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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
1B_276/2018  
 
 
Arrêt du 27 juin 2018  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Merkli, Président, 
Karlen et Fonjallaz. 
Greffière : Mme Kropf. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Eric Stauffacher, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public central du canton de Vaud. 
 
Objet 
Détention provisoire, 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 15 mai 2018 (354 PE18.004977-VCR).  
 
 
Faits :  
 
A.   
Une enquête pénale a été ouverte après la découverte, le 10 mars 2018, du corps sans vie de B.________ dans le lac Léman, à U.________. L'enquête a permis d'établir qu'elle avait passé la soirée précédente en compagnie de quatre requérants d'asile, soit A.________, C.________, D.________ et E.________. Elle était alors sous l'emprise de l'alcool et de médicaments, en particulier d'antidépresseurs consommés en quantité supérieure aux valeurs thérapeutiques, et se trouvait dans un état manifestement altéré. Les liquides séminaux et les profils ADN de C.________ et de E.________ ont été retrouvés sur B.________. 
A.________ a été appréhendé le 26 avril 2018 sous les préventions d'omission de prêter secours, d'actes d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance et d'infraction à la LStup (RS 812.121). Il lui est en substance reproché d'avoir eu des relations sexuelles avec B.________ alors que celle-ci était en incapacité de discernement ou de résistance et de l'avoir laissée seule alors qu'elle était en danger de mort. Il lui est également reproché d'avoir incité E.________ à entretenir des rapports sexuels avec B.________ dans cet état et d'avoir demandé de la cocaïne en échange de cette offre. 
 
B.   
A la requête du Ministère public de l'arrondissement du Nord vaudois, la détention provisoire de A.________ a été ordonnée le 28 avril 2018 par le Tribunal des mesures de contrainte du canton de Vaud (Tmc). Sa durée maximale a été fixée à trois mois, soit au plus tard jusqu'au 26 juillet 2018. 
Le 15 mai 2018, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté le recours formé par A.________ contre cette décision, considérant, à l'instar du Tmc, qu'il existait des charges suffisantes et un risque de fuite. 
 
C.   
Par acte du 8 juin 2018, A.________ forme un recours en matière pénale contre cet arrêt, concluant en substance à sa libération immédiate. A titre subsidiaire, il demande l'annulation de l'arrêt attaqué et le renvoi de la cause à l'autorité précédente. Il sollicite également l'octroi de l'assistance judiciaire. 
Invitée à se déterminer, la cour cantonale y renonce et se réfère aux considérants de sa décision. Quant au Ministère public, il s'en remet à la décision attaquée. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le recours en matière pénale (art. 78 al. 1 LTF) est ouvert contre une décision relative à la détention provisoire au sens des art. 212 ss CPP. Selon l'art. 81 al. 1 let. a et let. b ch. 1 LTF, le prévenu déten u a qualité pour recourir. Le recours a été formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision rendue en dernière instance cantonale (art. 80 LTF) et les conclusions présentées sont recevables au regard de l'art. 107 al. 2 LTF. Il y a donc lieu d'entrer en matière. 
 
2.   
Le recourant conteste l'existence de soupçons suffisants de la commission d'infractions et invoque une violation des art. 221 CPP, 31 Cst. et 5 CEDH. 
 
2.1. Une mesure de détention provisoire n'est compatible avec la liberté personnelle garantie aux art. 10 al. 2 Cst. et 5 CEDH que si elle repose sur une base légale (art. 31 al. 1 et art. 36 al. 1 Cst.), soit en l'espèce les art. 212 et 220 ss CPP. Elle doit en outre correspondre à un intérêt public et respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 2 et 3 Cst. ainsi qu'art. 212 al. 2 et 3 CPP). Pour que tel soit le cas, la privation de liberté doit être justifiée par un risque de fuite, de collusion ou de réitération (art. 221 al. 1 let. a, b et c CPP). Préalablement à ces conditions, il doit exister des charges suffisantes, soit de sérieux soupçons de culpabilité, à l'égard de l'intéressé (art. 221 al. 1 CPP, art. 5 par. 1 let. c CEDH), c'est-à-dire des raisons plausibles de le soupçonner d'avoir commis une infraction.  
 
2.2. A teneur de l'art. 221 al. 1 CPP, la détention provisoire suppose que le prévenu est fortement soupçonné d'avoir commis un crime ou un délit. Selon la jurisprudence, il n'appartient pas au juge de la détention de procéder à une pesée complète des éléments à charge et à décharge et d'apprécier la crédibilité des personnes qui mettent en cause le prévenu. Il doit uniquement examiner s'il existe des indices sérieux de culpabilité justifiant une telle mesure (ATF 143 IV 330 consid. 2.1 p. 333). L'intensité des charges propres à motiver un maintien en détention préventive n'est pas la même aux divers stades de l'instruction pénale; si des soupçons, même encore peu précis, peuvent être suffisants dans les premiers temps de l'enquête, la perspective d'une condamnation doit apparaître avec une certaine vraisemblance après l'accomplissement des actes d'instruction envisageables (ATF 143 IV 316 consid. 3.2 p. 318 s.). En d'autres termes, les soupçons doivent se renforcer plus l'instruction avance et plus l'issue du jugement au fond approche. Si des raisons plausibles de soupçonner une personne d'avoir commis une infraction suffisent au début de l'enquête, ces motifs objectifs doivent passer de plausibles à vraisemblables (arrêt 1B_208/2018 du 28 mai 2018 consid. 4.1).  
 
2.3. En l'occurrence, il est incontesté qu'en l'état, aucune trace d'ADN du recourant n'a été retrouvée sur la victime, contrairement à ce qui prévaut notamment pour au moins deux des trois autres intéressés. Si le recourant nie avoir eu des relations sexuelles avec la défunte, deux des trois autres mis en cause - C.________ et D.________ - ont affirmé le contraire. Certes, leurs déclarations n'ont pas toujours été constantes, s'agissant en particulier de leurs propres agissements, mais, à ce stade encore très précoce de l'enquête, ces allégations concordantes sur le comportement a priori adopté par le recourant sont suffisantes. Cela vaut d'autant plus que le recourant ne démontre pas que les deux co-prévenus auraient eu un intérêt particulier à le mettre en cause pour de tels faits. En tout état de cause, le recourant a reconnu avoir embrassé la victime - dont on rappellera l'état fortement altéré par l'alcool, ainsi que par des médicaments, ce que semble au demeurant avoir réalisé le recourant (cf. procès-verbal du 26 avril 2018 de l'audition d'arrestation, p. 3.) - sur la bouche et lui avoir caressé la poitrine, comportements pouvant être constitutifs d' "autre acte d'ordre sexuel " au sens de l'art. 191 CP (Dupuis et Al., Petit commentaire du Code pénal, 2e éd. 2017, no 15 ad art. 191 CP et nos 23 et 27 ad art. 187 CP; Philipp Maier, in Basler Kommentar, 3e éd. 2013, no 13 ad art. 191 CP et no 11 ad art. 187 CP). La cour cantonale a encore relevé en se fondant sur les propos de D.________ et de E.________ que le recourant pourrait les avoir instigués à la commission d'actes d'ordre sexuel sur une personne incapable de discernement ou de résistance - comportement également punissable sous l'angle de l'art. 191 CP (Dupuis et Al., op.cit., no 25 ad art. 191 CP) - dès lors qu'il les aurait contactés par téléphone afin de leur proposer des relations sexuelles avec la victime et qu'au moins l'un des deux y aurait donné suite; le recourant ne développe devant le Tribunal fédéral aucune argumentation tendant à remettre en cause ces constatations.  
A ce stade encore précoce de l'enquête, ces éléments suffisent pour retenir l'existence de soupçons suffisants de la commission d'actes d'ordre sexuel et/ou d'instigation à de tels actes et ce grief peut être écarté. 
Cela étant, dans la mesure où le Ministère public entend demander la prolongation de la détention provisoire, il lui appartiendra d'étayer ces soupçons, notamment en expliquant en quoi les actes d'instruction en cours - dont les résultats des analyses des téléphones (cf. la demande de mise en détention du 27 avril 2018, p. 2 in fine) - a permis, le cas échéant, de les renforcer.  
 
3.   
Le recourant remet en cause l'existence d'un risque de fuite. Il soutient qu'au vu des éléments recueillis au cours de l'instruction, il aurait tout intérêt à être présent pour la suite de la procédure pour plaider l'acquittement en ce qui concerne les infractions d'actes d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement et d'omission de prêter secours, ainsi que de ne pas mettre en péril ses démarches de demande d'asile. Il conteste également qu'un risque de collusion soit réalisé. 
 
3.1.   
Selon la jurisprudence, le risque de fuite au sens de l'art. 221 al. 1 let. a CPP doit s'analyser en fonction d'un ensemble de critères tels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources, ses liens avec l'Etat qui le poursuit ainsi que ses contacts à l'étranger, qui font apparaître le risque de fuite non seulement possible, mais également probable. Les circonstances particulières de chaque cas d'espèce doivent être prises en compte. La gravité de l'infraction ne peut pas, à elle seule, justifier la prolongation de la détention, même si elle permet souvent de présumer un danger de fuite en raison de l'importance de la peine dont le prévenu est menacé (ATF 143 IV 160 consid. 4.3 p. 167). 
 
3.2. En l'espèce, les éléments invoqués par le recourant - dans la mesure où ils seraient suffisants eu égard à son obligation de motivation (art. 42 al. 2 LTF) - ne permettent pas de remettre en cause l'appréciation effectuée par la cour cantonale.  
Ainsi, celle-ci a retenu à juste titre que le recourant, ressortissant algérien, n'avait aucune attache en Suisse et que son statut de requérant d'asile ne suffisait pas pour retenir qu'au regard de la gravité des faits examinés et/ou de la peine encourue, il ne chercherait pas la fuite ou le refuge dans la clandestinité. Sa propre appréciation des éléments recueillis par l'instruction - qui conduiraient en substance à pouvoir plaider l'acquittement - ne permet pas non plus à ce stade encore initial de l'enquête d'avoir une vision différente de ce danger. 
Vu le risque de fuite existant, il n'y a pas lieu d'examiner ce qu'il en est d'un éventuel risque de collusion. 
 
3.3. Enfin, le recourant, à juste titre, n'invoque aucun argument tendant à démontrer que la durée de la détention provisoire subie (3 mois) ne serait pas conforme au principe de la proportionnalité, au regard la peine concrètement encourue (art. 212 al. 3 CPP). Il ne propose pas non plus, à juste titre également, de mesures de substitution pour pallier le danger retenu (art. 237 CPP).  
 
4.   
Il s'ensuit que le recours est rejeté. 
Le recourant a demandé l'octroi de l'assistance judiciaire (art. 64 al. 1 LTF). Les conditions y relatives étant réalisées, cette requête doit être admise. Il y a lieu de désigner Maître Eric Stauffacher en tant qu'avocat d'office et de lui allouer une indemnité à titre d'honoraires, qui sera supportée par la caisse du tribunal. Il n'est pas perçu de frais judiciaires (64 al. 1 LTF), ni alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
La requête d'assistance judiciaire est admise. Maître Eric Stauffacher est désigné comme avocat d'office du recourant et une indemnité de 1'500 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à payer par la caisse du Tribunal fédéral. Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Ministère public central du canton de Vaud et à la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 27 juin 2018 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Merkli 
 
La Greffière : Kropf