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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1P.721/2003/svc 
 
Arrêt du 23 mars 2004 
Ire Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du Tribunal fédéral, Reeb et Fonjallaz. 
Greffier: M. Parmelin. 
 
Parties 
A.________, 
recourant, représenté par Me Claude Kalbfuss, avocat, 
 
contre 
 
L.J.________, 
intimée, représentée par Me Alphonse-Marie Veuthey, avocat, 
Ministère public du canton du Valais, 
Palais de Justice, case postale 2050, 1950 Sion 2, 
Cour pénale II du Tribunal cantonal du canton 
du Valais, Palais de Justice, 1950 Sion 2. 
 
Objet 
procédure pénale; appréciation des preuves, 
 
recours de droit public contre le jugement de la 
Cour pénale II du Tribunal cantonal du canton du Valais 
du 20 octobre 2003. 
 
Faits: 
A. 
Le 8 octobre 1997, F.J.________ et N.J.________ ont déposé une plainte pénale contre A.________ qu'ils accusaient d'avoir procédé à des attouchements d'ordre sexuel sur leur fille L.J.________, née en 1992, dont il était le parrain. 
A la fin de l'année 1995 et début 1996, les époux J.________ ont remarqué que L.J.________ avait un comportement anormal; elle était très nerveuse et avait peur de tout; lorsque A.________ venait à la maison, elle s'excitait beaucoup et changeait d'attitude, sans raison apparente; elle avait des problèmes pour s'endormir; elle voyait des fantômes dans sa chambre et venait se réfugier chaque nuit dans leur lit. Préoccupée par cette situation, N.J.________ s'est confiée en mars 1996 à sa soeur, V.________, qui suivait une formation d'assistante sociale à l'Office cantonal des mineurs, à Monthey, en lui demandant de discuter avec L.J.________. La fillette aurait alors avoué spontanément à sa tante que le fantôme était son parrain, qu'elle appelait "tonton xxx", qu'il lui avait mis la main dans la culotte, sous les habits, et que cela lui avait fait mal, ajoutant que son parrain avait "cassé la vitre de la porte du garage" en désignant son sexe. N.J.________ s'est dite abasourdie par les propos rapportés par sa soeur, car elle n'avait jusqu'alors nourri aucun soupçon de cette nature. La semaine suivante, elle est allée consulter seule le Docteur Denis Paccaud, pédiatre à Monthey, qui suit L.J.________ depuis sa naissance. Sur le conseil de ce dernier, les époux J.________ ont pris contact avec le Service médico-pédagogique de Monthey, le 26 mars 1996, pour une évaluation et une prise en charge. 
Le 13 septembre 1996, les parents de L.J.________ ont eu une première entrevue avec les époux A.________, en présence du responsable de ce service, le Docteur Calogero Morreale, durant laquelle les soupçons d'abus n'ont pas été abordés. Ils ont eu une seconde entrevue le 3 novembre 1996, à leur domicile, avec V.________; à cette occasion, A.________ a été informé des propos de L.J.________ à son égard et du fait qu'il ne devait plus revoir sa filleule. Le comportement de la fillette s'est alors rapidement amélioré. Elle a cependant violemment réagi à l'occasion d'une rencontre fortuite avec son parrain, lors du carnaval de Monthey. Elle présentait par la suite à nouveau des manifestations d'angoisse se caractérisant par des troubles du sommeil, des cauchemars et des terreurs nocturnes. Sur les conseils du médecin traitant de L.J.________, les époux J.________ se sont adressés en date du 11 septembre 1997 au Docteur Edouard Monot, psychothérapeute à Montreux, qui suit la fillette à raison d'une séance par semaine; celui-ci s'est déclaré convaincu de la réalité des abus dénoncés et leur a conseillé de saisir la justice pour le bien de l'enfant. 
Dans son rapport établi le 13 novembre 1997, le Docteur Calogero Morreale a expliqué que L.J.________ était venue en consultation pour des problèmes d'endormissement et de cauchemars nocturnes qui ont été mis en relation avec le temps que l'enfant passait seule avec son parrain, sans pouvoir définir clairement leur origine. La situation s'est nettement améliorée lorsque la famille a décidé que la fillette ne verrait son parrain qu'en présence de ses parents, puis lorsqu'elle a rompu tout contact avec celui-ci. Interrogé à nouveau le 28 janvier 1999, le Docteur Calogero Morreale n'a pu se montrer plus précis, car la fillette n'avait pas porté d'accusations claires et directes contre son parrain. Il a encore ajouté qu'au vu des circonstances, il existait un risque, mais non un fort risque de suggestion. 
Le Docteur Denis Paccaud s'est exprimé le 31 janvier 1998. Il s'est déclaré convaincu que L.J.________ a subi des attouchements des organes génitaux, dont la gravité ne pouvait cependant être appréciée par l'examen physique réalisé le 26 juin 1996, lequel mettait en évidence un orifice vaginal bien large, avec un bord finement crénelé, et une absence d'hymen vaginal, sans pouvoir affirmer s'il s'agissait d'une anomalie de naissance ou si c'était le résultat d'un abus sexuel. 
L.J.________ a été interrogée par une agente de la police cantonale valaisanne, le 3 mars 1998, en présence de sa mère. Elle a répété à cette occasion que son parrain lui touchait le sexe lorsqu'il la mettait au lit et que cela lui faisait mal. Elle a également dit qu'il la tapait sur tout le corps quand il venait la baigner et qu'elle avait peur. 
A.________ a contesté les faits qui lui étaient reprochés, en déclarant n'avoir jamais été seul avec la fillette pour lui donner le bain ou la coucher. Il suggérait que le comportement de sa filleule pouvait être mis en relation avec celui de son cousin Y.________, âgé alors de six ans, qui avait l'habitude de lever la jupe des filles et de leur baisser les culottes, voire que le père de L.J.________ soit l'auteur des abus, dès lors qu'il avait été impliqué dans une affaire de pédophilie; il n'excluait pas non plus que l'enfant ait été influencée par sa mère, qui avait été elle-même la victime d'agissements semblables de la part de son parrain dans sa jeunesse. 
Le 4 février 1999, le Juge d'instruction pénale en charge du dossier a ordonné la mise en oeuvre d'une expertise de crédibilité de L.J.________, qu'il a confiée au Docteur Bernard Graf, psychiatre et psychothérapeute, à Lausanne. Ce dernier a rendu son rapport le 29 janvier 2000; son appréciation se fonde sur le dossier pénal, sur les différents entretiens tenus avec l'enfant au cours du printemps et de l'été 1999, l'un en présence de sa mère, les deux autres avec la fillette seule, sur l'examen clinique et psychologique effectué par une consoeur et une discussion de cet examen avec la psychologue. Il conclut à la crédibilité des propos de l'enfant et exclut l'éventualité qu'elle ait pu imaginer la situation décrite dans ses propos, les différents examens pratiqués allant dans le sens de la réalité de l'abus dénoncé et de séquelles post-traumatiques. 
A.________ a demandé en vain à ce que l'expertise soit retranchée du dossier et, le cas échéant, à ce qu'une contre-expertise soit ordonnée, au motif que l'expert ne l'avait pas entendu et avait omis de prendre en compte certains éléments à décharge. Le 20 juillet 2000, la Chambre pénale du Tribunal cantonal du canton du Valais (ci-après: la Chambre pénale) a admis la plainte et a invité le juge d'instruction à prendre une nouvelle décision sur l'opportunité d'une contre-expertise à réception des réponses aux questions complémentaires adressées à l'expert. Ce dernier a déposé son complément d'expertise le 14 décembre 2000. A.________ s'est déterminé sur ce document en maintenant sa requête de contre-expertise. Le Juge d'instruction pénale a rejeté cette demande par décision du 7 mars 2001, confirmée par la Chambre pénale sur plainte du prévenu le 20 juin 2001. 
B. 
Par jugement du 7 juin 2002, le Tribunal du IIIème arrondissement pour le district de Monthey a reconnu A.________ coupable d'actes d'ordre sexuel avec des enfants et d'actes d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance, et l'a condamné à dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis pendant deux ans. Faisant siennes les considérations et les conclusions de l'expert, il a retenu que A.________ avait à deux reprises, les 5 et 12 décembre 1995, profité de l'occasion qui lui était donnée de baigner sa filleule et de la mettre au lit pour caresser le sexe de l'enfant, alors âgée de trois ans et demi, non sans lui faire quelque mal. 
