Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
6B_2/2024
Arrêt du 26 juillet 2024
Ire Cour de droit pénal
Composition
MM. les Juges fédéraux
Denys, Juge présidant, Muschietti et von Felten.
Greffière : Mme Corti.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Ilir Cenko, avocat,
recourant,
contre
Ministère public de la République et canton de Genève,
route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy,
intimé.
Objet
Expulsion,
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision, du 19 octobre 2023
(P/2398/2022 AARP/402/2023).
Faits :
A.
Par jugement du 17 mai 2023, le Tribunal de police genevois, statuant par défaut, a reconnu A.________ coupable de pornographie (art. 197 al. 4 2e phrase CP), d'entrée et de séjour illégaux (art. 115 al. 1 let. a et b de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration [LEI; RS 142.20]) et d'exercice d'une activité lucrative sans autorisation (art. 115 al. 1 let. c LEI), l'a condamné à une peine pécuniaire de 180 jours-amende à 80 fr. le jour, avec un sursis de 3 ans, ainsi qu'à une amende de 2'880 francs. Le tribunal a également prononcé l'expulsion de A.________ du territoire suisse pour une durée de 5 ans, sans signalement dans le Système d'information Schengen (SIS) et lui a interdit, à vie, d'exercer toute activité professionnelle et non professionnelle organisée impliquant des contacts réguliers avec des mineurs, frais à sa charge en 1'156 francs.
B.
Par arrêt du 19 octobre 2023, la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice de la République et canton de Genève a partiellement admis l'appel formé par A.________. Elle a réformé le jugement de première instance en ce sens qu'elle a renoncé à prononcer une amende de 2'880 fr. à l'encontre de A.________, ainsi que l'interdiction à vie d'exercer toute activité organisée impliquant des contacts réguliers avec des mineurs. Elle a confirmé le jugement du 17 mai 2023 pour le surplus.
Les faits pertinents qui ressortent de l'arrêt sont les suivants:
B.a. Selon le rapport de l'Office fédéral de la police (FedPol) du 20 mai 2020, ayant reçu une dénonciation de la
National Center for Missing and Exploited Children (NCMEC) aux États-Unis par le biais d'un
CyberTipline Report (
CT Report), le 16 avril 2020 à 03h59, l'utilisateur du numéro de téléphone +417xxxxxxxx et de l'adresse électronique a.________@outlook.com - qui s'est avéré plus tard être A.________ - a diffusé via le service de messagerie
Messenger à huit de ses contacts une vidéo pédopornographique (relation sexuelle entre deux enfants) via son compte Facebook. Ladite vidéo montre des images de deux enfants de sexe opposé entretenant une relation sexuelle. Cette vidéo a été envoyée dans un groupe de discussion, dont les huit autres participants sont des jeunes hommes âgés entre 22 et 25 ans.
B.b. A.________ a accepté que les policiers consultent son téléphone portable, dans lequel a été retrouvée la vidéo incriminée, laquelle avait été enregistrée dans sa galerie photos le 3 avril 2020.
B.c. A.________, de nationalité kosovare, est né en mars 1996. Il est célibataire et sans enfant. Il a suivi la scolarité obligatoire au Kosovo et a obtenu un diplôme de monteur en échafaudages. Il est venu en Suisse en 2018 pour rejoindre son père. Sa mère est dans un premier temps restée au Kosovo avant de rejoindre son époux à U.________ au printemps 2023. Il explique voir sa mère quotidiennement. Il a trois frères, dont un seul vit encore au Kosovo, les deux autres habitant en Slovénie et en Autriche. À U.________, il avait été engagé dans le domaine du jardinage entre mars 2019 et janvier 2022, travail sans autorisation qui lui a été reproché dans le cadre de la présente procédure. Il fait l'objet d'une décision définitive et exécutoire de renvoi de Suisse. Un premier délai au 15 août 2021 lui avait été imparti pour quitter la Suisse, prolongé d'un ultime délai au 30 avril 2022.
B.d. Selon l'extrait de son casier judiciaire, A.________ n'a aucun antécédent en Suisse. Il indique ne pas en avoir dans un autre pays.
C.
A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 19 octobre 2023. Il conclut, avec suite de frais et dépens, principalement à sa réforme en ce sens qu'il est renoncé à son expulsion de Suisse. Subsidiairement, il conclut à l'annulation de l'arrêt cantonal et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Il sollicite également l'octroi de l'effet suspensif.
Considérant en droit :
1.
Il est constaté que le recourant ne revient pas sur les différentes infractions pour lesquelles il a été reconnu coupable, ni sur la peine qui lui a été infligée à ce titre.
2.
Invoquant les art. 121 al. 3 let. a et al. 4 Cst. ainsi que l'art. 66a CP, le recourant conteste son expulsion du territoire suisse.
2.1. Aux termes de l'art. 66a al. 1 let. h CP, le juge expulse de Suisse l'étranger qui est condamné notamment pour pornographie (art. 197 al. 4 2e phrase CP), quelle que soit la quotité de la peine prononcée à son encontre, pour une durée de 5 à 15 ans. Selon l'art. 66a al. 2 CP, le juge peut exceptionnellement renoncer à une expulsion lorsque celle-ci mettrait l'étranger dans une situation personnelle grave et que les intérêts publics à l'expulsion ne l'emportent pas sur l'intérêt privé de l'étranger à demeurer en Suisse. À cet égard, il tiendra compte de la situation particulière de l'étranger qui est né ou qui a grandi en Suisse.
L'art. 121 al. 3 let. a Cst. prévoit que les étrangers sont privés de leur titre de séjour, indépendamment de leur statut, et de tous leurs droits à séjourner en Suisse, s'ils ont été condamnés par un jugement entré en force pour meurtre, viol, ou tout autre délit sexuel grave, pour un acte de violence d'une autre nature tel que le brigandage, la traite d'êtres humains, le trafic de drogue ou l'effraction. Selon l'al. 4, le législateur précise les faits constitutifs des infractions visées à l'al. 3. Il peut les compléter par d'autres faits constitutifs.
2.1.1. L'art. 121 al. 3 Cst. cite différentes infractions, dont certaines se réfèrent à des dispositions correspondantes du Code pénal (viol, brigandage), mais dont d'autres sont formulées de manière très ouverte et peu technique (trafic de drogue, effraction, délits sexuels graves), et n'ont pas de contours clairs, d'où la mission du législateur prévue à l'art. 121 al. 4 Cst. (cf. ATF 139 I 16 consid. 4.3 et les références citées). L'art. 121 al. 3 Cst. n'est pas formulé de manière suffisamment claire pour pouvoir justifier son applicabilité directe (ATF 139 I 16 consid. 4.3.2 et les références citées; cf. aussi ATF 139 I 31 consid. 2.3.2 et 131 V 9 consid. 3.5.1.2).
2.1.2. Les art. 66a -66 d CP sont la concrétisation des alinéas 3 à 6 de l'art. 121 Cst. (ATF 144 IV 332 consid. 3.1.1; cf. aussi ATF 145 IV 404 consid. 1.5.1), adoptés le 28 novembre 2010 à la suite de l'acceptation par le Peuple et les Cantons de l'initiative populaire fédérale "Pour le renvoi des étrangers criminels" ("initiative sur le renvoi"; FF 2011 2593). Dans son projet du 26 juin 2013, visant à mettre en oeuvre l'art. 121 al. 3 à 6 Cst., le Conseil fédéral avait considéré que le principe de la proportionnalité - au sens strict - commandait de conditionner l'expulsion du prévenu à un acte d'une certaine gravité, qui résulterait à la fois de la sanction prévue par la loi et de la peine prononcée dans le cas concret. La sanction minimale prévue par le projet dépassait donc une peine privative de liberté de 6 mois ou une peine pécuniaire de 180 jours-amende. Ces seuils minimaux ne devaient cependant pas avoir une valeur absolue, puisque le juge devait pouvoir exceptionnellement prononcer l'expulsion même si la peine ne dépassait pas respectivement 6 mois pour une peine privative de liberté, 180 jours-amende pour une peine pécuniaire, ou 720 heures de travaux d'intérêt général, si les intérêts publics à l'expulsion l'emportaient sur l'intérêt de l'étranger à demeurer en Suisse (Message concernant une modification du Code pénal et du Code pénal militaire [mise en oeuvre de l'art. 121, al. 3 à 6, Cst. relatif au renvoi des étrangers criminels], FF 2013 5373, 5423; ATF 144 IV 332 consid. 3.1.1; cf. arrêt 6B_506/2017 du 14 février 2018 consid. 1.1). Le législateur n'a toutefois pas retenu les seuils minimaux proposés par le Conseil fédéral. Ainsi, l'art. 66a CP prévoit l'expulsion "
obligatoire " de l'étranger condamné pour l'une des infractions ou combinaison d'infractions listées à l'al. 1, quelle que soit la quotité de la peine prononcée à son encontre. L'expulsion est donc en principe indépendante de la gravité des faits retenus (ATF 146 IV 105 consid. 3.4.1; 144 IV 332 consid. 3.1.3; arrêts 6B_1439/2021 du 28 novembre 2022 consid. 3.3.1; 6B_139/2022 du 24 novembre 2022 consid. 5.3; 6B_255/2021 du 3 octobre 2022 consid. 1.3.2; cf aussi arrêt 6B_506/2017 précité consid. 1.1 et les références citées). Encore, il importe peu que l'infraction soit achevée ou tentée ou encore que la sanction soit prononcée avec ou sans sursis (ATF 146 IV 105 consid. 3.4.1 et les références citées; 144 IV 168 consid. 1.4.1; arrêts 6B_1418/2021 du 5 décembre 2022 consid. 5.1; 6B_1439/2021 précité consid. 3.3.1; 6B_139/2022 du 24 novembre 2022 consid. 5.3).
2.1.3. Comme susmentionné (
supra consid. 2.1), l'art. 66a al. 2 CP prévoit que le juge peut exceptionnellement renoncer à une expulsion que lorsque celle-ci mettrait l'étranger dans une situation personnelle grave (première condition) et que les intérêts publics à l'expulsion ne l'emportent pas sur l'intérêt privé de l'étranger à demeurer en Suisse (seconde condition). Les conditions posées par cette disposition sont cumulatives (ATF 149 IV 231 consid. 2.1; 144 IV 332 consid. 3.3).
La clause de rigueur décrite à l'art. 66a al. 2 CP permet ainsi de garantir le principe de la proportionnalité (cf. art. 5 al. 2 Cst.; ATF 146 IV 105 consid. 3.4.2; 144 IV 332 consid. 3.3.1). Elle doit être appliquée de manière restrictive (ATF 146 IV 105 consid. 3.4.2; 144 IV 332 consid. 3.3.1). Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral (ATF 146 IV 105 consid. 3.4.2; 144 IV 332 consid. 3.3.2), il convient de s'inspirer des critères énoncés à l'art. 31 de l'ordonnance du 24 octobre 2007 relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative (OASA; RS 142.201) et de la jurisprudence y relative, dans le cadre de l'application de l'art. 66a al. 2 CP. L'art. 31 al. 1 OASA prévoit qu'une autorisation de séjour peut être octroyée dans les cas individuels d'extrême gravité. L'autorité doit tenir compte notamment de l'intégration du requérant selon les critères définis à l'art. 58a al. 1 LEI, de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants, de la situation financière, de la durée de la présence en Suisse, de l'état de santé ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance. Comme la liste de l'art. 31 al. 1 OASA n'est pas exhaustive et que l'expulsion relève du droit pénal, le juge devra également, dans l'examen du cas de rigueur, tenir compte des perspectives de réinsertion sociale du condamné (ATF 147 IV 453 consid. 1.4.5; 144 IV 332 consid. 3.3.2). En règle générale, il convient d'admettre l'existence d'un cas de rigueur au sens de l'art. 66a al. 2 CP lorsque l'expulsion constituerait, pour l'intéressé, une ingérence d'une certaine importance dans son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par la Constitution fédérale (art. 13 Cst.) et par le droit international, en particulier l'art. 8 CEDH (ATF 149 IV 231 consid. 2.1.1; 147 IV 453 consid. 1.4.5).
L'art. 8 par. 1 CEDH dispose que toute personne a en particulier droit au respect de sa vie privée et familiale. Une ingérence dans l'exercice de ce droit est possible, selon l'art. 8 par. 2 CEDH, pour autant qu'elle soit prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. Selon la jurisprudence, pour se prévaloir du droit au respect de sa vie privée au sens de l'art. 8 par. 1 CEDH, l'étranger doit établir l'existence de liens sociaux et professionnels spécialement intenses avec la Suisse, notablement supérieurs à ceux qui résultent d'une intégration ordinaire. Le Tribunal fédéral n'adopte pas une approche schématique qui consisterait à présumer, à partir d'une certaine durée de séjour en Suisse, que l'étranger y est enraciné et dispose de ce fait d'un droit de présence dans notre pays. Il procède bien plutôt à une pesée des intérêts en présence, en considérant la durée du séjour en Suisse comme un élément parmi d'autres et en n'accordant qu'un faible poids aux années passées en Suisse dans l'illégalité, en prison ou au bénéfice d'une simple tolérance (cf. ATF 134 II 10 consid. 4.3; arrêts 6B_1247/2023 du 10 juin 2024 consid. 4.1.4; 6B_1210/2023 du 24 avril 2024 consid. 4.1 et les arrêts cités). Un séjour légal de dix années suppose en principe une bonne intégration de l'étranger (ATF 144 I 266 consid. 3.9).
Par ailleurs, un étranger peut se prévaloir de l'art. 8 par. 1 CEDH (et de l'art. 13 Cst.), qui garantit notamment le droit au respect de la vie familiale, pour s'opposer à l'éventuelle séparation de sa famille, pour autant qu'il entretienne une relation étroite et effective avec une personne de sa famille ayant le droit de résider durablement en Suisse (ATF 144 II 1 consid. 6.1; 139 I 330 consid. 2.1 et les références citées). Les relations familiales visées par l'art. 8 par. 1 CEDH sont avant tout celles qui concernent la famille dite nucléaire, soit celles qui existent entre époux ainsi qu'entre parents et enfants mineurs vivant en ménage commun (cf. ATF 144 II 1 consid. 6.1; 135 I 143 consid. 1.3.2; arrêts 6B_1210/2023 précité consid. 4.1; 6B_86/2023 du 7 août 2023 consid. 5.2.2). Les relations entre enfants adultes et leurs parents ne bénéficient en revanche pas de la protection de l'art. 8 CEDH, sauf s'il existe entre eux une relation de dépendance qui va au-delà de liens affectifs normaux, par exemple en raison d'une maladie ou d'un handicap (ATF 137 I 154 consid. 3.4.2; arrêts 6B_1210/2023 précité consid. 4.1; 6B_244/2023 du 25 août 2023 consid. 6.3).
2.2. La loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre (interprétation littérale). Il n'y a lieu de déroger au sens littéral d'un texte clair par voie d'interprétation que lorsque des raisons objectives permettent de penser que ce texte ne restitue pas le sens véritable de la disposition en cause. Si le texte n'est pas absolument clair, si plusieurs interprétations de celui-ci sont possibles, il convient de rechercher quelle est la véritable portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à considérer, soit notamment des travaux préparatoires (interprétation historique), du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose ou encore de sa relation avec d'autres dispositions légales (interprétation systématique). Le Tribunal fédéral ne privilégie aucune méthode d'interprétation, mais s'inspire d'un pluralisme pragmatique pour rechercher le sens véritable de la norme; en particulier, il ne se fonde sur la compréhension littérale du texte que s'il en découle sans ambiguïté une solution matériellement juste (ATF 149 IV 105 consid. 3.4; 147 V 35 consid. 7.1; 146 V 87 consid. 7.1). Si plusieurs interprétations sont possibles, il convient de choisir celle qui est conforme à la Constitution (ATF 149 I 2 consid. 3.2.1; 145 III 56 consid. 5.3.1; 144 III 54 consid. 4.1.3.1 et les arrêts cités; cf. aussi ATF 150 IV 48 consid. 3.2; 149 I 2 consid. 3.2.1; 145 II 270 consid. 4.1). L'interprétation conforme à la Constitution trouve ses limites lorsque le texte et le sens de la disposition légale sont absolument clairs, quand bien même ils seraient contraires à la Constitution (ATF 141 II 338 consid. 3.1 et les arrêts cités; arrêts 2C_339/2021 du 4 mai 2022 consid. 4.1; 2C_402/2020 du 10 décembre 2020 consid. 3.1).
2.3. Le recourant reproche à la cour cantonale de ne pas avoir exclu l'application de l'art. 66a al. 1 let. h CP dans le cas d'espèce, opérant une interprétation conforme à la lettre de l'art. 121 al. 3 let. a Cst. (mentionnant le viol ou "tout autre délit sexuel grave"), compte tenu du fait que l'infraction à l'art. 197 al. 4 CP qui lui est imputée serait de très peu de gravité. Il soutient également qu'un parallélisme aurait dû être fait entre les cas de très peu de gravité de l'art. 67 al. 4
bis CP et le cas d'espèce.
2.3.1. Comme on vient de voir, l'art. 66a al. 1 CP a concrétisé le mandat donné au législateur de définir les faits constitutifs des infractions visées à l'art. 121 al. 3 Cst. (cf. art. 121 al. 4 Cst.). En présence d'une infraction figurant dans la liste de l'art. 66a al. 1 CP, une expulsion doit en principe être ordonnée de manière automatique et indépendamment de la gravité des faits retenus, du montant de la peine et du fait que celle-ci ait été prononcée avec ou sans sursis (cf.
supra consid. 2.1.2). Pour ce motif déjà, le recourant ne peut rien déduire lorsqu'il fait valoir que le cas serait de très peu de gravité (cf. arrêt 6B_1439/2021 du 28 novembre 2022 consid. 3.4 où une expulsion a été confirmée en relation précisément avec une infraction à l'art. 197 al. 4 2e phrase CP pour laquelle le recourant avait été condamné à une peine pécuniaire avec sursis de 10 jours-amende). La gravité des faits est en revanche prise en considération lors de la pesée des intérêts opérée dans le cadre de l'analyse de la deuxième condition de l'art. 66a al. 2 CP, dans l'hypothèse où la première condition est remplie, ce qui n'est pas le cas en l'espèce (cf.
infra consid. 2.3.6 et 2.3.7).
Par ailleurs, compte tenu du fait que le législateur a intégré l'infraction prévue à l'art. 197 al. 4 2e phrase CP dans la liste de l'art. 66a al. 1 CP (cf. 66a al. 1 let. h
in fine CP), il a considéré que celle-ci constitue un "autre délit sexuel grave" au sens de l'art. 121 al. 3 let. a Cst., qui conduit à l'expulsion obligatoire de Suisse. Au demeurant, l'art. 121 al. 3 Cst. n'est de toute manière pas formulé de manière suffisamment claire et son applicabilité directe est exclue (cf.
supra consid. 2.1.1).
2.3.2. Le recourant ne peut rien tirer de l'ATF 145 IV 404. Cette jurisprudence ne concerne pas une infraction de pornographie au sens de l'art. 197 al. 4 2e phrase CP, mais une affaire de vol à l'étalage avec une violation d'une interdiction de pénétrer dans un grand magasin. Dans ce cas très particulier, le Tribunal fédéral avait procédé à une interprétation conforme à la Constitution de l'art. 66a al. 1 let. d CP dans le but de définir l'infraction tombant sous le coup de cette disposition, soit celle d'"effraction", prévue à l'art. 121 al. 3 let. a
in fine Cst., laquelle n'existe pas en droit pénal suisse et qui y a été transcrite en combinant le vol (art. 139 CP) avec une violation de domicile (art. 186 CP). En l'espèce, le texte légal de l'art. 66a al. 1 let. h
in fine CP est absolument clair. Il fait référence à l'infraction de pornographie au sens de l'art. 197 al. 4 2e phrase CP, infraction qui existe et est bien définie en droit suisse.
2.3.3. Il est vrai que la cour cantonale a renoncé à prononcer une interdiction à vie d'exercer une activité avec des mineurs à l'encontre du recourant en retenant que l'infraction commise était de très peu de gravité au sens de l'art. 67 al. 4
bis CP. Elle a notamment considéré que la peine prononcée était minime par rapport à la peine-menace de l'art. 197 al. 4 2e phrase CP et que la faute du recourant pouvait être relativisée. Elle a également estimé que l'interdiction ne paraissait pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres infractions du même type, le recourant n'ayant aucun antécédent et le pronostic favorable ayant conduit à l'octroi du sursis. Comme on vient de le voir (cf.
supra consid. 2.3.1), ces éléments (la gravité des faits, le montant de la peine ou le fait que celle-ci ait été prononcée avec un sursis) ne peuvent pas être pris en considération dans le cadre de l'analyse du prononcé d'une expulsion au sens de l'art. 66a al. 1 CP. Du moment que l'infraction figure dans la liste, l'expulsion est automatique, sous réserve d'un cas de rigueur (art. 66a al. 2 CP). Au demeurant, les art. 66a CP et 67 CP visent des objectifs très différents, leur rapprochement étant ainsi de toute manière exclu. En effet, la
ratio legis de la mesure prévue à l'art. 66a CP est le renvoi systématique hors de Suisse des étrangers criminels dès lors qu'ils ont commis les infractions prévues dans la liste de l'art. 66a al. 1 CP (cf. PERRIER DEPEURSINGE/MONODET, in Commentaire romand, Code pénal I, 2e éd. 2021, no2
ad art. 66a CP; cf. FF 2013 5373, 5398). En revanche, l'art. 67 CP vise à prévenir la répétition d'infractions déterminées (cf. arrêt 6B_909/2018 du 23 janvier 2019 consid. 3.4.3; KATIA VILLARD, in Commentaire romand, Code pénal I, 2e éd. 2021, no3
ad art. 67 CP) et à protéger la collectivité contre de nouveaux abus (cf. arrêt 6B_1010/2013 du 17 février 2014 consid. 4.1; KATIA VILLARD,
op. cit., no3
ad art. 67 CP). Du reste, une expulsion est prévue pour une durée limitée (de 5 à 15 ans; cf. art. 66a al. 1
in fine CP), alors que la mesure prévue à l'art. 67 al. 4 CP, pertinente en l'espèce, est prononcée à vie, ayant ainsi un impact potentiellement différent sur l'auteur de l'infraction.
2.3.4. L'affaire zurichoise citée par le recourant ne lui est également d'aucune aide. Comme le rappelle le recourant lui-même, la cour cantonale a en effet relevé que dans cet arrêt, l'Obergericht du canton de Zurich avait renoncé à l'expulsion sous l'angle du cas de rigueur au sens de l'art. 66a al. 2 CP d'un prévenu, vivant en Suisse depuis 18 ans et marié à une suissesse avec qui il avait deux enfants mineurs, retenant que cela le placerait dans une situation personnelle grave.
2.3.5. Au vu de ce qui précède, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral ni constitutionnel en relevant que le recourant avait commis une infraction qui tombait sous le coup de l'art. 66a al. 1 CP et qu'une expulsion était ainsi obligatoire, sous la réserve de l'application de l'art. 66a al. 2 CP, voire des normes de droit international.
2.3.6. Il s'agit maintenant d'analyser si le recourant remplit les conditions cumulatives du cas de rigueur au sens de l'art. 66a al. 2 CP.
En l'espèce, la cour cantonale a relevé que le recourant était arrivé en Suisse à l'âge adulte, en 2018 seulement. Il ne disposait d'aucun titre de séjour et faisait l'objet d'une décision de renvoi, ses chances d'insertion légale dans le pays étant nulles. Au titre de ses relations familiales, il ne faisait valoir que ses visites quotidiennes à sa mère, laquelle était arrivée en Suisse il y avait très peu de temps, alors qu'il indiquait ne plus avoir de contacts avec son père. Les contacts avec ses parents pourraient néanmoins se poursuivre au Kosovo, où ceux-ci pourraient rendre visite au recourant. Il avait encore de nombreux membres de sa famille et des amis au Kosovo, où il semblait retourner régulièrement. Son expulsion vers son pays d'origine ne l'exposait ainsi pas à une situation personnelle grave. La première condition du cas de rigueur n'étant pas remplie, il se justifiait de prononcer l'expulsion du recourant de Suisse pour une durée de 5 ans.
Cette appréciation doit être confirmée.
En effet, sous l'angle de la garantie du respect de sa vie privée d'abord, le recourant ne peut pas justifier d'une intégration réussie. Il n'est arrivé en Suisse qu'en 2018 et a travaillé dans notre pays sans autorisation entre mars 2019 et janvier 2022. Ayant fait l'objet d'une décision définitive et exécutoire de renvoi de Suisse, il ne dispose à l'heure actuelle d'aucun titre de séjour valable, un ultime délai pour quitter notre pays lui ayant été fixé au 30 avril 2022. Un éventuel droit à des cours séjours en Suisse, sans être soumis à l'obligation de visa, ne lui est d'aucune aide pour démontrer une intégration réussie dans notre pays. Le recourant ne fait également état d'aucune intégration sociale ou associative particulière en Suisse. Force est dès lors de constater qu'il ne peut pas se prévaloir du droit au respect de sa vie privée au sens de l'art. 8 par. 1 CEDH.
Sous l'angle de sa vie familiale, il sied de relever que le recourant est célibataire et n'a pas d'enfants. Il n'a plus de contacts avec son père et aucun de ses frères vit dans notre pays. Certes, la mère du recourant vit en Suisse. Il ne s'agit toutefois pas de la famille dite nucléaire au sens de la jurisprudence, le recourant étant âgé de 28 ans. Par ailleurs, la mesure n'empêchera pas le recourant d'entretenir des contacts avec elle par le biais des moyens de télécommunication modernes. Pour le reste, le recourant ne fait qu'opposer sa propre appréciation des preuves à celle de la cour cantonale, sans démontrer en quoi celle-ci aurait versé dans l'arbitraire. Le recourant échoue ainsi à démontrer une ingérence dans sa vie familiale au sens de l'art. 8 CEDH.
Au vu de ce qui précède, l'expulsion du recourant ne le placerait pas dans une situation personnelle grave. Partant, la première des conditions cumulatives de l'art. 66a al. 2 CP n'est pas réalisée.
2.3.7. Faute pour la première condition d'être réalisée, le recourant ne saurait se prévaloir de la clause de rigueur. Ainsi, point n'est besoin d'examiner la deuxième condition cumulative.
2.3.8. En conséquence, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral ni le droit conventionnel en ordonnant l'expulsion du recourant du territoire suisse. L'expulsion du recourant s'avère ainsi conforme aux art. 66a al. 2 CP et 8 CEDH, étant précisé que le recourant n'élève aucun grief spécifique à l'encontre de la durée de la mesure.
3.
Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF).
La cause étant jugée, la demande d'effet suspensif n'a plus d'objet. Au demeurant, le recours en matière pénale interjeté contre un prononcé d'expulsion déploie de plein droit un effet suspensif (arrêts 6B_1256/2023 du 19 avril 2024 consid. 5; 6B_1398/2022 du 12 mai 2023 consid. 4; 6B_1005/2022 du 30 mars 2023 consid. 2).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision.
Lausanne, le 26 juillet 2024
Au nom de la Ire Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Juge présidant : Denys
La Greffière : Corti