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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_734/2021  
 
 
Arrêt du 26 janvier 2023  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Chaix et Merz. 
Greffière : Mme Tornay Schaller. 
 
Participants à la procédure 
1. A.________, 
2. B.________, 
3. C.________, 
4. D.________ SA, 
tous les quatre représentés par Mes Diane Schasca-Brunoni et Kristina De Lucia Vucurovic, 
recourants, 
 
contre  
 
1. Coopérative E.________, 
2. Coopérative F.________, 
toutes les deux représentées par Me Claire Bolsterli, avocate, 
intimées, 
 
Département du territoire du canton de Genève, Office des autorisations de construire, Service des affaires juridiques, case postale 22, 1211 Genève 8, 
 
G.________ et H.G.________, tous les deux représentés par Mes Paul Hanna et Yannick Fernandez, avocats, 
 
Objet 
Autorisation de construire, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre administrative, du 19 octobre 2021 (ATA/1103/2021 - A/1745/2020-LCI). 
 
 
Faits :  
 
A.  
L'Etat de Genève est propriétaire de la parcelle n° 4'029 de la commune de Genève-Plainpalais (ci-après: la Ville), sise en 3 ème zone de construction, sur laquelle est actuellement érigé un bâtiment à vocation administrative. Le bâtiment abritait autrefois l'ancienne manufacture horlogère des Frères Stern (ci-après: l'usine Stern). La parcelle se situe à l'intérieur d'un îlot actuellement en cours de densification entre le Rond-point de la Jonction, la rue des Deux-Ponts, la rue des Falaises et le Rhône (sentier des Saules) dans le secteur de la Pointe de la Jonction.  
Le 27 juin 2012, un droit de superficie conjoint a été accordé par l'Etat de Genève à la Coopérative F.________ (ci-après: F.________) et à la Coopérative E.________ (ci-après: E.________), respectivement pour 85 % et 15 % des droits à bâtir, afin de réaliser sur la parcelle n o 4'029 un immeuble de logements "bon marché et de qualité".  
En janvier 2018, le mandataire de F.________ et de E.________ a déposé une demande d'autorisation visant à la démolition du bâtiment administratif existant (l'ancienne usine Stern) et une demande d'autorisation de construire deux immeubles de 65 logements et 7 chambres d'hôte, avec des salles communes au rez-de-chaussée permettant d'accueillir 200 personnes, avec des surfaces commerciales de 190 m² et des espaces communautaires. Un garage souterrain, comprenant dix-sept places pour véhicules et nonante-six pour vélos, est aussi prévu. 
Dans le cadre de l'instruction de l'autorisation de démolir, le Service cantonal des monuments et des sites a délivré un préavis favorable sous conditions, alors que la Ville de Genève a émis un préavis défavorable. 
Dans le cadre de l'instruction de l'autorisation de construire, les préavis favorables de la Direction de la planification directrice cantonale et régionale et de la Commission d'urbanisme ont notamment été recueillis. Après avoir rendu trois préavis et requis des modifications du projet, la Direction des autorisations de construire a émis un ultime préavis favorable avec dérogations sous conditions. La Commission d'architecture a aussi examiné le projet à plusieurs reprises et exigé des modifications; elle a finalement rendu un préavis favorable avec dérogations et sous conditions. La Ville de Genève a toujours émis des préavis défavorables. 
 