Le 31 juillet 2002, A.________ a fait appel de ce jugement auprès de la Cour pénale II du Tribunal cantonal du canton du Valais (ci-après: la Cour pénale ou la cour cantonale). A titre de complément de preuves, il sollicitait entre autre que le dossier soit soumis à un expert afin de déterminer s'il existait un risque de suggestion, compte tenu de la manière dont les déclarations de l'enfant avait été recueillies et l'enquête effectuée. Le Ministère public du canton du Valais (ci-après: le Ministère public) et L.J.________ se sont joints à l'appel en arguant de l'insuffisance tant de la peine infligée à l'accusé que du montant des dépens alloués à la partie civile pour l'instruction et le jugement de première instance, arrêtés à 1'500 francs. 
Statuant par jugement du 20 octobre 2003, la Cour pénale a rejeté l'appel de A.________ et l'appel joint du Ministère public, après avoir refusé de donner suite à la requête en complément de preuves du condamné; elle a partiellement admis l'appel de L.J.________, s'agissant des dépens qu'elle a fixés à 2'400 francs. Elle a reconnu A.________ coupable d'actes d'ordre sexuel avec des enfants et d'actes d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance, pour avoir caressé le sexe de sa filleule à deux reprises, les 5 et 12 décembre 1995, lorsqu'il la mettait au lit, et l'a condamné à dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis pendant deux ans. Elle s'est fondée sur les premières déclarations de la fillette à sa tante, qu'elle a jugées crédibles dans la mesure où elles avaient été faites dans des conditions excluant toute suggestion de la part de celle-ci ou de tiers, et sur l'avis de l'expert qui conclut à la crédibilité de L.J.________. 
C. 
Agissant par la voie du recours de droit public, A.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler ce jugement. Invoquant les art. 9 et 29 Cst., il se plaint d'une violation de la présomption d'innocence, d'arbitraire dans l'appréciation des preuves, d'une violation de son droit d'être entendu et d'un déni de justice. 
La Cour pénale se réfère aux considérants de son jugement. L.J.________ et le Ministère public ont renoncé à déposer des observations. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Seul le recours de droit public est ouvert pour se plaindre d'une appréciation arbitraire des preuves et des constatations de fait qui en découlent (ATF 124 IV 81 consid. 2a p. 83) ou d'une atteinte directe à un droit constitutionnel, tel que le droit d'être entendu garanti à l'art. 29 al. 2 Cst. ou l'interdiction du déni de justice formel déduit de l'art. 29 al. 1 Cst. (ATF 127 IV 215 consid. 2d p. 218). Savoir si une expertise de crédibilité est convaincante ou non et, le cas échéant, si une nouvelle expertise s'impose, est une question d'appréciation des preuves (ATF 106 IV 97 consid. 2b p. 99, 236 consid. 2a p. 238). La voie de droit choisie en l'occurrence est donc correcte. 
Formé au surplus en temps utile contre une décision finale prise en dernière instance cantonale et qui touche le recourant dans ses intérêts juridiquement protégés, le recours est recevable au regard des art. 84 ss OJ
2. 
Invoquant les art. 9 Cst. et 6 § 2 CEDH, le recourant se plaint à divers titres d'une appréciation arbitraire des faits pertinents et d'une violation de la présomption d'innocence. Selon lui, les déclarations de L.J.________ à sa tante n'auraient pas été recueillies de manière à exclure toute influence ou suggestion extérieure. Il en irait de même de celles faites à l'agente de police en présence de la mère de la fillette. Quant à l'expertise du Docteur Bernard Graf, elle s'écarterait des méthodes reconnues en la matière et n'aurait de ce fait aucun valeur probante. En outre, le refus d'ordonner une expertise visant à évaluer le risque de suggestibilité de l'enfant consacrerait une violation de son droit d'être entendu, tel qu'il découle de l'art. 29 al. 2 Cst. 
2.1 En tant qu'elle s'applique à la constatation des faits et à l'appréciation des preuves, la présomption d'innocence interdit au juge de prononcer une condamnation s'il éprouve des doutes quant à la culpabilité de l'accusé. Des doutes abstraits ou théoriques, qui sont toujours possibles, ne suffisent cependant pas à exclure une condamnation; la présomption d'innocence n'est donc invoquée avec succès que s'il apparaît, à l'issue d'une appréciation des preuves exempte d'arbitraire, que le juge aurait dû éprouver des doutes sérieux et irréductibles sur la culpabilité de l'intéressé (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 41; 124 IV 86 consid. 2a p. 88; 120 Ia 31 consid. 2c p. 37). 
