[AZA 7]
B 43/01 Tn
IIIe Chambre
MM. les juges Schön, Président, Spira et Ursprung.
Greffier: M. Berthoud
Arrêt du 24 septembre 2001
dans la cause
M.________, recourant, représenté par Maître Jean-Marie Agier, avocat, FSIH, Place du Grand-Saint-Jean 1, 1003 Lausanne,
contre
Les Retraites Populaires, Rue Caroline 11, 1003 Lausanne, intimée,
et
Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne
A.- M.________ a travaillé en qualité de bûcheron à partir du 1er mars 1986. Dans sa demande d'affiliation aux Retraites Populaires, datée du 7 avril 1986, l'employeur a indiqué que le salaire AVS déterminant du travailleur s'élèverait probablement à 20 000 fr. en 1986. Le prénommé a été affilié à cette institution de prévoyance avec effet rétroactif à la date de son engagement. Durant la période s'étendant du 31 juillet 1986 au 30 juillet 1987, l'assuré a été rémunéré à l'heure et son salaire effectif s'est élevé à 42 653 fr. 35.
Le 31 juillet 1987, M.________ a été victime d'un accident de travail, à la suite duquel il a bénéficié de rentes de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA) et de l'assurance-invalidité.
Par lettre du 14 novembre 1997, M.________ a demandé aux Retraites Populaires d'examiner son droit à une rente d'invalidité pour ses enfants et lui-même. L'institution de prévoyance lui a répondu, le 2 juillet 1998, qu'elle lui verserait une rente annuelle viagère d'invalidité de 901 fr. 20, ainsi que des rentes de 180 fr. pour chacun de ses enfants, ces prestations étant adaptées à l'évolution des prix. Elle a précisé, dans une écriture du 22 juillet suivant, qu'elle avait fixé à 2720 fr. le montant du dernier salaire coordonné annuel en vigueur au début de l'incapacité de travail. Le 31 juillet 1998, M.________ a fait savoir à l'institution de prévoyance que la CNA s'était basée sur un salaire assuré de 42 653 fr. pour arrêter le montant de sa rente; comme la déduction de coordination était en 1987 de 17 280 fr., il parvenait de son côté à un salaire annuel assuré de 25 373 fr. (42 653 - 17 820).
B.- Se prévalant du fait que le salaire retenu par la CNA s'élevait en 1987 à 42 653 fr., M.________ a saisi entre-temps le Tribunal des assurances du canton de Vaud, le 1er juillet 1998, en concluant à ce que les Retraites Populaires fussent condamnées à lui payer une rente d'invalidité d'un montant à dire de justice, avec intérêts moratoires à 5 % l'an. Dans une seconde écriture du 7 septembre 1998, il a modifié ses conclusions en ce sens qu'un salaire coordonné annuel de 25 373 fr. soit pris en compte dans le calcul des rentes d'invalidité, au lieu du salaire de 2720 fr. retenu par l'institution du prévoyance.
Cette dernière a conclu au rejet de la demande, motifs pris notamment que l'activité et la rétribution du demandeur étaient irrégulières et que le salaire de 20 000 fr., sur la base duquel les cotisations avaient été payées, constituait un montant forfaitaire.
La juridiction cantonale a arrêté le salaire déterminant de l'assuré à 20 000 fr. Par jugement du 19 février 2001, elle a rejeté la demande.
C.- M.________ interjette recours de droit administratif contre ce jugement dont il demande l'annulation, avec suite de dépens. Il conclut à ce que le dossier soit renvoyé au Tribunal des assurances du canton de Vaud, afin qu'il fixe le montant des rentes d'invalidité sur la base d'un salaire coordonné de 25 373 fr. pendant la dernière année d'assurance.
Les Retraites Populaires concluent au rejet du recours.
L'Office fédéral des assurances sociales en propose l'admission.
Considérant en droit :
1.- Le litige porte sur le montant du salaire coordonné annuel du recourant au début de l'incapacité de travail.
2.- Pour fixer le salaire coordonné, l'art. 7 al. 2 LPP dispose qu'il convient de prendre en considération le salaire déterminant au sens de l'AVS.
Le Conseil fédéral a admis, dans le cadre de ses compétences, des dérogations à ce principe, en édictant l'art. 3 OPP 2. La jurisprudence rendue au sujet de cette disposition réglementaire a précisé que l'institution de prévoyance doit établir un décompte détaillé si elle ne se fonde pas sur le salaire annuel déterminant pour calculer le salaire coordonné (RSAS 1998 p. 150 consid. 3 et 4). Par ailleurs, lorsqu'elle détermine le salaire coordonné, l'institution de prévoyance doit tenir compte des modifications déjà convenues ou connues à ce moment (RSAS 1998 pp. 146-147 consid. 3). En outre, dans un jugement du 16 juillet 1993, publié in RSAS 1996 p. 67, le Tribunal des assurances du canton de Zurich a considéré que l'assuré qui parvient à établir que l'employeur a déclaré à l'institution de prévoyance un salaire AVS inexact peut en demander la rectification après coup.
3.- En l'occurrence, les faits de la cause n'ont pas été établis de manière suffisante, en violation de l'art. 73 al. 2 LPP qui soumet le procès à la maxime inquisitoire (ATF 115 V 113 consid. 3d/bb). C'est ainsi que les premiers juges ont considéré comme un fait constant que le recourant occupait une activité irrégulière au sens de l'art. 3 al. 1 let. c OPP 2 et du ch. 2 du règlement d'application de novembre 1984 (voir le dernier alinéa du consid. 3 du jugement attaqué, p. 9). Pourtant, comme le recourant le fait observer à juste titre dans un premier moyen, ce n'est pas du tout ce qui ressort du dossier de la CNA. En effet, à la lecture du relevé des rémunérations qu'il a perçues mensuellement de juillet 1986 à juillet 1987 et des déclarations verbalisées de son employeur du 30 janvier 1989, il faut bien plutôt admettre que le recourant exerçait une activité régulière.
Par ailleurs, on ne comprend pas non plus comment le salaire forfaitaire de 20 000 fr. par an a été déterminé, faute d'indication à ce sujet dans le dossier. Certes, ce montant correspond à celui qui figure sur la demande d'affiliation du 7 avril 1986, mais il manque à l'évidence de plausibilité (cf. ATF 115 V 94), comme le relève avec raison l'OFAS dans son préavis en se référant à l'extrait du livre de paie concernant le recourant. De surcroît, les premiers juges n'ont pas exposé les motifs pour lesquels ils se sont écartés du salaire annuel de 42 653 fr. jadis retenu par la CNA, alors qu'ils l'avaient dûment retenu dans un précédent jugement du 30 mars 1992 (AA 15/90 - 21/1992).
4.- Dans un second moyen, le recourant remet en question la compatibilité du règlement de l'intimée avec l'art. 24 al. 3 LPP et l'art. 3 al. 1 let. c OPP 2, dès lors qu'il autoriserait l'institution de prévoyance à prendre en compte, pour le calcul de la rente, un salaire coordonné fictif inférieur au salaire réel.
Cette question peut toutefois rester indécise, dans la mesure où elle ne pourra être examinée que lorsque les premiers juges auront déterminé si c'est à juste titre que l'intimée a fait application, en l'occurrence, de ce règlement, en se fondant sur l'art. 3 al. 1 let. c OPP 2. Mais cela nécessite une instruction complémentaire et donc un renvoi de la cause au Tribunal des assurances du canton de Vaud.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances
prononce :
I. Le recours est admis et le jugement du Tribunal des
assurances du canton de Vaud du 19 février 2001 est
annulé, la cause étant renvoyée à cette autorité pour
instruction complémentaire et nouveau jugement au sens
des motifs.
II. Il n'est pas perçu de frais de justice.
III. L'intimée versera au recourant la somme de 2500 fr. à titre de dépens (y compris la taxe à la valeur ajoutée) pour l'instance fédérale.
IV. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des assurances du canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales.
Lucerne, le 24 septembre 2001
Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIIe Chambre :
Le Greffier :