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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_207/2023  
 
 
Arrêt du 25 juillet 2024  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes les Juges fédérales 
Kiss, Juge présidant, Hohl et May Canellas. 
Greffière : Mme Godat Zimmermann. 
 
Participants à la procédure 
A.________ Sàrl, 
représentée par Me Baptiste Allimann, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
B.________ SA, 
c/o Étude Piquerez & Droz, 
représentée par Me Manuel Piquerez, avocat, 
intimée. 
 
Objet 
représentation civile; hypothèque légale des artisans et entrepreneurs, 
 
recours contre l'arrêt rendu le 28 février 2023 par la Cour civile du Tribunal cantonal du canton du Jura (CC 53 / 2022). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. B.________ SA (l'intimée) est une société immobilière. Au début 2019, C.________ en détenait le capital-actions et D.________ en était l'unique administrateur.  
En juillet 2019, E.________ a acquis le capital-actions de B.________ SA; il est depuis lors seul administrateur de la société. 
 
A.b. B.________ SA est propriétaire d'un immeuble sis à (...), à U.________. Dès 2001, elle en a confié la gestion à F.________ SA, qui résiliera le contrat de gérance pour fin décembre 2019.  
 
A.c. Au début 2019, des réparations se sont révélées nécessaires dans cet immeuble, dans lequel résidait l'actionnaire unique de B.________ SA. Une rénovation totale du parking souterrain s'imposait, notamment afin de pouvoir relouer la surface commerciale du bâtiment. Dans ce cadre, l'autorité de surveillance des installations électriques exigeait une remise en état de l'installation électrique existante, ainsi qu'un raccordement adapté au nouveau type de construction (garage muni d'une porte et de barrières électriques, avec un système de ticketing). La décision de rénover le parking a été prise en mars 2019 par la propriétaire (complément d'office sur la base de la décision de première instance).  
F.________ SA a alors contacté A.________ Sàrl (la recourante), entreprise à laquelle, depuis près de vingt ans, elle confiait les travaux d'électricité à effectuer dans l'immeuble propriété de B.________ SA. 
En date du 20 mars 2019, A.________ Sàrl a établi un devis - adressé à la propriétaire par l'intermédiaire de la gérance - portant sur la remise en conformité des installations électriques du parking pour un montant de 29'538 fr. 55. F.________ SA a accepté ce devis oralement. 
Les travaux de rénovation nécessitaient la coopération sur place de plusieurs corps de métier, dont le spécialiste du genre d'installation en cause (G.________), chargé d'établir des plans et de commander l'installation. A.________ Sàrl devait donc composer avec d'autres entreprises, notamment en ce qui concerne le fonctionnement de la porte et des barrières électriques du parking. Pour cette partie-là des travaux d'électricité, intégrée dans les plans de la construction prévue, les prestations et leur prix ont été convenus oralement avec la gérance. 
La gérance a surveillé et coordonné les travaux de rénovation du parking souterrain, qui ont commencé en mai 2019. 
A.________ Sàrl a débuté son activité à ce moment-là. La construction de l'aménagement intérieur du parking a toutefois retardé la remise aux normes de l'installation électrique. Le bon de commande correspondant au devis du 20 mars 2019 a été remis par la gérance le 17 octobre 2019; l'entreprise d'électricité a pu alors reprendre les travaux, qui s'achèveront le 17 décembre 2019. 
Les travaux de rénovation du parking n'ont suscité aucune réclamation. En particulier, les travaux exécutés par A.________ Sàrl ont été contrôlés par l'autorité compétente pour surveiller les installations électriques. Ils ont été acceptés par F.________ SA avant la résiliation du contrat de gérance. 
 
A.d. E.________ n'a pas été informé des travaux de rénovation du parking, qui étaient en cours en juillet 2019, à l'époque où il a acquis le capital-actions de la SA propriétaire de l'immeuble qu'il n'a pas visité.  
 
