Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet. Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
Zurück zur Einstiegsseite Drucken
Grössere Schrift
 
{T 1/2} 
1P.440/2001/dxc 
 
Arrêt du 24 janvier 2002 
Ire Cour de droit public 
 
Les juges fédéraux Aemisegger, président de la cour et vice-président du Tribunal fédéral, 
Aeschlimann, Pont Veuthey, juge suppléante, 
greffier Thélin. 
 
SI Samuel Vogel Sisami SA, 1091 Grandvaux, représentée par Me Jacques Ballenegger, avocat, 10, rue Beau-Séjour, case postale 2860, 1002 Lausanne, recourante, 
 
contre 
 
Robert Bettex, ch. de Lallex 20, 1091 Grandvaux, 
intimé; 
Municipalité de Grandvaux, 1091 Grandvaux, 
Département des infrastructures du canton de Vaud, place de la Riponne 10, 1014 Lausanne Adm cant VD, 
Tribunal administratif du canton de Vaud, avenue Eugène-Rambert 15, 1014 Lausanne Adm cant VD. 
 
recevabilité du recours au Tribunal administratif 
 
(recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de Vaud du 31 mai 2001) 
 
Le Tribunal fédéral considère en fait et en droit: 
1. 
La société immobilière Samuel Vogel Sisami SA est propriétaire de la parcelle n° 630 du registre foncier de la commune de Grandvaux, située en dehors de la zone à bâtir, sur laquelle se trouve un bâtiment d'exploitation viticole. 
 
En mars 1997, la société a obtenu l'autorisation de réaliser un agrandissement de ce bâtiment. Les travaux qu'elle a entrepris excédaient l'intervention autorisée, de sorte qu'elle a dû, en octobre 1999, soumettre son projet à une enquête publique complémentaire; elle s'est alors heurtée à l'opposition d'un propriétaire voisin, Robert Bettex. Le Département des infrastructures du canton de Vaud a refusé l'autorisation spéciale cantonale nécessaire pour les constructions hors de la zone à bâtir; simultanément, il a ordonné la suppression d'un local que la propriétaire avait déjà aménagé. Cette décision, datée du 12 avril 2000, a été notifiée à la société propriétaire le 3 mai suivant, par l'intermédiaire de la Municipalité de Grandvaux. La décision indiquait qu'un recours pouvait être exercé devant le Tribunal administratif cantonal. 
 
Entre-temps, la société avait écrit au Chef du Département des infrastructures pour se plaindre des difficultés administratives de cette affaire. Le 18 mai 2000, elle a adressé une nouvelle lettre au même magistrat, dans laquelle elle faisait d'abord état, longuement, du développement de ses activités et du besoin de créer des locaux supplémentaires sur la parcelle n° 630, du fait que la Municipalité soutenait sans réserve le projet, du profond attachement des exploitants à la région de Lavaux et à sa protection, de leur engagement civique au sein des institutions et associations locales, et des motivations exclusivement politiques de l'opposant. Elle demandait ensuite une intervention en faveur de son projet, dans les termes suivants: 
Monsieur le Conseiller d'Etat, nous avons pu apprécier au travers de la presse votre art de la négociation dans le très long conflit de Lutry et les anciennes caves Bujard, qui grâce à vous a finalement trouvé un épilogue positif. Nous aimerions ici aussi faire appel à votre sens des responsabilités civiques et politiques pour venir nous aider à trouver une solution à ce conflit politique stérile dont les exploitants de notre domaine sont les victimes. Comment peut-on soutenir une telle mesquinerie et volonté de destruction alors que le secteur viticole a besoin de dynamisme et d'encouragement ? 
 
Pouvons-nous espérer que notre appel au secours vous convaincra de vous déplacer personnellement sur le site en question, afin de vous faire une opinion de ce faux drame soulevé par un citoyen aigri. Devons-nous, dans le cadre de ces mêmes raisonnements qui tendent à l'absurde, murer le parking de Rivaz, une réussite illégale mais combien convaincante. 
2. 
Ayant mandaté un avocat, la société a présenté, le 31 mai 2000, une demande de nouvel examen des questions réglées par la décision du 12 avril 2000; subsidiairement, si le Département n'entrait pas en matière, elle demandait que sa propre lettre du 18 mai suivant fût considérée comme un recours dirigé contre cette décision. Ayant reçu une réponse négative, la société a saisi le Tribunal administratif; elle a soutenu, notamment, que la lettre précitée aurait dû être considérée comme un recours, et être transmise d'office à la juridiction compétente. 
 
Le Tribunal administratif a statué par arrêt du 31 mai 2001. Il a retenu, en bref, que la volonté de recourir contre la décision du 12 avril 2000 n'avait été manifestée, pour la première fois, que dans la requête formulée avec le concours de l'avocat, le 31 mai 2000, alors que le délai légal de vingt jours était échu; il a déclaré le recours irrecevable dans la mesure où il était dirigé contre ladite décision. Il a rejeté le recours dans la mesure où celui-ci tendait à ce que le Département fût contraint de réexaminer l'affaire et prendre une nouvelle décision. 
3. 
Agissant par la voie du recours de droit public, Samuel Vogel Sisami SA requiert le Tribunal fédéral d'annuler ce prononcé. Elle se plaint d'une application arbitraire du droit cantonal de procédure, constitutive d'un déni de justice formel, en tant que la lettre du 18 mai 2000 n'a pas été traitée comme un acte de recours valable. Elle n'élève aucun grief contre le refus d'un réexamen de l'affaire, de sorte que ce point n'est plus litigieux. 
 
