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Ecriture agrandie
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
9C_247/2015  
   
   
 
 
 
Arrêt du 23 juin 2015  
 
IIe Cour de droit social  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux Glanzmann, Présidente, Parrino et Moser-Szeless. 
Greffière : Mme Flury. 
 
Participants à la procédure 
Office de l'assurance-invalidité du canton de Genève, Rue des Gares 12, 1201 Genève, 
recourant, 
 
contre  
 
A.________, représenté par Me Thierry Sticher, avocat, 
intimé. 
 
Objet 
Assurance-invalidité (mesure de réadaptation d'ordre professionnel), 
 
recours contre le jugement de la Cour de justice de 
la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, du 2 mars 2015. 
 
 
Faits :  
 
A.   
A.________, né en 1959, travaillait en qualité de magasinier. Alléguant souffrir d'atteintes aux mains et aux pieds ainsi que d'un oedème généralisé, il a déposé une demande de prestations auprès de l'Office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après: l'office AI) le 3 juillet 2012. 
Se fondant sur l'ensemble des éléments médicaux recueillis, l'office AI a nié le droit de l'assuré à une rente d'invalidité au motif que ce dernier disposait d'une pleine capacité de travail dans une activité adaptée. Il a également rejeté la demande en tant qu'elle portait sur des mesures d'ordre professionnel dès lors que l'intéressé présentait un taux d'invalidité de 10 %, insuffisant pour y donner droit. L'évaluation de l'invalidité se fondait sur un revenu sans invalidité de 62'217 fr., tiré de données statistiques (décision du 17 mars 2014). 
 
B.   
A.________ a recouru contre cette décision auprès de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, concluant préalablement à la mise en oeuvre d'une expertise ainsi que d'une mesure d'observation professionnelle et principalement à l'octroi d'une rente entière ou, subsidiairement, de mesures de reclassement. L'office AI a conclu au rejet du recours. Il retenait toutefois désormais un taux d'invalidité de 11,25 %. Au terme d'un second échange d'écritures, les parties ont maintenu leurs conclusions respectives (déterminations des 30 juillet et 11 août 2014). 
Par jugement du 2 mars 2015, la juridiction cantonale a partiellement admis le recours, annulé la décision litigieuse et renvoyé le dossier à l'office AI pour nouvelle décision au sens des considérants. Elle a arrêté le taux d'invalidité à 22,11 % et par conséquent constaté qu'une rente ne pouvait être allouée, mais qu'une mesure de reclassement pouvait être justifiée. Le calcul du degré d'invalidité reposait sur le dernier salaire effectivement perçu par l'intéressé dans son emploi de magasinier auprès de B.________, à V.________. 
 
C.   
L'administration interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement dont elle requiert l'annulation, concluant à la confirmation de sa décision du 17 mars 2014 dans son résultat, avec les modifications telles qu'elles figurent dans sa réponse au recours. 
A.________ conclut au rejet du recours tandis que l'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
En tant que son dispositif renvoie le dossier à l'administration pour nouvelle décision au sens des considérants, le jugement entrepris doit être qualifié de décision incidente qui ne peut être attaquée qu'aux conditions de l'art. 93 LTF (ATF 133 V 477 consid. 4.2 p. 482). Dans le cas particulier, la juridiction cantonale a constaté que l'intimé présentait un taux d'invalidité de 22,11 % susceptible de lui ouvrir le droit à une mesure de reclassement si les autres conditions du droit à la prestation étaient remplies. Sur ce point, le jugement attaqué contient une instruction impérative destinée à l'autorité inférieure qui ne lui laisse plus aucune latitude de jugement pour la suite de la procédure, de sorte qu'elle devra rendre une décision qui, selon elle, est contraire au droit fédéral. En cela, l'office recourant subit un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF, si bien qu'il y a lieu d'entrer en matière sur son recours (cf. ATF 133 V 477 consid. 5.2 p. 483). 
 
2.   
Saisi d'un recours en matière de droit public (art. 82 ss LTF), le Tribunal fédéral exerce un pouvoir d'examen limité. Il applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF) et statue sur la base des faits retenus par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il peut néanmoins rectifier ou compléter d'office l'état de fait du jugement entrepris si des lacunes ou des erreurs manifestes lui apparaissent aussitôt (art. 105 al. 2 LTF). Il examine en principe seulement les griefs motivés (art. 42 al. 2 LTF) et ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties (art. 107 al. 1 LTF). Le recourant ne peut critiquer la constatation des faits importants pour le sort de l'affaire que si ceux-ci ont été établis en violation du droit ou de façon manifestement inexacte (art. 97 al. 1 LTF). 
 
3.   
Le litige porte sur le droit de l'intimé à des mesures d'ordre professionnel sous forme de reclassement dans une nouvelle profession au sens de l'art. 17 LAI. Compte tenu des critiques émises pas l'office recourant contre le jugement cantonal, il s'agit en particulier d'examiner si les premiers juges ont correctement fixé le taux d'invalidité en considérant que le revenu sans invalidité - pris en compte dans le cadre de la comparaison des revenus - correspondait au dernier salaire effectif de l'assuré et non au salaire statistique résultant de l'Enquête suisse sur la structure des salaires (ESS). Le jugement entrepris expose correctement les dispositions légales et les principes jurisprudentiels indispensables à la résolution de cette question. Il suffit d'y renvoyer. 
 
4.  
 
4.1. Considérant que la capacité de travail de l'intéressé était nulle dans son activité de magasinier mais totale dans une activité adaptée, la juridiction cantonale a procédé à une comparaison des revenus en vue de déterminer le degré d'invalidité. Elle a retenu, au titre de revenu sans invalidité, un montant de 71'890 fr. 09 (70'613 fr. 40 indexé à 2012; cf. questionnaire pour l'employeur) en se fondant sur le salaire que l'intimé aurait réalisé s'il avait continué à travailler auprès de son dernier employeur, à savoir B.________. La comparaison de ce revenu avec le revenu d'invalide fixé à 55'995 fr. (62'217 fr. avec abattement de 10 %) donnait un taux d'invalidité de 22,11 %, insuffisant pour ouvrir le droit à une rente d'invalidité mais suffisant pour éventuellement donner droit à une mesure de reclassement.  
 
4.2. L'office recourant reproche aux premiers juges de s'être fondés sur le salaire effectif pour calculer le taux d'invalidité sans tenir compte du fait que l'assuré avait été licencié pour des raisons indépendantes de son atteinte à la santé. Il soutient en substance que, compte tenu des motifs de licenciement, le salaire effectif ne serait pas représentatif du véritable rendement de l'intéressé.  
 
5.  
 
5.1. Comme le relève l'administration, il ressort de la lettre de licenciement du 27 octobre 2010 résiliant les rapports de travail pour le 31 décembre suivant que l'entreprise B.________ s'est séparée de son employé en raison du manque d'efforts fournis par celui-ci malgré la lettre d'avertissement qui lui était parvenue un mois auparavant. L'employeur n'a pas fait mention d'éventuels problèmes médicaux (questionnaire pour l'employeur). Il apparaît ainsi que l'intimé a perdu son emploi pour des motifs étrangers à l'invalidité, ce que la juridiction cantonale a manqué de constater (supra consid. 2). Cette dernière s'est basée uniquement sur le fait que le dernier salaire était connu et correspondait au revenu que l'assuré était en mesure de réaliser. Ce raisonnement n'est pas fondé dans la mesure où, si le licenciement n'est pas motivé par une raison médicale, on ne peut admettre que l'assuré aurait poursuivi son activité auprès du même employeur. Lorsque la perte d'emploi est due à des motifs étrangers à l'invalidité, le revenu sans invalidité doit en principe être déterminé par des valeurs moyennes (arrêt 9C_212/2015 du 9 juin 2015 consid. 5.4 et les arrêts cités). Il n'était donc pas conforme au droit fédéral de se fonder sur le salaire que l'intéressé aurait réalisé auprès du dernier employeur (arrêt 9C_394/2013 du 27 septembre 2013 consid. 3.4). Les premiers juges ne peuvent dès lors être suivis sur ce point.  
 
5.2. Cela étant, on ne saurait confirmer le raisonnement de l'office recourant, en tant que celui-ci se fonde dans le cas particulier sur les valeurs statistiques de l'ESS pour déterminer le montant du revenu sans invalidité. En effet, il ressort des constatations de la juridiction cantonale et des pièces du dossier que l'assuré a d'une part travaillé pendant de très nombreuses années en tant que magasinier auprès du même employeur et, d'autre part, qu'il a obtenu dans cette activité un salaire nettement supérieur au salaire statistique invoqué par le recourant. Avant d'exercer son activité de magasinier au service de B.________ (de 2008 à 2010), l'assuré avait travaillé de nombreuses années (de 1986 à 2008 selon le certificat de travail du 29 février 2008) au sein de la même entreprise, C.________ SA, en qualité de magasinier. Par ailleurs, au regard des salaires ressortant de l'extrait de compte individuel établi par la Caisse cantonale genevoise de compensation, ses revenus dépassaient ceux résultant de l'ESS pour une activité identique. Ainsi, que l'on prenne le dernier salaire obtenu auprès de B.________ (70'613 fr. 40 en 2010) ou bien auprès de C.________ SA (67'650 fr. en 2007), l'assuré aurait obtenu en 2012 un revenu de près de 72'000 fr., nettement supérieur au salaire de 63'096 fr. invoqué par le recourant.  
Dans ces circonstances, la juridiction cantonale n'a pas violé le droit en fixant le salaire sans invalidité à près de 72'000 fr., au regard des salaires effectivement réalisés par l'assuré dans son unique activité pendant de nombreuses années. Le degré d'invalidité qui résulte de la comparaison des revenus, fixé à 22 %, n'est dès lors pas critiquable. Le recours est mal fondé. 
 
6.   
Vu l'issue du litige, les frais de la procédure sont mis à la charge de l'office recourant (art. 66 al. 1 LTF) qui versera des dépens à l'intimé (art. 68 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de l'office recourant. 
 
3.   
L'office recourant versera à l'intimé la somme de 2400 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, et à l'Office fédéral des assurances sociales. 
 
 
Lucerne, le 23 juin 2015 
Au nom de la IIe Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Glanzmann 
 
La Greffière : Flury