B.  
Par décisions du 19 mai 2020, le Département du territoire du canton de Genève (ci-après: le Département) a délivré l'autorisation de démolir ainsi que la décision globale d'autorisation de construire deux immeubles avec surfaces commerciales, espaces communautaires et garage souterrain. 
H.G.________ et G.________, copropriétaires d'un lot au sein de la propriété par étages érigée sur la parcelle n° 4'107 située en face des constructions projetées, ont interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance du canton de Genève (ci-après: TAPI) à l'encontre des autorisations de construire et de démolir. 
A.________, B.________, C.________ et D.________ SA (ci-après: A.________ et consorts), copropriétaires d'une parcelle directement voisine, ont aussi interjeté recours au TAPI concluant principalement à l'annulation de l'autorisation de construire. 
Par jugement du 11 mars 2021, le TAPI a préalablement ordonné la jonction des causes. Il a déclaré recevables les recours déposés contre l'autorisation de construire et les a rejetés. Il a en revanche déclaré irrecevable le recours des époux G.________ portant sur l'autorisation de démolir, faute de qualité pour recourir. 
H.G.________ et G.________ ainsi que A.________ et consorts ont chacun formé recours contre le jugement du 11 mars 2021 auprès de la Chambre administrative de la Cour de justice du canton de Genève (ci-après: la Cour de justice). Par arrêt du 19 octobre 2021, celle-ci a rejeté les recours dans la mesure de leur recevabilité. 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ et consorts demandent principalement au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du 19 octobre 2021, le jugement du 11 mars 2021 et l'autorisation de construire du 19 mai 2020. Ils concluent subsidiairement au renvoi du dossier au Département du territoire pour nouvelle décision au sens des considérants. Ils requièrent à titre encore plus subsidiaire le renvoi du dossier à la Cour de justice pour nouvelle décision au sens des considérants. 
Le Département et les sociétés F.________ et E.________ concluent au rejet du recours. L'Office fédéral de l'environnement conclut au rejet du grief portant sur une violation de l'ordonnance fédérale sur la protection contre le bruit (OPB, RS 814.41). La Cour de justice s'en rapporte à justice quant à la recevabilité du recours et persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. H.G.________ et G.________ persistent dans les conclusions prises dans leur recours. Les recourants répliquent. Un deuxième, puis un troisième échange d'écritures ont lieu, au terme desquels les parties maintiennent leurs positions respectives. 
Par ordonnance du 21 décembre 2021, le Juge présidant de la I re Cour de droit public a admis la requête d'effet suspensif, déposée par les recourants.  
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) prise en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF) dans le domaine du droit public de l'aménagement du territoire et des constructions (art. 82 let. a LTF), le recours est en principe recevable comme recours en matière de droit public selon les art. 82 ss LTF, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. Les recourants ont pris part à la procédure devant l'instance précédente. En tant que copropriétaires de parcelles directement voisines de l'autorisation de construire litigieuse, ils sont particulièrement touchés par l'arrêt attaqué. Ils peuvent ainsi se prévaloir d'un intérêt personnel et digne de protection à l'annulation de l'arrêt attaqué. Ils bénéficient dès lors de la qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF
Les autres conditions de recevabilité sont au surplus réunies, si bien qu'il convient d'entrer en matière. 
 
2.  
Les recourants se plaignent d'abord d'un établissement arbitraire des faits. 
 
2.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), hormis dans les cas visés à l'art. 105 al. 2 LTF. Selon l'art. 97 al. 1 LTF, le recours ne peut critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (ATF 145 V 188 consid. 2). Le recourant doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées (cf. art. 106 al. 2 LTF). Les faits et les critiques invoqués de manière appellatoire sont irrecevables (ATF 145 I 26 consid. 1.3).  
 
2.2. En l'espèce, les recourants reprochent à la Cour de justice d'avoir retenu de manière erronée que la perte d'ensoleillement sur l'immeuble serait dans le pire des cas inférieure à deux heures quotidiennes le jour de l'équinoxe. Cet élément n'est toutefois pas susceptible d'avoir une incidence sur l'issue du litige notamment dans la mesure où le grief de violation de l'art. 14 al. 1 let. a de la loi cantonale sur les constructions et installations diverses du 14 avril 1988 (LCI; RS/GE L 5 05) doit être rejeté (voir infra consid. 4.4).  
 
3.  
Les recourants font grief à la Cour de justice d'avoir refusé deux mesures d'instruction, un transport sur place et une expertise acoustique. 
 
3.1. Garanti à l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes et de participer à l'administration des preuves essentielles lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1). L'autorité peut cependant renoncer à procéder à des mesures d'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de forger sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, l'autorité tombe dans l'arbitraire lorsqu'elle ne prend pas en compte, sans raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 143 IV 500 consid. 1.1). Dans ce contexte, le recourant est soumis aux exigences accrues de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 146 I 62 consid. 3).  
 
3.2. En l'espèce, la cour cantonale a considéré que le dossier contenait les plans produits, les maquettes du projet, les images de synthèse et des photographies; les outils numériques permettaient de plus d'apprécier avec précision l'environnement, les caractéristiques architecturales du quartier, l'emplacement, les dimensions et le périmètre dans lequel le projet s'insérerait.  
Les recourants n'expliquent pas en quoi le refus de la cour cantonale serait constitutif d'arbitraire. S'agissant du transport sur place, ils se contentent d'affirmer que "l'atmosphère particulièrement appréciée par les habitants de la cité qui règne sur le sentier des Saules" ne saurait être appréhendée sur la base de plans, de maquettes ou d'image de synthèse. Ils se bornent encore à qualifier le projet de "mastodonte" dont la présence dénaturera le quartier et la vue de ce dernier depuis les falaises Saint-Jean. Cette affirmation, qui est l'expression d'une appréciation subjective du projet, ne suffit cependant pas à démontrer le caractère manifestement insoutenable de l'argumentation de la cour cantonale, ce d'autant moins que les recourants font fi du fait qu'un concours architectural a été organisé en vue de construire ces immeubles et que le jury a rendu un rapport motivé justifiant son choix. 
De plus, contrairement à ce que soutiennent les recourants, le dossier ne contient pas autant d'avis favorables que défavorables; si des modifications de projet ont été initialement requises par certaines autorités spécialisées, celles-ci se sont finalement toutes déclarées favorables au projet, à l'exception de la Ville de Genève. Par ailleurs, quoi qu'en disent les recourants, le fait que le projet se situe à quelques minutes à pied des instances cantonales n'est pas un argument permettant de solliciter une inspection locale. 
Quant à l'expertise acoustique, les recourants soutiennent qu'elle serait nécessaire dans la mesure où la réalisation du projet entraînerait pour le voisinage des immissions de bruit excessives, en particulier en raison de l'utilisation des terrasses et des coursives. Cet élément n'est toutefois pas susceptible d'avoir une influence sur l'issue du litige, le grief relatif à l'OPB devant être rejeté (voir infra consid. 5). 
Par conséquent, la Cour de justice pouvait, sans violer le droit d'être entendu des recourants, renoncer à procéder à une inspection locale et à ordonner une expertise acoustique. Mal fondé, le grief doit être écarté. 
 
4.  
Les recourants soutiennent ensuite que la Cour de justice aurait appliqué de manière arbitraire différentes dispositions légales cantonales et communales. 
 
4.1. Le Tribunal fédéral ne revoit l'interprétation et l'application du droit cantonal que sous l'angle de l'arbitraire. Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou lorsqu'elle contredit d'une manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Le Tribunal fédéral n'a pas à déterminer quelle est l'interprétation correcte que l'autorité cantonale aurait dû donner des dispositions applicables; il doit uniquement examiner si l'interprétation qui a été faite est défendable. Par conséquent, si celle-ci ne se révèle pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation cantonale en cause, elle sera confirmée, même si une autre solution paraît également concevable, voire préférable. De plus, il ne suffit pas que les motifs de la décision attaquée soient insoutenables, encore faut-il que cette dernière soit arbitraire dans son résultat (ATF 144 I 170 consid. 7.3). Dans ce contexte, la partie recourante est soumise aux exigences accrues de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF.  
Le Tribunal fédéral s'impose une certaine retenue lorsqu'il s'agit de tenir compte de circonstances locales dont les autorités cantonales ont une meilleure connaissance que lui, ou de trancher de pures questions d'appréciation (cf. ATF 140 I 168 consid. 4.2.1; 138 II 77 consid. 6.7). 
 
4.2. Les recourants font d'abord grief à la cour cantonale d'avoir retenu que l'ancienne usine Stern ne constituait pas un élément d'un ensemble méritant protection au sens des art. 89 ss LCI et ne nécessitait pas un préavis de la Commission des monuments, de la nature et des sites (CMNS). Ils se plaignent d'une application arbitraire de l'art. 5 al. 2 du règlement général d'exécution de la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites du 29 novembre 1976 (RPMNS; RS/GE L 4 05.01).  
 
4.2.1. Selon l'art. 5 al. 2 RPMNS, la commission des monuments, de la nature et des sites a principalement pour attributions de donner son préavis sur tout projet de travaux concernant un immeuble porté à l'inventaire (let. c), de donner son préavis sur tout projet de travaux concernant un immeuble classé (let. e), de donner son préavis sur tout projet de travaux concernant un immeuble situé en zone protégée (let. f).  
 