A.e. A.________ Sàrl a établi à l'attention de B.________ SA trois factures pour un montant total de 41'684 fr. 35, soit :  
 
- une facture du 16 décembre 2019 par 10'796 fr. 35 pour interventions du 2 mai au 12 décembre 2019 concernant la remise en fonction des portes et l'installation de G.________; 
- une facture du 20 décembre 2019 par 30'235 fr. 20 pour interventions du 25 octobre au 17 décembre 2019 concernant la remise en conformité des installations électriques du parking; 
- une facture du 20 décembre 2019 par 652 fr. 80 pour une intervention du 12 décembre 2019 relative à un raccordement au compteur électrique. 
Ces factures, qui n'ont pas été contestées par B.________ SA, sont demeurées impayées. 
 
 
B.  
 
B.a. Le 6 avril 2020, A.________ Sàrl a déposé auprès du Juge civil du Tribunal de première instance du canton du Jura une requête de mesures provisionnelles et superprovisionnelles par laquelle elle demandait l'inscription provisoire d'une hypothèque légale des artisans et entrepreneurs sur l'immeuble propriété de B.________ SA pour le montant de 41'684 fr. 35 plus intérêts à 5 % dès le 12 mars 2020, correspondant aux trois factures de décembre 2019.  
L'inscription provisoire requise a été opérée au registre foncier sur la base d'une ordonnance notifiée le 8 avril 2020 par le Juge civil, statuant sur mesures superprovisionnelles. 
Par décision du 7 décembre 2020 sur mesures provisionnelles, le Juge civil a confirmé l'inscription provisoire de l'hypothèque légale au profit de A.________ Sàrl, à hauteur de 41'684 fr. 35 plus intérêts à 5 % dès le 12 mars 2020; il a imparti à la requérante un délai de trois mois pour ouvrir action en inscription définitive de l'hypothèque légale et dit que l'inscription provisoire deviendrait caduque trente jours après l'entrée en force de la décision de l'autorité judiciaire concernant l'inscription définitive. 
 
B.b. Par demande du 5 mars 2021, A.________ Sàrl a requis de la Juge civile du Tribunal de première instance du canton du Jura l'inscription définitive de l'hypothèque légale.  
Elle a déposé simultanément une requête en conciliation tendant à la condamnation de B.________ SA à lui payer les sommes de 41'684 fr. 35 et de 4'320 fr. 82, avec intérêts. A la suite de l'échec de la conciliation, elle a ouvert action en paiement contre la propriétaire de l'immeuble en date du 24 août 2021. 
Les deux procédures ont été jointes. 
 
B.c. Par décision du 25 mars 2022, la Juge civile a ordonné l'inscription définitive d'une hypothèque légale des artisans et entrepreneurs en faveur de A.________ Sàrl sur l'immeuble précité en garantie d'une créance de 41'684 fr. 35 plus intérêts à 5 % dès le 12 mars 2020; par ailleurs, elle a condamné B.________ SA à payer ce montant avec intérêts à A.________ Sàrl.  
 
 
B.d. Statuant le 28 février 2023 sur appel de B.________ SA, la Cour civile du Tribunal cantonal du canton du Jura a débouté A.________ Sàrl de ses conclusions en paiement et en inscription définitive d'une hypothèque légale des artisans et entrepreneurs sur le bien-fonds propriété de B.________ SA.  
En substance, elle a jugé que B.________ SA (représentée) n'était pas liée par le contrat d'entreprise passé en son nom par F.________ SA (représentante) avec A.________ Sàrl (tiers), en l'absence de pouvoirs de représentation internes de la gérance (art. 32 al. 1 CO) ou d'une attitude de la représentée dont l'entreprise d'électricité aurait pu objectivement déduire l'existence des pouvoirs de la représentante (art. 33 al. 3 CO). 
 
B.e. A.________ Sàrl interjette un recours en matière civile, reprenant à titre principal ses conclusions en inscription définitive d'une hypothèque légale des artisans et entrepreneurs et en paiement du montant de 41'684 fr. 35 plus intérêts à 5 % dès le 12 mars 2020.  
Par ordonnance présidentielle du 17 mai 2023, l'effet suspensif requis par la recourante a été accordé au recours. 
B.________ SA conclut au rejet du recours. 
Pour sa part, la cour cantonale propose de confirmer l'arrêt attaqué. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Les conditions de recevabilité du recours en matière civile sont réalisées sur le principe, notamment en ce qui a trait au respect du délai (art. 46 al. 1 let. a et art. 100 al. 1 LTF) et à la valeur litigieuse minimale (art. 74 al. 1 let. b LTF). 
 
2.  
 
2.1. Le recours en matière civile peut être exercé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF), y compris le droit constitutionnel (ATF 136 I 241 consid. 2.1; 136 II 304 consid. 2.4).  
 
Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Compte tenu de l'obligation de motiver imposée par l'art. 42 al. 2 LTF, il ne traitera toutefois que les questions qui sont soulevées devant lui par les parties, à moins que la violation du droit ne soit manifeste (ATF 140 III 86 consid. 2, 115 consid. 2). Dès lors qu'une question est discutée, il n'est lié ni par les motifs invoqués par les parties, ni par l'argumentation juridique retenue par l'autorité cantonale; il peut donc admettre le recours pour d'autres motifs que ceux invoqués par le recourant, comme il peut le rejeter en procédant à une substitution de motifs (ATF 137 II 313 consid. 1.4; 135 III 397 consid. 1.4 et l'arrêt cité). 
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut rectifier ou compléter les constatations de l'autorité précédente que si elles sont manifestement inexactes ou découlent d'une violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). " Manifestement inexactes " signifie ici " arbitraires " (ATF 143 I 310 consid. 2.2; 141 IV 249 consid. 1.3.1; 140 III 115 consid. 2; 135 III 397 consid. 1.5). Encore faut-il que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).  
Aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF). 
 
3.  
Il n'est pas contesté que la recourante a exécuté des travaux pour un montant de 41'684 fr. 35 dans l'immeuble propriété de l'intimée. Ces travaux sont intervenus dans le cadre de la rénovation totale du parking souterrain et portaient tant sur la remise en état de l'installation électrique existante que sur le raccordement aux nouveaux éléments du garage (porte et barrières électriques; système de ticketing). Ils ont été commandés par la gérance, au nom de la propriétaire, à partir de mars 2019 et se sont déroulés en plusieurs phases entre mai et décembre 2019. 
Le litige tourne autour de la représentation de la SA propriétaire par la gérance. 
 
3.1. Selon l'arrêt attaqué, ces deux parties étaient liées par un contrat de gérance ordinaire, qui n'autorisait pas la gérance à commander les travaux de rénovation ici en cause sans instruction précise de la part de l'intimée.  
A cet égard, la cour cantonale constate tout d'abord que la gérance ne disposait pas de pouvoirs de représentation (internes) exprès pour conclure avec la recourante un contrat d'entreprise au nom de l'intimée; elle a jugé insuffisant le seul témoignage du représentant de la gérance quant à un accord oral de l'administrateur de la SA propriétaire, obtenu avant le début des travaux. L'autorité précédente a également exclu que l'intimée, par son administrateur unique, ait conféré tacitement des pouvoirs de représentation (internes) à la gérance; en particulier, elle a nié toute pertinence à la présence dans l'immeuble en travaux de l'actionnaire unique de la SA propriétaire. 
Après avoir constaté que l'intimée n'avait pas ratifié le décompte final, la Cour civile a jugé ensuite que la SA propriétaire n'avait ni expressément ni tacitement porté à la connaissance de la recourante une procuration (externe) allant au-delà des pouvoirs de représentation effectivement conférés à la gérance, de sorte que la bonne foi de l'entreprise d'électricité n'avait même pas à être examinée. 
L'autorité précédente aboutit ainsi à la conclusion que l'intimée (représentée) n'est pas liée par le contrat conclu en son nom par la gérance (représentante) avec la recourante (tiers). 
 
3.2. La recourante se plaint en vrac de violations des art. 33 al. 3, 37 et 38 al. 2 CO, ainsi que d'un établissement manifestement inexact des faits. Reprenant notamment le témoignage de l'administrateur de la gérance, elle fait valoir que celle-ci disposait du pouvoir de représentation nécessaire et suffisant pour commander les travaux d'électricité en cause. La recourante relève par ailleurs que des travaux dans cet immeuble lui avaient déjà été confiés précédemment et qu'elle a pu constater la surveillance et la coordination de tous les travaux par la gérance sur le chantier de rénovation du parking. A son sens, elle pouvait ainsi de bonne foi admettre que la gérance était autorisée par la propriétaire à lui commander les travaux litigieux. Au demeurant, l'intimée aurait, à tout le moins tacitement et par actes concluants, ratifié les travaux exécutés, en ne manifestant jamais un désaccord avec ceux-ci et en ne contestant pas les factures qui lui ont été adressées. La recourante reproche du reste à la cour cantonale d'avoir omis d'examiner la question de la ratification des travaux eux-mêmes.  
 
4.  
 
4.1. Lorsque, comme en l'espèce, le représentant qui conclut le contrat manifeste agir au nom du représenté, ce dernier est lié dans trois cas: (1) lorsqu'il a conféré les pouvoirs nécessaires au représentant dans leurs rapports internes (procuration interne; art. 32 al. 1 CO) ou, en l'absence de pouvoirs internes conférés au représentant par le représenté, (2) lorsque le tiers pouvait déduire l'existence de tels pouvoirs du comportement du représenté dans leurs rapports externes (procuration externe par apparence ou par tolérance; art. 33 al. 3 CO) ou (3) lorsque le représenté a ratifié le contrat (art. 38 al. 1 CO) (ATF 146 III 37 consid. 7.1 et les arrêts cités).  
Dans une première étape, le juge doit donc rechercher si le représentant a manifesté agir au nom du représenté et s'il avait des pouvoirs de représentation internes (art. 32 al. 1 CO). Ce n'est que s'il arrive à la conclusion que le représentant a agi sans pouvoirs de représentation internes que le juge devra, dans une seconde étape, rechercher si le représenté est contractuellement lié, soit en vertu de l'art. 33 al. 3 CO, soit en vertu de l'art. 38 al. 1 CO
 
4.2. A juste titre, la cour cantonale a commencé par examiner si la gérance (représentante) avait agi en vertu d'une autorisation qui lui avait été donnée par la SA propriétaire (représentée), c'est-à-dire en vertu d'une procuration (interne).  
 
4.2.1. C'est en priorité la volonté réelle et commune du représenté et du représentant qui est déterminante à cet égard; ce n'est que subsidiairement, si la volonté réelle ne peut pas être établie, que l'octroi des pouvoirs doit être examiné selon le principe de la confiance (cf. art. 18 al. 1 CO; ATF 146 III 121 consid. 3.2.1; arrêt 4A_562/2019 du 10 juillet 2020 consid. 5.1.2).  
L'octroi des pouvoirs peut être exprès ou tacite. Selon la jurisprudence, l'octroi de pouvoirs internes tacite au sens de l'art. 32 al. 1 CO découle soit d'une tolérance ( Duldung), soit d'une apparence ( Anschein). Il y a procuration interne par tolérance ( Duldungsvollmacht ou Duldungsbevollmächtigung) lorsque le représenté sait qu'une personne a agi en son nom auprès d'un tiers sans qu'il l'y ait autorisée, mais qu'il ne s'est pas opposé à cet acte de représentation non sollicité. Il y a procuration interne apparente ( Anscheinsvollmacht ou Anscheinsbevollmächtigung) lorsque, d'une part, le représenté ne sait pas qu'une personne a agi comme sa représentante auprès d'un tiers, mais qu'il aurait dû le savoir s'il avait fait preuve de l'attention que les circonstances permettaient d'exiger de lui et que, d'autre part, la représentante pouvait, selon les règles de la bonne foi, interpréter le comportement du représenté comme valant octroi de pouvoirs (ATF 141 III 289 consid. 4.1 et les arrêts cités; arrêt 4A_562/2019 précité consid. 5.1.2).  
 
4.2.2. En l'espèce, sur la base du témoignage de l'administrateur de la gérance et en l'absence de témoignage de l'administrateur de l'époque de la propriétaire, la cour cantonale n'a pas été en mesure d'établir, en fait, une volonté réelle et commune de la représentée et de la représentante d'accorder à celle-ci, en mars 2019, le pouvoir de conclure un contrat d'entreprise avec la recourante pour les travaux électriques liés à la rénovation du parking. Lorsqu'elle se borne à soutenir que les déclarations du représentant de la gérance étaient suffisantes sur ce point, la recourante remet en cause de manière irrecevable les constatations de fait, qui lient le Tribunal fédéral (cf. consid. 2.2. supra).  
L'autorité précédente a ensuite examiné l'octroi des pouvoirs internes selon le principe de la confiance. Elle a estimé qu'aucun élément ne permettait de retenir que la propriétaire aurait autorisé tacitement la gérance à la représenter lors de la commande des travaux litigieux. Selon la décision entreprise, il n'est en particulier pas établi que la propriétaire, par l'un ou l'autre de ses administrateurs successifs, avait connaissance des travaux de rénovation et aurait ainsi passivement toléré que la gérance la représente dans ce cadre; la cour cantonale a jugé non pertinent le fait que l'actionnaire unique (de l'époque) de la SA propriétaire habitait dans l'immeuble au moment où les travaux ont débuté, dès lors que l'actionnaire unique n'avait pas la qualité d'organe et ne représentait pas valablement la société au sens de l'art. 718 al. 1 CO
La cour de céans peut revoir le résultat de cette interprétation objective - qui est une question de droit (ATF 144 III 93 consid. 5.2.3) - en se fondant sur les faits de l'arrêt cantonal, complétés le cas échéant sur la base de la décision de première instance, à laquelle la cour cantonale renvoie (consid. A.4 de l'arrêt sur appel renvoyant au consid. H.e de la décision attaquée). 
Ce n'est pas la gérance, mais bien la SA propriétaire de l'immeuble, par son actionnaire unique, qui a pris la décision, en mars 2019, de rénover complètement le parking souterrain, ce qui impliquait entre autres des travaux électriques d'importance dont essentiellement une remise aux normes; la cour cantonale relève du reste expressément qu'il est évident que la propriétaire a dû être informée que des travaux étaient nécessaires pour que le bâtiment soit aux normes. La décision de rénover le parking a nécessairement été communiquée à la gérance puisque celle-ci, durant la même période, a pris contact avec la recourante pour un devis portant sur les travaux électriques de remise aux normes. A l'évidence, la gérance (représentante) pouvait, selon les règles de la bonne foi, comprendre cette communication comme l'autorisation de la propriétaire (représentée) d'effectuer en son nom les actes de gestion extraordinaire liés à la rénovation et, plus particulièrement, l'adjudication des travaux électriques correspondants à l'entreprise à laquelle tous les travaux d'électricité du bâtiment étaient attribués depuis près de vingt ans. 
Les travaux de rénovation supervisés par la gérance, dont les travaux d'électricité, ont débuté en mai 2019, soit avant la vente du capital-actions. A ce moment-là, l'actionnaire unique de l'intimée habitait dans l'immeuble et pouvait difficilement ignorer les travaux en cours de réalisation dans le parking souterrain. Contrairement à l'avis de la cour cantonale, cet élément est pertinent. En effet, il ne s'agit pas ici de déterminer si la SA propriétaire est engagée envers un tiers par un acte de gestion de son actionnaire unique. L'enjeu porte sur ce que savait ou aurait dû savoir la SA représentée, à laquelle la connaissance de l'actionnaire unique est manifestement imputable. Il s'ensuit que, à supposer qu'elle ne fût pas encore au courant de l'attribution des travaux d'électricité, la propriétaire aurait dû, en tout cas à partir du début des travaux de rénovation, savoir que la gérance avait agi comme sa représentante auprès d'un tiers. 
Au terme de l'interprétation selon le principe de la confiance des manifestations de volonté des parties au contrat de gérance, il apparaît que l'intimée a octroyé tacitement à la gérance les pouvoirs à la fois de conclure un contrat d'entreprise avec la recourante pour les travaux d'électricité en lien avec la rénovation complète du parking et de surveiller lesdits travaux jusqu'à leur fin. Ces pouvoirs internes découlent plus précisément d'une procuration apparente, dès lors que la propriétaire aurait dû savoir que les travaux litigieux avaient été commandés par la gérance, laquelle pouvait penser de bonne foi être autorisée à agir ainsi. 
Par ailleurs, aucun élément de l'arrêt attaqué ne laisse à penser que les pouvoirs internes de la gérance auraient été, entre mars et décembre 2019, révoqués ou limités. En particulier, même connue de la représentante, la vente du capital-actions de la société représentée, en juillet 2019, ne saurait, en soi, avoir une quelconque incidence sur l'étendue des pouvoirs internes conférés. Peu importe dès lors que le nouvel actionnaire unique et administrateur n'ait pas eu connaissance des travaux en cours. 
En conclusion, la cour cantonale a violé le droit fédéral, spécialement les art. 32 al. 1 et 18 al. 1 CO, en jugeant que l'intimée n'est pas liée par les engagements pris par la gérance envers la recourante dans le cadre de la rénovation du parking de l'immeuble dont elle est propriétaire. Le recours doit être admis. 
 
5.  
Il convient d'examiner si la cour de céans doit renvoyer l'affaire à la cour cantonale après annulation de la décision entreprise ou si elle est en mesure de statuer sur les conclusions en paiement et en inscription définitive d'une hypothèque légale des artisans et entrepreneurs formulées par la recourante (art. 107 al. 2 LTF). 
 
5.1. Ni l'exécution correcte des travaux confiés à la recourante et acceptés par la gérance, ni leur coût à hauteur de 41'684 fr. 35 ne sont contestés. Dans son appel, l'intimée ne s'en prenait du reste à la décision allouant à la recourante ses conclusions que dans la mesure où la juge de première instance avait admis que la représentée était obligée envers l'entreprise d'électricité.  
Dans ces conditions, il y a lieu d'admettre les conclusions en paiement de la recourante et de condamner l'intimée à lui payer le montant de 41'684 fr. 35 plus intérêts à 5 % dès le 12 mars 2020. 
 
5.2. S'agissant de l'hypothèque légale des artisans et entrepreneurs requise le 6 avril 2020 par la recourante, son montant est désormais établi par jugement (art. 839 al. 3 CC). Elle fait l'objet d'une inscription provisoire sur la base d'une ordonnance notifiée au registre foncier le 8 avril 2020. Comme les travaux se sont achevés le 17 décembre 2019, le délai de quatre mois prévu à l'art. 839 al. 2 CC a été respecté (cf. art. 76 al. 3 ORF [RS 211.432.1]). Au surplus, le délai de trois mois fixé par le juge pour ouvrir action a été observé.  
Partant, les conclusions de la recourante en inscription définitive d'une hypothèque légale des artisans et entrepreneurs peuvent également être admises. 
 
6.  
L'intimée, qui succombe, prendra à sa charge les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF) et versera des dépens à la recourante (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis et l'arrêt attaqué est réformé comme suit: 
 
- B.________ SA est condamnée à payer à A.________ Sàrl un montant de 41'684 fr. 35 plus intérêts à 5 % dès le 12 mars 2020; 
- est ordonnée l'inscription définitive d'une hypothèque légale des artisans et entrepreneurs en faveur de A.________ Sàrl sur l'immeuble feuillet n° xxx du ban de U.________, propriété de B.________ SA, pour garantir une créance d'un montant de 41'684 fr. 35 plus intérêts à 5 % dès le 12 mars 2020. 
 
2.  
La cause est renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision sur les frais et dépens de la procédure cantonale. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de l'intimée. 
 
4.  
L'intimée versera à la recourante une indemnité de 2'500 fr. à titre de dépens. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Cour civile du Tribunal cantonal du canton du Jura. 
 
 
Lausanne, le 25 juillet 2024 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Juge présidant : Kiss 
 
La Greffière : Godat Zimmermann