Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
4P.322/2005 /ech
Arrêt du 27 mars 2006
Ire Cour civile
Composition
MM. et Mme les Juges Corboz, Président, Klett et Favre.
Greffier: M. Ramelet.
Parties
A.________,
recourant, représenté par Me Philippe Schweizer,
contre
B.________,
intimé, représenté par Me Benoît Ribaux,
Ie Cour civile du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel, rue du Pommier 1, case postale 1161, 2001 Neuchâtel 1.
Objet
procédure civile, droit d'être entendu,
recours de droit public contre le jugement de la Ie Cour civile du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel du 31 octobre 2005.
Faits:
A.
Le 3 novembre 1990, B.________, A.________ et cinq tiers, formant une société simple, ont acquis, pour le prix de 750'000 fr., un immeuble, à La Chaux-de-Fonds. Les associés, sous la forme d'un consortium, ont procédé à d'importants travaux de rénovation sur le bâtiment, lesquels ont provoqué des dépenses élevées financées par un prêt hypothécaire de la banque X.________, devenue par la suite Y.________ SA.
L'affaire n'ayant pas procuré le rendement attendu, des mesures d'assainissement ont dû être prises, dans le cadre desquelles la banque précitée a partiellement abandonné sa créance, le prêt étant ramené à 2'600'000 fr. en capital, valeur au 30 septembre 1994.
Par acte notarié du 2 juin 1995, les associés ont dissous, avec effet au 30 septembre 1994, le consortium qu'ils formaient et cédé à B.________ et A.________ leurs droits indivis sur le bien-fonds susmentionné; les cessionnaires ont déclaré affecter l'immeuble au régime de la copropriété au sens des art. 646 ss CC, par part égale entre eux, et reprendre comme codébiteurs solidaires les dettes et engagements contractés auprès du créancier hypothécaire pour un montant en capital de 2'600'000 fr.
En raison des retards survenus dans la couverture des intérêts hypothécaires, Y.________ SA a dénoncé, le 17 février 2000, son prêt au remboursement et réclamé paiement aux deux codébiteurs solidaires du montant de 2'821'323 fr.15. Après avoir introduit des poursuites en réalisation de gage immobilier, Y.________ SA a requis le 22 février 2001 la vente de l'immeuble, dont une expertise a estimé la valeur à 1'875'000 fr.
Le 7 mars 2001, B.________ a signé avec Y.________ SA une convention selon laquelle il s'engageait, d'une part, à verser à celle-ci immédiatement un amortissement extraordinaire de 1'000'000 fr., montant pour lequel il était subrogé dans les droits de l'établissement bancaire, et, d'autre part, à acheter, lors de la vente aux enchères à intervenir, l'immeuble au prix résiduel de 1'600'000 fr. Le 10 juillet 2001, conformément à cet accord, B.________ a acquis le bien-fonds pour le prix précité au cours d'enchères publiques.
B.
B.a Le 12 août 2002, B.________ a fait notifier une poursuite à A.________, que ce dernier a frappée d'opposition.
Par demande du 26 juin 2003, B.________ a ouvert action contre A.________ devant l'une des Cours civiles du Tribunal cantonal neuchâtelois. Le demandeur a conclu à ce que le défendeur lui verse 429'285 fr.75 plus intérêts à 5 % l'an dès le dépôt de la demande, l'opposition formée à la poursuite précitée étant levée à due concurrence. Le demandeur a fait valoir qu'il avait versé pour acquérir l'immeuble un montant total de 2'600'000 fr., auquel s'ajoutaient 15'977 fr. de frais du service des réalisations immobilières et 26'400 fr. à titre de droits de mutation ou "lods". Comme le bien-fonds ne valait que 1'875'000 fr., la perte qu'il avait subie représentait 767'377 fr. Les parties étant codébitrices solidaires, le défendeur devait lui rembourser la moitié de la perte, soit 383'688 fr.50, plus la moitié d'un décompte d'intérêts s'élevant à 91'194 fr.55, c'est-à-dire 45'597 fr.25.
Par réponse datée du 1er décembre 2003, le défendeur a conclu au rejet de la demande; reconventionnellement, il a requis que le demandeur soit condamné à lui payer 45'470 fr.15 avec intérêts à 5 % dès le dépôt de la réponse. Au sujet de la demande principale, A.________ a soutenu que l'action était prématurée dès lors que la société simple formée par les plaideurs n'était pas liquidée, que de toute manière le demandeur n'avait pas éprouvé de perte, l'immeuble valant bien 2'600'000 fr., et que le préjudice éventuellement subi par ce dernier résultait de la transaction que l'intéressé avait conclue avec Y.________ SA. Sur la reconvention, le défendeur a exposé que l'accord passé entre B.________ et Y.________ SA n'avait pas eu pour effet de le libérer de ses obligations à l'endroit de cette banque, laquelle lui avait imposé un plan de redressement en relation avec la créance qu'elle déduisait du certificat d'insuffisance de gages délivré le 6 décembre 2002 pour un montant en capital et intérêts de 221'981 fr.75. Le défendeur a ainsi allégué qu'au jour du dépôt de la réponse, il avait payé à Y.________ SA un montant de 90'940 fr.30, dont le demandeur lui devait remboursement de la moitié, soit 45'470 fr.15.
Dans sa duplique du 16 février 2004, le défendeur a exposé que les versements qu'il avait effectués pour éteindre la créance de Y.________ SA s'élevaient désormais à 137'079 fr.80 et que le demandeur était son débiteur de la moitié de cette somme, à savoir 68'539 fr.90.
Pour qu'il soit tenu compte en instance cantonale des versements successifs opérés par le défendeur au profit de Y.________ SA en remboursement du certificat d'insuffisance de gages, sans que ce plaideur soit obligé de compléter à chaque fois ses mémoires, les parties ont conclu les 3 et 8 mars 2004 une convention de procédure, à teneur de laquelle le défendeur "(était) autorisé, avant clôture des débats, à alléguer et documenter tout paiement qu'il aurait pu effectuer en mains de Y.________ SA à compter de ce jour ... ...". Le juge instructeur a pris acte de cette convention à son audience du 16 mars 2004.
La procédure probatoire, qui a comporté le dépôt de pièces littérales et l'audition de divers témoins, a été clôturée le 19 octobre 2004.
Le 14 décembre 2004, le juge instructeur a écrit aux mandataires des parties de lui indiquer si leurs mandants acceptaient que le jugement soit rendu par voie de circulation, en application de l'art. 334 al. 1 du Code de procédure civile neuchâtelois du 30 septembre 1991 (CPC/NE), ou s'ils souhaitaient que la cause soit citée pour plaidoiries et jugement.
Par écritures des 19 et 24 janvier 2005, respectivement le demandeur et le défendeur ont déclaré accepter que la Cour civile rende son jugement par voie de circulation.
B.b Dans son jugement du 31 octobre 2005, la Ie Cour civile du Tribunal cantonal neuchâtelois a condamné le défendeur à verser au demandeur la somme de 370'488 fr. avec intérêts à 5 % l'an dès le 31 juillet 2001 (1), condamné le demandeur à payer au défendeur le montant de 83'540 fr. plus intérêts à 5 % l'an dès le 1er mars 2004 (2), ordonné la compensation entre les créances précitées (3), prononcé, à concurrence de 360'258 fr., la mainlevée définitive de l'opposition totale formée par le défendeur à la poursuite qui lui a été notifiée (4), rejeté toutes autres ou plus amples conclusions (5), enfin statué sur les frais (6) et dépens (6, recte: 7).
C.
A.________ forme un recours de droit public au Tribunal fédéral contre le jugement précité. Invoquant une application arbitraire des règles cantonales de procédure et une double violation de son droit d'être entendu, il conclut à l'annulation de la décision cantonale.
L'intimé conclut au rejet du recours, alors que la cour cantonale déclare se référer à son jugement.
Le Tribunal fédéral considère en droit:
1.
Le recours de droit public au Tribunal fédéral est ouvert contre une décision cantonale pour violation des droits constitutionnels des citoyens (art. 84 al. 1 let. a OJ).
Le jugement rendu par la cour cantonale, qui est final, n'est susceptible d'aucun autre moyen de droit sur le plan fédéral ou cantonal dans la mesure où le recourant invoque la violation directe d'un droit de rang constitutionnel, de sorte que la règle de la subsidiarité du recours de droit public est respectée (art. 84 al. 2 et 86 al. 1 OJ). En revanche, si le recourant soulève une question relevant de l'application du droit fédéral, le grief n'est pas recevable, parce qu'il pouvait faire l'objet d'un recours en réforme (art. 43 al. 1 et 84 al. 2 OJ).
Le recourant est personnellement touché par la décision attaquée, qui rejette ses conclusions libératoires, de sorte qu'il a un intérêt personnel, actuel et juridiquement protégé à ce que cette décision n'ait pas été prise en violation de ses droits constitutionnels; en conséquence, il a qualité pour recourir (art. 88 OJ).
Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'examine que les griefs d'ordre constitutionnel invoqués et suffisamment motivés dans l'acte de recours (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 130 I 26 consid. 2.1 p. 31, 258 consid. 1.3 p. 261/262).
Dans un recours de droit public pour arbitraire, les moyens de fait ou de droit nouveaux sont prohibés (ATF 124 I 208 consid. 4b p. 212). Le Tribunal fédéral se fonde dès lors sur l'état de fait tel qu'il a été retenu dans l'arrêt attaqué, à moins que le recourant ne démontre que la cour cantonale a retenu ou, au contraire, ignoré de manière insoutenable des faits déterminants pour l'issue de la querelle (ATF 118 Ia 20 consid. 5a p. 26). Le recours de droit public n'étant pas un appel, il n'appartient pas au Tribunal fédéral de substituer sa propre appréciation à celle de l'autorité cantonale; il n'entre par conséquent pas en matière sur les griefs revêtant un caractère appellatoire (ATF 129 I 113 consid. 2.1 p. 120; 128 III 50 consid. 1c).
2.
L'autorité cantonale a considéré que le consortium qu'avaient constitué les plaideurs avec cinq tiers avait pris fin, si ce n'est par la volonté unanime des associés, en tout cas lors de la vente forcée de l'immeuble intervenue le 10 juillet 2001, de sorte que la demande introduite par B.________ n'était pas prématurée. Elle a admis que le demandeur, lequel avait versé à Y.________ SA un montant de 2'600'000 fr., avait éteint la créance en capital de celle-ci, que ce paiement avait eu un effet libératoire à l'encontre du défendeur et que B.________ disposait donc d'une créance récursoire contre A.________. La Cour civile a calculé le montant de cette créance en prenant en compte le prix payé par le demandeur pour acquérir l'immeuble aux enchères (i.e. 2'600'000 fr.) plus les frais versés à l'Etat (i.e.15'977 fr.), soit 2'615'977 fr., somme qu'elle a divisée par deux, d'où un quotient de 1'307'988 fr., dont elle a déduit 937'500 fr., c'est-à-dire la moitié de la valeur du bien-fonds déterminée par expertise (i.e. 1'875'000 fr. / 2), pour obtenir en fin de compte le montant de 370'488 fr. (1'307'988 fr. - 937'500 fr.); elle a jugé, en se référant à la pièce 3 (cotée D 8/3) des lots de documents produits par le défendeur, que cette créance devait porter intérêts à 5 % dès le 31 juillet 2001, échéance de la mise en demeure.
Les magistrats neuchâtelois ont encore jugé que le défendeur, sur la base du certificat d'insuffisance de gages obtenu par Y.________ SA, avait de son côté versé à cette banque 167'079 fr.80 jusqu'à la clôture des débats, laquelle était intervenue à fin janvier 2005 puisque les deux parties avaient renoncé à plaider. A.________ disposait ainsi d'une créance récursoire de la moitié de ce montant contre B.________, soit de 83'540 fr. (après arrondissement au franc supérieur), plus intérêts à 5 % dès le 1er mars 2004, date moyenne des remboursements effectués.
La créance du demandeur, avec les intérêts courus, représentait au jour du jugement 450'759 fr., alors que celle du défendeur, y compris les intérêts, se montait à la même date à 90'501 fr. Après compensation, la cour cantonale a obtenu une somme de 360'258 fr., à concurrence de laquelle elle a prononcé la mainlevée définitive de l'opposition formée par le défendeur à la poursuite qui lui avait été notifiée le 12 août 2002.
3.
3.1 A l'appui de son premier moyen, qui se subdivise en trois volets, le recourant fait tout d'abord valoir que la Cour civile a statué ultra petita et enfreint arbitrairement l'art. 56 al. 1 CPC/NE. Alors que le demandeur réclamait un montant en capital avec des intérêts dès le dépôt de la demande, poursuit le défendeur, la cour cantonale lui a accordé des intérêts à compter d'une date antérieure de près de deux ans au point de départ requis.
Puis, le défendeur soutient que l'octroi desdits intérêts sur la base d'une mise en demeure qui n'a jamais été ni alléguée ni prouvée consacrerait une application arbitraire de l'art. 57 al. 1 CPC/NE.
Enfin, le recourant déclare qu'il ne pouvait pas s'attendre à ce que les magistrats neuchâtelois fixent le point de départ des intérêts dus à l'intimé dès le 31 juillet 2001, si bien qu'il aurait été privé de la possibilité de faire valoir ses moyens et aurait été victime d'une violation de son droit d'être entendu. Il expose à ce propos qu'il a été condamné au minimum à 6 jours d'intérêts qui n'étaient pas dus, cela sans avoir eu la faculté de se défendre
3.2
3.2.1 Le droit d'être entendu est une garantie constitutionnelle de nature formelle, dont la violation doit entraîner l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond (ATF 127 V 431 consid. 3d/aa p. 437). Il sied donc d'examiner en priorité le dernier pan du moyen (ATF 124 I 49 consid. 1).
Le droit d'être entendu doit être reconnu et respecté lorsque singulièrement le juge envisage de fonder sa décision sur une norme ou un motif juridique non évoqué dans la procédure antérieure et dont aucune des parties en présence ne s'est prévalue et ne pouvait supputer la pertinence in casu (ATF 125 V 368 consid. 4a p. 370 et les références).
En l'espèce, l'intimé a conclu dans sa demande du 26 juin 2003 à l'octroi d'une somme en capital de 429'285 fr. 75 et au versement d'intérêts moratoires ( art. 104 et 105 CO ) au taux de 5 % l'an "dès le dépôt de la demande". Saisie de cette conclusion, la Cour civile devait ainsi juger du bien-fondé de la créance invoquée, en fixer la quotité si la prétention était justifiée et arrêter le dies a quo et le taux de la dette accessoire d'intérêt. Dans ce contexte, il est totalement exclu d'admettre qu'en ayant déterminé le point de départ des intérêts moratoires dus par le défendeur à sa partie adverse, l'autorité cantonale a statué sur un point inattendu, au sujet duquel ce dernier n'a pas pu présenter ses moyens. Que le dies a quo fixé par les magistrats neuchâtelois ne satisfasse pas le recourant n'a rien à voir avec une atteinte à son droit d'être entendu.
Ce pan du grief confine à la témérité.
3.2.2 A teneur de l'art. 56 CPC/NE, le juge est lié par les conclusions des parties en ce sens qu'il ne peut accorder ni plus ni autre chose que ce qui est demandé (al. 1); il peut accorder moins (al. 2). Cette norme est l'expression de l'adage latin "Ne eat judex ultra petita partium". Cela signifie que le demandeur détermine librement l'étendue de la prétention qu'il déduit en justice, alors le défendeur décide de la mesure dans laquelle il veut se soumettre à l'action (cf. par ex. Oscar Vogel/Karl Spühler, Grundriss des Zivilprozessrechts, 8e éd., chap. 6, n. 9; Max Kummer, Grundriss des Zivilprozessrechts, 4e éd, p. 81).
In casu, comme on l'a vu, le demandeur a sollicité que le défendeur soit condamné à lui verser le montant de 429'285 fr. 75, avec intérêts à 5 % l'an dès le 26 juin 2003, jour du dépôt de la demande. Le demandeur n'a pas réduit ses conclusions pendant le procès. Dans le jugement attaqué, la Cour civile a octroyé au demandeur la somme de 370'488 fr. plus intérêts à 5 % l'an dès le 31 juillet 2001. Le montant accordé au recourant par l'autorité cantonale, si l'on y ajoute les intérêts moratoires à partir du dies a quo qu'elle a fixé, représentait en valeur au moment de l'introduction d'instance, à savoir au 26 juin 2003 (i.e., pour simplifier, 23 mois plus tard), la somme de 405'994 fr. (370'488 fr. + 18'525 du 31 juillet 2001 au 31 juillet 2002 (5% de 370'488 fr. ) + 16'981 du 1er août 2002 au 30 juin 2003 (11/12e de 18'525 fr.)).
Partant, il appert que la cour cantonale, compte tenu des accessoires de la créance admise, n'a pas appliqué arbitrairement l'art. 56 al. 1 CPC/NE interdisant qu'il soit jugé ultra petita, puisque la somme dont le défendeur a été reconnu redevable est inférieure de plus de 20'000 fr. aux prétentions en capital que l'intimé avait présentées dans sa demande.
Cette partie du grief est privé de fondement.
3.2.3 Selon l'art. 57 al. 1 CPC/NE, le juge ne peut ni suppléer ni suggérer des faits qu'une partie n'alléguerait pas spontanément, mais il peut exiger des explications sur les moyens ou conclusions qui lui paraissent obscurs ou contradictoires.