Invités à répondre, le Tribunal administratif et le Département des infrastructures proposent le rejet du recours. La Municipalité de Grandvaux et l'intimé Bettex ont renoncé à déposer des observations. 
4. 
Une décision de refus d'entrer en matière, prise par l'autorité cantonale de dernière instance, ou une décision de cette autorité confirmant un tel refus, peut faire l'objet d'un recours de droit administratif au Tribunal fédéral même lorsqu'elle est fondée sur le droit cantonal de procédure, dans les cas où l'autorité, si elle avait statué sur le fond, aurait dû appliquer le droit administratif fédéral (ATF 125 II 10 consid. 2a p. 13, 123 II 231 consid. 2 in fine p. 234, 121 II 190 consid. 3a p. 192). Cette situation est réalisée en l'espèce, où les travaux entrepris par la recourante sont soumis aux art. 24 et suivants de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (cf. ATF 116 Ib 8). Le recours de droit public est ainsi irrecevable (art. 84 al. 2 OJ), et les griefs de la recourante doivent être examinés dans le cadre des règles applicables au recours de droit administratif. 
 
Celui-ci peut être formé pour violation du droit fédéral, y compris les droits constitutionnels (art. 104 let. a OJ; ATF 125 II 1 consid. 2a p. 5, 124 V 90 consid. 3 p. 92, 121 II 235 consid. 1 p. 237/238). En l'occurrence, seul l'art. 9 Cst. est en cause; le Tribunal fédéral doit contrôler, sous l'angle de l'arbitraire, l'application des règles cantonales sur le recours au Tribunal administratif. 
5. 
Selon la loi vaudoise sur la juridiction et la procédure administratives (LJPA), du 18 décembre 1989, le recours s'exerce par écrit, dans un délai de vingt jours dès la communication de la décision attaquée (art. 31 al. 1). L'acte est adressé à l'autorité compétente; s'il est mal adressé, il est transmis sans délai à cette autorité (art. 31 al. 4). L'acte doit satisfaire à diverses exigences relatives à la forme, au contenu et aux annexes (art. 31 al. 2 et 3); si elles ne sont pas satisfaites, l'auteur est invité à réparer l'irrégularité dans un délai qui lui est fixé (art. 35 al. 1). 
 
Il faut ainsi examiner s'il s'imposait d'interpréter la lettre du 18 mai 2000 comme un acte de recours au sens de l'art. 31 al. 1 et 4 LJPA. Dans l'affirmative, le Tribunal administratif aurait dû se tenir pour valablement saisi, et inviter la recourante à remédier aux éventuelles insuffisances de l'acte, conformément à l'art. 35 al. 1 LJPA, alors même que ce document ne lui avait été transmis que tardivement par le Département. 
 
Dans une procédure administrative, de même que dans les relations de droit privé, les déclarations qu'un particulier adresse aux autorités doivent être interprétées selon le principe de la confiance, c'est-à-dire d'après le sens qui peut et doit leur être donné de bonne foi, d'après leur texte et leur contexte, ainsi que d'après toutes les circonstances qui les ont précédées et accompagnées (ATF 126 III 119 consid. 2a p. 120, 125 III 435 consid. 2a/aa p. 436/437; Jean-François Egli, La protection de la bonne foi dans le procès, in Juridiction constitutionnelle et juridiction administrative, Zurich 1992, p. 236/237). 
 
La propriétaire de la parcelle n° 630 a été informée d'emblée, à réception de la décision du 12 avril 2000, de son droit de recourir au Tribunal administratif. Au lieu de soumettre le cas à cette juridiction, elle s'est délibérément adressée au Chef du Département des infrastructures. Les motifs qu'elle a exposés pourraient être ceux d'un recours pour inopportunité; cependant, la suite de sa lettre révèle que l'intervention demandée ne ressortissait pas au pouvoir de décision du magistrat interpellé, et que l'auteur de la lettre - l'administrateur de la société - était conscient de cette situation: il sollicitait une médiation gracieuse, analogue à celle intervenue dans une affaire concernant un plan d'affectation à Lutry, médiation qui avait reçu une large publicité et que le Chef du Département avait accomplie en marge de toute procédure légale, en convainquant certaines des parties de changer d'opinion. Par ailleurs, la propriétaire comparait son propre projet avec un ouvrage réalisé à Rivaz, qu'elle qualifiait elle-même d'illégal. Elle savait donc qu'elle n'avait pas droit à l'intervention demandée, et elle savait également que celle-ci ne pourrait aboutir, le cas échéant, qu'avec l'accord des parties au litige. 
 
Cette démarche était fondamentalement différente de l'exercice d'un recours, où le plaideur se prétend autorisé à requérir une décision contraire à celle qu'il attaque et, ainsi, à imposer son propre point de vue contre celui de l'autorité qui a statué. Dans ces conditions, la lettre du 18 mai 2000 ne devait pas, de bonne foi, être considérée comme un acte de recours au sens des dispositions 
 
cantonales précitées, et le Tribunal administratif n'est en tous cas pas tombé dans l'arbitraire en refusant de se prononcer sur l'affaire en cause. 
6. 
Le recours au Tribunal fédéral se révèle mal fondé, ce qui entraîne son rejet; la partie qui l'a introduit doit acquitter l'émolument judiciaire. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est rejeté. 
2. 
La recourante acquittera un émolument judiciaire de 3'000 fr. 
3. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire de la recourante, à l'intimé, à la Municipalité de Grandvaux, au Département des infrastructures et au Tribunal administratif du canton de Vaud. 
Lausanne, le 24 janvier 2002 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le président: Le greffier: