Eidgenössisches Versicherungsgericht
Tribunale federale delle assicurazioni
Tribunal federal d'assicuranzas
Cour des assurances sociales
du Tribunal fédéral
Cause
{T 7}
I 380/05
Arrêt du 25 janvier 2006
IIe Chambre
Composition
Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Lustenberger et Kernen. Greffier : M. Cretton
Parties
E.________, recourant, représenté par la CAP Compagnie d'Assurance de Protection Juridique SA, rue St Martin 26, 1005 Lausanne,
contre
Office AI du canton de Fribourg, impasse de la Colline 1, 1762 Givisiez, intimé
Instance précédente
Cour des assurances sociales du Tribunal administratif du canton de Fribourg, Givisiez
(Jugement du 13 avril 2005)
Faits:
A.
E.________ , né en 1963, travaillait comme maçon pour le compte de «la société X.________ SA». Ayant constaté l'amaigrissement progressif de sa jambe gauche et l'apparition de douleurs au genou, il a consulté divers spécialistes qui l'ont placé en arrêt maladie dès le 1er novembre 2001. Il a requis des prestations de l'assurance-invalidité le 30 janvier 2002.
Au cours de l'instruction du dossier, l'Office de l'assurance-invalidité du canton de Fribourg (ci-après : l'Office AI) a recueilli l'avis du docteur B.________, médecin traitant et interniste FMH. Dans un rapport du 5 février 2002, le praticien a diagnostiqué une hypoamyotrophie sur probables séquelles de poliomyélite entraînant une incapacité totale et définitive de travail dans le métier d'ouvrier. Il estimait toutefois que l'exercice d'une activité adaptée restait exigible. Ses conclusions reposaient sur celles des docteurs R.________, neurologue FMH (examen électromyographique du 5 septembre 2001), S.________, radiologue FMH (imagerie par résonance magnétique du 12 septembre 2001), K.________, service de neurologie de l'hôpital Y.________ (examen électroneuromyographique du 3 octobre 2001), ainsi que A.________ et L.________, clinique de médecine de l'hôpital Q.________ (séjour du 14 au 20 novembre 2001).
Le 16 octobre 2002, l'administration a communiqué à l'assuré un projet de décision lui reconnaissant un taux d'invalidité de 19 % ouvrant droit à des mesures d'ordre professionnel, sous forme d'aide au placement, mais pas à une rente.
Le médecin traitant ayant annoncé une péjoration de l'état de santé de son patient, l'Office AI a mandaté son centre d'observation médicale de Lausanne (ci-après : COMAI), afin qu'il procède à une expertise pluridisciplinaire. Il ressort du rapport rédigé le 22 décembre 2003 par la doctoresse U.________ médecin interniste, ainsi que par les docteurs H.________, neurologue, et D.________, psychiatre, que l'intéressé a subi des examens rhumatologique (docteur de G.________), neurologique (docteurs K.________ et C.________), psychiatrique (docteur D.________) et orthopédique (docteur R.________). Ces examens ont permis de poser les diagnostics d'atteinte sensitivomotrice du système nerveux périphérique du membre inférieur gauche d'origine indéterminée (G 60.9 CIM-10), de syndrome douloureux de la cheville gauche sur arthrose talo-naviculaire (M 02.97 CIM-10), de retard mental léger (F 70 CIM-10) et de syndrome douloureux somatoforme persistant (F 45.4 CIM-10).
Les experts ont retenu une capacité résiduelle de travail de 80 % dans une activité adaptée. Du point de vue neurologique, la symptomatologie de parésie amyotrophiante contre-indiquait tout travail lourd, la position debout prolongée et les déplacements répétés. Sur le plan rhumatologique et orthopédique, le syndrome douloureux et l'arthrose talo-naviculaire justifiaient une incapacité totale pour les travaux de force ou s'effectuant en position debout. Toutefois, ladite capacité était de 100 % dans une activité sédentaire offrant la possibilité d'alterner les positions (assis/debout) et de se reposer régulièrement. Du point de vue psychiatrique, le syndrome douloureux somatoforme persistant ne possédait pas un caractère invalidant. Seul le retard mental léger risquait de rendre le reclassement professionnel difficile.
Par décision du 13 janvier 2004, confirmée sur opposition le 26 mai suivant, l'administration a octroyé à l'assuré des mesures d'ordre professionnel, sous forme d'aide au placement, mais lui a dénié le droit à la rente.
B.
E.________ a déféré la décision sur opposition à la Cour des assurances sociales du Tribunal administratif du canton de Fribourg qui l'a débouté par jugement du 13 avril 2005.
C.
L'assuré interjette recours de droit administratif contre ce jugement dont il requiert l'annulation. Il conclut, sous suite de frais et dépens, à l'octroi d'une rente entière dès le 1er novembre 2001. Subsidiairement, il sollicite le renvoi de la cause pour instruction complémentaire (stage dans un centre d'observation professionnelle).
L'Office AI conclut au rejet du recours. L'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.
Après l'échéance du délai de recours, l'intéressé a déposé une lettre, datée du 19 octobre 2005, de son médecin traitant.
Considérant en droit:
1.
1.1 Le litige porte sur le droit du recourant à une rente de l'assurance-invalidité, plus particulièrement sur le degré d'invalidité à la base de cette prestation.
1.2 La loi fédérale du 6 octobre 2000 sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA) et la novelle du 21 mars 2003 (4ème révision de la LAI) sont entrées en vigueur les 1er janvier 2003 et 1er janvier 2004, entraînant de nombreuses modifications légales dans le domaine de l'assurance-invalidité.
Conformément au principe selon lequel les règles applicables sont celles en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 130 V 447 consid. 1.2.1, 127 V 467 consid. 1), la juridiction cantonale devait examiner le droit litigieux à l'aune des dispositions de la LAI en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002 ou au 31 décembre 2003, pour la période courant jusqu'à ces dates, puis à celle de la nouvelle réglementation pour la période postérieure, dès lors que le recourant sollicitait l'octroi d'une rente entière d'invalidité dès le 1er novembre 2001.
1.3 Le jugement entrepris expose toutefois correctement les normes (dans leur version postérieure à l'entrée en vigueur de la LPGA et de la novelle du 21 mars 2003) et la jurisprudence relatives à la notion d'invalidité (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI), à son évaluation chez les assurés actifs (art 16 LPGA), au principe de libre appréciation des preuves, à la valeur probante des rapports médicaux et à la méthode de comparaison des revenus. Il suffit donc d'y renvoyer sur ces point, dès lors que les notions citées n'ont pas été modifiées par l'entrée en vigueur du nouveau droit (cf. ATF 130 V 343).
On précisera que l'art. 28 al. 1 LAI (échelonnement des rentes) n'a pas été modifié en tant qu'il concerne le quart et la demi-rente, mais qu'il permet désormais d'octroyer trois-quarts de rente à celui dont le degré d'invalidité atteint 60 % au moins, alors que le taux ouvrant droit à une rente entière est passé de 66 2/3 % à 70 %.
2.
Le recourant conteste le jugement cantonal en tant qu'il lui reconnaît une pleine capacité de travail dans une activité adaptée.
2.1 En plus d'une minuscule hernie foraminale en L4-L5 ne justifiant pas les plaintes exprimées, les investigations médicales ont mis en évidence que l'intéressé souffrait d'une hypoamyotrophie de la jambe gauche ainsi que d'une arthrose talo-naviculaire entraînant des faiblesses et des douleurs. Aucune pathologie psychiatrique n'a été décelée dans le registre dépressif, anxieux ou psychotique.
Dans leur appréciation du cas, les experts n'ont retenu que les travaux lourds, de force ou s'effectuant en position debout, les déplacements répétés et la station debout prolongée comme limitations fonctionnelles pouvant interférer avec l'exercice d'une profession. C'est pourquoi, ils jugeaient le recourant apte à mettre en valeur sa capacité résiduelle de travail dans une activité sédentaire offrant la possibilité d'alterner les positions (assis/debout) et de se reposer régulièrement; aucune restriction temporelle n'apparaissait dans les rapports spécifiques établis par chaque expert.
Tenant compte du syndrome douloureux somatoforme persistant et du retard mental léger, qualifiés de non-invalidants, ainsi que du vécu douloureux, de la scolarité incomplète et des faiblesses linguistiques de l'intéressé, les experts ont arrêté la capacité de travail de ce dernier à 80%. Pour sa part, l'administration a estimé que le recourant était apte à travailler à 100 %.
2.2 On relèvera d'abord que dans son évaluation du cas, l'Office intimé a justement écarté des facteurs tels que la scolarité incomplète ou les problèmes linguistiques de l'intéressé constituant des difficultés psychosociales ou socioculturelles dont l'assurance-invalidité n'a pas à répondre (cf. ATF 127 V 299 consid. 5, VSI 2000 p. 155 consid. 3).
La prise en considération de ces facteurs mise à part, il apparaît également que les conclusions des experts rejoignent en presque totalité celles du docteur B.________, notamment lorsque ce dernier rapporte l'aptitude de son patient à pratiquer un autre métier que celui de maçon sans qu'il faille s'attendre à une diminution de rendement. Ce praticien a toutefois annoncé, sans plus ample motivation, une aggravation postérieure de l'état de santé de E.________ l'empêchant désormais d'exercer une quelconque profession. Il a été tenu compte de cette aggravation dans l'expertise du COMAI. Elle en a d'ailleurs motivé la mise en oeuvre et, bien qu'avérée, n'a pas permis de contredire les premières conclusions du médecin traitant. Outre le fait qu'un tel médecin est, selon l'expérience, enclin à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (cf. ATF 125 V 353 consid. 3b/cc), il faut relever que le docteur B.________ n'établit pas de relation entre la péjoration de l'état de santé du recourant, qu'il se contente de rapporter, et une hypothétique diminution de la capacité de travail de ce dernier, au contraire des médecins du COMAI qui excluent, de manière probante (cf. ATF 125 V 351ss), une telle relation, sans qu'il ne soit possible de mettre en doute leur objectivité ou de suspecter une éventuelle prévention à l'égard de l'assuré (cf. ATF 123 V 175; arrêt B. du 26 juillet 2002 [I 19/02]).
L'argumentation de l'intéressé quant à la possibilité d'alterner les positions (assis/debout/couché) ne lui est par ailleurs d'aucune utilité. En effet, cette limitation n'est formulée par les experts que dans la dernière partie de leur rapport sous forme de réponse synthétique à des questions préformulées et standardisées. De surcroît, compte tenu des affections mises en évidence et des limitations afférentes, on ne voit pas ce qui empêcherait le recourant d'exercer une profession sédentaire, d'autant plus qu'au cours de l'expertise, le maintien d'une telle position durant 2 heures n'a pas semblé le gêner outre mesure.
Au regard de ce qui précède, c'est donc à juste titre que les premiers juges ont retenu une pleine capacité de travail dans une activité adaptée.
2.3 Le dossier contenant en outre suffisamment d'indications médicales fiables, il ne se justifie pas de mettre en oeuvre une mesure d'instruction complémentaire sous la forme d'un stage dans un centre d'observation professionnelle de l'assurance-invalidité.
2.4 Pour le surplus, les chiffres retenus par l'Office intimé à titre de revenus sans invalidité et d'invalide n'étant pas contesté, il y a lieu de retenir que les affections dont souffre le recourant n'entraînent pas une diminution de sa capacité de travail dans une mesure telle qu'elle lui ouvrirait droit à une rente (cf. art. 16 LPGA et 28 al. 2 aLAI; ATF 128 V 30 consid. 1, 104 V 136 consid. 2a et 2b). Par ailleurs, le degré d'invalidité obtenu après comparaison des revenus mentionnés (19 %) ne correspond pas non plus à une perte de gain suffisante pour que des mesures d'ordre professionnel, sous forme de reclassement dans une nouvelle profession, soient octroyées (ATF 124 V 110 consid. 2b et les références). Même si la jurisprudence a déjà admis qu'un taux légèrement inférieur à 20 % pouvait ouvrir droit à une telle mesure (cf. par exemple, Arrêt J. du 18 octobre 2001, I 665/99), celle-ci serait selon toute vraisemblance vouée à l'échec eu égard à la capacité d'apprentissage limitée du recourant (ATF 130 V 173 consid. 4.3.3, 124 V 109 sv. consid. 2a et les références). Le recours se révèle ainsi mal fondé.
3.
En instance fédérale, le recourant a déposé une lettre de son médecin traitant après l'échéance du délai de recours. Le Tribunal fédéral des assurances n'admet en principe pas la production de nouvelles pièces dans de telles circonstances, sauf dans le cadre d'un nouvel échange d'écriture. Néanmoins, de tels éléments sont pris en considération lorsqu'ils constituent des faits nouveaux importants ou des preuves concluantes au sens de l'art. 137 let. b OJ et pourraient justifier la révision de l'arrêt du Tribunal (ATF 127 V 357 consid. 4). Tel n'est pas le cas en l'occurrence. En effet, le praticien critique le jugement cantonal en tant qu'il se dilue dans des considérations qui n'ont rien à voir avec l'état de santé de son patient. Cependant, ladite critique est dirigée contre le contenu du rapport d'expertise et constitue une nouvelle théorie sur l'origine des maux dont souffre le recourant. Dans la mesure où l'argumentation porte uniquement sur les causes des affections reconnues et non sur les effets (limitations fonctionnelles engendrées) ayant une incidence sur la capacité de travail (sur le rôle du médecin, cf. ATF 125 V 261 consid. 4, 115 V 134 consid. 2, 114 V 314 consid. 3c, 105 V 158 consid. 1), la pièce en question peut sans autre être écartée.
Le docteur B.________ signale en outre une aggravation de l'atrophie de la jambe gauche. Cette constatation peut également être écartée dans la mesure où elle porte sur des faits postérieurs à la décision litigieuse. En effet, le Tribunal fédéral des assurances apprécie la légalité des décisions attaquées, en règle générale, d'après l'état de fait existant au moment où elles ont été rendues (ATF 121 V 366 consid. 1). Les faits survenus postérieurement et qui ont modifié la situation doivent normalement faire l'objet d'une nouvelle décision administrative (ATF 117 V 293 consid. 4). Les experts ont expressément réservé ce cas de figure.
4.
La procédure est gratuite, dès lors qu'elle porte sur l'octroi ou le refus de prestations d'assurance (art. 134 OJ). Le recourant, qui n'obtient pas gain de cause, ne saurait prétendre à une indemnité de dépens (art. 159 OJ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:
1.
Le recours est rejeté.
2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.
3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la Cour des assurances sociales du Tribunal administratif du canton de Fribourg et à l'Office fédéral des assurances sociales.
Lucerne, le 25 janvier 2006
Au nom du Tribunal fédéral des assurances
La Présidente de la IIe Chambre: Le Greffier: