Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
9C_422/2021
Arrêt du 23 mars 2022
IIe Cour de droit social
Composition
M. et Mmes les Juges fédéraux Parrino, Président, Moser-Szeless et Truttmann, Juge suppléante.
Greffière : Mme Perrenoud.
Participants à la procédure
A.________, représentée par B.________,
recourante,
contre
Caisse de compensation du canton du Valais, Avenue Pratifori 22, 1950 Sion,
intimée.
Objet
Prestation complémentaire à l'AVS/AI,
recours contre le jugement du Tribunal cantonal du Valais du 14 juillet 2021 (S1 19 231).
Faits :
A.
A.________, née en 1938, a présenté une demande de prestations complémentaires à sa rente de l'assurance-vieillesse et survivants (AVS), en novembre 2018. Par décisions du 1er mars 2019, la Caisse de compensation du canton du Valais (ci-après: la caisse) a rejeté la demande. En bref, elle a considéré que pour la période courant dès le 1er novembre 2018, les revenus déterminants étaient supérieurs aux dépenses reconnues, en prenant notamment en considération que l'assurée s'était dessaisie sans contrepartie de biens immobiliers au profit de ses deux fils. Le 26 septembre 2019, la caisse a rejeté l'opposition de l'assurée. Dans ses calculs, elle a fixé respectivement à 117'260 fr. (pour 2018) et 107'260 fr. (pour 2019) les montants de la fortune dessaisie, après déduction des dettes hypothécaires, en fonction des informations données par la commission de taxation de la Commune de Chamoson, qui avait estimé la valeur des biens cédés en mars et septembre 2007 à 323'120 fr. et 433'400 fr. Selon la caisse, les immeubles cédés constituaient des acquêts, de sorte que la part de dessaisissement de l'assurée correspondait à la moitié de la valeur des biens.
B.
Statuant le 14 juillet 2021 sur le recours de A.________, le Tribunal cantonal du Valais, Cour des assurances sociales, l'a rejeté.
C.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt cantonal ainsi que la décision de la caisse du 26 septembre 2019.
Considérant en droit :
1.
Le recours en matière de droit public se caractérise comme un recours en réforme (art. 107 al. 2 LTF), de sorte que le recourant doit en principe prendre des conclusions sur le fond. A titre exceptionnel, il est admis que le recourant puisse se limiter à prendre des conclusions cassatoires lorsque le Tribunal fédéral, s'il accueillait le recours, ne serait pas en mesure de statuer lui-même sur le fond (cf. ATF 137 II 313 consid. 1.3; 134 III 379 consid. 1.3). Par ailleurs, les conclusions doivent être interprétées selon le principe de la confiance, à la lumière de la motivation du recours. En l'espèce, il ressort du mémoire de recours que la recourante demande que lui soit reconnu le droit à des prestations complémentaires, en raison d'un excédent de dépenses (et non de revenus) dès l'année 2018. Son recours est donc recevable.
2.
Le recours en matière de droit public peut être formé notamment pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF), que le Tribunal fédéral applique d'office (art. 106 al. 1 LTF), n'étant limité ni par les arguments de la partie recourante, ni par la motivation de l'autorité précédente. Le Tribunal fédéral fonde son raisonnement sur les faits retenus par la juridiction de première instance (art. 105 al. 1 LTF) sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF).
3.
3.1. Le litige porte sur le droit de la recourante à des prestations complémentaires requises par demande du 14 novembre 2018, en particulier sur le montant de la fortune dessaisie en lien avec la cession de biens immobiliers à chacun de ses fils respectivement en mars 1997 et septembre 2007.
3.2. L'arrêt cantonal expose de manière complète les dispositions légales (dans leur teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2020, applicables en l'espèce, compte tenu de la date de la décision sur opposition du 26 septembre 2019 [ATF 130 V 445 consid. 1.2.1]) et les principes jurisprudentiels applicables à la résolution du litige. Il suffit d'y renvoyer.
On rappellera cependant qu'il y a dessaisissement lorsque la personne concernée a renoncé à des éléments de revenu ou de fortune sans obligation juridique et sans avoir reçu en échange une contre-prestation équivalente, ces deux conditions étant alternatives (ATF 140 V 267 consid. 2.2; 134 I 65 consid. 3.2; 131 V 329 consid. 4.4). Aux termes de l'art. 17 de l'ordonnance du 15 janvier 1971 sur les prestations complémentaires à l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité (OPC-AVS/AI; RS 831.301), dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2020, la fortune prise en compte doit être évaluée selon les règles de la législation sur l'impôt cantonal direct du canton du domicile (al. 1). Lorsque des immeubles ne servent pas d'habitation au requérant ou à une personne comprise dans le calcul de la prestation complémentaire, ils seront pris en compte à la valeur vénale (al. 4).
4.
4.1. La recourante ne conteste pas les constatations de la juridiction cantonale selon lesquelles feu C.________, son époux, était inscrit au registre foncier comme propriétaire des deux parcelles objets des libéralités et qu'elle avait cédé sa part dans l'hoirie de son conjoint à ses deux fils, singulièrement à B.________ selon l'acte notarié du 3 mars 1997 et à D.________ selon l'acte notarié du 5 septembre 2007. Elle ne s'en prend pas non plus aux considérations de la juridiction cantonale selon lesquelles pour déterminer le montant de la fortune nette dont elle s'était dessaisie, il convenait de fixer non seulement la quote-part découlant de sa participation à l'hoirie, mais également sa participation à la liquidation du régime matrimonial, laquelle précédait celle de la succession. La recourante s'en prend uniquement à la quotité de la part sur les biens cédés à ses fils, que la juridiction cantonale a fixée à deux tiers au lieu de la moitié retenue par la caisse. Elle se limite cependant à contester la modification de la répartition effectuée par le Tribunal cantonal et retenir dans ses propres calculs la "répartition validée par la caisse (...), soit 1/2", sans faire valoir d'élément concret à l'encontre du raisonnement de la juridiction cantonale.
Toutefois, les considérations cantonales, fondées sur les règles du code civil relatives à la liquidation du régime matrimonial en vigueur jusqu'au 31 décembre 1987 (soit avant l'entrée en vigueur de la modification du Code civil suisse du 5 octobre 1984 [Effets généraux du mariage, régime matrimonial et successions; RO 1986 122]), en fonction de la date du décès de l'époux de la recourante (en 1984), ainsi que sur les règles sur le partage successoral (dont en particulier l'art. 462 ch. 1 CC), reposent sur une application erronée du droit. Les premiers juges ont d'abord correctement tenu compte des (anciennes) règles sur l'union des biens, applicables à défaut de contrat de mariage ou de situation soumise au régime matrimonial extraordinaire (art. 178 aCC, en relation avec l'art. 9a al. 2 des dispositions transitoires du CC). Conformément aux art. 213 et 214 al. 1 aCC, au décès du mari, le bénéfice restant après le prélèvement de ses apports par la femme appartient pour un tiers à celle-ci ou à ses descendants et, pour le surplus, au mari ou à ses héritiers. En revanche, la juridiction cantonale a perdu de vue que selon l'art. 462 al. 1 aCC, qui a été modifié au 1er janvier 1988 (RO 1986 122, p. 143), le conjoint survivant peut réclamer à son choix, si le défunt laisse des descendants, l'usufruit de la moitié ou la propriété du quart de la succession. La part de la recourante à la succession de son époux s'élevait dès lors à un quart au décès de celui-ci, moment de l'ouverture de la succession (art. 537 al. 1 CC; cf. STEINAUER, Le droit des successions, 2e éd. 2015, N 62, 104 et 852 ss). La part de la recourante sur les immeubles cédés à ses fils s'élevait dès lors à 1/2 (1/3 [résultant de la dissolution du régime matrimonial] + [1/4 x 2/3 résultant du partage de la succession]). Par conséquent, c'est bien la quotité d'une demie prise en considération par l'intimée qui se révèle conforme au droit. Ce résultat ne modifie cependant pas l'issue de la cause, comme il ressort des considérations suivantes.
4.2. En tant que la recourante critique ensuite le montant (de 26'000 fr.) pris en considération par la juridiction cantonale à titre de dettes hypothécaires reprises par B.________ en 1997, son argumentation selon laquelle ces dettes correspondraient à la somme de 96'000 fr. (soit la moitié de 192'000 fr.) ne peut pas être suivie. Elle repose en effet exclusivement sur deux "Avis de reprise de dette" établis par le Conservateur du registre foncier de Sion le 26 mars 1997 qu'elle produit pour la première fois devant la Cour de céans. La recourante n'expose pas en quoi la production de ces documents et les allégués y relatifs seraient admissibles au regard des exigences légales en matière de production de preuves nouvelles devant le Tribunal fédéral (art. 99 al. 1 LTF; ATF 143 V 19 consid. 1.2; 133 III 393 consid. 3; cf. aussi arrêt 9C_58/2015 du 11 août 2015 consid. 3.2 in SVR 2015 BVG n° 43 p. 166). Elle n'explique singulièrement pas pourquoi elle n'a pas pu produire en instance cantonale ces pièces établies antérieurement à l'acte attaqué. La seule issue de la procédure précédente - défavorable à l'assurée - ne saurait en tout cas suffire pour admettre des faits ou moyens de preuve nouveaux, qui auraient pu être invoqués à l'époque ("faux nova"). Cela résulte de la portée contraignante pour le Tribunal fédéral des faits établis par la juridiction de première instance (consid. 2 supra; ATF 134 III 625 consid. 2.2; 134 V 223 consid. 2.2.1; arrêt 9C_952/2015 du 2 mai 2016 consid. 1).
4.3. La recourante invoque finalement en vain une violation de l'art. 17c OPC-AVS/AI, selon lequel le montant du dessaisissement en cas d'aliénation correspond à la différence entre la valeur de la prestation et la valeur de la contre-prestation. Cette disposition est entrée en vigueur au 1er janvier 2021 (RO 2020 599) et n'est par conséquent pas applicable en l'occurrence. Au demeurant, contrairement à ce que soutient la recourante, les dettes hypothécaires "en vigueur en mars 1997" ne constituent pas une contre-prestation au sens de la règle d'exécution citée.
5.
Il suit de ce qui précède que le recours est mal fondé.
6.
Au vu des circonstances, il convient de renoncer à percevoir des frais judiciaires (art. 66 al. 1, seconde phrase, LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du Valais, Cour des assurances sociales, et à l'Office fédéral des assurances sociales.
Lucerne, le 23 mars 2022
Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Parrino
La Greffière : Perrenoud