Saisi d'un recours de droit public mettant en cause l'appréciation des preuves, le Tribunal fédéral examine seulement si le juge cantonal a outrepassé son pouvoir d'appréciation et établi les faits de manière arbitraire (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 41; 124 I 208 consid. 4 p. 211; 120 Ia 31 consid. 2d p. 37/38; 118 Ia 28 consid. 1b p. 30 et les arrêts cités). Une constatation de fait n'est pas arbitraire pour la seule raison que la version retenue par le juge ne coïncide pas avec celle de l'accusé ou du plaignant; encore faut-il que l'appréciation des preuves soit manifestement insoutenable, en contradiction flagrante avec la situation effective, qu'elle constitue la violation d'une règle de droit ou d'un principe juridique clair et indiscuté, ou encore qu'elle heurte de façon grossière le sentiment de la justice et de l'équité (ATF 129 I 49 consid. 4 p. 58, 173 consid. 3.1 p. 178; 128 I 81 consid. 2 p. 86), ce qu'il appartient au recourant d'établir (ATF 125 I 492 consid. 1b p. 495 et les arrêts cités). 
Concernant plus particulièrement l'appréciation du résultat d'une expertise, le juge n'est en principe pas lié par ce dernier (art. 249 PPF). Mais s'il entend s'en écarter, il doit motiver sa décision et ne saurait, sans motifs déterminants, substituer son appréciation à celle de l'expert, sous peine de verser dans l'arbitraire. En d'autres termes, le juge qui ne suit pas les conclusions de l'expert n'enfreint pas l'art. 9 Cst. lorsque des circonstances bien établies viennent en ébranler sérieusement la crédibilité (ATF 129 I 49 consid. 4 p. 57/58; 128 I 81 consid. 2 p. 86; 122 V 157 consid. 1c p. 160; 119 Ib 254 consid. 8a p. 274; 118 Ia 144 consid. 1c p. 146/147 et les arrêts cités). Tel est notamment le cas lorsque l'expertise contient des contradictions et qu'une détermination ultérieure de son auteur vient la contredire sur des points importants, ou lorsqu'elle se fonde sur des pièces et des témoignages dont le juge apprécie autrement la valeur probante ou la portée (ATF 101 IV 129 consid. 3a in fine p. 130). Si, en revanche, les conclusions d'une expertise judiciaire apparaissent douteuses sur des points essentiels, celui-ci doit recueillir des preuves complémentaires pour tenter de dissiper ses doutes. A défaut, en se fondant sur une expertise non concluante, il pourrait commettre une appréciation arbitraire des preuves et violer l'art. 9 Cst. (ATF 118 Ia 144 consid. 1c p. 146). La nécessité d'une nouvelle expertise dépend ainsi d'une appréciation de celle versée au dossier et des autres éléments de preuves. 
2.2 En l'occurrence, la Cour pénale a retenu que A.________ avait caressé le sexe de L.J.________ à deux reprises, les 5 et 12 décembre 1995, aux moments de la mettre au lit. Elle s'est fondée à cet égard sur les premières déclarations de la fillette à sa tante, qu'elle a jugées crédibles parce qu'elles avaient été faites dans des conditions excluant toute suggestion de la part de celle-ci ou de tiers et parce que l'enfant les avait reprises sur l'essentiel devant l'agente de la police cantonale puis devant le Docteur Edouard Monot. Elle s'est également basée sur l'avis de l'expert judiciaire qui conclut à la crédibilité de L.J.________. 
Le recourant prétend que la fillette se serait d'abord confiée à sa mère, contrairement à ce que retient la Cour pénale; il conviendrait en outre d'appréhender les déclarations faites à V.________ avec prudence dès lors qu'elles ont été recueillies par un membre de la famille, dans des conditions non vérifiables, faute d'enregistrement, et qui ne permettent pas d'exclure toute suggestion. 
L.J.________ s'est plainte à ses parents de la présence de fantômes dans sa chambre, qu'elle n'a cependant jamais mise en relation avec son parrain. Ni son père ni sa mère n'ont demandé d'explications à ce sujet à leur fille avant que sa tante ne l'interroge. F.J.________ a déclaré avoir simplement tenté de rassurer sa fille en lui disant que les fantômes n'existaient pas, sans pousser ses investigations plus loin. Quant à N.J.________, lorsqu'elle a parlé à sa soeur des problèmes rencontrés par L.J.________, elle n'avait pas questionné la fillette pour savoir qui étaient ces fantômes et ce qu'ils faisaient, comme cela ressort de la déposition de V.________. Elle s'est d'ailleurs dite abasourdie par les propos de sa fille, tels que relatés par sa soeur. Dans ces conditions, la cour cantonale n'a pas fait preuve d'arbitraire en retenant que L.J.________ avait pour la première fois parlé des agissements de son parrain à sa tante, même si la fillette a prétendu en avoir parlé d'abord à sa mère lors de son audition par la police. 
Le fait que le premier interrogatoire de l'enfant ait été mené par un proche et n'ait pas été enregistré n'empêchait pas l'autorité pénale de s'y référer. Une telle restriction serait d'ailleurs incompatible avec l'art. 249 PPF (ATF 127 IV 172 consid. 3a p. 174). En effet, si l'on suivait le recourant, il faudrait exclure par principe toute possibilité de prendre en compte des accusations de cette nature sous prétexte qu'elles auraient été faites en premier lieu à des membres de la famille sans avoir été enregistrées; tel ne saurait être le sens de la jurisprudence qui préconise d'enregistrer, dans la mesure du possible, les premières déclarations de l'enfant (ATF 129 I 49 consid. 5 p. 58); tout au plus, il convient de s'assurer en pareil cas qu'elles ont été recueillies dans des conditions permettant d'exclure toute suggestion ou influence externe. En l'occurrence, V.________ a exposé de manière claire et précise, lors de son audition en qualité de témoin par la police de sûreté valaisanne, la manière dont elle avait questionné l'enfant et l'avait amenée à faire part des agissements du recourant. C'est ainsi qu'interrogée au sujet des fantômes qu'elle disait voir tous les soirs dans sa chambre, sa nièce lui aurait spontanément dit que c'était "tonton xxx". Lorsqu'elle l'a questionnée sur ce qu'il lui faisait, la fillette a répondu "des chatouilles". Comme elle lui demandait de désigner sur elle où il lui faisait des chatouilles, L.J.________ s'est approchée et lui a passé ses mains sur le haut du corps, très rapidement. A la question de savoir si elle était habillée lorsque le fantôme la chatouillait, la fillette a répondu que cela se passait sous les habits. Invitée à lui montrer, elle lui a alors saisi les leggings, les a tirés vers elle et a enfoui sa main dans la culotte, très rapidement. A sa tante qui demandait si elle avait demandé à son parrain d'arrêter, elle a répondu par l'affirmative en indiquant qu'"il faisait quand même". V.________ a alors insisté sur le fait qu'on n'avait pas le droit de faire cela. A ce moment, la fillette a parlé de la porte du garage et a dit que "tonton xxx" avait cassé la vitre, en désignant une vitre du restaurant voisin et en imitant le geste que l'on fait pour la briser. Le recourant prétend qu'en raison du temps écoulé et de l'absence de procès-verbal de l'entretien, on ne saurait admettre sans autre que le témoignage de la tante de L.J.________ reflète fidèlement les questions et les réponses de l'enfant; il n'a toutefois jamais demandé à interroger une nouvelle fois V.________ à ce propos. La cour cantonale pouvait dès lors sans arbitraire admettre que la retranscription faite par la tante de L.J.________ des premières déclarations de l'enfant correspondait à la réalité, en dépit du temps écoulé et du fait qu'elles n'avaient pas été enregistrées; de même, il était parfaitement soutenable d'en déduire que V.________ n'avait ni posé de questions directives ni procédé à des incitations suggestives, mais que c'est bien l'enfant qui avait spontanément et de façon inattendue confié avoir fait l'objet d'attouchements d'ordre sexuel de la part de son parrain. Sur ce point, le jugement attaqué échappe au grief d'arbitraire. 
2.3 Le recourant prétend que la Cour pénale ne pouvait pas se fonder sur les premières déclarations officielles de l'enfant recueillies le 3 mars 1998 pour asseoir sa conviction, parce que l'agente de police aurait parlé avec la fillette des faits de la cause avant de procéder à l'enregistrement de l'entrevue; de plus, la mère de l'enfant assistait à l'interrogatoire, en infraction flagrante avec les dernières données de la science en la matière, et serait intervenue de manière directive. La cour cantonale ne s'est fondée sur cet élément de preuve qu'en tant qu'il venait confirmer sur l'essentiel les déclarations de L.J.________ à sa tante, puis au Docteur Edouard Monot. A supposer qu'il faille dénier toute valeur probante à cet entretien en raison des irrégularités mises en évidence par le recourant, cela ne conduirait pas encore à annuler l'arrêt attaqué, dès lors que la Cour pénale pouvait sans arbitraire se fonder sur les premières déclarations de l'enfant pour conclure à la culpabilité de A.________. Dans ces conditions, la question de savoir si les déclarations de L.J.________ lors de son audition par la police sont pour l'essentiel cohérentes par rapport à celles faites à sa tante et si la Cour pénale a commis un déni de justice en ne se prononçant pas sur l'argument tiré du caractère incomplet du procès-verbal d'audition peut rester indécise. 
2.4 Le recourant reproche également à la Cour pénale de s'être basée sur l'expertise de crédibilité de L.J.________ réalisée par le Docteur Bernard Graf, malgré les graves défauts dont elle serait affectée. Une telle expertise doit permettre au juge d'apprécier la valeur des déclarations de l'enfant, en s'assurant que ce dernier n'est pas suggestible, que son comportement trouve son origine dans un abus sexuel et n'a pas une autre cause, qu'il n'a pas subi l'influence de l'un des parents et qu'il ne relève pas de la pure fantaisie de l'enfant. Pour qu'une telle expertise ait une valeur probante, elle doit répondre aux standards professionnels reconnus par la doctrine et la jurisprudence récente (ATF 129 I 49 consid. 5 p. 58; 128 I 81 consid. 2 p. 85 et les références citées; cf. arrêt 1P.262/2000 du 19 juillet 2000 cité par Philipp Maier/Arnulf Möller, Begutachtungen der Glaubhaftigkeit in der Strafrechtspraxis, AJP 2002, p. 686, n. 24; voir également à ce sujet, Grégoire Zimmermann, Le témoignage d'enfants dans le contexte juridique: la question de la suggestibilité, RVJ 2002 p. 135). 
L'expert s'est déterminé sur les capacités intellectuelles de L.J.________ et sur les possibilités d'une éventuelle fabulation; il a ainsi constaté que le développement de la fillette s'inscrivait dans les limites de la norme et qu'au moment des faits, elle disposait de compétences cognitives, d'une capacité d'attention, de compétences mnésiques et d'un stock lexical permettant une expression correcte et facilitant la révélation; il précisait en outre que l'enfant distinguait bien ce qui relevait de l'imaginaire de ce qui était du registre de la réalité. Il s'est également prononcé sur la crédibilité des premières déclarations de L.J.________ faites à sa tante en relevant que le dévoilement était intervenu dans le contexte d'un questionnement de l'enfant sur ses peurs nocturnes, dont aucun élément ne permettait jusqu'alors de relier avec son parrain et, encore moins, avec des attouchements à connotation sexuelle, dans la mesure où les parents n'avaient jamais cherché à connaître l'identité du fantôme que leur fille prétendait voir dans sa chambre. Il soulignait enfin la cohérence entre les récits que L.J.________ a faits aux différents intervenants et qui parlent nettement en faveur de la crédibilité de la fillette. L'expert a donc procédé à une analyse des déclarations de l'enfant, comme le préconisent la doctrine et la jurisprudence lorsque les premières déclarations n'ont pas pu être enregistrées, même si cette analyse ne répond peut-être pas en tout point aux standards reconnus actuellement par les professionnels de la branche. 
Il est exact en revanche que le Docteur Bernard Graf ne s'est pas prononcé expressément sur une éventuelle suggestion de la part de L.J.________, malgré la requête en ce sens déposée par le recourant. Cela ne suffit pas à écarter toute valeur probante à l'expertise et à justifier la mise en oeuvre d'une nouvelle expertise. 
Pour les raisons déjà évoquées précédemment, la Cour pénale pouvait sans arbitraire admettre que la manière dont L.J.________ avait été amenée à parler des agissements de son parrain à sa tante permettait d'exclure une éventuelle suggestion de la part tant des époux J.________ que de V.________. Dans son rapport du 3 novembre 1997, le Docteur Edouard Monot a déclaré qu'au point où il en était dans son travail avec L.J.________ et avec ses parents, ces derniers étaient crédibles dans leur récit et qu'ils n'étaient pas gens à manipuler un enfant ou à lui suggérer de telles choses dans le but de nuire ou par quelque obsession malsaine. Il relevait en particulier que les époux J.________ avaient mis du temps à se convaincre de la réalité des faits avant de s'adresser au pédiatre de leur fille. Il soulignait enfin que la façon dont ils parlaient de leur découverte, du temps qu'ils avaient mis pour comprendre et admettre la réalité des faits et jusqu'au ton de leur récit, la clarté et en même temps la pudeur adéquate avec lesquelles ils parlaient de ces choses-là excluait toute activité de suggestion de leur part auprès de L.J.________ et que le discours de la fillette n'était nullement "télécommandé" comme il l'avait vu dans d'autres situations. Le Docteur Calogero Morreale est ainsi le seul à évoquer un risque de suggestion, qu'il qualifie de faible, sans donner aucune motivation sur les raisons qui l'amènent à tenir ce risque pour avéré. Dans ces conditions, la cour cantonale pouvait considérer sans arbitraire que L.J.________ n'avait fait l'objet d'aucune influence extérieure sur la base des éléments de preuves disponibles, sans qu'il soit nécessaire de recourir à une nouvelle expertise. 
2.5 Enfin, les autres éléments avancés pour mettre en doute la crédibilité de L.J.________ ne sont pas déterminants. Ainsi, le fait que l'enfant n'ait plus utilisé l'image de la vitre de la porte de garage que son parrain aurait cassée pour illustrer l'abus dont elle aurait été la victime ne signifie pas encore que cet élément lui aurait été suggéré. Au contraire, interpellé à ce propos, le Docteur Bernard Graf a précisé que cette expression était parfaitement compatible avec le langage d'une fillette de quatre ans et relevait d'ailleurs davantage du langage d'un enfant que celui d'un adulte. La cour cantonale n'avait aucune raison de s'écarter de cette appréciation, en tant qu'elle émane d'un spécialiste. L'expert a donné une explication plausible des raisons pour lesquelles L.J.________ n'avait pas dénoncé les agissements de son parrain à ses parents, au moment des faits; on relèvera à cet égard que lorsque le recourant mettait sa filleule au lit, il prenait soin de ne pas laisser entrer la soeur de L.J.________ dans la chambre, selon les propos de celle-ci rapportés par sa mère à l'audience de jugement. En outre, L.J.________ a toujours désigné son parrain comme l'auteur des actes dont elle disait avoir été la victime, que ce soit à sa tante ou aux autres intervenants. Dans ces conditions, la Cour pénale pouvait sans arbitraire écarter une confusion par rapport au père de L.J.________ ou à un cousin, âgé de six ans au moment des faits, qui avait pour habitude de lever la jupe des filles et de leur baisser les culottes. Le fait que N.J.________ ait elle-même subi des abus de même nature de la part de son parrain ne présentait aucune pertinence dès lors que l'enfant a parlé pour la première fois des attouchements dont elle était la victime à sa tante. Quant aux témoignages favorables d'autres couples qui ont confié leurs enfants aux époux A.________ sans rencontrer de problèmes, ils n'étaient manifestement pas de nature à écarter la réalité des abus dénoncés. 
2.6 En définitive, le recourant ne parvient pas à démontrer que le jugement attaqué reposerait sur une appréciation arbitraire des preuves, ni qu'un examen objectif de l'ensemble des éléments de la cause aurait dû inciter la Cour pénale à concevoir des doutes irréductibles sur sa culpabilité, au point que sa condamnation serait contraire à la présomption d'innocence. 
 
3. 
Le recours doit par conséquent être rejeté, dans la mesure où il est recevable, aux frais du recourant qui succombe (art. 156 al. 1 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens à l'intimée, qui n'a pas déposé d'observations. 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
2. 
Un émolument judiciaire de 3'000 fr. est mis à la charge du recourant. 
3. 
Il n'est pas alloué de dépens. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties, ainsi qu'au Ministère public et à la Cour pénale II du Tribunal cantonal du canton du Valais. 
Lausanne, le 23 mars 2004 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: Le greffier: