Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
9C_572/2021
Arrêt du 25 juillet 2022
IIe Cour de droit social
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Parrino, Président,
Stadelmann et Moser-Szeless.
Greffier : M. Cretton.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Yero Diagne, avocat,
recourant,
contre
Fondation 2ème pilier swissstaffing,
p.a. Aon Suisse SA,
avenue Edouard-Dubois 20, 2000 Neuchâtel,
intimée.
Objet
Prévoyance professionnelle (rente d'invalidité),
recours contre le jugement du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 28 septembre 2021
(PP 34/19 - 8/2021).
Faits :
A.
A.________ travaillait par l'intermédiaire d'une société active dans le secteur de l'intérim en qualité de préparateur de commandes depuis le 8 octobre 2014. Il était à ce titre assuré pour la prévoyance professionnelle par la Fondation 2ème pilier swissstaffing (ci-après: swissstaffing). Renversé par une voiture le 30 mars 2015, il a subi diverses atteintes à la santé qui ont entravé l'exercice de son activité habituelle. Son contrat de travail a été résilié pour le 23 octobre 2015. Invoquant des douleurs au dos et au bassin, il a requis des prestations de l'assurance-invalidité le 28 septembre 2015. Constatant au terme de l'instruction de la cause que les séquelles de l'accident s'étaient amendées avant l'issue du délai d'attente d'une année mais que de nouveaux troubles avaient entraîné une incapacité totale et durable de travail dès le mois de mai 2016, l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après: l'office AI) a reconnu le droit de l'assuré à une rente entière à partir du 1er mai 2017 (décisions des 21 mars et 4 avril 2019).
L'intéressé a communiqué les décisions de l'office AI à swissstaffing et lui a demandé de se prononcer sur son droit à une rente d'invalidité de la prévoyance professionnelle, compte tenu de son incapacité totale et ininterrompue de travail depuis le jour de l'accident (courrier du 13 mai 2019). L'institution de prévoyance a informé A.________ qu'elle ne pouvait pas lui accorder des prestations d'invalidité, au motif qu'il n'était déjà plus assuré auprès d'elle lorsque l'incapacité de travail déterminante était survenue (courrier du 21 octobre 2019).
B.
Saisi d'une demande de A.________, qui concluait à l'octroi d'une rente entière d'invalidité de la prévoyance professionnelle depuis le 23 juin 2017 avec intérêts à 5 % l'an dès le jour du dépôt de la demande, le Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des assurances sociales, l'a rejetée (jugement du 28 septembre 2021).
C.
A.________ interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement. Il en demande principalement la réforme, en ce sens que sa demande est admise et swissstaffing condamnée à lui octroyer une rente entière d'invalidité à compter du 23 juin 2017 avec intérêts à 5 % l'an dès le jour du dépôt de la demande. Subsidiairement, il en requiert l'annulation et conclut au renvoi de la cause à la juridiction précédente afin qu'elle procède au sens des considérants.
L'institution de prévoyance conclut au rejet du recours. L'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.
Considérant en droit :
1.
Le recours en matière de droit public (au sens des art. 82 ss LTF) peut être formé pour violation du droit (circonscrit par les art. 95 et 96 LTF ). Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est limité ni par l'argumentation de la partie recourante ni par la motivation de l'autorité précédente. Il statue sur la base des faits établis par cette dernière (art. 105 al. 1 LTF). Cependant, il peut rectifier les faits ou les compléter d'office s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Le recourant ne peut critiquer les faits que s'ils ont été constatés de façon manifestement inexacte ou contraire au droit et si la correction d'un tel vice peut influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).
2.
2.1. Le litige porte en l'occurrence sur le droit du recourant à une rente d'invalidité de la prévoyance professionnelle, en particulier sur le point de savoir si celui-ci était assuré par la fondation intimée au moment de la survenance de l'incapacité de travail dont la cause est à l'origine de l'invalidité au sens de l'art. 23 al. 1 let. a LPP. Etant donné les motifs et les conclusions du recours, il s'agit de déterminer si l'incapacité de travail résultant de la maladie psychique qui a amené l'office AI à reconnaître le droit de l'assuré à une rente d'invalidité a débuté en 2015, comme le soutient ce dernier, ou dès le mois de mai 2016, comme l'a retenu le tribunal cantonal.
Même si les premiers juges n'ont pas fixé la date de la fin des rapports de prévoyance d'une manière claire, les parties ne contestent pas que l'incapacité de travail doit s'être produite encore en 2015 afin d'ouvrir le droit à une rente de la prévoyance professionnelle. Elles ne contestent pas davantage l'absence de force contraignante de la décision de l'office AI, ni le fait que les troubles somatiques ne fondent pas le droit à des prestations de la prévoyance professionnelle.
2.2. L'acte attaqué cite les normes et la jurisprudence indispensables à la résolution du litige, plus particulièrement celles relatives au droit aux prestations (art. 23 al. 1 let. a LPP), à la notion d'"événement assuré" au sens de l'art. 23 LPP (ATF 138 V 409 consid. 6.1-6.3), au caractère contraignant des décisions de l'AI (ATF 144 V 72 consid. 4.1; 133 V 67 consid. 4.3.2; 129 V 150 consid. 2.5), au lien de connexité (matérielle et temporelle) et à l'interruption du lien de connexité temporelle (ATF 138 V 409 consid. 6.2; à cet égard, cf. aussi 144 V 58 consid. 4). Il suffit d'y renvoyer.
3.
La juridiction cantonale a considéré que le recourant n'avait pas droit à une rente d'invalidité de la prévoyance professionnelle dans la mesure où l'incapacité de travail engendrée par le trouble psychique à l'origine de l'invalidité reconnue par l'office AI s'était manifestée pour la première fois durant le mois de mai 2016, soit à une date à laquelle le recourant n'était plus assuré auprès de l'institution de prévoyance intimée. Pour aboutir à cette conclusion, elle s'est d'abord fondée sur un rapport d'expertise du Bureau d'expertises médicales (BEM) de Vevey, que l'office AI avait mandaté pour une expertise bidisciplinaire (rapport du 15 novembre 2017). En substance, elle a considéré que ce rapport était probant en tant - notamment - que les expertes avaient expliqué d'une manière convaincante pourquoi elles excluaient l'influence sur la capacité du recourant à travailler en 2015 des affections (état de stress post-traumatique, épisode dépressif, trouble de la personnalité paranoïaque et syndrome douloureux somatoforme persistant) retenus auparavant par les médecins traitants. Elle a en outre exposé en détail les raisons pour lesquelles elle considérait que, d'une part, l'appréciation du docteur B.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie (rapport du 20 juillet 2018), ne remettait pas en cause les conclusions de l'expertise et que, d'autre part, les différents avis de la doctoresse C.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie (rapports des 21 janvier, 21 décembre 2016 et 13 février 2017), permettaient d'exclure la survenance de l'atteinte à la santé avant la fin des rapports de prévoyance en 2015. Elle a enfin exclu que les observations du docteur D.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie (rapport du 2 août 2018), et la prise en charge initiale du cas par l'assureur-accidents, puis par l'assureur perte de gain en cas de maladie puissent justifier l'existence d'une pathologie incapacitante en 2015 ou fonder le droit à une rente d'invalidité de la prévoyance professionnelle.
4.
4.1. Le recourant considère que son incapacité de travail dont la cause est à l'origine de l'invalidité reconnue par l'office AI remonte au jour de l'accident. Il reproche avant tout au tribunal cantonal d'avoir fondé son jugement sur les conclusions des expertes du BEM et d'avoir ignoré l'avis des ses médecins traitants (en particulier ceux des docteurs (E.________) [recte: F.________] du 12 novembre 2015 et G.________ du 20 novembre 2015, tous deux spécialistes en médecine interne générale, ainsi que ceux déjà mentionnés des docteurs C.________ et B.________), qui faisaient tous état de pathologies psychiques incapacitantes depuis l'accident. Il lui fait également grief d'avoir ignoré le constat de l'office AI, qui faisait aussi remonter l'incapacité de travail au 30 mars 2015. Il estime que ces éléments (notamment), établis en temps réel, ont une valeur probante supérieure à celle du rapport d'expertise et montrent que les premiers juges ont arbitrairement exclu l'existence d'un trouble psychique incapacitant en 2015 déjà. Il conteste plus particulièrement la valeur probante du rapport d'expertise. Il fait valoir à cet égard que les expertes n'ont retenu aucun diagnostic psychiatrique malgré les avis contraires de ses médecins, confirmés par les démarches qui avaient abouti à un placement dans un hôpital psychiatrique à des fins d'assistance. Il en déduit que la juridiction cantonale aurait dû écarter les conclusions partiales et choquantes du BEM. Il soutient encore que d'autres éléments allégués et prouvés mais ignorés par le tribunal cantonal (en particulier le rapport de police de l'accident, le rapport médical initial de l'assureur-accidents, la prise en charge ultérieure de son cas par l'assureur perte de gain en cas de maladie, le rapport initial de l'office AI et son bilan des mesures d'ordre professionnel entreprises) confirment l'existence d'un trouble psychique incapacitant depuis le 30 mars 2015. Il fait finalement grief aux premiers juges d'avoir procédé à une appréciation anticipée des preuves arbitraire en refusant d'ordonner une expertise et d'auditionner son épouse.
4.2.
4.2.1. Cette argumentation est mal fondée. Il s'agit effectivement d'une appréciation personnelle des preuves qui ne démontre pas en quoi celle à laquelle a procédé la juridiction cantonale serait arbitraire.
4.2.2. Ainsi, contrairement à ce que soutient d'abord l'assuré, si elle a fondé son jugement sur le rapport d'expertise, l'autorité judiciaire n'a pas ignoré l'avis des médecins traitants s'étant exprimés auparavant. Comme indiqué (cf. consid. 3 supra), elle a considéré que ledit rapport était convaincant à tout le moins pour ce qui concerne la période antérieure parce que, notamment, les expertes avaient dûment expliqué pourquoi lesdits avis ne pouvaient être suivis (absence des symptômes permettant de retenir ou de confirmer les diagnostics des médecins traitants). Dans ces circonstances, se limiter à invoquer le fait que les docteurs F.________, G.________, C.________ et B.________ ont tous fait état de troubles psychiques incapacitants présents avant la réalisation de l'expertise ne suffit pas pour démontrer que les médecins du BEM se seraient trompés dans leur analyse des diagnostics et, partant, que le rapport d'expertise n'aurait pas de valeur probante ou que le tribunal cantonal aurait arbitrairement suivi les conclusions des expertes quant à la période en cause.
Le recourant ne saurait ensuite tirer argument des décisions de l'office AI des 21 mars et 4 avril 2019, en particulier du fait que cette autorité aurait retenu une incapacité ininterrompue de travail dès le 30 mars 2015. Cette allégation est en effet erronée dès lors que l'office AI a dans un premier temps constaté que les affections résultant de l'accident s'étaient amendées avant l'échéance du délai d'attente d'une année au point de laisser subsister une capacité de travail de 90 % dans l'activité de préparateur de commandes et de 100 % dans une activité adaptée excluant le droit à des prestations, puis dans un second temps que la rente entière d'invalidité allouée depuis le 1er mai 2017 trouvait son fondement dans la survenance d'une nouvelle période d'incapacité de travail qui avait débuté en mai 2016. Dans ce contexte, on ne voit par ailleurs pas en quoi la fin des prestations de l'assureur-accidents pour le 30 novembre 2015 ou l'avis de la doctoresse C.________ attestant une nouvelle incapacité de travail depuis le mois de mai 2016 seraient susceptibles d'établir l'existence d'une incapacité de travail ininterrompue dès le jour de l'accident.
On ajoutera encore que se contenter de rapporter les constatations du docteur B.________, faites de surcroît à une époque postérieure à l'expertise, et d'affirmer que la symptomatologie décrite par ce médecin ne se retrouve pas dans le rapport d'expertise ne saurait suffire pour nier la valeur probante de ce dernier document. Outre le fait que, selon les constatations cantonales, l'expertise repose sur des entretiens d'une durée totale de 4 heures 45 minutes qui n'ont pas permis de déceler la symptomatologie en question, on relèvera que l'argumentation développée n'établit pas que les raisons ayant conduit le tribunal cantonal à écarter l'avis du psychiatre prénommé seraient arbitraires. Peu importe en outre que les conclusions du docteur B.________ soient en adéquation avec d'autres éléments du dossier médical, plus particulièrement ceux établis dans le contexte du placement à des fins d'assistance, dans la mesure où ces éléments concernent des faits qui se sont produits après la fin des rapports de prévoyance et ont été pris en compte dans le cadre de l'octroi de la rente de l'assurance-invalidité à partir du 1er mai 2017.
4.2.3. Le fait que la juridiction cantonale n'aurait pas pris en compte certains éléments factuels ne change rien à ce qui précède dans la mesure où ces éléments ne sont pas pertinents en l'espèce, contrairement à ce que soutient le recourant. Ainsi, que des symptômes de maladies psychiques puissent être décelés dans le rapport de police, que le rapport médical initial adressé à l'assureur-accidents et certains rapports de réadaptation de l'office AI fassent état d'un état de stress post-traumatique ou que l'assureur-accidents et l'assureur perte de gain en cas de maladie ont pris en charge des traitements psychiatriques ne démontre pas que le tribunal cantonal a fait preuve d'arbitraire en suivant les conclusions de l'expertise et en excluant la survenance d'une incapacité de travail déterminante durant la période d'assurance. Ces éléments reposent effectivement en partie sur les déclarations unilatérales de l'assuré ou ont été intégrés dans l'appréciation des médecins du BEM. En se contentant de les évoquer, le recourant ne démontre toujours pas que les expertes se seraient trompées.
4.2.4. Compte tenu de ce qui précède, on ne peut pas davantage faire valablement grief aux premiers juges d'avoir violé le droit d'être entendu de l'assuré ou procédé à une appréciation arbitraire des preuves en renonçant à ordonner une expertise et à auditionner des témoins dans la mesure où ils disposaient de suffisamment d'éléments pertinents, cohérents et convaincants pour se forger une conviction. Le seul fait d'alléguer que la réalisation d'une expertise aurait pu aboutir à une conclusion différente ne suffit pas pour remettre en question le jugement sur ce point.
4.3. Le recourant ayant échoué à établir que la juridiction cantonale avait arbitrairement retenu que l'incapacité de travail dont la cause est à l'origine de l'invalidité (reconnue par l'assurance-invalidité) était survenue alors qu'il était encore assuré par la fondation intimée, son recours doit être rejeté.
5.
Vu l'issue du litige, les frais judiciaires sont mis à la charge de l'assuré (art. 66 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des assurances sociales, et à l'Office fédéral des assurances sociales.
Lucerne, le 25 juillet 2022
Au nom de la IIe Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Parrino
Le Greffier : Cretton