4.2.2. En l'espèce, la cour cantonale a considéré que la CMNS n'avait pas à émettre de préavis en vertu de l'art. 5 al. 2 let. c, e et f RPMNS car l'immeuble appelé à être démoli ne faisait pas l'objet d'un plan de site, qu'il se situait intégralement en dehors du périmètre de protection des rives du Rhône qu'il jouxtait et que, ni la parcelle concernée par la procédure, ni les bâtiments limitrophes n'appartenaient à un ensemble figurant dans la liste visée à l'art. 90 al. 4 LCI. Ce raisonnement ne prête pas le flanc à la critique. Les recourants se contentent d'ailleurs uniquement d'affirmer, de façon appellatoire, que la cour cantonale aurait dû consulter une seconde fois la CMNS "pour un projet qui s'inscrit au sein de bâtiments protégés", sans soutenir que l'immeuble litigieux serait porté à l'inventaire, qu'il serait classé ou qu'il serait situé en zone protégée. Cette remarque manque par conséquent de pertinence.  
Pour le reste, les recourants ne peuvent rien tirer du fait que le conseiller d'Etat en charge du département avait, par arrêté du 16 juin 2016, rejeté la demande de I.________ d'inscrire à l'inventaire l'usine Stern, nonobstant le préavis favorable de la CMNS, considérant, dans la pesée des intérêts, la prépondérance de la pénurie de logements sévissant à Genève. L'usine n'étant pas inscrite à l'inventaire et ne faisant l'objet d'aucune mesure de protection patrimoniale, le RPMNS ne prévoit pas que la CMNS soit à nouveau consultée dans le cadre d'une procédure de démolition et d'autorisation de construire. 
Enfin, comme l'a relevé la cour cantonale, si la CMNS avait été consultée dans le cadre du projet de surélévation de l'immeuble voisin sis sur la parcelle n° 145, c'était parce que ledit bâtiment avait fait l'objet d'une mise à l'inventaire limitée aux façades originelles, ce qui n'était pas le cas de l'usine Stern. 
Par conséquent, les recourants ne parviennent pas à démontrer que la cour cantonale a fait preuve d'arbitraire en constatant qu'il n'y avait pas lieu de recueillir le préavis de la CMNS. Le grief doit être rejeté dans la faible mesure de sa recevabilité. 
 
4.3. Les recourants reprochent ensuite à la Cour de justice de ne pas s'être prononcée sur leur grief en lien avec la modification de la servitude, de ne pas avoir remis en cause l'absence de motivation de la dérogation et, enfin, de ne pas s'être prononcée sur la non-réalisation des conditions légales énumérées à l'art. 11 al. 4 let. a, c et d LCI. Ils se plaignent ainsi d'une application arbitraire de l'art. 11 al. 4 LCI.  
 
4.3.1. A teneur de l'art. 11 al. 4 LCI, le département peut, après consultation de la commission d'architecture, autoriser un dépassement du gabarit prescrit par la loi lorsque les constructions prévues sont édifiées sur des terrains dont la surface libre est suffisante pour préserver les voisins des inconvénients que pourrait impliquer le supplément de hauteur (let. a), n'excèdent pas l'indice d'utilisation du sol qui résulterait de la stricte application de la loi (let. b), ne nuisent pas à l'harmonie de la silhouette de l'agglomération ni à la perception de sa topographie (let. c) ou se justifient par leur aspect esthétique et leur destination et sont compatibles avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier (let. d).  
 
4.3.2. En l'espèce, la cour cantonale a considéré que la modification de la "servitude de distance" en "servitude de jour les plus étendus et distances" (modification validée par le registre foncier le 15 septembre 2020) permettait la réalisation du projet sans dérogation au sens de l'art. 11 LCI. Il n'est dès lors pas nécessaire d'examiner si les conditions de l'art. 11 LCI sont remplies. Les recourants font uniquement valoir à cet égard que le fait de modifier la servitude de manière à ne plus contraindre le gabarit du projet s'inscrivant sur la parcelle grevée ne saurait être toléré. Ils soutiennent qu'une telle pratique reviendrait à rendre inapplicables les règles de gabarit. Cette simple affirmation non étayée n'est toutefois pas de nature à démontrer le caractère manifestement insoutenable de l'argumentation de la cour cantonale. En effet, les recourants ne contestent pas que le projet litigieux respecte ainsi les règles du gabarit légal (art. 27 et 36 LCI).  
Pour le reste, les recourants se prévalent en vain du caractère incompréhensible et insuffisamment motivé du préavis de la Commission d'architecture. Cette critique ne porte en effet que sur l'argumentation subsidiaire de la Cour de justice (selon laquelle même si une dérogation avait été nécessaire au sens de l'art. 11 LCI, elle aurait déjà fait l'objet d'une analyse dans les préavis de la Direction des autorisations de construire et de la Commission d'architecture). 
Le grief d'application arbitraire de l'art. 11 al. 4 LCI doit par conséquent être écarté, dans la faible mesure de sa recevabilité. 
 
4.4. Les recourants font encore grief à la cour cantonale d'avoir appliqué arbitrairement l'art. 14 al. 1 let. a LCI, en déniant l'existence d'inconvénients graves causés par le projet de construction. Ils estiment que la perte d'ensoleillement qu'ils subiraient sur leur immeuble ainsi qu'en général sur le sentier des Saules représenterait un inconvénient grave.  
 
4.4.1. Selon l'art. 14 al. 1 let. a LCI, le département peut refuser les autorisations prévues à l'article 1 lorsqu'une construction ou une installation peut être la cause d'inconvénients graves pour les usagers, le voisinage ou le public.  
 
4.4.2. En l'occurrence, s'agissant de la perte d'ensoleillement sur le sentier des Saules, les recourants reconnaissent ne pas remplir les conditions leur permettant de se prévaloir de ce grief mais estiment que la question aurait dû être traitée d'office par la cour cantonale. Cette critique doit être d'emblée rejetée, dans la mesure où il n'y a aucun arbitraire à ne pas traiter d'un grief dont les recourants ne sont pas habilités à se prévaloir.  
Quant à la perte d'ensoleillement sur leur immeuble, la cour cantonale a considéré qu'il ne figurait au dossier aucune expertise sur cette problématique particulière d'ensoleillement. Elle s'est néanmoins référée aux maquettes produites par les recourants, desquelles il ressort que la perte d'ensoleillement serait sur leur immeuble, dans le pire des cas, inférieure à deux heures quotidiennes, en début de journée, soit de 08h00 à 10h00 le jour de l'équinoxe, le 22 septembre 2021. Or selon la jurisprudence cantonale, une perte d'ensoleillement de 2,4 heures par jour en moyenne n'est pas une amplitude permettant de considérer qu'il s'agit d'un inconvénient grave au sens de l'art. 14 al. 1 let. a LCI. 
Face à cette argumentation, les recourants se bornent à soutenir que les maquettes produites permettent de constater que la perte d'ensoleillement serait de 2 heures au minimum, au jour de l'équinoxe. Ils n'expliquent cependant pas en quoi cette perte d'ensoleillement permettrait de retenir l'existence d'un inconvénient grave, compte tenu des autres arguments avancés par la cour cantonale. Celle-ci a en effet aussi pris en compte le fait que le projet se trouvait dans une zone qui permettait la construction projetée, de sorte que les voisins devaient en principe souffrir une diminution d'ensoleillement de leur parcelle. La Cour de justice a encore tenu compte de l'intérêt public à la construction contestée, qui permettra de mettre sur le marché locatif genevois vingt-deux (recte: 65) nouveaux appartements à proximité du centre-ville; elle a jugé que cet intérêt devait l'emporter sur la perte d'ensoleillement à déplorer; celle-ci, étant d'ailleurs limitée, ne saurait constituer un inconvénient grave pour les recourants. 
L'affirmation des recourants ne suffit ainsi pas à démontrer le caractère manifestement insoutenable du raisonnement du Tribunal cantonal, ce d'autant moins que le Tribunal de céans s'impose une retenue dans l'appréciation de circonstances locales. Dans ces conditions, la solution retenue par l'instance précédente ne paraît pas insoutenable. Le grief d'application arbitraire de l'art. 14 al. 1 let. a LCI doit par conséquent être rejeté. 
 
4.5. Les recourants font aussi valoir une application arbitraire de l'art. 49 al. 1 LCI, qui traite de la hauteur des vides d'étage.  
 
4.5.1. A teneur de l'art. 49 al. 5 LCI, lorsqu'il en résulte un avantage prépondérant pour la construction et que le caractère architectural d'une rue n'en est pas affecté, notamment par une rupture de l'harmonie d'une série de bâtiments contigus, le département peut réduire le vide d'étage jusqu'à 2,40 m aux fins de construction de logements.  
 
4.5.2. En l'espèce, la Cour de justice a expressément exposé que la question du vide d'étage avait fait, par quatre fois, l'objet d'un examen détaillé par la Commission d'architecture qui avait, dans ses préavis des 5 mars 2019 et 21 mai 2019, accepté une dérogation en application de l'art. 49 al. 5 LCI et qu'ils soient finalement portés à 2,51 m vu l'évolution du projet et une "habitabilité s'orient[ant] vers des logements à but collectif avec une typologie originale". Elle a ajouté que les recourants n'amenaient aucun élément qui permettrait de conclure que, ce faisant, la Commission n'aurait pas, à l'instar de l'examen auquel elle s'était livrée pour la question du gabarit de l'immeuble, considéré en définitive que cette dérogation ne rompait pas avec l'harmonie des bâtiments voisins ni ne créait de problèmes d'habitabilité.  
Les recourants ne contestent pas que la question du vide d'étage a fait l'objet de quatre examens détaillés par la Commission d'architecture. Ils se contentent d'affirmer que cette commission aurait insuffisamment motivé la réduction de ses exigences quant à la hauteur du vide d'étage passant de 2,60 m à 2,51 m. Partant, ils font fi de l'explication relevée par la cour cantonale et ne démontrent pas en quoi le raisonnement de l'instance précédente serait insoutenable. Fussent-ils habilités à s'en prévaloir, les recourants ne peuvent rien tirer non plus du fait que cette dérogation interviendrait au détriment de la qualité de vie des utilisateurs finaux. Quant au fait que des vides d'étage de 2,51 m aux étages et de 2,70 m au rez-de chaussée "romprait manifestement avec l'harmonie des bâtiments alentours", il représente uniquement l'appréciation subjective des recourants et ne démontre aucunement en quoi la cour cantonale aurait appliqué arbitrairement l'art. 49 LCI. 
Mal fondé, le grief doit être rejeté. 
 
4.6. Les recourants estiment encore que le projet n'est pas conforme à l'art. 9 du règlement relatif aux plans d'utilisation du sol de la ville de Genève du 20 février 2007 (RPUS), en ce qui concerne les locaux au rez-de-chaussée.  
 
4.6.1. L'art. 9 ch. 1.1 RPUS prévoit qu'afin de développer l'animation et l'attractivité des quartiers concernés, en maintenant et en favorisant l'implantation des activités de manière harmonieuse, diversifiée et équilibrée, les surfaces au rez-de-chaussée des bâtiments doivent, pour la nette majorité de chaque surface, être destinées ou rester destinées à des activités accessibles au public, lorsqu'elles donnent sur des lieux de passage ouverts au public.  
L'art. 9 ch. 1.2 RPUS précise que cette règle ne s'applique pas lorsqu'une construction nouvelle ne se situe pas en continuité avec des bâtiments dont les rez-de-chaussée sont affectés à des locaux ouverts au public. 
 
4.6.2. A l'instar du TAPI, la cour cantonale a retenu que l'art. 9 RPUS ne s'appliquait que pour autant que la construction nouvelle se situe en continuité des bâtiments dont les rez-de-chaussée étaient affectés à des locaux ouverts au public. Or aucun bâtiment sur le sentier des Saules ni sur la rue des Falaises ne comportait d'arcade ouverte au public: d'un côté l'immeuble rénové sur la parcelle voisine n° 4107 ne comportait aucune surface ouverte au public (la réglementation du RPUS ne lui avait pas été appliquée); tel était le cas aussi des bâtiments voisins, à l'exception du café-restaurant situé au 2 rue des Deux-Ponts.  
Les recourants soutiennent au contraire que l'implantation de locaux fermés au public (sept chambres d'hôtes) au rez-de-chaussée pourrait créer un précédent qui justifierait ensuite la privatisation des locaux situés au rez-de-chaussée, ce qui irait à l'encontre du but du RPUS. Partant, ils semblent oublier que l'art. 9 ch. 1.2 RPUS permet expressément une exception au fait de favoriser les activités accessibles au public au rez-de-chaussée des immeubles, lorsqu'une construction nouvelle ne se situe pas en continuité avec des bâtiments dont les rez-de-chaussée sont affectés à des locaux ouverts au public (ce que les recourants ne contestent pas être le cas en l'espèce). S'ajoute à cela que le projet litigieux prévoit au rez-de-chaussée un local commercial et des salles communes ouvertes au public permettant d'accueillir 200 personnes, ce qui participera à l'animation socio-culturelle du quartier. Par ailleurs, quoi qu'en disent les recourants, le fait que le bâtiment actuel abrite des lieux ouverts au public n'est pas décisif. 
Dans ces conditions, les recourants ne parviennent pas à démontrer que la cour cantonale aurait appliqué arbitrairement l'art. 9 RPUS. Le grief doit être écarté. 
 
5.  
Les recourants se plaignent enfin d'une "analyse arbitraire de la violation potentielle de l' OPB". Ils estiment que l'utilisation des coursives et des terrasses par les habitants entraînerait dans le voisinage des immissions de bruit supérieures à celles admissibles. 
 
5.1. Selon l'art. 25 al. 1 de la loi fédérale sur la protection de l'environnement du 7 octobre 1983 (LPE; RS 814.01), de nouvelles installations fixes ne peuvent être construites que si les immissions causées par le bruit de ces seules installations ne dépassent pas les valeurs de planification dans le voisinage; l'autorité qui délivre l'autorisation peut exiger un pronostic de bruit.  
A teneur de l'art. 36 al. 1 OPB, l'autorité d'exécution détermine les immissions de bruit extérieur dues aux installations fixes ou ordonne leur détermination si elle a des raisons de supposer que les valeurs limites d'exposition en vigueur sont déjà ou vont être dépassées. 
 
5.2. En l'espèce, les recourants soutiennent que "le bâtiment projeté abritera des habitants appréciant la vie en communauté ainsi que de nombreux étudiants qui souhaiteront profiter des parties communes mises à leur disposition et notamment de la terrasse". Ils estiment que le bâtiment projeté est soumis aux règles du droit fédéral sur la protection contre le bruit et qu'une expertise acoustique aurait dû être exigée afin d'évaluer le caractère nuisible ou incommodant des atteintes.  
Dans ses préavis, le Service cantonal de l'air, du bruit et des rayonnements (SABRA) a identifié les installations bruyantes en lien avec le projet litigieux, à savoir le parking et sa trémie ainsi que les ventilations. Il a en revanche considéré que la question du bruit issu des coursives et des terrasses relevait du droit privé. Comme l'a relevé l'OFEV, les nuisances liées à l'exploitation usuelle des habitations, terrasses et jardins, même dans une zone d'habitation calme, sont considérées comme conformes aux usages locaux. Elles ne sauraient dès lors être qualifiées de nuisibles ou incommodantes. Un dépassement des valeurs de planification selon l'art. 25 LPE peut d'emblée être exclu et une expertise acoustique n'a pas à être ordonnée. 
Pour le reste, les recourants ne peuvent rien tirer de l'arrêt 1A.262/2000 du 6 juillet 2001, qui traite de la création de locaux d'exposition et de spectacle ainsi que d'un bistrot, un bar et une terrasse. Ayant le caractère d'un établissement public, ce projet n'est pas comparable au projet litigieux qui prévoit principalement la construction de logements. 
Par conséquent, la cour cantonale n'a procédé à aucune "analyse arbitraire" de l'OPB en renonçant à une expertise acoustique au sens de l'art. 36 OPB
 
6.  
Il s'ensuit que le recours est rejeté dans la mesure de sa recevabilité. 
Les recourants, qui succombent, doivent supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Les intimées, qui obtiennent gain de cause avec l'assistance d'un avocat, ont droit à des dépens, à la charge des recourants (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 francs, sont mis à la charge des recourants. 
 
3.  
Une indemnité de dépens de 4'000 francs est allouée aux intimées, à la charge des recourants. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des recourants, des intimées et de G.________ et H.G.________, au Département du territoire, à la Chambre administrative de la Cour de justice du canton de Genève ainsi qu'à l'Office fédéral de l'environnement. 
 
 
Lausanne, le 26 janvier 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
La Greffière : Tornay Schaller