admise à des relations avec l'Etat.
Dès lors qu'il y a une atteinte à la liberté religieuse, il sied de se demander si la condition de l'admission à des relations avec l'Etat en lien avec les demandes de manifestations religieuses sur le domaine public respecte les exigences de l'art. 36 Cst. et de l'art. 9 par. 2 CEDH.
6.
La recourante estime que l'atteinte à sa liberté religieuse est grave et qu'elle ne repose pas sur une base légale suffisante.
6.1. En vertu de l'art. 36 al. 1 première et deuxième phrase Cst., toute restriction d'un droit fondamental doit être fondée sur une base légale et les restrictions graves doivent être prévues par une loi. L'art. 9 par. 2 CEDH énonce que la restriction doit être "prévue par la loi" (sur cette exigence, cf. arrêts de la CourEDH
Karácsony et autres c. Hongrie du 17 mai 2016 [req. no 42461/13, 44357/13], §§ 123-125;
Leyla Sahin c. Turquie du 10 novembre 2005 [req. no 44774/98], §§ 84, 88).
6.1.1. Les atteintes graves portées à un droit fondamental doivent être fondées sur une base claire et explicite dans une loi au sens formel, tandis que les atteintes plus légères peuvent, par le biais d'une délégation législative, figurer dans des actes de niveau inférieur à la loi (ATF 148 I 33 consid. 5.1; 147 I 478 consid. 3.1.2; 139 I 280 consid. 5.1; 123 I 296 consid. 3), voire trouver leur fondement dans une clause générale (ATF 122 I 360 consid. 5b/bb). En outre, l'art. 36 al. 1 Cst. (et l'art. 5 al. 1 Cst.) exigent une certaine densité normative de la base légale, qui doit être suffisante pour que l'application soit prévisible (cf. ATF 148 I 233 consid. 4.1; arrêt 1C_59/2018 du 25 octobre 2018 consid. 3.1 et les arrêts cités). En cas d'atteinte grave, la base légale doit être claire et précise (cf. ATF 148 I 160 consid. 7.8; 140 I 168 consid. 4; 139 I 280 consid. 5.1).
6.1.2. Lorsque la restriction d'un droit fondamental est grave, le Tribunal fédéral examine librement la question de l'existence d'une base légale cantonale suffisante (cf. ATF 142 I 121 consid. 3.3) et sous l'angle restreint de l'arbitraire dans le cas contraire (cf. ATF 125 I 417 consid. 4c; 124 I 25 consid. 4a; arrêt 2C_349/2019 du 27 juin 2019 consid. 3.1). Savoir si une restriction à un droit fondamental est grave s'apprécie en fonction de critères objectifs (ATF 148 I 233 consid. 4.1 et les arrêts cités; arrêt 2C_349/2019 du 27 juin 2019 consid. 3.1). L'impression subjective de la personne concernée n'est pas déterminante (ATF 148 I 233 consid. 4.1; 141 I 211 consid. 3.2 et les arrêts cités).
6.1.3. Dans le domaine de la liberté de conscience et de croyance, l'appréciation de la gravité de la restriction est difficile, car les sentiments et les convictions religieux sont toujours motivés de manière subjective. Les organes étatiques doivent se référer à la signification des règles religieuses pour les personnes concernées (ATF 142 I 49 consid. 7.1 et les arrêts cités). Les entraves à la manifestation des convictions religieuses sont habituellement ressenties comme graves par les personnes concernées (cf. ATF 142 I 49 consid. 7.1; 119 Ia 178 consid. 6a). Pour déterminer la gravité de l'atteinte, il est donc décisif d'examiner si les personnes touchées par une entrave concrète sont en mesure d'exposer en quoi cette atteinte heurte un élément essentiel ou une règle de comportement importante établie dans leur pratique religieuse, de sorte que la gravité de l'atteinte est objectivement compréhensible et est démontrée par des circonstances extérieures de la vie (ATF 142 I 49 consid. 7.1 et les arrêts cités).
6.2. En l'espèce, les exigences à respecter pour être, en tant qu'organisation religieuse, admise à des relations avec l'Etat, à savoir être organisée sous la forme d'une association ou d'une fondation, participer à la cohésion sociale au sein de la société genevoise, ainsi qu'avoir signé et s'engager à respecter la déclaration d'engagement (art. 3 let. a à c RLE; cf.
supra consid. 3.3), ne portent pas en elles-mêmes une atteinte grave à la liberté religieuse de la recourante et celle-ci ne démontre pas le contraire. Parmi les conditions à remplir, la recourante se plaint certes de devoir signer la déclaration d'engagement en tant que celle-ci comprend la reconnaissance de la primauté de l'ordre juridique suisse sur toute obligation religieuse qui lui serait contraire, en particulier s'agissant du droit de la famille (art. 4 let. h RLE). Le respect des règles de droit suisse établies démocratiquement s'impose toutefois de toute façon déjà à toutes et tous, y compris aux organisations religieuses, et l'emporte, en cas de conflit, sur les convictions personnelles, notamment en droit de la famille. La règle de primauté de l'art. 4 let. h RLE n'est à cet égard qu'un simple rappel. Pour le reste, la recourante ne prétend pas et ne démontre pas que les autres engagements violeraient sa liberté religieuse.
La recourante fait valoir que l'atteinte est grave, parce qu'elle serait privée de la possibilité de célébrer, sur le domaine public, un baptême, qui est un rite important pour elle. La Cour de céans ne remet pas en cause la signification de cet acte dans la pratique religieuse de la recourante, mais relève que la décision attaquée en l'espèce n'interdit pas la célébration de baptêmes évangéliques sur le domaine public. Elle ne fait que soumettre l'examen d'une demande en vue d'une telle manifestation à la condition préalable d'une admission à des relations avec l'Etat. Or, ainsi qu'il a été vu, la recourante n'expose pas en quoi la condition de l'admission préalable, comprenant la signature de la déclaration d'engagement, porterait atteinte à un élément essentiel ou à une règle de conduite importante dans sa pratique religieuse. Dans la mesure où il suffit à la recourante d'être admise à des relations avec l'Etat pour avoir ensuite le droit de demander des autorisations en vue de célébrer des baptêmes dans le lac Léman, il convient de qualifier l'atteinte qu'elle subit à sa liberté religieuse du fait de la décision entreprise de légère. Comme l'atteinte est légère, une base légale formelle n'est pas nécessaire (cf. art. 36 al. 1 Cst.). Il n'y a donc pas lieu d'examiner plus avant la critique de la recourante selon laquelle la restriction qui lui est imposée ne repose pas sur une base légale suffisante au motif que les règles d'admission à des relations avec l'Etat sont fixées dans le RLE.
6.3. En tout état, la recourante considère que l'interprétation de la Cour de justice selon laquelle la LLE et le RLE imposent l'obligation pour une organisation religieuse d'être admise à des relations avec l'Etat pour pouvoir déposer une demande d'autorisation d'usage accru du domaine public en vue d'une manifestation religieuse ne peut être suivie, car, d'après elle, les demandes de manifestation ne relèveraient pas des relations avec l'Etat et n'entreraient, partant, pas dans le champ d'application de l'art. 4 LLE. Le Tribunal fédéral examinera cette question sous l'angle de l'arbitraire (cf.
supra consid. 6.1).
6.3.1. Sous l'angle de la base légale, la Cour de justice a relevé que l'art. 4 al. 1 LLE permettait à l'Etat d'entretenir des relations avec les organisations religieuses dans le cadre de l'accomplissement de tâches publiques et que l'art. 4 al. 2 LLE donnait la compétence au Conseil d'Etat de fixer par voie réglementaire les conditions à ces relations, notamment sous l'angle du respect des droits fondamentaux et de l'ordre juridique suisse. La Cour de justice en a déduit, en substance, que le Département était fondé à exiger de la recourante qu'elle se soumette à la procédure d'admission à des relations avec l'Etat comme préalable à l'examen d'une demande d'autorisation d'usage accru du domaine public selon les critères fixées dans le RLE, car cette autorisation intervenait dans l'accomplissement d'une tâche publique pour l'Etat.
6.3.2. L'interprétation qui précède n'est pas insoutenable. L'art. 4 LLE autorise les relations entre les organisations religieuses et l'Etat dans l'accomplissement des tâches publiques de celui-ci, mais les soumet aux conditions fixées par voie réglementaire. En l'occurrence, le Département est sollicité par la recourante pour délivrer une autorisation d'usage accru du domaine public, ce qui relève de ses tâches publiques. Il n'est pas arbitraire de considérer que cette relation, même ponctuelle, tombe sous le coup de l'art. 4 LLE et donc des exigences fixées par le RLE, ainsi que l'a retenu la Cour de justice. Il ne faut pas perdre de vue que la recourante, en demandant un usage accru du domaine public, sollicite une prestation de la part de l'Etat et non une abstention de sa part (cf., sur la portée négative et positive de la liberté de religion: ATF 125 I 300 consid. 3a; 108 Ia 41 consid. 3). Il n'est donc pas insoutenable de considérer que cette demande relève des relations entre l'Etat et les organisations religieuses au sens de la LLE. Dans le canton de Genève, les interactions entre l'Etat et les organisations religieuses constituent l'exception et non la règle (art. 3 Cst./GE; cf.
supra consid. 3.1). L'interprétation de la Cour de justice selon laquelle une organisation religieuse sollicitant un usage accru du domaine public doit se soumettre, en vertu de l'art. 4 LLE, aux exigences fixées dans le RLE s'inscrit dans cette compréhension genevoise des rapports entre les Eglises et l'Etat, qui se fonde sur le principe de la laïcité, ce qu'un canton peut choisir (cf. art. 72 al. 1 Cst.; cf.
supra consid. 3.1). La Cour de céans note encore, d'un point de vue systématique, que l'art. 6 LLE relatif aux manifestations religieuses se trouve dans le chapitre II de la loi, spécifiquement consacré aux relations avec l'Etat (cf.
supra consid. 3.2), ce qui va aussi dans le sens de l'interprétation retenue par la Cour de justice. Enfin, le RLE est très clair en ce qu'il énonce à son art. 3 que l'organisation religieuse souhaitant entretenir une relation avec l'Etat au sens notamment de l'art. 6 LLE doit remplir les conditions figurant aux art. 3 et 4 RLE. On ne voit donc pas en quoi la Cour de justice serait tombée dans l'arbitraire en retenant que la LLE et le RLE imposaient à la recourante d'être admise à des relations avec l'Etat pour pouvoir déposer une demande d'autorisation d'usage accru du domaine public en vue d'y célébrer un baptême.
6.4. En conclusion, le grief tiré de la violation de l'art. 36 al. 1 Cst. (cf. aussi art. 9 par. 2 CEDH) est mal fondé.
7.
Reste à examiner si la condition préalable d'admission à des relations avec l'Etat poursuit un intérêt public et respecte le principe de proportionnalité ( art. 36 al. 2 et 3 Cst. ; art. 9 par. 2 CEDH), ce qui est également contesté dans le recours. Le tribunal de céans vérifie librement si ces exigences sont respectées (ATF 147 I 393 consid. 5.3.2; 142 I 162 consid. 3.2.2; 134 I 153 consid. 4.2.1 et 4.2.2).
7.1. Pour être admissible, l'intérêt public au sens de l'art. 36 al. 2 Cst. doit être pertinent pour restreindre le droit fondamental en cause (ATF 148 I 160 consid. 7.9; 142 I 49 consid. 8.1; 135 I 233 consid. 8.2; 131 I 333 consid. 2.1). Pour être compatible avec l'art. 9 CEDH, une restriction à la liberté religieuse doit notamment être inspirée par un but susceptible d'être rattaché à l'un de ceux que cette disposition énumère, à savoir la sécurité publique, la protection de l'ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou la protection des droits et libertés d'autrui (arrêt de la CourEDH
S.A.S c. France du 1er juillet 2014 [req. no 43835/11], § 113, à propos de l'intérêt public du "vivre-ensemble").
7.2. La Cour de justice a retenu que l'exigence d'admission à des relations avec l'Etat, comprenant la signature de la déclaration d'engagement (art. 4 RLE), avait pour but, d'une part, le maintien de la paix religieuse et la préservation d'un climat de tolérance et de respect mutuel, et, d'autre part, la protection des droits d'autrui et le respect de l'ordre juridique, notamment des "règles élémentaires du vivre ensemble". Dans ses déterminations, le Département souligne une préoccupation pour les autres usagers de l'espace public que la recourante. Il faudrait que les spectateurs non volontaires d'un culte aient au moins l'assurance que ceux qui le pratiquent respectent l'ordre juridique et les valeurs de la République.
7.3. La sauvegarde de la paix confessionnelle constitue un motif d'intérêt public admissible pour restreindre la liberté religieuse (ATF 142 I 49 consid. 8.2.3; 123 I 296 consid. 4a; 108 Ia 41 consid. 3; cf. arrêts de la CourEDH
Lautsi et autres c. Italie du 18 mars 2011 [req. no 30814/06], § 60;
Leyla Sahin c. Turquie du 10 novembre 2005 [req. no 44774/98], § 107).
Le respect de l'ordre juridique suisse, comprenant les principes démocratiques et de l'Etat de droit, constitue aussi un intérêt public pertinent (cf. ATF 135 I 79 consid. 7.2). En outre, la protection des droits et libertés d'autrui est un motif expressément envisagé à l'art. 36 al. 2 Cst. et à l'art. 9 par. 2 CEDH. Il peut s'agir de la protection de la liberté religieuse d'autrui ou de la protection d'autres droits (par ex: égalité entre femmes et hommes: ATF 142 I 49 consid. 9.6.1; 135 I 79 consid. 7.1; 119 Ia 178 consid. 7b; arrêt de la CourEDH
S.A.S c. France du 1er juillet 2014 [req. no 43835/11], § 119; égalité pour les personnes homosexuelles: arrêt de la CourEDH
Eweida et autres c. Royaume-Uni du 15 janvier 2013 [req. no 48420/10, 59842/10, 51671/10 et 36516/10], § 105).
7.4. La condition d'admission à des relations avec l'Etat, comprenant la signature de la déclaration d'engagement, poursuit donc des intérêts publics légitimes.
7.5. Il convient encore de vérifier la proportionnalité de la mesure.
7.5.1. Le principe de proportionnalité exige que la mesure envisagée soit apte à produire les résultats escomptés (règle de l'aptitude) et que ceux-ci ne puissent pas être atteints par une mesure moins incisive (règle de la nécessité). En outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et il postule un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (principe de la proportionnalité au sens étroit, impliquant une pesée des intérêts; ATF 149 I 129 consid. 3.4.3 et les arrêts cités). L'Etat peut prendre des mesures préventives, afin de protéger les droits fondamentaux d'autrui, mais il convient alors de procéder à une pesée des intérêts (cf. art. 35 al. 3 Cst.; ATF 138 I 475 consid. 3.3.2; 126 II 300 consid. 5; cf. aussi art. 1 CEDH; arrêt de la CourEDH
Leela Förderkreis e.V. et autres c. Allemagne du 6 novembre 2008 [req. no 58911/00], § 99).
7.5.2. Selon la jurisprudence de la CourEDH, les Etats parties qui connaissent un système d'enregistrement ou de reconnaissance des organisations religieuses peuvent notamment exiger d'une organisation religieuse qu'elle fournisse des documents exposant les principes fondamentaux de sa religion, afin de déterminer si cette religion ne constitue pas un danger pour la société démocratique (cf. arrêt de la CourEDH
Metodiev et autres c. Bulgarie du 15 juin 2017 [req. no 58088/08], § 42). Les Etats parties disposent d'un droit de regard sur la conformité du but et des activités d'une association religieuse avec les règles fixées par la législation, mais ils doivent en user d'une manière qui se concilie avec leurs obligations au titre de la Convention (arrêts de la CourEDH
Archidiocèse orthodoxe d'Ohrid c. l'ex-République yougoslave de Macédoine du 16 novembre 2017 [req. no 3532/07], § 94;
Metodiev et autres c. Bulgarie du 15 juin 2017 [req. no 58088/08], § 35). Les critères de la reconnaissance et la procédure au terme de laquelle un culte peut être reconnu doivent en particulier être prévus par un texte satisfaisant aux exigences d'accessibilité et de prévisibilité applicables et respecter le principe de non-discrimination (arrêt de la CourEDH
Assemblée chrétienne des témoins de Jéhovah d'Anderlecht et autres c. Belgique du 5 avril 2022 [req. no 20165/20], §§ 50 à 56). L'Etat se doit de rester neutre et impartial dans sa relation avec les divers religions, cultes et croyances; il en va du maintien du pluralisme et du bon fonctionnement de la démocratie (arrêts de la CourEDH
Archidiocèse orthodoxe d'Ohrid c. l'ex-République yougoslave de Macédoine du 16 novembre 2017 [req. no 3532/07], § 94;
Eglise métropolitaine de Bessarabie et autres c. Moldova du 13 décembre 2001 [req. no 45701/99], §§ 115-116). Dans les limites fixées par la Convention, la CourEDH reconnaît aux Etats parties une certaine marge d'appréciation dans leurs relations avec les organisations religieuses (arrêts de la CourEDH
Archidiocèse orthodoxe d'Ohrid c. l'ex-République yougoslave de Macédoine du 16 novembre 2017 [req. no 3532/07], § 95;
Izzettin Dogan et autres c. Turquie du 26 avril 2016 [req. no 62649/10], §§ 107 à 112).
Dans une affaire récente, la CourEDH a sanctionné le fait que seules des organisations religieuses reconnues pouvaient bénéficier, dans la région de Bruxelles-Capitale, de l'exonération du précompte immobilier, car ni les critères ni la procédure de reconnaissance n'étaient prévus par la loi (arrêt de la CourEDH
Assemblée chrétienne des témoins de Jéhovah d'Anderlecht et autres c. Belgique du 5 avril 2022 [req. no 20165/20], §§ 51-56). La CourEDH a en revanche relevé dans cette affaire qu'en retenant la reconnaissance du culte comme critère de distinction présidant à l'exonération du précompte immobilier, les autorités avaient en soi opté pour un critère qui revêtait un caractère objectif et qui pouvait s'avérer pertinent au regard du but poursuivi, à savoir éviter la fraude (§§ 44 à 46). Elle a également retenu, eu égard aux particularités du fédéralisme, qu'il n'était pas discriminatoire qu'un tel régime ne soit prévu que dans une région du pays (§ 47).
7.5.3. En l'occurrence, l'admission à des relations avec l'Etat est à Genève une exigence préalable à l'usage accru du domaine public. De base, les organisations religieuses n'ont pas un droit inconditionnel à cet usage (cf.
supra consid. 5.1). Une réglementation telle que celle prévue par le canton de Genève n'apparaît ainsi pas d'emblée inadmissible. Sous l'angle de l'aptitude, on relève que l'admission comprend la signature d'une déclaration d'engagement qui fixe les exigences en matière de respect des droits fondamentaux et de l'ordre juridique suisse (art. 3 let. c et 4 RLE). Ainsi qu'il a été exposé (cf.
supra consid. 3.3), l'organisation religieuse s'engage à respecter et soutenir la paix religieuse, accepter la diversité des approches philosophiques, spirituelles ou religieuses (art. 4 let. a et b RLE), respecter les droits fondamentaux d'autrui (art. 4 let. d, f, g RLE) et reconnaître la primauté de l'ordre juridique suisse (art. 4 let. h RLE). L'exigence d'admission préalable à des relations avec l'Etat est ainsi propre à atteindre les buts visés de maintien de la paix religieuse, de protection des droits d'autrui et de respect de l'ordre juridique en lien avec l'usage accru du domaine public, puisqu'il est demandé à l'organisation religieuse de s'engager à respecter ces principes.
7.5.4. Sous l'angle de la nécessité, l'admission à des relations avec l'Etat permet au canton de Genève de vérifier, avant que la recourante ne sollicite un usage accru du domaine public, que celle-ci s'engage au respect de l'ordre juridique et des droits fondamentaux. On ne voit pas de mesure moins incisive disponible, sauf à renoncer complètement à l'exigence. Or, la Cour de céans ne peut ignorer que le canton de Genève attache une grande importance à la séparation entre l'Etat et les églises, ce que la Constitution fédérale lui permet de faire (cf.
supra consid. 7.1). Dans ce contexte, il apparaît légitime que ce canton veuille s'assurer que les organisations religieuses, avec lesquelles il n'entretient par principe aucune relation et sur lesquelles il n'exerce aucune forme de contrôle, s'engagent expressément au respect de l'ordre juridique lorsqu'elles entendent exercer leur liberté religieuse sur son domaine public. La conception genevoise des rapports entre l'Eglise et l'Etat explique et justifie également que les organisations religieuses souhaitant organiser des manifestations religieuses sur le domaine public soient soumises à la condition préalable de l'admission à des relations avec l'Etat, alors que d'autres organisations (politiques par exemple) ne le sont pas lorsqu'elles demandent à manifester sur le domaine public. On peut relever à cet égard que dans l'ATF 148 I 160, le Tribunal fédéral a admis que les manifestations religieuses sur le domaine public pouvaient être soumises à un régime spécial découlant de la législation cantonale sur la laïcité (cf. art. 6 LLE), reconnaissant ainsi le caractère spécifique de telles manifestations dans un canton qui a posé le principe de la laïcité. Cela explique une différence de traitement par rapport aux autres manifestations sur le domaine public, qui ne sont régies que par la loi cantonale sur les manifestations sur le domaine public. Or, la condition d'admission préalable pour les organisations religieuses, litigieuse en l'espèce, s'insère dans ce système spécial (cf.
supra consid. 6.3).
7.5.5. Enfin, sous l'angle de la proportionnalité au sens strict, il y a, d'une part, l'intérêt public du canton de Genève à pouvoir s'assurer que les organisations religieuses souhaitant solliciter un usage accru du domaine public s'engagent au respect de l'ordre juridique et des droits fondamentaux d'autrui et, d'autre part, l'intérêt de la recourante à ne pas se soumettre à la procédure d'admission. Or, comme déjà indiqué (cf.
supra consid. 6.2), la contrainte pour la recourante est minime; il s'agit de signer une déclaration d'engagement en faveur de la paix religieuse, de l'ordre juridique et des droits fondamentaux. La recourante n'indique pas concrètement quelle facette de sa liberté religieuse serait heurtée par cette exigence et on ne voit pas en quoi celle-ci serait disproportionnée par rapport à l'objectif visé. Compte tenu des prérogatives de l'Etat sur le domaine public, des buts poursuivis par la réglementation litigeuse et des très faibles contraintes pour la recourante découlant de l'obligation d'admission à des relations avec l'Etat, la décision entreprise ne constitue pas une ingérence excessive dans les droits de la recourante.
7.6. La recourante voit dans la décision du Département une interdiction des manifestations religieuses sur le domaine public, qui la prive de célébrer un rite important pour elle.
Contrairement à ce que la recourante prétend, la décision du Département ne revient pas à lui interdire d'emblée de manière définitive de procéder à des manifestations religieuses sur le domaine public, interdiction qui serait à l'évidence contraire à la liberté religieuse, comme l'a récemment relevé le Tribunal fédéral en lien avec la législation genevoise (ATF 148 I 160 consid. 11; cf. déjà ATF 108 Ia 41 à propos de l'ancienne loi genevoise sur le culte extérieur, qui interdisait toute manifestation cultuelle sur le domaine public). La recourante perd en effet de vue que le refus qui lui a été opposé en l'espèce tient uniquement dans la circonstance qu'elle ne veut pas procéder aux démarches pour être admise à des relations avec l'Etat. Il lui suffirait de demander son admission à des relations avec l'Etat et de remplir les critères des art. 3 et 4 RLE pour pouvoir déposer une demande d'autorisation d'usage accru du domaine public, qui devrait alors être examinée selon les critères fixés à l'art. 6 LLE et dans la LMDPu (cf.
supra consid. 3.2), ainsi que dans le respect des exigences posées par la jurisprudence (cf. ATF 148 I 160 consid. 11). Dans la mesure où le Département, qui s'écarte à cet égard de l'objet du litige, allègue dans ses déterminations que les manifestations religieuses ne doivent, par principe, pas se dérouler sur le domaine public, il est intégralement renvoyé à l'ATF 148 I 160, dans lequel le Tribunal fédéral a déjà examiné, et rejeté, ces arguments (cf. consid. 11).
7.7. En conclusion, la Cour de justice n'a pas méconnu les garanties découlant de l'art. 9 CEDH et des art. 15 et 36 Cst. en confirmant le refus d'autorisation en vue de la célébration d'un baptême dans le lac Léman au motif que la recourante n'est pas une organisation religieuse admise à des relations avec l'Etat au sens du droit cantonal genevois.
8.
La recourante fait valoir que la décision contestée emporte violation du principe d'égalité de traitement (art. 8 al. 1 Cst.), car des autorisations de célébrer des baptêmes sur la même plage auraient été octroyées à d'autres requérants évangéliques par le passé. La recourante se réfère à une autorisation du 16 septembre 2019 et à une autorisation du 17 septembre 2020.
La première autorisation a été délivrée avant l'entrée en vigueur du RLE, qui exige l'admission à des relations avec l'Etat comme préalable au dépôt d'une demande d'autorisation d'usage accru du domaine public. La recourante ne peut donc rien déduire de la comparaison.
Quant à la seconde autorisation, le Département admet qu'elle a été rendue à tort. Conformément à une jurisprudence constante, il n'existe pas de droit à l'égalité dans l'illégalité, sauf dans certaines circonstances (ATF 139 II 49 consid. 7.1), qui ne sont pas réalisées en l'espèce. La recourante ne peut donc rien déduire non plus de cette comparaison.
9.
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours, dans la mesure où il est recevable. La recourante, qui succombe, doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens ( art. 68 al. 1 et 3 LTF ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires de la recourante, au Département de la sécurité, de la population et de la santé et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative.
Lausanne, le 23 février 2024
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente : F. Aubry Girardin
La Greffière : E. Kleber