Pour François Bohnet (Code de procédure civile neuchâtelois commenté, 2e éd., Bâle 2005, p. 93 in medio), qui se fonde sur les dispositions de l'ancien Code de procédure cantonale, l'allégué doit pouvoir être interprété largement et comprendre les faits qui normalement sont liés au fait allégué.
De toute manière, le principe posé par l'art. 57 al. 1 CPC/NE trouve ses limites dans la prohibition du formalisme excessif, qui est une forme particulière du déni de justice formel (cf. art. 29 al. 1 Cst.). Il y a formalisme excessif seulement lorsque la stricte application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi et complique de manière insoutenable la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l'accès aux tribunaux; l'excès de formalisme peut résider soit dans la règle de comportement imposée au justiciable par le droit cantonal, soit dans la sanction qui lui est attachée (ATF 128 II 139 consid. 2a; 127 I 31 consid. 2a/bb; 125 I 166 consid. 3a).
Il résulte du dossier que l'intimé a allégué, sous chiffre 11 de sa demande, qu'" à de multiples reprises et sous diverses formes, (il) a invité le défendeur ... ... à participer à la perte subie par le (premier)". Quant au recourant, il a produit dans sa réponse, à l'appui de ses allégués 31 et 32, la pièce, cotée D. 8/3, sur laquelle la cour cantonale s'est fondée pour déterminer le moment où le défendeur a été interpellé par son adverse partie (cf. art. 102 al. 1 CO). Par ce document, daté du 12 juillet 2001, le demandeur, par l'entremise de son conseil, mettait expressément en demeure le défendeur de lui rembourser le montant de 792'800 fr. "jusqu'au 31 juillet 2001".
La Cour civile a certes procédé à une interprétation très large de l'allégué 11 de la demande en rapprochant le fait qui y était énoncé d'une pièce déposée par le recourant à l'appui d'allégations ayant un tout autre objet, à savoir les circonstances ayant entouré la conclusion de la convention du 7 mars 2001 entre l'intimé et Y.________ SA. Il n'en demeure pas moins qu'il n'était pas insoutenable, au vu de l'opinion de l'auteur précité et de l'interdiction du formalisme excessif, de prendre en compte cette écriture pour déterminer le jour à partir duquel le défendeur était en demeure d'exécuter l'obligation dont le demandeur était créancier à son endroit.
Le troisième volet du moyen est infondé.
4.
4.1 En guise de second moyen, le recourant fait longuement grief à l'autorité cantonale d'avoir fait abstraction des remboursements qu'il a effectués auprès de Y.________ SA au cours de l'année 2005 et d'avoir levé définitivement son opposition à la poursuite à concurrence d'un montant irréel, cela au mépris de l'accord de procédure intervenu en mars 2004. Il y voit une violation crasse de son droit d'être entendu et du "principe de fair play en procédure". Il fait grand cas d'une écriture qu'il a adressée au juge instructeur de la Cour civile le 13 décembre 2004, dans laquelle il requérait la possibilité d'ajuster ses conclusions jusqu'à la clôture des débats en fonction des paiements successifs opérés en faveur de ladite banque. Il prétend que ce magistrat est revenu par la suite sur cette "faculté procédurale" sans aucun avertissement, contrairement à ce qu'il aurait laissé entendre dans son pli du 14 décembre 2004.
4.1.1 On peut sérieusement douter que le moyen, dont le caractère appellatoire est prédominant, satisfasse aux exigences strictes de motivation instaurées par l'art. 90 al. 1 let. b OJ. Il n'importe dès lors que la critique est infondée.
4.1.2 Le recourant n'invoquant aucune règle du droit cantonal de procédure protégeant son droit d'être entendu, le grief sera examiné exclusivement au regard des principes découlant de l'art. 29 al. 2 Cst. (ATF 126 I 15 consid. 2a et les arrêts cités).
La jurisprudence a en particulier déduit de l'art. 29 al. 2 Cst. le droit pour le justiciable de participer à l'administration des preuves essentielles ou pour le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela pourrait influer sur le sort de la querelle (ATF 129 II 497 consid. 2.2 p. 505; 127 I 54 consid. 2b p. 56). Le droit d'être entendu confère ainsi aux plaideurs le droit de s'exprimer sur tous les points importants avant qu'une décision ne soit prise; cette règle s'applique sans restriction aux questions de fait (ATF 124 I 49 consid. 3c p. 52).
4.1.3 Dans le cas présent, les parties ont passé les 3 et 8 mars 2004 une convention de procédure, en vertu de laquelle le défendeur était désormais autorisé, "avant clôture des débats", à faire état des remboursements auxquels il pourrait procéder en mains de Y.________ SA. Le juge instructeur a pris acte de cette convention le 16 mars 2004.
En application de cet accord, le recourant, par le truchement de son avocat, a requis du juge instructeur le 13 décembre 2004 qu'il fasse connaître la date à laquelle les débats seraient clos, afin qu'il soit à même, au besoin, d'"ajuster (ses) conclusions". Le 14 décembre 2004, ce magistrat a prié les parties de lui indiquer jusqu'au 20 janvier 2005 si elles acceptaient que le jugement soit rendu par voie de circulation comme le permet l'art. 334 al. 1 CPC/NE ou si elles souhaitaient que la cause soit citée pour plaidoiries et jugement; le juge instructeur a encore ajouté que le point soulevé par le conseil du défendeur le 13 décembre 2004 serait examiné quand les parties auront "fait connaître leur détermination sur le mode d'envisager le jugement".
Le conseil du demandeur a accepté, par courrier du 19 janvier 2005, que le jugement soit rendu par voie de circulation. Le même jour, le conseil du défendeur s'est borné à prendre note du contenu de l'écriture du juge instructeur datée du 14 décembre 2004 et à signaler qu'un nouveau versement de 5'000 fr. était survenu le 24 décembre 2004, sans toutefois se déterminer sur l'option proposée par ce magistrat. Relancé par le Greffier du Tribunal cantonal, l'avocat du défendeur, par pli du 24 janvier 2004 reçu le lendemain, a affirmé qu'il était d'accord qu'il soit statué sur le différend par voie de circulation.
Les cantons déterminent librement à quel stade du procès les moyens d'attaque et de défense doivent être formulés (cf. Fabienne Hohl, Procédure civile, tome I, ch. 813 p. 157). En principe, les parties peuvent invoquer leurs moyens jusqu'à la clôture des débats (Kummer, op. cit., p. 83 in medio; Vogel/Spühler, op. cit., chap. 6, n. 104 et 105).
En droit neuchâtelois, l'art. 329 al. 1 CPC/NE dispose que s'il y a plaidoiries, le président du tribunal accorde à chaque partie deux tours de parole, puis il prononce la clôture des débats. Quant à l'art. 334 al. 1 CPC/NE, il prescrit qu'en cas de défaut ou d'acquiescement, ou si les parties y ont expressément consenti, le président du tribunal peut proposer de juger la cause par voie de circulation, sans débat oral ni délibération en public.
Il résulte de ces éléments que dans l'instance divisant les parties, la clôture des débats est intervenue le 25 janvier 2005, soit le jour où le greffe de l'autorité cantonale a reçu la lettre expédiée par l'avocat du recourant manifestant sans restriction l'accord de celui-ci à la reddition d'une décision par voie de circulation. C'est ce qu'a retenu la Cour civile, qui a fixé ladite clôture à fin janvier 2005.
Après avoir formellement renoncé à plaider, cela alors qu'en droit neuchâtelois les plaidoiries précèdent immédiatement la clôture des débats (cf. art. 329 al. 1 CPC/NE), le recourant ne pouvait pas s'attendre à pouvoir par la suite présenter de nouveaux moyens de défense.
Les parties ayant ainsi consenti à ce que la cause soit jugée par voie de circulation, la question soulevée précédemment par le recourant dans son pli du 13 décembre 2004 à propos de l'ajustement éventuel de sa reconvention avait perdu son objet, de sorte que le juge instructeur pouvait se dispenser d'y répondre.
On ne discerne pas de violation du droit d'être entendu en l'occurrence.
Aucune volte-face inopinée ne pouvant être reprochée au magistrat instructeur, le grief de "fair play" en procédure, à supposer qu'il ait une portée propre, est sans consistance.
5.
Il suit de là que le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité. Vu l'issue du litige, le recourant supportera l'émolument de justice et versera à l'intimé une indemnité de dépens (art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Un émolument judiciaire de 6'500 fr. est mis à la charge du recourant.
3.
Le recourant versera à l'intimé une indemnité de 7'500 fr. à titre de dépens.
4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la Ie Cour civile du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel.
Lausanne, le 27 mars 2006
Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse
Le président: Le greffier: