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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
5A_890/2018  
 
 
Arrêt du 25 février 2019  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Herrmann, Président, 
von Werdt et Bovey. 
Greffière : Mme de Poret Bortolaso. 
 
Participants à la procédure 
Société coopérative d'habitation A.________, représentée par Me Jean-Luc Maradan, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Office fédéral des constructions et de la logistique, Confédération suisse, 
représenté par Mes Christophe Claude Maillard et 
Pierre Bugnon, avocats, 
intimé. 
 
Objet 
fixation des rentes de superficie (arbitrage privé), 
 
recours contre la sentence arbitrale de l'arbitre unique C.________ du 24 septembre 2018. 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. La Confédération suisse a concédé à la Société coopérative d'habitation A.________ (ci-après: SCH A.________) différents droits de superficie sur plusieurs immeubles dont elle est propriétaire à Fribourg (DDP 6523, 10306 et 10307), Grolley (DDP 701 et 765), Hauterive (DDP 670) et Villars-sur-Glâne (DDP 3106 et 4419 et dépendances).  
Par avenant au contrat constitutif d'un droit de superficie du 13 juin 1984 et au contrat d'extension du droit de superficie du 19 octobre 1989 ainsi qu'accord de principe signé les 30 novembre 2015 et 1er décembre 2015, les parties ont décidé de confier à la Chambre suisse des experts à Lausanne une nouvelle fixation de la rente superficiaire relative aux droits de superficie susmentionnés, ce à compter du 1er janvier 2016. 
La Chambre suisse des experts a confié le mandat d'expertise à la société B.________, à Zurich, Genève, Bâle et Lausanne. 
Selon l'avenant précité, la contestation de la rente fixée par l'expert devait être soumise à un Tribunal arbitral composé d'un arbitre unique, à savoir C.________, notaire à Z.________ (art. 1, ch. 8). 
B.________ SA a établi un rapport d'évaluation le 14 mars 2016, fixant le montant total des rentes superficiaires à 933'625 fr. 51 par an. 
 
A.b. SCH A.________ a saisi l'arbitre unique le 31 mars 2016, contestant la rente arrêtée par l'expert, réclamant que dit rapport soit déclaré inutilisable et, principalement, que le Tribunal arbitral établisse le prix des terrains et le taux d'intérêt des rentes de superficie selon certains critères déterminés, subsidiairement, que le dossier soit retourné à la Commission d'experts, à charge pour elle de désigner de nouveaux experts ayant pour tâches de reconsidérer le prix des terrains et le taux d'intérêt des rentes de superficie selon certains critères déterminés.  
Par sentence du 24 septembre 2018, l'arbitre unique a partiellement admis le recours, réduisant les rentes superficiaires au montant total de 605'471 fr. 99 par an, les frais étant répartis par moitié entre les parties et les dépens compensés. 
 
B.   
Agissant par la voie du recours en matière civile au Tribunal fédéral, SCH A.________ (ci-après: la recourante) conclut à l'annulation de la sentence arbitrale du 24 septembre 2018 et, principalement à ce que le taux d'intérêt de la rente soit fixé à 2% en lieu et place du taux de 3,5% retenu par l'expert (recte: l'arbitre); subsidiairement, la recourante demande le renvoi de la cause à l'arbitre pour nouvelle décision au sens des considérants. 
Des déterminations n'ont pas été demandées. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. Dans le domaine de l'arbitrage interne, le recours en matière civile est recevable contre les décisions de tribunaux arbitraux aux conditions prévues aux art. 389 à 395 CPC (art. 77 al. 1 let. b LTF). La procédure est régie par la LTF (art. 389 al. 2 CPC), dont certaines dispositions sont toutefois déclarées inapplicables par l'art. 77 al. 2 LTF. Seuls les griefs invoqués et motivés sont examinés (art. 77 al. 3 LTF).  
Dirigé contre une sentence finale (art. 392 let. a CPC), le recours a été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) par la partie qui a succombé dans ses conclusions (art. 76 al. 1 LTF); la valeur litigieuse est manifestement supérieure à 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF). Le recours en matière civile est dès lors recevable au regard de ces dispositions. 
 
1.2. Voie de droit extraordinaire, le recours en matière civile est ici purement cassatoire (cf. l'art. 77 al. 2 LTF qui exclut l'application de l'art. 107 al. 2 LTF dans la mesure où cette disposition permet au Tribunal fédéral de statuer sur le fond de l'affaire).  
 
2.  
 
2.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits constatés dans la sentence attaquée (cf. art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut rectifier ou compléter d'office les constatations des arbitres, même si les faits ont été établis de manière manifestement inexacte ou en violation du droit (cf. l'art. 77 al. 2 LTF qui exclut l'application de l'art. 105 al. 2 LTF). En revanche, il conserve la faculté de revoir l'état de fait à la base de la sentence attaquée si l'un des griefs mentionnés à l'art. 393 CPC est soulevé à l'encontre dudit état de fait ou que des faits ou des moyens de preuve nouveaux sont exceptionnellement pris en considération dans le cadre de la procédure du recours en matière civile (arrêt 4A_407/2017 du 20 novembre 2017 consid. 1.5 et les références).  
 
2.2. Selon l'art. 393 let. e CPC, la sentence arbitrale peut être attaquée lorsqu'elle est arbitraire dans son résultat parce qu'elle repose sur des constatations manifestement contraires aux faits résultant du dossier ou parce qu'elle constitue une violation manifeste du droit ou de l'équité. Ce motif de recours a été repris de l'art. 36 let. f aCA; la jurisprudence relative à cette ancienne disposition conserve toute sa valeur (arrêt 4A_642/2017 du 12 novembre 2018 consid. 4.1.1 et les références).  
Une constatation de fait est manifestement contraire aux faits résultant du dossier, et partant entraîne un résultat arbitraire, au sens de l'art. 393 let. e, 1ère hypothèse, CPC, lorsque le tribunal arbitral, à la suite d'une inadvertance, s'est mis en contradiction avec les pièces du dossier, soit en perdant de vue certains passages d'une pièce déterminée ou en leur attribuant un autre contenu que celui qu'ils ont réellement, soit en admettant par erreur qu'un fait est établi par une pièce alors que celle-ci ne donne en réalité aucune indication à cet égard. L'objet de ce grief est donc restreint: il ne porte pas sur l'appréciation des preuves et les conclusions qui en sont tirées, mais uniquement sur les constatations de fait manifestement réfutées par des pièces du dossier. La façon dont le tribunal arbitral exerce son pouvoir d'appréciation ne peut pas faire l'objet d'un recours; le grief d'arbitraire est limité aux constatations de fait qui ne dépendent pas d'une appréciation, c'est-à-dire à celles qui sont inconciliables avec des pièces du dossier (ATF 131 I 45 consid. 3.6 et 3.7; arrêts 4A_642/2017 précité ibid.; 4A_407/2017 précité ibid. et les références). 
 
3.   
L'essentiel des critiques de la recourante s'axe sur le taux d'intérêt de la rente (taux d'actualisation), fixé à 3,5 % par l'arbitre. 
 
3.1. L'arbitre a souligné que les prix du terrain étaient en hausse pour diverses raisons (indices, rareté, faibles taux d'intérêts). Un taux de 3% constituerait à son sens un taux bas; l'expert avait retenu un taux de 4%, taux d'ailleurs communément retenu par les auteurs comme taux de référence; le taux de 2% concédé lors de la constitution des droits litigieux constituait vraisemblablement un encouragement à la conclusion de droits de superficie et à la construction de logements pour des loyers corrects. Estimant qu'une pondération était nécessaire, l'arbitre a retenu un taux de 3,5 %, celui-ci permettant un rendement satisfaisant compte tenu de la forte augmentation des valeurs du terrain.  
 
3.2.  
 
3.2.1. La recourante reproche à l'arbitre d'avoir omis différents éléments fondamentaux, ressortant notamment de ses statuts et des contrats de superficie, à savoir: le principe de la couverture des coûts (art. 6 al. 2 du contrat de superficie, respectivement art. 3 al. 1 de son avenant); sa volonté de fournir au personnel de la Confédération " des logements sûrs à des prix favorables, et de les conserver " (art. 2 du contrat de superficie et art. 3 al. 1 des statuts de la recourante); le retour des constructions à la propriétaire du fonds à l'extinction du droit de superficie (art. 8 du contrat de superficie) et la restitution, lors du retour, des avantages pécuniaires touchés par le superficiaire du fait que la Confédération a exigé sur les créances un intérêt inférieur au taux (art. 9 du contrat de superficie). Or ces différents points démontraient que l'objectif poursuivi par les parties lors de la constitution des droits litigieux n'était pas celui de faire du bénéfice, contrairement au taux d'intérêt de 3,5 % finalement retenu par l'arbitre.  
Au contraire de ce qu'affirme la recourante, l'on ne peut sans autre retenir des éléments sus-invoqués l'absence de toute volonté de rendement de la part de la Confédération. La motivation développée par l'intéressée relève bien plutôt d'une appréciation factuelle, inadmissible dans le cadre d'un recours dirigé contre une sentence arbitrale (consid. 2.2 supra). L'on relèvera également que l'art. 6 du contrat de superficie et l'art. 3 al. 2 de son avenant, cités dans un autre contexte par la recourante, prévoient que les parties ont la possibilité de réadapter la rente lorsque les conditions économiques se sont modifiées (valeur du terrain, taux des intérêts, etc.), circonstance qui ne permet pas d'écarter tout objectif de rendement. 
 
3.2.2. La recourante reproche ensuite à l'arbitre de ne pas s'être fondé sur les valeurs ECAB des bâtiments alors que celles-ci permettraient pourtant d'évaluer les bâtiments se trouvant dans la région de Fribourg en fonction de critères objectifs et locaux. En se limitant à invoquer le long processus qu'impliquerait une référence à ces valeurs (à savoir: renvoi du dossier pour une nouvelle expertise) et en privilégiant sa propre appréciation, l'arbitre avait rendu une sentence arbitraire.  
La critique développée par la recourante relève à nouveau d'un élément factuel (valeur d'un immeuble) purement appréciatif, grief qui n'est guère admissible dans le cadre du recours qu'elle adresse au Tribunal de céans (consid. 2.2 supra). L'on soulignera au demeurant que l'expert a procédé à une pondération de la part " terrain " tenant compte de l'état des immeubles, qu'il a lui-même visités. 
 
3.2.3. La recourante reproche enfin à l'arbitre d'avoir arrêté le taux d'intérêt de la rente " à la louche " sans expliquer comment il parvenait au résultat de 3,5 %, écartant les pièces du dossier qui indiquaient clairement les lignes directives permettant de fixer le taux, pour finalement aboutir à un résultat en contradiction notoire avec celles-ci. Le taux bas de 3% avait été arrêté par lui-même, sans justification; il s'écartait de surcroît nettement du taux de 2% prévu dans le contrat constitutif du droit de superficie, alors qu'il ne ressortait nullement qu'il s'agissait d'un taux d'encouragement, pour s'approcher du taux de 4% retenu par l'expert, qui ne tenait aucunement compte de la situation des bâtiments.  
L'on ignore d'abord quelles pièces du dossier permettraient d'arrêter le taux de la rente, la recourante ne les désignant pas. A supposer qu'elle entende se référer aux éléments précédemment invoqués (consid. 3.2.1), sa critique est scellée. 
Ainsi que le relève ensuite elle-même la recourante, le taux arrêté par l'arbitre relève une fois encore de son appréciation, critique irrecevable dans le cadre d'un recours dirigé contre une sentence arbitrale. Aucune violation du droit d'être entendu de la recourante n'est à relever à cet égard dès lors que l'arbitre a précisément expliqué son raisonnement quant à la fixation du taux finalement appliqué. La recourante ne l'invoque d'ailleurs même pas. 
 
3.3. Il n'y a pas lieu d'examiner le recours sous l'angle des conséquences qu'impliqueraient les constatations que l'expert aurait effectuées en contradiction avec les éléments factuels se trouvant au dossier dès lors que cette contradiction n'a nullement été démontrée par l'intéressée.  
 
4.   
En définitive, le recours doit être déclaré irrecevable, aux frais de son auteur (art. 66 al. 1 LTF). Aucune indemnité de dépens n'est allouée à la Confédération suisse dès lors que celle-ci - qui agit en sa qualité de propriétaire foncière et non dans l'exercice de ses attributions officielles - n'a pas été invitée à se déterminer. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est irrecevable. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 10'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à l'arbitre unique C.________. 
 
 
Lausanne, le 25 février 2019 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
La Greffière : de Poret Bortolaso