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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_400/2023  
 
 
Arrêt du 26 juillet 2024  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes les Juges fédérales 
Kiss, Juge présidant, Hohl et May Canellas. 
Greffière : Mme Raetz. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Me Philippe Nordmann, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
B.________, 
représentée par Me Jürg Jakob, avocat,, 
intimée. 
 
Objet 
assurance complémentaire à l'assurance-maladie sociale (art. 7 CPC); décision d'irrecevabilité, 
 
recours contre la décision rendue le 19 juin 2023 par la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du Valais (S2 23 33). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Le 1er février 2019, A.________ a adhéré à B.________ (ci-après: la Caisse). Il s'agit d'une coopérative au sens des art. 828 ss CO, fondée pour couvrir la perte de gain de courte et longue durée en cas de maladie ou d'accident. 
Les statuts de la Caisse prévoient que les droits et obligations de l'associé sont réglés par les statuts et les conditions générales; la relation entre la société et l'associé relève du droit régissant l'affiliation (art. 7 al. 1 à 3). Selon les conditions générales (CG), à réception de l'annonce de maladie ou d'accident, la Commission médicale examine le droit aux prestations de l'associé et, suite à l'examen de la demande, l'informe par écrit de l'acceptation entière ou partielle de la demande ou de son rejet (art. 12 CG). En cas de contestation, l'associé a le droit de recourir dans un délai de trente jours auprès de la Division Droit de l'administration, sauf si les CG prévoient une décision définitive de la Commission médicale (art. 19.1 et 19.3 CG). La Division Droit de l'administration rend une nouvelle décision en appréciant toutes les circonstances, confirme la décision contestée ou renvoie la décision à la première instance pour une nouvelle évaluation (art. 19.4 CG). L'associé peut (ensuite) ouvrir action dans les trois mois contre la décision de la Division Droit de l'administration devant le Tribunal de district de St-Gall (art. 20.2 CG). 
Par courrier du 29 septembre 2022, la Commission médicale de la Caisse a réévalué le cas maladie d'A.________ ayant débuté le 18 décembre 2021. Elle a décidé de considérer son incapacité de travail à compter de cette date comme une rechute. 
Par courriel du 21 octobre 2022, A.________ a contesté cette position. Le 27 octobre 2022, elle a déposé un " recours " auprès de la Caisse. 
Par courrier du 12 janvier 2023, la Commission médicale de la coopérative s'est déclarée disposée à réexaminer la situation lorsque l'intéressée lui aurait remis ses comptes annuels 2018 à 2021. Le 15 mars 2023, la Caisse a accordé un nouveau délai pour produire les comptes requis, faute de quoi la Commission médicale prendrait une décision susceptible de recours. 
 
B.  
Le 3 avril 2023, A.________ a ouvert action devant la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal valaisan, en concluant à ce que la Caisse soit condamnée à lui verser une indemnité journalière (de base) de 800 fr. du 18 janvier 2022 au 19 janvier 2024 puis, dès cette dernière date, une indemnité journalière (d'invalidité) de 250 fr. jusqu'à l'âge terme au plus tard, avec intérêts. 
Par ordonnance du 4 avril 2023, la cour cantonale a interpellé les parties au sujet de sa compétence. Elles se sont déterminées. 
Par décision du 19 juin 2023, la cour cantonale a déclaré l'action irrecevable. En bref, elle a considéré que ni la LAMal, ni la LCA, ni la LSA étaient applicables, mais uniquement le CO. A.________ devait donc respecter les règles de procédure fixées dans les conditions générales de la Caisse, et ainsi attendre la décision de la Commission médicale, puis la contester auprès de la Division Droit de l'administration, voire ultérieurement auprès du Tribunal compétent. La cour cantonale a retenu qu'elle n'était pas compétente à raison de la matière. Il n'était donc pas nécessaire de trancher la question de sa compétence à raison du lieu. 
 
C.  
A.________ (ci-après: la recourante) a exercé un recours en matière civile, subsidiairement un recours en matière de droit public, et encore plus subsidiairement un recours constitutionnel subsidiaire au Tribunal fédéral à l'encontre de cette décision. Elle a conclu à sa réforme en ce sens que la cour cantonale doive se prononcer sur le fond du litige. Subsidiairement, elle a conclu à l'annulation de la décision attaquée et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants. Elle a notamment produit le rapport de gestion 2022 de la Caisse (ci-après: l'intimée). 
Dans sa réponse, l'intimée a conclu au rejet du recours, dans la mesure de sa recevabilité. Elle a joint des annexes. 
La cour cantonale, laquelle a transmis le dossier de la cause, ne s'est pas déterminée. 
La recourante a déposé une réplique spontanée. L'intimée a renoncé à dupliquer. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le présent litige oppose la recourante à B.________. Il s'inscrit dans un rapport de droit privé et relève donc sur le principe du juge civil (arrêt 4A_679/2016 du 22 mai 2017 consid. 1.1). Est ainsi ouverte la voie du recours en matière civile, et non celle du recours en matière de droit public. 
La recourante a porté le différend la divisant d'avec l'intimée devant l'autorité qu'elle estime compétente pour en connaître comme instance cantonale unique (art. 7 CPC; art. 5 al. 1 let. a de la loi du canton du Valais du 11 février 2009 d'application du code de procédure civile suisse [LACPC/VS; RS/VS 270.1]). Le recours en matière civile est donc ouvert indépendamment de la valeur litigieuse pour contester la décision par laquelle cette autorité, tribunal supérieur d'un canton, a nié sa compétence (art. 74 al. 2 let. b et art. 75 al. 2 let. a LTF; arrêt 4A_169/2023 du 31 janvier 2024 consid. 1; arrêt 4A_241/2015 du 20 octobre 2015 consid. 1.1 non publié in ATF 141 III 479; cf. également ATF 138 III 799 consid. 1.1). Il s'ensuit que le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable (art. 113 LTF). 
Pour le surplus, les autres conditions de recevabilité du recours en matière civile sont réalisées sur le principe, notamment celles afférentes au délai de recours (art. 46 al. 1 let. b et art. 100 al. 1 LTF). 
 
2.  
 
2.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 140 III 115 consid. 2; 137 I 58 consid. 4.1.2; 137 II 353 consid. 5.1) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).  
La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 et les références citées). La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références citées). Si elle souhaite obtenir un complètement de l'état de fait, elle doit aussi démontrer, par des renvois précis aux pièces du dossier, qu'elle a présenté aux autorités précédentes, en conformité avec les règles de la procédure, les faits juridiquement pertinents à cet égard et les moyens de preuve adéquats (ATF 140 III 86 consid. 2). Si la critique ne satisfait pas à ces exigences, les allégations relatives à un état de fait qui s'écarterait de celui de la décision attaquée ne pourront pas être prises en considération (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1). 
 
2.2. Le Tribunal fédéral applique en principe d'office le droit (art. 106 al. 1 LTF) à l'état de fait constaté dans l'arrêt cantonal (ou à l'état de fait qu'il aura rectifié). Cela ne signifie pas que le Tribunal fédéral examine, comme le ferait un juge de première instance, toutes les questions juridiques qui pourraient se poser. Compte tenu de l'obligation de motiver imposée par l'art. 42 al. 2 LTF, il ne traite que les questions qui sont soulevées devant lui par les parties, à moins que la violation du droit ne soit manifeste (ATF 140 III 115 consid. 2, 86 consid. 2). Le recourant doit discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 140 III 86 consid. 2).  
Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF), y compris le droit constitutionnel (ATF 134 III 379 consid. 1.2; 133 III 446 consid. 4.1, 462 consid. 2.3). Il ne peut en revanche pas être interjeté pour violation du droit cantonal en tant que tel. Il est toutefois possible de faire valoir que la mauvaise application du droit cantonal constitue une violation du droit fédéral, en particulier qu'elle est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. ou contraire à d'autres droits constitutionnels (ATF 138 I 1 consid. 2.1; 134 III 379 consid. 1.2; 133 III 462 consid. 2.3). 
 
2.3. Aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF).  
Il n'y a pas lieu d'examiner la question de la recevabilité des pièces produites puisque, quoi qu'il en soit, elles n'influent pas sur l'issue du litige (cf. consid. 5 infra).  
 
3.  
La recourante soutient d'abord que la cour cantonale n'a pas reproduit certaines dispositions des conditions générales de l'intimée (art. 5, 7, 8 et 20 CG), pourtant alléguées dans la demande. La recourante n'explique pas précisément en quoi ces dispositions seraient pertinentes pour le sort de la cause. Au vu de ce qui suit, elles ne sont de toute manière pas déterminantes. Il n'en sera donc pas tenu compte. 
 
4.  
Ensuite, la recourante allègue qu'en faisant fi de l'art. 15.2 CG, la décision attaquée présenterait un " défaut de motivation assimilable à de l'arbitraire " et une fausse application du droit. 
Or, d'une part, cette disposition n'a pas été constatée par la cour cantonale, et d'autre part, la brève motivation exposée ne répond pas aux exigences prévalant devant le Tribunal fédéral. Ce grief est donc irrecevable. 
 
5.  
Dans son recours, l'intéressée dénonce, parfois en quelques phrases, une application arbitraire de l'art. 7 CPC et de l'art. 5 LACPC/VS, une violation de l'art. 29a Cst., de l'art. 101 al. 1 ch. 2 LCA en lien avec l'art. 2 al. 2 let. d LSA, des art. 18 et 841 al. 2 CO, ainsi que de l'art. 8 CC
La recourante soutient qu'elle est " avant tout une assurée au sens de la LCA, même si elle est en même temps coopératrice ". Elle allègue qu'il s'agit d'un rapport d'assurance de nature contractuelle (et donc soumis à la LCA), et non de nature coopérative, en se fondant notamment sur l'ATF 124 III 30 concernant déjà l'intimée. 
Toutefois, comme le relève l'intimée dans sa réponse, la recourante ne dit mot sur le raisonnement de la cour cantonale selon lequel les conditions générales prévoyaient qu'il fallait attendre la décision de la Commission médicale, puis la contester auprès de la Division Droit de l'administration, avant de pouvoir saisir un tribunal (cf. art. 19 et 20 CG). Les quelques lignes que semble y consacrer la recourante dans sa réplique sont tardives et n'ont pas à être prises en compte. Dans son recours, l'intéressée ne soutient pas expressément que ces conditions générales ne lui seraient pas applicables; elle s'y réfère d'ailleurs à plusieurs reprises. En outre, l'ATF 124 III 30 ne prévoyait pas que les conditions générales devaient être d'emblée exclues dans le cas où le rapport juridique entre les parties serait de nature contractuelle; au contraire, dans ce cas, il était fait référence à la police, laquelle renvoyait aux conditions générales. En somme, le fait que la recourante soit ou non une " assurée au sens de la LCA " importe peu, puisqu'elle n'a pas expliqué valablement en quoi l'application des conditions générales de l'intimée, ou leur contenu, violerait le droit. Comme l'a constaté la cour cantonale, la recourante n'était pas au bénéfice, notamment, d'une décision de la Division Droit de l'administration de l'intimée, comme exigé par les conditions générales. Ainsi, la saisine d'un tribunal était prématurée à ce stade. Il n'y a donc pas lieu d'analyser les arguments invoqués par la recourante, pour autant qu'ils soient recevables. 
On peut néanmoins relever ce qui suit s'agissant de l'art. 7 CPC. Selon cette disposition, les cantons peuvent instituer un tribunal qui statue en tant qu'instance cantonale unique sur les litiges portant sur les assurances complémentaires à l'assurance-maladie sociale selon la loi fédérale du 18 mars 1994 sur l'assurance-maladie (LAMal; RS 832.10). Comme déjà relevé, le canton du Valais a fait usage de cette possibilité (cf. art. 5 al. 1 let. a LACPC/VS, consid. 1 supra). Dans ce cas de figure, tous les litiges portant sur les assurances complémentaires à l'assurance-maladie sociale doivent être soumis au tribunal statuant en instance unique; le fait que, notamment, l'assureur soit une caisse-maladie ou une entreprise d'assurance privée importe peu (ATF 141 III 479 consid. 2.1; arrêt 4A_169/2023 consid. 4.2 du 31 janvier 2024 destiné à publication et les références citées). On peut en inférer que la qualité de ce dernier n'est pas déterminante. Pour savoir si le critère de la complémentarité à l'assurance-maladie sociale exigé par l'art. 7 CPC est réalisé, il convient uniquement d'examiner si l'assurance est complémentaire à la LAMal par les risques couverts (maladie, accident ou maternité) et par les prestations qu'elle offre, lesquelles doivent être destinées à compléter les prestations de base prévues par la LAMal (pour les détails, cf. arrêt 4A_169/2023 consid. 4.2 précité).  
 
6.  
Le recours doit être rejeté, dans la mesure de sa recevabilité. 
Les frais judiciaires et les dépens seront mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 66 al. 1 et art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 7'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
La recourante versera à l'intimée une indemnité de 8'000 fr. à titre de dépens. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du Valais. 
 
 
Lausanne, le 26 juillet 2024 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Juge présidant : Kiss 
 
La Greffière : Raetz