Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
6B_148/2022
Arrêt du 24 octobre 2022
Cour de droit pénal
Composition
Mme et MM. les Juges fédéraux
Denys, Juge présidant, Muschietti et van de Graaf.
Greffière : Mme Paquier-Boinay.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Alec Reymond, avocat,
recourant,
contre
1. Ministère public de la République et canton de Genève,
route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy,
2. B.________ SA,
3. C.________,
représentée par Me Eric Hess, avocat,
4. D.________,
représentée par Me Marc Hassberger, avocat,
intimés.
Objet
Ordonnances de non-entrée en matière,
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale
de recours, du 9 décembre 2021 (P/13745/2021 et P/17612/2020 ACPR/859/2021 et ACPR/860/2021).
Faits :
A.
Par ordonnances du 18 août 2021 (P/13745/2021) et du 27 août 2021 (P/17612/2020), le Ministère public genevois a décidé de ne pas entrer en matière sur les faits visés par la plainte pénale déposée le 24 mars 2020 par A.________ à l'encontre de B.________ SA (ci-après: B.________) ainsi que C.________ et D.________, qui a fait l'objet de deux procédures séparées sous les références P/13745/2021 concernant B.________ respectivement P/17612/2020 s'agissant de C.________ et D.________.
B.
Par arrêt du 9 décembre 2021, la Chambre pénale de recours de la Cour de justice genevoise a rejeté les recours formés par A.________ contre les ordonnances du ministère public, recours qu'elle avait préalablement joints.
C.
Les faits à l'origine de la procédure sont en substance les suivants.
Depuis le 1er novembre 2013, A.________ est titulaire d'une relation bancaire auprès de B.________ à U.________. Les fonds qu'il détient sur cette relation étaient auparavant déposés, depuis 1980, auprès d'un autre établissement qui a été repris par B.________ en octobre 2013.
Le 25 février 2004, A.________ a octroyé à la société " E.________ SA ", aujourd'hui en liquidation et dont le directeur était F.A.________, une procuration de gestion selon laquelle E.________ pouvait procéder à diverses opérations financières sur les avoirs gérés, mais pas à des transferts bancaires ou à des retraits en espèces. Le 28 septembre suivant, A.________ a confié à E.________ un mandat de conseil en placement, aux termes duquel il l'autorisait à procéder sur ses avoirs à diverses opérations financières, dont certaines présentant un risque élevé, ce qu'il reconnaissait et acceptait.
Les employées chargées de la relation d'affaires de F.A.________ au sein de B.________ ont été C.________, de 2013 à juin 2016, et D.________, de juin 2016 à 2017.
Le 19 février 2019, G.A.________, épouse de F.A.________ et administratrice d'E.________, a informé A.________ que son mari avait commis des opérations frauduleuses sur ses avoirs. Le même jour, celui-ci s'est dénoncé pour avoir détourné des fonds au préjudice de plusieurs clients d'E.________, dont A.________.
A.________ a déposé plainte pénale le 21 mars 2019 contre F.A.________, qui a fait l'objet d'une procédure séparée, dans le cadre de laquelle il a admis avoir effectué des transferts et un retrait d'espèces au débit du compte d'A.________ sans son autorisation, en copiant-collant sa signature depuis un autre document et en fournissant à B.________ de fausses explications ainsi que de faux justificatifs; il avait aussi demandé à un tiers qui lui était redevable de se faire passer pour A.________ lors des rappels téléphoniques (" call back ") de la banque et avait transmis à B.________ le numéro de ce tiers, qui ne figurait pas sur les documents d'ouverture.
Le 24 mars 2020, A.________ a déposé une plainte pénale complémentaire contre B.________, C.________ et D.________ pour blanchiment d'argent. Il a expliqué que les avoirs confiés à E.________ étaient exclusivement destinés à l'héritage futur de ses enfants, qu'il avait opté pour un profil de gestion conservateur et qu'entre 2013 et 2019 ses avoirs étaient passés de USD 5'415'339 à USD 3'303, baisse drastique qui s'expliquait principalement par des transferts indus en faveur de tiers. Sous réserve de quelques instructions générales initiales pour des investissements dans des produits financiers et d'un transfert de USD 697'045 depuis son compte personnel auprès d'une autre banque, il n'avait jamais donné d'instruction directe à B.________ ni demandé à E.________ ou à F.A.________ de procéder à des transferts au débit de ses comptes. Au total, il avait pu identifier 26 opérations litigieuses effectuées entre mars 2014 et novembre 2017 pour un montant total de USD 4'211'372.
D.
A.________ forme un recours en matière pénale contre l'arrêt de la cour de justice. Il conclut, avec suite de frais et dépens, principalement à l'annulation de l'arrêt attaqué ainsi que des ordonnances de non-entrée en matière et au renvoi de la cause au ministère public pour qu'il ouvre une instruction; à titre subsidiaire, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour qu'elle statue à nouveau.
Considérant en droit :
1.
1.1. Selon l'art. 81 al. 1 let. a et b ch. 5 LTF, la partie plaignante qui a participé à la procédure de dernière instance cantonale est habilitée à recourir au Tribunal fédéral, si la décision attaquée peut avoir des effets sur le jugement de ses prétentions civiles. Constituent de telles prétentions celles qui sont fondées sur le droit civil et doivent en conséquence être déduites ordinairement devant les tribunaux civils. Il s'agit principalement des prétentions en réparation du dommage et du tort moral au sens des art. 41 ss CO.
En vertu de l'art. 42 al. 1 LTF, il incombe à la partie recourante d'alléguer les faits qu'elle considère comme propres à fonder sa qualité pour recourir. Lorsque le recours est, comme en l'espèce, dirigé contre une décision de non-entrée en matière ou de classement de l'action pénale, la partie plaignante n'a pas nécessairement déjà pris des conclusions civiles. Quand bien même la partie plaignante aurait déjà déclaré des conclusions civiles (cf. art. 119 al. 2 let. b CPP), il n'en reste pas moins que le procureur qui refuse d'entrer en matière ou prononce un classement n'a pas à statuer sur l'aspect civil (cf. art. 320 al. 3 CPP). Dans tous les cas, il incombe par conséquent à la partie plaignante d'expliquer dans son mémoire au Tribunal fédéral quelles prétentions civiles elle entend faire valoir contre l'intimé. Comme il n'appartient pas à la partie plaignante de se substituer au ministère public ou d'assouvir une soif de vengeance, la jurisprudence entend se montrer restrictive et stricte, de sorte que le Tribunal fédéral n'entre en matière que s'il ressort de façon suffisamment précise de la motivation du recours que les conditions précitées sont réalisées, à moins que l'on puisse le déduire directement et sans ambiguïté compte tenu notamment de la nature de l'infraction alléguée (ATF 141 IV 1 consid. 1.1).
1.2. Le recourant expose qu'il entend faire valoir à l'encontre des trois intimées des prétentions civiles à hauteur de 4'211'214 fr., montant qui correspond au total des transferts indus exécutés au débit de son compte par le tiers gérant. Ce dernier, comme le recourant le précise lui-même, est prévenu de diverses infractions contre le patrimoine dans le cadre d'une procédure séparée. Il appert que c'est en premier lieu à son encontre que le recourant devrait faire valoir ses prétentions civiles. Or, celui-ci n'indique pas quelles prétentions civiles distinctes il pourrait faire valoir à l'encontre des intimées. Il ne fournit aucune explication spécifique concernant ses prétentions individuelles à l'encontre de chaque intimée séparément. Dès lors, il y a lieu d'admettre que la motivation du recours n'est pas suffisante et que le recourant ne dispose pas de la qualité pour recourir sur le fond de la cause en application de l'art. 81 al. let. b ch. 5 LTF.
1.3. Par ailleurs, l'hypothèse visée à l'art. 81 al. 1 let. b ch. 6 LTF n'entre pas en considération, le recourant ne soulevant aucun grief relatif à son droit de porter plainte.
1.4. Indépendamment des conditions posées par l'art. 81 al. 1 LTF, la partie plaignante est habilitée à se plaindre d'une violation de ses droits de partie équivalant à un déni de justice formel, sans toutefois pouvoir faire valoir par ce biais, même indirectement, des moyens qui ne peuvent être séparés du fond (ATF 146 IV 76 consid. 2; 141 IV 1 consid. 1.1). Le Tribunal fédéral n'entre en matière sur les moyens fondés sur la violation de droits fondamentaux que s'ils ont été invoqués et motivés de manière précise (art. 106 al. 2 LTF).
Le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu. Il fait valoir que les employés de B.________ ont été entendus par la police sans qu'il puisse participer à ces auditions et donc poser des questions ou formuler des réquisitions de preuves.
Aux termes de l'art. 147 CPP, les parties ont le droit d'assister à l'administration des preuves par le ministère public et les tribunaux et de poser des questions aux comparants. Cette disposition, qui concerne expressément les auditions par le ministère public et les tribunaux, n'est pas applicable en l'espèce, les interrogatoires menés par la police étant régis par l'art. 159 CPP. Le recourant n'invoque pas cette dernière disposition et ne prétend pas qu'il aurait dûment sollicité la présence de son défenseur à cet interrogatoire, de sorte que son grief est sur ce point irrecevable faute de motivation satisfaisant aux exigences de l'art. 106 al. 2 LTF. Il y a lieu de relever de surcroît que dans la mesure où le recourant se plaint du fait que les procès-verbaux des auditions des employés de banques aient été versés à la procédure instruite séparément contre F.A.________, c'est dans le cadre de cette dernière procédure qu'il pourrait le cas échéant soulever ce moyen.
2.
Le recours est irrecevable.
Vu l'issue de la procédure, le recourant, qui succombe, supportera les frais de justice (art. 64 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est irrecevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève.
Lausanne, le 24 octobre 2022
Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Juge présidant : Denys
La Greffière : Paquier-Boinay