Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
2P.338/2004
2A.757/2004/svc
Arrêt du 26 avril 2006
IIe Cour de droit public
Composition
MM. et Mme les Juges Merkli, Président,
Betschart, Wurzburger, Müller et Yersin.
Greffière: Mme Kurtoglu-Jolidon.
Parties
X.________ AG,
recourante, représentée par Y.________,
contre
Service cantonal des contributions du canton
de Fribourg, route Joseph Piller 13, 1700 Fribourg,
Tribunal administratif du canton de Fribourg,
cour fiscale, rue André Piller 21, 1762 Givisiez.
Objet
2P.338/2004
capital propre dissimulé et intérêts y relatifs
(impôt cantonal 1999),
2A.757/2004
capital propre dissimulé et intérêts y relatifs
(impôt fédéral direct 1999),
recours de droit public (2P.338/2004) et
recours de droit administratif (2A.757/2004)
contre l'arrêt du Tribunal administratif
du canton de Fribourg du 19 novembre 2004.
Faits:
A.
La société X.________ AG, sise à A.________ dans le canton de Fribourg, a pour but le développement de revêtements anticorrosion. Son capital-actions se monte à 500'000 fr. Cette société est détenue à 60% par L.________, personne physique, et à 40% par la société L.________ AG, sise dans le canton de Soleure, qui est elle-même détenue à 100% par L.________. X.________ AG est propriétaire d'un immeuble à A.________, dans lequel elle a exercé une activité de thermolaquage jusqu'en 1994. De 1995 à 1997, elle a loué son immeuble à L.________ AG et, depuis 1998, elle le loue à M.________ AG, l'une des sociétés du groupe, qui a repris l'exploitation de l'usine de thermolaquage.
B.
La recourante a mis fin à son activité en 1994 après avoir subi des pertes d'exploitation ayant nécessité un assainissement d'un montant de plus de 3'000'000 fr. La Banque O.________ (ci-après: la Banque) a alors exigé que les dettes de X.________ AG à son égard soient reprises par L.________ AG qui s'était portée caution; elles ont toutefois continué d'être garanties par des cédules hypothécaires portant sur l'immeuble appartenant à la recourante. L.________ AG a ensuite prêté à X.________ AG les montants dont elle se trouvait dès lors débitrice à l'égard de la Banque, soit 8'244'484 fr. au 31 décembre 1999. A cette même date, le montant total des prêts de L.________ AG à la recourante atteignait 10'000'000 fr., la différence consistant apparemment en des prêts octroyés par L.________ AG à X.________ AG avant la restructuration susmentionnée.
C.
Dans sa décision de taxation du 28 février 2001 pour l'impôt fédéral direct et l'impôt cantonal de la période fiscale 1999, le Service cantonal des contributions du canton de Fribourg (ci-après: le Service des contributions) a estimé que X.________ AG avait un capital propre dissimulé de 3'566'919 fr., ce qui portait le capital imposable à 4'078'159 fr. Les intérêts afférents à ce capital propre dissimulé, soit 240'716 fr., ont été ajoutés au bénéfice de l'exercice, le bénéfice imposable étant fixé à 85'985 fr. La réclamation à l'encontre de cette taxation a été rejetée le 12 mars 2002.
D.
Par arrêt du 19 novembre 2004, le Tribunal administratif a partiellement admis le recours pour l'impôt fédéral direct et pour l'impôt cantonal de la période fiscale 1999. Pour ces deux impôts, il a réduit les intérêts passifs non déductibles relatifs au capital propre dissimulé à 145'941 fr. et, pour l'impôt cantonal sur le capital, il a arrêté le capital propre dissimulé à 3'047'390 fr. Il a, par contre, modifié la décision attaquée au détriment de la contribuable, pour l'impôt fédéral direct et pour l'impôt cantonal, sur un point: il a considéré que X.________ AG avait mis gratuitement à disposition de L.________ AG des cédules hypothécaires contrairement à l'usage commercial, ce qui constituait une distribution dissimulée de bénéfice. Il a dès lors ajouté au bénéfice imposable une commission de fiducie d'un montant de 37'300 fr.
Le Tribunal administratif a relevé que X.________ AG bénéficiait, au 31 décembre 1999, d'un prêt de 10'000'000 fr. de la part de L.________ AG. En application d'une circulaire de l'Administration fédérale des contributions qui fixe la proportion des fonds étrangers admissibles pour de telles sociétés, ledit Tribunal a calculé que X.________ AG était en mesure d'obtenir de tiers des fonds étrangers d'un montant de 287'625 fr. sur les créances (85% de leur valeur vénale au 31 décembre 1999, soit 338'382 fr.), de 5'516'195 fr. sur les immeubles (70% de leur valeur vénale au 31 décembre 1999, soit 7'880'278 fr.) et de 1'148'790 fr. sur les machines et installations (50% de leur valeur vénale au 31 décembre 1999, soit 2'297'580 fr.), soit un total de 6'952'610 fr. Ainsi, le montant de 10'000'000 fr. mis à disposition de la société par un actionnaire excédait de 3'047'390 fr. les limites prévues par la circulaire. Cette somme devait dès lors être considérée comme du capital propre dissimulé.
Le Tribunal administratif a rappelé que les intérêts passifs imputables à la part du prêt économiquement assimilable au capital propre (intérêts sur le capital propre dissimulé) font partie du bénéfice imposable et équivalent à des distributions de bénéfice et des avantages procurés à des tiers qui ne sont pas justifiés par l'usage commercial. Il a déterminé les intérêts non admis fiscalement - en tenant compte de la valeur vénale des actifs de la société au 31 décembre 1999, soit 10'516'240 fr., et de la part du prêt admise au titre de capital étranger, soit 6'952'610 fr. - de la façon suivante:
Montant admis au taux du 1er rang:
6'309'744 fr. (60% de 10'516'240 fr.) à 5% 315'487 fr.
Montant admis au taux du 2e rang:
642'866 fr. (6'952'610 fr. ./. 6'309'744 fr.) à 6% 38'572 fr.
Total 354'059 fr.
Intérêts effectivement versés par
X.________ AG 500'000 fr.
Intérêts non admis fiscalement 145'941 fr.
=========
Le Tribunal administratif a ajouté ce montant au bénéfice imposable de X.________ AG considérant qu'il représentait des intérêts non admis fiscalement sur le capital propre dissimulé.
E.
Agissant par la voie du recours de droit administratif (2A.757/2004), X.________ AG demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt du 19 novembre 2004 du Tribunal administratif, partant d'annuler la reprise d'intérêts sur le capital propre dissimulé et la reprise d'une commission de mise de cédules hypothécaires à la disposition de son actionnaire L.________ AG. Au cas où les reprises seraient confirmées, elle demande au Tribunal fédéral d'inviter le canton de Soleure à modifier la taxation de la période fiscale 1999 de la société L.________ AG. X.________ AG invoque une constatation inexacte et incomplète des faits (art. 104 lettre b OJ), une violation du principe de la bonne foi (art. 9 Cst.), du droit fédéral et de l'interdiction de la double imposition (art. 127 al. 3 Cst.).
Agissant également par la voie du recours de droit public (2P.338/2004), X.________ AG demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt du 19 novembre 2004 du Tribunal administratif. Au cas où les reprises seraient confirmées, elle demande au Tribunal fédéral d'inviter le canton de Soleure à modifier la taxation de la période fiscale 1999 de la société L.________ AG. Elle estime que l'arrêt est arbitraire (art. 9 Cst.) dans son appréciation des faits ainsi que dans son application des dispositions cantonales topiques, qu'il viole les principes de la bonne foi (art. 9 Cst.) et de l'interdiction de la double imposition intercantonale (art. 127 al. 3 Cst.).
Le Tribunal administratif conclut au rejet des deux recours. L'Administration fédérale des contributions déclare faire siennes les considérations émises par le Tribunal administratif dans l'arrêt du 19 novembre 2004 et propose le rejet du recours de droit administratif. Le Service des contributions n'a pas déposé d'observations.
Le Tribunal fédéral considère en droit:
1.
Dirigés contre le même arrêt, les deux recours reposent sur le même état de fait et soulèvent des griefs en grande partie similaires. Il se justifie dès lors de joindre les causes par économie de procédure.
I. Impôt fédéral direct (2A.757/2004)
2.
La recourante se plaint d'une constatation inexacte et incomplète des faits. Elle estime que le prêt que son actionnaire lui a consenti ne représente pas du capital propre. Elle reproche au Tribunal administratif de n'avoir pas retenu que la reprise de ses dettes envers la Banque par L.________ AG a été imposée par la Banque et que, en 2003, celle-ci lui a à nouveau accordé un crédit de 7'735'000 fr.
Cette critique est infondée. En effet, ledit Tribunal ayant manifestement constaté de façon correcte et complète les faits établis dans le respect des règles essentielles de procédure (cf. art. 104 let. b OJ; ATF 131 II 361 consid. 2 p. 366 et les arrêts cités), le Tribunal fédéral est lié par l'art. 105 al. 2 OJ. En réalité, l'autorité intimée a estimé, à bon droit, que certains faits n'étaient pas relevants, en particulier ceux postérieurs à la période en cause. Au surplus, la recourante s'en prend à leur qualification et à leur appréciation juridique et soulève ainsi une question de droit que le Tribunal fédéral examine d'office et librement (ATF 131 III 182 consid. 3 p. 184 et les arrêts cités).
3.
3.1 La recourante excipe du principe de la bonne foi. Le Service des contributions n'avait effectué aucune reprise lors des taxations des périodes fiscales antérieures à 1999, ni sur les intérêts relatifs au capital propre dissimulé ni pour la mise à disposition des cédules hypothécaires. Elle estime dès lors que ce Service ne pouvait pas le faire pour la période fiscale 1999.
3.2 L'autorité de taxation procède à une nouvelle taxation à chaque période fiscale (art. 79, 80, 130 et 131 de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct [ci-après: LIFD ou loi fédérale sur l'impôt fédéral direct; RS 642.11]). Elle doit alors examiner tous les éléments de la taxation et, le cas échéant, les modifier s'il s'avère qu'ils s'écartent d'une application correcte de la loi, même si une solution différente a été admise lors de précédentes périodes ( art. 123, 130 et 131 LIFD ). Or, le principe de la bonne foi (sur cette notion cf. ATF 131 II 627 consid. 6.1 p. 636; 130 I 26 consid. 8.1 p. 60) ne protège pas le contribuable contre une telle modification, à moins qu'il n'ait reçu des assurances particulières et expresses de l'autorité de taxation et que les autres conditions prévues par la jurisprudence soient réunies.
Tel n'est pas le cas en l'espèce. Le fait que la recourante ait bénéficié de taxations trop basses lors des périodes fiscales antérieures à 1999 ne lui confère aucun droit à ce que sa taxation ne soit pas rectifiée en 1999. En outre, le droit fiscal est dominé par le principe de la légalité, de telle sorte que le principe de la bonne foi ne saurait avoir qu'une influence limitée dans ce domaine, surtout s'il vient à entrer en conflit avec le principe de la légalité (cf. art. 5 et 9 Cst. ; ATF 118 Ib 312 consid. 3b p. 316; cf. Jean-Marc Rivier, Droit fiscal suisse, 2e éd., Lausanne 1998, p. 132; Ernst Blumenstein/Peter Locher, System des Steuerrechts, 6e éd., 2002, p. 28). Dès lors que la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct règle l'imposition du capital propre dissimulé et de ses intérêts (art. 65 LIFD; cf. infra consid. 4), celle-ci devait être appliquée correctement à la taxation de la période fiscale 1999.
Le grief de la recourante doit donc être rejeté.
4.
4.1 Selon l' art. 58 al. 1 let. a et b LIFD , le bénéfice net imposable comprend le solde du compte de résultats, compte tenu du solde reporté de l'exercice précédent, ainsi que, notamment, les distributions ouvertes ou dissimulées de bénéfice et les avantages procurés à des tiers qui ne sont pas justifiés par l'usage commercial.
L'art. 65 LIFD, dans sa teneur dès le 1er janvier 1998, précise:
"Les intérêts passifs imputables à la part de capital étranger économiquement assimilable au capital propre font partie du bénéfice imposable des sociétés de capitaux et des sociétés coopératives."
Est donc traitée comme du capital propre la part de fonds étrangers qui lui est économiquement assimilable. L'Administration fédérale des contributions a publié la circulaire no 6 du 6 juin 1997 relative au capital propre dissimulé de sociétés de capitaux et de sociétés coopératives ( art. 65 et 75 LIFD ) (Archives 66 296; ci-après: la circulaire no 6) qui définit à quelles conditions et à partir de quel montant les fonds étrangers d'une société doivent être assimilés à du capital propre. Le Tribunal fédéral n'est pas lié par cette circulaire mais, dans la mesure où elle vise à assurer une pratique uniforme, il ne s'en écarte pas sans motif.
4.2 Il peut y avoir un avantage important, tant pour l'actionnaire - ou les personnes qui lui sont proches - que pour la société de capitaux, à disposer des fonds nécessaires sous forme de prêt de l'actionnaire plutôt que de fonds propres: les intérêts passifs dus par la société débitrice du prêt sont considérés comme charge et dès lors déductibles du bénéfice imposable. Fiscalement, ce procédé n'est toutefois pas admis lorsque le prêt (dette) à la société joue économiquement le rôle de fonds propres et qu'ainsi des intérêts passifs déductibles sont payés à l'actionnaire en lieu et place de dividendes qui ne peuvent l'être. Ces fonds étrangers sont alors traités comme du capital propre dissimulé et les intérêts y relatifs ajoutés au bénéfice imposable. Cette façon de procéder peut représenter une distribution dissimulée de bénéfice ou un avantage procuré à des tiers qui n'est pas justifié par l'usage commercial. Comme elle est directement réglée à l'art. 65 LIFD, les conditions jurisprudentielles de la distribution dissimulée de bénéfice n'ont donc pas à être au surplus réalisées.
Le financement étranger est considéré comme inadapté lorsque la société obtient l'apport des fonds en question d'un détenteur de parts ou d'une personne qui lui est proche, qu'elle n'aurait pas pu, par ses propres moyens, obtenir les fonds nécessaires de la part de tiers et qu'elle expose les fonds au risque inhérent à la marche des affaires dans une mesure inhabituelle pour ceux des tiers. La preuve qu'un tiers indépendant aurait octroyé un prêt dans des circonstances identiques est donc réservée. Ainsi, sur le plan fiscal, une société peut s'endetter envers ses actionnaires lorsqu'elle aurait pu également obtenir par ses propres moyens les fonds nécessaires notamment de la part des banques (Peter Agner/Beat Jung/Gotthard Steinmann, Commentaire de la loi sur l'impôt fédéral direct, ad. art. 65, p. 276; Peter Brülisauer/Stephan Kuhn, in: Martin Zweifel/Peter Athanas, Kommentar zum schweizerischen Steuerrecht, Bundesgesetz über die direkte Bundessteuer (DBG), I/2a, no 18 ss ad art. 65 LIFD p. 844; Charles Hermann, Etre ou ne pas être sous-capitalisé, in: L'expert-comptable suisse 12/1998, p. 1359 ss; Peter Locher, Kommentar zum DBG, Bundesgesetz über die direkte Bundessteuer, II Teil, no 13 ad art. 65 LIFD, p. 590.)
4.3 Si le financement est qualifié d'inadapté, le montant du capital propre dissimulé doit être défini afin de calculer les intérêts qui lui correspondent et qui doivent être ajoutés au rendement net soumis à l'impôt sur le bénéfice.
Pour déterminer le capital propre dissimulé, il convient de fixer le montant maximum admis comme fonds étrangers.
La circulaire no 6 prévoit qu'afin d'établir les fonds étrangers admissibles, il faut partir, en règle générale, de la valeur vénale des actifs de la société bénéficiaire du prêt à la fin de la période fiscale. L'Administration fédérale des contributions a arrêté pour chaque type d'actifs, en pourcentage de la valeur vénale, le montant maximum des fonds étrangers qu'une société peut obtenir auprès de tiers. En particulier, les installations, machines et outillage sont supposés permettre à la société qui en est propriétaire d'obtenir des fonds étrangers à concurrence de 50% de leur valeur vénale et les immeubles d'exploitation à concurrence de 70%. La différence entre le prêt (dette) au bilan et le montant maximum ainsi déterminé, dans la mesure où ces moyens ont été fournis, directement ou indirectement, par des détenteurs de parts ou des personnes qui leur sont proches, représente le capital propre dissimulé.
5.
5.1 Le Tribunal administratif a relevé que la recourante bénéficiait d'un prêt de 10'000'000 fr. de la part de L.________ AG et que cette société détenait 40% des parts de la recourante. Selon ce Tribunal, la reprise des dettes de la recourante par l'actionnaire opérée en 1994, dont les modalités ont été imposées par la banque créancière, a eu pour effet que le prêt précédemment accordé à la recourante par un tiers (la Banque) l'était désormais par une société actionnaire, même si celle-ci a dû emprunter dans le même temps des fonds à la Banque. Le fait que la dette de L.________ AG envers la Banque ait été garantie par des cédules hypothécaires portant sur les immeubles appartenant à la recourante importait peu. Le Tribunal administratif a ainsi jugé que des fonds étrangers avaient été mis à la disposition de la recourante par une détentrice de parts.
La recourante nie que des fonds étrangers aient été mis à sa disposition par un actionnaire. Selon elle, est déterminant le fait qu'elle avait elle-même obtenu, avant la reprise de ses dettes auprès de la Banque par son actionnaire, des prêts bancaires. L.________ AG ne serait devenue sa créancière seulement après avoir repris ses dettes à la demande de la Banque. Cela démontrerait que, sans cette exigence de la Banque, la recourante aurait eu au 31 décembre 1999 une dette de 8'244'484 fr. envers cette dernière.
5.2 L'argumentation de la recourante tombe à faux puisque le fait que la Banque ait exigé la reprise de la dette de l'intéressée par L.________ AG, qui s'était portée caution, prouve précisément que la recourante ne pouvait plus obtenir de prêt d'un tiers et que, de fait, c'est une société actionnaire qui lui prêtait le montant en question au 31 décembre 1999. Que la nouvelle structure de financement ait été imposée par la Banque et que celle-ci ait exigé la reprise des dettes de la recourante par L.________ AG montrent bien que la recourante ne pouvait obtenir de crédit de tiers. De même, l'absence de volonté d'économiser des impôts de l'intéressée n'est pas relevante puisque, contrairement à ce qu'elle semble croire, cette condition ne figure pas à l'art. 65 LIFD et que celles d'une évasion fiscale n'ont pas à être réalisées.
C'est également à bon droit que le Tribunal administratif a estimé qu'il importait peu que la Banque ait à nouveau accordé un crédit de 7'735'000 fr. avec effet au 31 décembre 2003 directement à la recourante. La période fiscale ici en cause est la période 1999 et la situation de l'intéressée en 2003 n'a pas, à cet égard, à être prise en compte. En outre, contrairement à ce qu'affirme la recourante, le fait qu'un crédit lui ait été accordé en 2003 n'est pas la preuve que la Banque était prête à consentir le même prêt en 1999. Le contraire peut même être déduit de ce qui précède, puisque celle-ci a imposé que les dettes de la recourante soit reprises par L.________ AG.
Au vu de ce qui précède, c'est à juste titre que le Tribunal administratif a estimé qu'une part des fonds étrangers de la recourante représentait du capital propre dissimulé.
6.
6.1 La recourante conteste les taux de 70% et de 50% appliqués respectivement aux immeubles et aux machines et installations pour déterminer le montant des fonds étrangers admissibles. Elle revendique un taux uniforme de 80%. Ce taux est applicable, d'après la circulaire no 6, aux immeubles autres que les immeubles d'exploitation. Selon la recourante, l'autorité de taxation fribourgeoise l'appliquerait aux immeubles des sociétés immobilières, que ceux-ci soient commerciaux, industriels ou autres. En outre, les installations et machines seraient des parties intégrantes de l'immeuble, ce qui justifierait l'utilisation du même taux pour ces actifs. Au surplus, ce taux de 80% avait été appliqué dans la procédure de taxation et de réclamation.
6.2 Selon la circulaire no 6, une société peut obtenir, par ses propres moyens, des fonds étrangers à concurrence des pourcentages suivants, calculés sur la valeur vénale des actifs:
- créances 85%
- installations, machines, outillage, etc. 50%
- immeubles d'exploitation 70%
- autres immeubles 80%
Ces taux servent à déterminer la garantie qu'offrent les actifs d'une société du point de vue d'un futur créancier. Seuls les actifs réalisables représentent une garantie. Dès lors, l'argument de la recourante selon lequel ses usines ne peuvent être qualifiées d'immeubles d'exploitation du fait qu'elle est une société immobilière, dont la seule activité consiste à louer ses biens immobiliers à une autre société, tombe à faux. En effet, ce qui est déterminant pour un créancier c'est la nature des immeubles. Que la recourante soit une société immobilière et qu'elle loue ses biens immobiliers n'a, à cet égard, pas d'importance. C'est ainsi le taux applicable aux immeubles d'exploitation qui doit être retenu, soit 70% de leur valeur vénale.
Quant aux installations et machines, bien que se trouvant dans les usines, elles sont des biens mobiliers (art. 713 ss CC) indépendants, juridiquement et de fait, de l'immeuble (art. 655 ss CC). Du point de vue d'un créancier, elles peuvent être réalisées indépendamment de l'immeuble. Il convient donc de leur appliquer le taux de 50% et non le taux relatif aux immeubles.
Il est vrai que l'autorité de taxation avait effectivement appliqué, aux immeubles et installations et machines, un taux uniforme de 80% dans sa décision de taxation du 28 février 2001, selon celle-ci, parce qu'il s'agissait de sa pratique avant la mise en oeuvre de la circulaire no 6, qui a pris un certain temps. Dans ses observations devant le Tribunal administratif, le Service des contributions a demandé l'application des taux de la circulaire no 6, ce que le Tribunal administratif a également retenu. La recourante n'établit nullement qu'ils seraient erronés, de sorte qu'il n'y a pas lieu de réformer la décision attaquée sur ce point.
6.3 La recourante ne conteste pas le calcul des intérêts, effectué par le Tribunal administratif sur la base du capital propre dissimulé de 3'047'390 fr., fixés à 145'941 fr. (cf. partie "Faits" consid. D). En application des art. 65 et 58 LIFD , ce montant doit donc être intégré au bénéfice imposable de la recourante.
7.
7.1 Le Tribunal administratif a retenu que la recourante avait mis à disposition de L.________ AG, son actionnaire, des cédules hypothécaires de 10'200'000 fr. portant sur son immeuble et utilisées pour garantir les dettes (reprises de la recourante) que l'actionnaire avait dorénavant envers la Banque.
Se fondant sur le rapport entre les fonds étrangers admis (6'952'610 fr.) et le total du prêt accordé par l'actionnaire à la recourante, le Tribunal administratif a estimé à 7'091'662 fr. (6'952'610 fr. x 10'200'000 fr. / 10'000'000 fr.) la part des cédules garantissant la fraction du prêt admise au titre de capital étranger. Pour ce montant, la remise des cédules entrerait "dans le cadre des prestations réciproques consenties par chacune des parties au contrat de prêt" et ainsi la renonciation à une commission de fiducie ne constituerait pas une distribution dissimulée de bénéfice. En revanche, la mise à disposition gratuitement des cédules se rapportant au capital propre dissimulé, soit 3'108'338 fr. (3'047'390 fr. x 10'200'000 fr. / 10'000'000 fr.), constituerait une distribution dissimulée de bénéfice. En effet, "dans la mesure où ce montant n'est pas admis au titre de prêt et doit être assimilé à du capital propre, il ne saurait à l'évidence constituer une contre-prestation de l'actionnaire justifiant que des cédules hypothécaires lui soient mises à disposition gratuitement". Cette autorité a alors calculé une commission de fiducie de 1,2% sur ce montant (3'108'338 fr. x 1,2%), et elle a ajouté 37'300 fr. au bénéfice imposable. Selon la recourante, cette reprise n'a pas lieu d'être.
7.2 La doctrine et la jurisprudence qualifient de distribution dissimulée de bénéfice les prestations faites par la société, sans contre-prestation, à ses actionnaires, aux membres de l'administration ou à d'autres organes, ou encore à toute personne la ou les touchant de près et qu'elle n'aurait pas faites, dans les mêmes circonstances, à des tiers indépendants de la société. Le caractère insolite de cette prestation doit en outre être reconnaissable par les organes de la société (ATF 131 II 593 p. 607; 119 Ib 116 consid. 2 p. 119 et les arrêts cités; RDAT 2000 I 13t 653, 2A.552/1998; Norberto Bernardoni/Giorgio Duchini, La fiscalità dell'azienda, p. 367/368, Francis Cagianut/Ernst Höhn, Unternehmungssteuerrecht, 3e éd., p. 462/463).
7.3 Comme l'admet le Tribunal administratif, si la mise à disposition des cédules en faveur de l'actionnaire, pour la fraction du prêt considérée comme capital étranger n'a rien d'insolite, tel n'est pas le cas des cédules hypothécaires garantissant la part du prêt qui a été considérée comme du capital propre. Pour celles-ci, le fait qu'une commission de fiducie n'a pas été demandée par l'intéressée à L.________ AG ne peut s'expliquer que par la qualité d'actionnaire de cette société. L'importance de cette prestation accordée sans contre-prestation n'a pas pu échapper à la recourante.
Ainsi, au vu de ce qui précède, la reprise du montant de 37'300 fr. dans le bénéfice imposable de la période fiscale 1999 est justifiée au sens de l'art. 58 al. 1 LIFD.
8.
8.1 La recourante se plaint d'avoir subi une reformatio in pejus en tant que le Tribunal administratif a retenu les taux de 70% et de 50% appliqués respectivement aux immeubles, ainsi qu'aux machines et installations afin de déterminer les fonds étrangers admissibles, la décision de taxation du 28 février 2001 fixant un taux uniforme de 80% et qu'il a ajouté une commission de fiducie de 37'300 fr. au bénéfice imposable.
8.2 Une reformatio in pejus s'apprécie par rapport à la taxation prise dans son ensemble et non sur un seul élément. Si le Tribunal administratif a retenu des fonds étrangers admissibles moins élevés que ceux pris en compte dans la taxation, il a réduit les intérêts non admis fiscalement de 240'716 fr. à 145'941 fr. selon un calcul avantageux pour la recourante. Compte tenu de la commission de fiducie de 37'300 fr., la reprise prévue par le Tribunal administratif s'élevait à 183'241 fr. (145'941 fr. + 37'300 fr.) alors que celle de l'autorité de taxation était de 240'716 fr. Les éléments en défaveur de la recourante ont donc été largement compensés par la correction du calcul des intérêts. Partant la recourante ne peut prétendre avoir subi une reformatio in pejus.
Au demeurant, le Tribunal administratif aurait pu modifier la décision de l'autorité de taxation au détriment de la recourante, l'art. 143 al. 1, 2ème phrase, LIFD l'y autorisant.
Le grief doit donc être rejeté.
9.
La recourante se plaint de double imposition intercantonale. Selon elle, un ajustement du bénéfice imposable de L.________ AG pour la période fiscale 1999 aurait dû être effectué par le canton de Soleure en fonction du montant de la reprise des intérêts qu'elle a subie.
9.1 L'art. 127 al. 3 Cst. ne concerne que les doubles impositions résultant de la concurrence de deux souverainetés cantonales. Il n'a pas d'application s'agissant de l'impôt fédéral direct.
9.2 S'agissant de la double imposition économique de la recourante et de son actionnaire, c'est à bon droit que les intérêts qui ont été repris auprès de la première seraient également imposés chez la seconde (sous réserve d'un éventuel privilège holding). Le système voulu par le législateur entraîne en principe la double imposition des distributions de bénéfices aux actionnaires: les profits de la société sont imposés une première fois auprès de celle-ci dans le cadre de l'impôt sur le bénéfice et une seconde fois, auprès de l'actionnaire lui-même soumis à l'impôt sur le bénéfice ou sur le revenu, lors de la distribution (cf. art. 20 al. 1 lettre c et 58 al. 1 lettre a LIFD).
Au vu de ce qui précède, la recourante n'a pas subi de double imposition prohibée.
II. Impôts cantonal et communal (2P.338/2004)
10.
10.1 Le recours de droit public n'a en principe qu'un caractère cassatoire (ATF 129 I 129 consid. 1.2.1 p. 131, 173 consid. 1.5 p. 176 et la jurisprudence citée). Il est toutefois fait exception à cette règle lorsque le recours est fondé sur le principe de l'interdiction de la double imposition intercantonale et qu'il apparaît nécessaire de donner des instructions aux cantons concernés sur les limites de leur compétence fiscale ou pour ordonner le remboursement d'impôts perçus au mépris de l'interdiction constitutionnelle de la double imposition. Les conclusions allant au-delà de la simple annulation de l'arrêt attaqué sont donc recevables (ATF 111 Ia 44 consid. 1c p. 46; Archives 73 p. 170 consid. 1.2, 2A.349/2002), à l'exception de celle relative à l'allocation d'un intérêt sur un éventuel trop-perçu d'impôt à restituer.
En l'espèce, dans la mesure où un grief du recours a trait à l'interdiction de la double imposition intercantonale, la conclusion demandant que le canton de Soleure soit invité à modifier la taxation 1999 de la société L.________ AG est recevable.
10.2 Le recours demande l'annulation de l'arrêt du 19 novembre 2004 du Tribunal administratif. Il ne contient aucun grief à l'encontre du calcul du capital imposable, qui comprend le capital propre dissimulé, tel qu'il a été arrêté pour l'impôt cantonal sur le capital. Faute de motivation conforme aux exigences tirées de 90 al. 1 lettre b OJ (ATF 130 I 258 consid. 1.3 p. 261; 128 I 295 consid. 7a p. 312 et les arrêts cités), le recours n'est dès lors pas recevable sur ce point.
En outre, la motivation du recours, qui est en substance similaire à celle du recours de droit administratif, est essentiellement appellatoire. Dans cette mesure, elle ne répond que très partiellement aux exigences tirées de l'art. 90 al. 1 lettre b OJ.
11.
11.1 La recourante se plaint d'une constatation et d'une appréciation arbitraire des faits, de la violation des règles de la bonne foi (art. 9 Cst.), d'une application arbitraire (art. 9 Cst.) de la loi fribourgeoise du 7 juillet sur les impôts cantonaux, en vigueur jusqu'au 31 décembre 2000 (ci-après: aLIC) et d'une double imposition prohibée (art. 127 al. 3 Cst.).
11.2 Les art. 85 d et 89 aLIC règlent de la même manière que la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct, la reprise de fonds étrangers qui jouent le rôle de capital propre dissimulé et le calcul des intérêts sur ces montants. La recourante ne prétend d'ailleurs pas qu'il en irait différemment. Les griefs soulevés doivent dès lors être écartés pour les mêmes motifs que ceux mentionnés ci-dessus (consid. 3 à 8). L'arrêt du Tribunal administratif fixe donc sans arbitraire le capital propre dissimulé et les intérêts y relatifs à respectivement 3'047'390 fr. et 145'941 fr., ainsi que la commission de fiducie pour la mise à disposition des cédules hypothécaires à 37'300 fr. pour la taxation relative aux impôts cantonal et communal de la période fiscale 1999.
11.3 La recourante invoque l'interdiction de la double imposition (art. 127 al. 3 Cst.). Ce principe s'oppose à ce qu'un même contribuable soit concrètement soumis, par deux ou plusieurs cantons, sur le même objet, pendant la même période, à des impôts analogues (double imposition effective) ou à ce qu'un canton excède les limites de sa souveraineté fiscale et, violant des règles de conflit jurisprudentielles, prétende prélever un impôt dont la perception est de la seule compétence d'un autre canton (double imposition virtuelle) (ATF 130 I 205 consid. 4.1 p. 210 et les références citées).
Sous réserve d'exceptions non réalisées en l'espèce (Xavier Oberson, Droit fiscal suisse, 2e éd., § 20, no 9, p. 395), il faut qu'un seul et même sujet fiscal soit touché. En conséquence, il n'y a pas double imposition contraire à l'art. 127 al. 3 Cst., dès lors que deux sujets fiscaux distincts sont soumis à l'impôt, chacun dans un canton différent.
La recourante et son actionnaire sont deux contribuables distincts, de sorte que la recourante ne saurait se prévaloir de sa situation fiscale pour demander la modification de la taxation de L.________ AG. La recourante estime toutefois que, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral (ATF 115 Ia 157), on est en présence d'un cas de double imposition car les deux sociétés font partie du même groupe.
L'intéressée ne peut rien tirer de l'arrêt cité car il a laissé ouverte la question de savoir si une prestation appréciable en argent d'une société anonyme en faveur d'une société soeur dans un autre canton, sans ajustement corrélatif, constituait une double imposition intercantonale prohibée. De toute façon, cet arrêt concernait une situation particulière différente du cas présent et n'a pas de portée générale.
12.
Vu ce qui précède, mal fondé, le recours de droit administratif doit être rejeté. Il en va de même du recours de droit public dans la mesure où il est recevable.
Succombant, la recourante doit supporter les frais judiciaires (art. 156 al. 1 OJ). Elle n'a pas droit à des dépens (art. 159 al. 1 OJ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Les causes 2P.338/2004 et 2A.757/2004 sont jointes.
2.
Le recours de droit administratif (2A.757/2004) est rejeté.
3.
Le recours de droit public (2P.338/2004) est rejeté dans la mesure où il est recevable.
4.
Un émolument judiciaire de 4'000 fr. est mis à la charge de la recourante.
5.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire de la recourante, au Service cantonal des contributions et au Tribunal administratif du canton de Fribourg ainsi qu'à l'Administration fédérale des contributions, Division juridique de l'impôt fédéral direct.
Lausanne, le 26 avril 2006
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le président: La greffière: