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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
6S.393/2006 /rod 
 
Arrêt du 23 octobre 2006 
Cour de cassation pénale 
 
Composition 
MM. les Juges Schneider, Président, 
Kolly et Zünd. 
Greffière: Mme Kistler. 
 
Parties 
X.________, 
recourant, représenté par Me Michel Bergmann, avocat, 
 
contre 
 
Y.________, 
intimé, 
Procureur général du canton de Genève, 
case postale 3565, 1211 Genève 3. 
 
Objet 
Lésions corporelles par négligence (art. 125 CP); droits de la victime dans la procédure pénale (art. 8 et 9 LAVI), 
 
pourvoi en nullité contre l'arrêt de la Cour de cassation du canton de Genève du 28 juillet 2006. 
 
Faits: 
A. 
Le 15 novembre 2004, Y.________ circulait sur la rue de la Croix-Rouge, à Genève, au volant d'une voiture de livraison. S'étant assoupi, il a franchi la ligne de sécurité et s'est trouvé ainsi roulant sur la même voie que les véhicules venant en sens inverse. Le véhicule de Y.________ a percuté celui de X.________, qui roulait normalement en sens inverse au guidon de son motocycle. 
 
Cette collision frontale a causé à X.________ une fracture ouverte du fémur droit, une fracture ouverte de la rotule droite, une fracture spiroïde longue du tibia droit avec fracture de la malléole externe, et une fracture non déplacée du col fémoral gauche. 
B. 
Par ordonnance du 22 avril 2005, le Procureur général genevois a condamné Y.________ pour lésions corporelles simples par négligence (art. 125 al. 1 CP), conduite d'un véhicule non couvert par l'assurance responsabilité civile (art. 96 ch. 2 al. 1 LCR) et usage abusif de permis ou de plaques (art. 97 ch. 1 al. 1 LCR) à la peine de vingt jours d'emprisonnement avec sursis pendant deux ans et à une amende de 2000 francs. Les droits de la partie civile X.________ ont été réservés. 
 
X.________ a fait opposition le 6 mai 2005 à cette ordonnance de condamnation, faisant valoir que les lésions corporelles qu'il avait subies devaient être qualifiées de graves, et non de simples, et que Y.________ n'avait pas agi par négligence, mais par dol éventuel. 
C. 
Par jugement du 28 mars 2006, le Tribunal de police genevois a déclaré l'opposition irrecevable et a condamné X.________ aux frais. 
 
Par arrêt du 28 juillet 2006, la Cour de cassation du canton de Genève a déclaré irrecevable le pourvoi en nullité formé par X.________. 
D. 
X.________ forme un pourvoi en nullité contre l'arrêt du 28 juillet 2006. Dénonçant une violation de l'art. 8 al. 1 let. b et c LAVI et de l'art. 9 al. 4 LAVI, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué. En outre, il sollicite l'effet suspensif. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
En vertu de l'art. 270 let. e ch. 2 PPF, la victime peut se pourvoir en nullité si elle peut faire valoir une violation des droits que lui accorde la loi fédérale du 4 octobre 1991 sur l'aide aux victimes d'infractions (LAVI, RS 312.5; ATF 122 IV 37 consid. 1a p. 39 s.). En l'espèce, le recourant doit être considéré comme une victime au sens de l'art. 2 al. 1 LAVI, puisqu'il a subi une atteinte directe à son intégrité corporelle du fait de l'accident de la circulation. Il est donc légitimé à se pourvoir en nullité selon l'art. 270 let. e ch. 2 PPF pour se plaindre d'une violation des art. 8 et 9 LAVI, qui accordent à la victime certains droits dans la procédure pénale. 
2. 
Se fondant sur les art. 218C al. 2 et 218E al. 2 CPP/GE, qui dénient le droit à la partie civile de former opposition au prononcé pénal d'une ordonnance de condamnation, la Chambre pénale, puis la Cour de cassation genevoises ont considéré qu'elles ne pouvaient accorder au recourant que la réserve de ses droits civils, déjà accordée par le Procureur genevois, et elles ont dès lors refusé d'entrer en matière sur l'opposition du recourant tendant à la modification de la qualification juridique des faits reprochés à l'intimé. Le recourant reproche aux autorités cantonales d'avoir de la sorte violé les art. 8 al. 1 let. b et c et 9 al. 4 LAVI. Il fonde son argumentation sur l'ATF 130 IV 90
2.1 L'art. 8 al. 1 let. b LAVI prévoit que la victime d'une infraction a le droit de demander qu'un tribunal statue sur le refus d'ouvrir l'action publique ou sur le non-lieu. Dans tous les cas où la procédure ne suit pas son cours jusque devant l'autorité de jugement, la victime peut donc exiger une décision judiciaire. Dès qu'un tribunal a statué, que ce soit en première instance ou sur recours, le droit de la victime prévu à l'art. 8 al. 1 let. b LAVI est épuisé. Cette disposition ne donne aucun droit à un recours devant une deuxième ou une troisième instance judiciaire (FF 1990 II 934; ATF 130 IV 90 consid. 3.2 p. 94). 
 
L'art. 9 al. 4 LAVI habilite les cantons à édicter des dispositions différentes pour la procédure de l'ordonnance pénale en ce qui concerne le traitement des prétentions civiles. Le droit cantonal ne peut cependant exclure le droit de la victime d'obtenir une décision judiciaire, reconnu par l'art. 8 al. 1 let. b LAVI, dans la procédure de l'ordonnance pénale (ATF 130 IV 90 consid. 3.3 p. 95). 
2.2 Dans l'ATF 130 IV 90, auquel se réfère le recourant, un automobiliste avait renversé un piéton, qui avait souffert d'une fracture du pied gauche, ayant entraîné l'amputation de celui-ci, et qui était mort quinze jours plus tard d'un infarctus du myocarde. Le Procureur genevois, qui n'est pas une autorité judiciaire, avait condamné cet automobiliste pour lésions corporelles graves, mais avait ordonné la cessation des poursuites pénales pour le décès du piéton, au motif qu'il n'existait aucun lien de causalité entre le décès et l'accident. Le Tribunal fédéral a considéré que le Procureur genevois avait rendu une ordonnance de condamnation incluant un non-lieu partiel sur la question de l'homicide. Il s'ensuivait que, conformément à l'art. 8 al. 1 let. b LAVI, la femme et les deux filles du piéton avaient droit à ce qu'une autorité judiciaire (en l'espèce le Tribunal de police et la Chambre pénale) se prononce sur la question de l'homicide par négligence et, en particulier, sur le lien de causalité entre l'accident et le décès du piéton. Le droit cantonal ne pouvait priver les victimes de ce droit. 
 
Les principes dégagés dans cet arrêt ne sont cependant d'aucun secours au recourant. Dans l'ATF 130 IV 90, le Procureur genevois avait condamné l'automobiliste pour une partie des faits et ordonné la cessation des poursuites pénales pour le surplus, de sorte que la femme et les deux filles du piéton décédé se trouvaient privées de décision judiciaire sur la question du décès de leur mari et père. En l'espèce, il s'agit d'une question de qualification différente des faits par le Procureur genevois, en ce sens que le Procureur a condamné l'intimé, mais a écarté la qualification juridique des faits proposée par le recourant (lésions corporelles graves par dol éventuel) et lui a substitué une autre qualification (lésions corporelles simples par négligence). Ce cas de figure diffère de celui de l'ordonnance de condamnation incluant un non-lieu partiel (ATF 130 IV 90 consid. 3.2 p. 94). 
 
L'ordonnance de condamnation du Procureur général du 22 avril 2005 ne peut donc être qualifiée de non-lieu partiel, de sorte que le recourant ne peut invoquer l'application de l'art. 8 al. 1 let. b LAVI et exiger qu'un tribunal se prononce sur la question de la gravité des lésions corporelles qu'il a subies. Le fait que le Procureur général a choisi de ne pas ouvrir d'instruction préparatoire et que, partant, l'intimé n'a pas été inculpé ne joue aucune rôle pour l'application de l'art. 8 al. 1 let. b LAVI
2.3 Le recourant revendique en vain l'application de l'art. 8 al. 1 let. c LAVI. Cette disposition prévoit que la victime peut former contre le jugement les mêmes recours que le prévenu, si elle était déjà partie à la procédure auparavant et dans la mesure où cette sentence touche ses prétentions civiles ou peut avoir des effets sur le jugement de ces dernières. Toutefois, l'art. 9 al. 4 LAVI permet aux cantons d'exclure le droit de la victime de se constituer partie civile dans la procédure de l'ordonnance pénale et de recourir contre le jugement rendu à l'encontre de l'auteur (ATF 130 IV 90 consid 3.3. p. 95), possibilité dont le canton de Genève a fait usage aux art. 218C al. 2 et 218E al. 2 CPP/GE. 
3. 
Se plaignant d'une fausse application des art. 122, 123 et 125 CP, le recourant s'en prend à la qualification des lésions corporelles qu'il a subies. 
 
Le pourvoi en nullité au Tribunal fédéral revêt un caractère subsidiaire par rapport aux voies de recours de droit cantonal (art. 268 PPF). Il suppose donc l'épuisement préalable des instances et voies de droit cantonales permettant de faire réexaminer librement l'application du droit fédéral. Il en découle que, si l'autorité cantonale ne peut pas examiner un moyen de droit pour des motifs de procédure cantonale et qu'elle n'entre pas en matière sur le problème de fond, il n'y a pas d'épuisement des instances cantonales sur ce point. Autrement dit, les moyens que l'autorité cantonale a déclarés irrecevables ne peuvent pas être soumis au Tribunal fédéral dans un pourvoi en nullité faute d'épuisement des instances cantonales (ATF 123 IV 42 consid. 2a p. 44 s.). 
 
Comme la Cour cantonale n'est pas entrée en matière sur la qualification des lésions, mais a déclaré le pourvoi irrecevable, les griefs soulevés sur ces questions de fond sont irrecevables faute d'épuisement des instances cantonales. 
4. 
Au vu de ce qui précède, le pourvoi doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
Succombant, le recourant est condamné aux frais (art. 278 al. 1 PPF), 
 
Il n'y a pas lieu d'allouer d'indemnité à l'intimé qui n'a pas déposé de mémoire dans la procédure devant le Tribunal fédéral. 
Vu l'issue du pourvoi, la requête d'effet suspensif devient sans objet. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le pourvoi est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
2. 
Un émolument judiciaire de 2000 francs est mis à la charge du recourant. 
3. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, à l'intimé, au Procureur général du canton de Genève et à la Cour de cassation genevoise. 
Lausanne, le 23 octobre 2006 
Au nom de la Cour de cassation pénale 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: La greffière: