Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet. Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
Zurück zur Einstiegsseite Drucken
Grössere Schrift
 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
4P.312/2006 /ech 
 
Arrêt du 27 février 2007 
Ire Cour de droit civil 
 
Composition 
MM. et Mme les Juges Corboz, Président de la Cour, Rottenberg Liatowitsch et Kolly. 
Greffière: Mme Crittin. 
 
Parties 
X.________ Sàrl, 
recourante, représentée par Me Marc Häsler, 
 
contre 
 
Y.________ SA, 
intimée, représentée par Me Carlo Lombardini, 
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, case postale 3108, 1211 Genève 3. 
 
Objet 
art. 9 et 29 al. 2 Cst. (procédure civile), 
 
recours de droit public [OJ] contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève du 
13 octobre 2006. 
 
Faits : 
A. 
A.a Le 12 février 2002, Y.________ SA, de siège à U.________, a conclu un contrat de sponsoring avec A.________, société de siège à V.________, B.________ et son épouse. Par la suite, ces derniers ont transféré, avec l'accord de Y.________ SA, leurs droits et obligations résultant du contrat à X.________ Sàrl, de siège à W.________ 
 
Le contrat, conclu pour une durée de trois ans (2002, 2003, 2004), portait sur un tournoi de ..., désigné dans le contrat par le terme « la Manifestation ». Chaque édition de la manifestation comportait deux étapes par an, l'une en Suisse romande et l'autre en Suisse alémanique. Y.________ SA, avec la marque ..., était le principal sponsor de la manifestation, qui portait le nom de .... De ce fait, Y.________ SA bénéficiait d'un certain nombre de droits, en contrepartie desquels elle devait s'acquitter d'un montant de 350'000 fr., plus TVA, par édition de la manifestation. X.________ Sàrl a confié à A.________ le mandat de l'assister dans l'organisation et l'exécution de la manifestation prévue dans le contrat. 
 
Les éditions 2002 et 2003 ont eu lieu à U.________ pour l'étape concernant la Romandie. S'agissant de la Suisse allemande, la manifestation s'est déroulée à V.________ en 2002 et à W.________, à l'intérieur de la gare principale CFF, en 2003. Y.________ SA a accepté de verser 100'000 fr. supplémentaires, TVA en sus, pour la localisation de ce dernier événement. L'édition 2004 de la manifestation n'a pas eu lieu. 
A.b Par courrier recommandé du 12 novembre 2003, le contrat a été résilié avec effet immédiat et pour justes motifs par Y.________ SA. Cette société a invoqué plusieurs violations contractuelles dans le cadre de l'édition 2003 de la manifestation. Elle a en outre affirmé que cette manifestation était un « échec objectif », qui justifiait, selon le contrat, la résiliation immédiate. 
 
Le 11 mai 2004, X.________ Sàrl a fait notifier à Y.________ SA un commandement de payer à concurrence de 376'600 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 28 février 2002. Le commandement de payer a été frappé d'opposition. 
B. 
B.a Le 21 juin 2004, X.________ Sàrl a déposé, auprès des autorités judiciaires genevoises, une demande en paiement à l'encontre de Y.________ SA. Elle lui réclamait la somme de 350'000 fr., à titre d'intérêt positif à l'exécution du contrat, somme à laquelle s'ajoutaient 26'600 fr. de TVA, avec intérêts à 5% l'an dès le 31 janvier 2003. La demanderesse requérait également la mainlevée définitive de l'opposition faite au commandement de payer susmentionné. 
 
Par jugement du 8 décembre 2005, le Tribunal de première instance a débouté la demanderesse de toutes ses conclusions. Les juges ont retenu que la dernière manifestation n'a pas été un « échec objectif ». Ils ont toutefois considéré que la confiance entre les parties était définitivement rompue, ce qui permettait la résiliation du contrat avec effet immédiat. Par surcroît de motifs, le Tribunal a relevé que la demanderesse n'a pas démontré avoir subi un dommage du fait de la résiliation du contrat. 
B.b Statuant sur appel de la demanderesse, la Chambre civile de la Cour de justice, par arrêt du 13 octobre 2006, a confirmé le jugement du 8 décembre 2005. Elle a jugé, contrairement aux premiers juges, qu'aucun des motifs invoqués par la défenderesse ne constituait un juste motif de résiliation anticipée du contrat. S'agissant du paiement de l'intérêt positif, elle a retenu que la demanderesse n'avait pas apporté des éléments suffisants pour retenir l'existence d'un dommage. 
C. 
La demanderesse interjette un recours de droit public au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 13 octobre 2006, sollicitant, à titre préalable, l'octroi de l'effet suspensif. Elle requiert principalement l'annulation de l'arrêt attaqué pour arbitraire et violation du droit d'être entendu. 
 
La défenderesse conclut, à la forme, à l'irrecevabilité du recours et, au fond, à son rejet. Quant à la cour cantonale, elle se réfère aux considérants de son arrêt. 
 
Par ordonnance du 22 novembre 2006, la demande d'effet suspensif a été rejetée. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
La loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2005, 1242). L'acte attaqué ayant été rendu avant cette date, la procédure reste régie par l'OJ (art. 132 al. 1 LTF). 
2. 
2.1 Le recours de droit public au Tribunal fédéral est ouvert contre une décision cantonale pour violation des droits constitutionnels des citoyens (art. 84 al. 1 let. a OJ). 
 
L'arrêt attaqué, qui est final, n'est susceptible d'aucun autre moyen de droit sur le plan fédéral ou cantonal dans la mesure où la recourante invoque la violation directe d'un droit constitutionnel, de sorte que la règle de la subsidiarité du recours de droit public est respectée (art. 84 al. 2 et 86 al. 1 OJ; ATF 128 II 259 consid. 1.1). En revanche, si la recourante soulève une question relevant de l'application du droit fédéral, le grief n'est pas recevable, parce qu'il pouvait faire l'objet d'un recours en réforme (art. 43 al. 1 et 84 al. 2 OJ; cf. ATF 129 I 173 consid. 1.1). 
 
La recourante est personnellement touchée par l'arrêt entrepris, qui la déboute entièrement de ses conclusions en paiement. Elle a donc un intérêt personnel, actuel et juridiquement protégé à ce que cette décision n'ait pas été adoptée en violation de ses droits constitutionnels, de sorte que la qualité pour recourir (art. 88 OJ) doit lui être reconnue. Interjeté en temps utile (art. 32 et 89 al. 1 OJ) et dans la forme prévue par la loi (art. 90 al. 1 OJ), le recours est donc en principe recevable. 
2.2 Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'examine que les griefs d'ordre constitutionnel invoqués et suffisamment motivés dans l'acte de recours (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 131 III 164 consid. 2.2.2). 
3. 
La recourante se plaint d'arbitraire dans l'établissement des faits et dans l'appréciation des preuves. 
 
Selon la jurisprudence, une décision est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. lorsqu'elle est manifestement insoutenable, qu'elle méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou lorsqu'elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité (ATF 132 III 209 consid. 2.1; 131 I 57 consid. 2); il ne suffit pas qu'une autre solution paraisse également concevable, voire préférable; pour que la décision soit annulée, encore faut-il qu'elle se révèle arbitraire, non seulement dans ses motifs, mais aussi dans son résultat (ATF 132 III 209 consid. 2.1; 131 I 217 consid. 2.1). 
 
En matière d'appréciation des preuves et de constatations de fait, l'autorité tombe dans l'arbitraire lorsqu'elle ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 129 I 8 consid. 2.1). 
4. 
La cour cantonale a considéré que le dommage, allégué par la recourante à l'appui de sa prétention en paiement de l'intérêt positif à l'exécution du contrat, n'a pas été établi à satisfaction. Après avoir apprécié les déclarations de C.________, associé de la recourante, et celles de D.________, directeur de A.________, elle a jugé qu'elle ne pouvait se fonder sur ces propos, largement contradictoires et dont l'exactitude a été considérée comme douteuse. Quant au résultat de l'expertise privée, il a été écarté par l'autorité cantonale. Ce rapport d'expertise, établi le 26 janvier 2006 par la fiduciaire E.________, retient comme résultat des exercices 2002 et 2003 de la manifestation le « bénéfice réel » du compte de pertes et profits comparés, annexé au rapport d'analyse. Dans la mesure où la partie adverse contestait l'expertise, la cour cantonale a estimé qu'il était nécessaire de fournir des précisions, pièces à l'appui, sur les paramètres de calcul du « bénéfice réel ». Il convenait de préciser sur quelle base et à quel titre les montants correspondant aux prestations des associés A.________ et B.________ ont été versés à la recourante sans contre-prestation. A défaut de toute explication, ce bénéfice n'a pas été retenu par la juridiction cantonale, qui a pris appui sur le second résultat du compte de pertes et profits, soit sur le « résultat après facturation interne ». Ce résultat porte en déduction du « bénéfice opérationnel » (revenus de sponsoring - frais généraux) les diverses prestations des associés. 
5. 
5.1 La recourante soutient que la cour cantonale aurait dû arrêter le bénéfice réalisé à 170'101 fr.27, pour 2002, et à 237'749 fr.29, pour 2003. Ces chiffres correspondent au résultat - occulté par l'autorité cantonale - du compte de pertes et profits, intitulé « bénéfice opérationnel », à la comptabilité produite, ainsi qu'aux déclarations de D.________. La recourante en déduit que l'appréciation des preuves faite par la cour cantonale est insoutenable. Dès lors que la perte pour l'exercice 2002 telle que retenue par l'autorité cantonale conduit à l'impossibilité de montrer l'existence d'un bénéfice pour l'exercice 2004, l'arbitraire dans le résultat est également réalisé. Cela étant, il est choquant et arbitraire, pour la recourante, de se voir reprocher de n'avoir pas « apporté la preuve d'éléments de fait pouvant servir d'indices de l'existence d'un dommage dû à la résiliation du contrat par l'intimée ». 
5.2 A titre préalable, il convient de relever que la recourante ne remet pas en cause, dans ce grief, la considération de l'autorité cantonale selon laquelle, faute de toute explication sur les raisons pour lesquelles les associés auraient fournis des prestations sans contre-prestation, les chiffres correspondant au « bénéfice réel » ne pouvaient être retenus. Elle estime que seul le « bénéfice opérationnel », sans déduction des prestations de A.________ et B.________, doit être pris en compte. 
 
Dans son argumentation, la recourante n'explique pas en quoi il serait insoutenable pour la cour cantonale d'avoir porté les prestations des associés en déduction du « bénéfice opérationnel ». Lorsqu'elle déclare que les honoraires et factures des associés n'ont aucune réalité économique, la recourante se borne à une affirmation qui heurte le document comptable sur lequel elle se fonde; une telle argumentation est impropre à démontrer l'arbitraire. En cela, le moyen soulevé est irrecevable. 
 
Au demeurant, le grief est dénué de tout fondement. La recourante fonde l'essentiel de son argumentation sur les comptes figurant à la fin de l'expertise privée effectuée à sa demande par la fiduciaire E.________. Il ressort de ce document que les ressources de la recourante, pour assurer les manifestations en 2002 et 2003, étaient constituées exclusivement de sponsoring. Après déduction des frais généraux, un bénéfice assez important se dégage, de 170'101 fr.27 en 2002 et de 237'749 fr.29 en 2003. La recourante voudrait que l'on se fonde sur ces chiffres. C'est oublier que dans les lignes suivantes, le document fait état d'honoraires et de facturations des associés. Selon le sens ordinaire des mots, les honoraires et les factures visent des sommes dues par la société. Ces mots ne peuvent pas se confondre avec la part des membres au bénéfice (art. 804 al. 1 CO). Par ailleurs, il ressort des explications données par la recourante que les associés avaient apporté l'affaire et que la recourante leur avait confié le mandat de l'assister dans l'organisation de l'exécution de la manifestation; il est indiqué aussi que l'un des associés a pour but social la recherche de sponsors. On en déduit nécessairement que les honoraires et factures correspondent à des sommes que les associés considéraient comme dues, indépendamment de savoir quelle était exactement leur prestation. Dès lors que les comptes font apparaître que des sommes étaient dues par la société à ses associés, il est logique d'admettre qu'elles réduisent d'autant le bénéfice net. Une telle lecture du document comptable ne peut pas être qualifiée d'arbitraire. Que le compte de pertes et profits distingue encore les factures sans contre-prestation des associés n'y change rien. Dans la mesure où le compte de pertes et profits fait apparaître des sommes dues aux associés, la cour cantonale pouvait se fonder sur le bénéfice net, après déduction des honoraires et factures des associés. Or, celui-ci s'est élevé à 27'755 fr.29 en 2003, tandis que la manifestation de 2002 s'est soldée par une perte de 6'741 fr.57. Face à de tels résultats, la cour cantonale pouvait admettre, sans tomber dans l'arbitraire, qu'il n'est pas certain qu'une manifestation supplémentaire aurait rapporté un bénéfice. Sur cette base, les magistrats cantonaux n'ont pas fait preuve d'arbitraire en jugeant que la recourante n'a pas apporté des éléments suffisants pour retenir l'existence d'un dommage. 
6. 
La recourante invoque enfin une violation de son droit d'être entendu, au sens de l'art. 29 al. 2 Cst. Elle reproche aux juges cantonaux de ne pas avoir donné suite à l'offre de preuve contenue dans l'écriture d'appel du 30 janvier 2006. Pour se faire, elle considère la conclusion subsidiaire de son mémoire d'appel, qui invitait l'autorité saisie à l'acheminer à prouver par toutes voies de droit utiles la réalité des faits allégués, comme une offre de preuve. Si la Cour de justice estimait que l'expertise produite devant elle n'était pas pleinement compréhensible, elle pouvait, sur la base de l'offre de preuve susmentionnée et conformément à l'art. 307 al. 1 et 2 CPC/GE, ordonner l'audition de la personne qui avait dressé l'expertise. La recourante estime encore que les magistrats ont enfreint l'art. 29 al. 2 Cst., en ayant retenu que la recourante n'a aucunement indiqué sur quelle base et à quel titre les montants correspondant au « bénéfice réel » de 147'632 fr. et de 172'496 fr. lui ont été versés sans contre-prestation. 
6.1 
6.1.1 La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu en particulier le droit pour le justiciable de s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à son détriment, celui de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur le sort de la décision (ATF 125 V 332 consid. 3a) et celui de participer à l'administration des preuves, d'en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 129 I 249 consid. 3; 127 I 54 consid. 2b). S'agissant plus précisément du droit de fournir des preuves, la jurisprudence a exposé que l'autorité avait l'obligation, sous l'angle du droit d'être entendu, de donner suite aux offres de preuve présentées en temps utile et dans les formes requises, à moins qu'elles ne soient manifestement inaptes à apporter la preuve ou qu'il s'agisse de prouver un fait sans pertinence (cf. ATF 131 I 153 consid. 3; 124 I 241 consid. 2; 121 I 306 consid. 1b). En outre, l'autorité n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais elle peut au contraire se limiter à ceux qui, sans arbitraire, lui paraissent pertinents (cf. ATF 126 I 97 consid. 2b et les arrêts cités). 
6.1.2 Aux termes de l'art. 307 CPC/GE, la cour peut ordonner que les procédures probatoires qui ont eu lieu en première instance et qui lui paraissent défectueuses ou insuffisantes, soient refaites devant elle (al. 1). Elle peut aussi ordonner toute autre espèce d'instruction ou de preuve qui n'a pas été ordonnée par les premiers juges (al. 2). 
6.2 Compte tenu des reproches formulés à l'encontre de l'autorité cantonale, il revenait à la recourante d'invoquer et de démontrer une éventuelle application arbitraire du droit cantonal, sous l'angle de l'art. 307 LPC/GE. Aucune démonstration de ce genre n'a pourtant été entreprise. S'agissant, enfin, de la discussion sur la déduction des prestations des associés, il convient d'admettre qu'elle ne relève pas du droit d'être entendu, mais de l'appréciation des preuves, dont le caractère insoutenable n'a en aucun cas été démontré par la recourante. Cela étant, le grief de violation du droit d'être entendu doit être rejeté. 
7. 
Les considérants qui précèdent commandent le rejet du recours, dans la mesure où il est recevable. 
8. 
Vu l'issue du litige, les frais et dépens sont mis à la charge de la recourante (art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
2. 
Un émolument judiciaire de 6'000 fr. est mis à la charge de la recourante. 
3. 
La recourante versera à l'intimée une indemnité de 7'000 fr. à titre de dépens. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. 
Lausanne, le 27 février 2007 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: La greffière: