Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
6P.113/2006
6S.212/2006 /rod
Arrêt du 27 septembre 2006
Cour de cassation pénale
Composition
MM. les Juges Schneider, Président,
Kolly et Zünd.
Greffière: Mme Kistler.
Parties
X.________,
recourant, représenté par Me Malek Buffat Reymond, avocate,
contre
Y.________,
intimée, représentée par Me Anne Cherpillod, avocate,
Ministère public du canton de Vaud, case postale, 1014 Lausanne,
Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de cassation pénale, rte du Signal 8, 1014 Lausanne.
Objet
Procédure pénale; arbitraire dans l'appréciation des preuves (art. 9 Cst.), présomption d'innocence (art. 32 al. 1 Cst. et 6 § 2 CEDH); escroquerie (art. 146 CP), menaces (art. 180 CP),
recours de droit public et pourvoi en nullité contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de cassation pénale, du 16 février 2006.
Faits:
A.
En août 2003, X.________ a convaincu Y.________, dont il avait été le conseiller en assurances, de racheter son assurance-vie et de souscrire un petit crédit, afin de lui confier cet argent qu'il disait vouloir faire fructifier plus généreusement, en l'investissant dans une société dont elle pourrait devenir la secrétaire, voire l'administratrice. A titre de garantie, il lui a remis une lettre de change, qu'il a signée au nom d'une société Z.________ SA, dont il avait acquis le capital-actions.
De plus, en décembre 2003, après avoir appris le dépôt d'une plainte pénale dirigée contre lui, X.________ a averti Y.________ qu'il connaissait un sorcier au Mali et qu'elle devait faire attention à ne pas trouver des serpents dans son lit durant la nuit et à ne pas perdre son emploi.
B.
Par jugement du 9 décembre 2005, le Tribunal de police de l'arrondissement de Lausanne a condamné X.________ pour escroquerie et menaces à la peine ferme de quatre mois d'emprisonnement. Il a révoqué le sursis accordé le 17 juillet 2001 par le Tribunal correctionnel de Lausanne et ordonné l'exécution de deux mois d'emprisonnement, sous déduction de quatorze jours de détention préventive. Il a reconnu X.________ débiteur de Y.________ d'une somme de 26'973 fr. 80 avec intérêt à 5 % l'an dès le 1er septembre 2003 à titre de dommages-intérêts et de 2'000 francs, valeur échue, à titre d'indemnité pour tort moral. Enfin, il a maintenu le séquestre sur une pièce et mis les frais à la charge de X.________.
Statuant le 16 février 2006 sur recours de X.________, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois a confirmé le jugement de première instance.
C.
Contre l'arrêt cantonal, X.________ dépose un recours de droit public et un pourvoi en nullité devant le Tribunal fédéral. Il conclut, dans les deux recours, à l'annulation de l'arrêt attaqué. Dans le recours de droit public, il se plaint d'arbitraire dans l'établissement des faits. Dans le pourvoi, il conteste, pour l'essentiel, les infractions d'escroquerie et de menaces.
Le Ministère public vaudois renonce à déposer une réponse, se référant à l'arrêt attaqué.
L'intimée conclut au rejet du pourvoi.
L'effet suspensif a été accordé à titre superprovisionnel le 17 mai 2006.
Le Tribunal fédéral considère en droit:
I. Recours de droit public
1.
1.1 Le recours de droit public au Tribunal fédéral est ouvert contre une décision cantonale pour violation des droits constitutionnels des citoyens (art. 84 al. 1 let. a OJ). Il n'est en revanche pas ouvert pour se plaindre d'une violation du droit fédéral, qui peut donner lieu à un pourvoi en nullité (art. 269 al. 1 PPF); un tel grief ne peut donc pas être invoqué dans le cadre d'un recours de droit public, qui est subsidiaire (art. 84 al. 2 OJ; art. 269 al. 2 PPF).
1.2 En vertu de l'art. 90 al. 1 let. b OJ, l'acte de recours doit, à peine d'irrecevabilité, contenir un exposé succinct des droits constitutionnels ou des principes juridiques violés et préciser en quoi consiste la violation. Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'a donc pas à vérifier de lui-même si la décision attaquée est en tous points conforme au droit ou à l'équité; il est lié par les moyens invoqués dans le recours et peut se prononcer uniquement sur les griefs de nature constitutionnelle que le recourant a non seulement invoqués, mais suffisamment motivés (ATF 127 I 38 consid. 3c p. 43; 126 III 534 consid. 1b p. 536; 125 I 71 consid. 1c p. 76). Le Tribunal fédéral n'entre pas non plus en matière sur les critiques de nature appellatoire (ATF 125 I 492 consid. 1b p. 495).
2.
Le recourant se plaint d'arbitraire dans l'appréciation des preuves et l'établissement des faits. Il invoque également la présomption d'innocence.
2.1 Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou lorsqu'elle contredit d'une manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si elle apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. En outre, il ne suffit pas que les motifs de la décision critiquée soient insoutenables, encore faut-il que cette dernière soit arbitraire dans son résultat (ATF 131 I 57 consid. 2 p. 61; 129 I 8 consid. 2.1 p. 9). A cet égard, il ne suffit pas non plus qu'une solution différente de celle retenue par l'autorité cantonale apparaisse également concevable ou même préférable (ATF 128 II 259 consid. 5 p. 280; 127 I 54 consid. 2b p. 56, 60 consid. 5a p. 70; 124 IV 86 consid. 2a p. 88 et les arrêts cités).
Lorsque le recourant - comme c'est le cas en l'espèce - s'en prend à l'appréciation des preuves et à l'établissement des faits, la décision n'est entachée d'arbitraire que si le juge ne prend pas en compte, sans raison sérieuse, un moyen de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'il se trompe manifestement sur le sens et la portée d'un tel élément, ou encore lorsqu'il tire des déductions insoutenables à partir des éléments recueillis (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9; 127 I 38 consid. 2a p. 41; 124 I 208 consid. 4a p. 211).
2.2 Dans la mesure où, comme en l'espèce, l'appréciation des preuves est critiquée en référence avec la présomption d'innocence, celle-ci n'a pas de portée plus large que l'interdiction de l'arbitraire (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 41).
3.
Le recourant soutient que l'état de fait retenu par la cour cantonale pour fonder sa condamnation pour escroquerie serait arbitraire sur plusieurs points.
3.1 Il soutient d'abord que la cour cantonale a versé dans l'arbitraire en retenant qu'il aurait dit à la dupe qu'il avait besoin de l'argent emprunté pour fonder une nouvelle société dans laquelle elle pourrait avoir un rôle de secrétaire ou d'administratrice, alors qu'il aurait simplement déclaré à la dupe qu'il investirait les fonds dans une société pour les faire fructifier plus généreusement (sans préciser s'il s'agissait d'une société nouvelle ou déjà existante).
En l'espèce, il ressort des constatations cantonales que le recourant a déclaré à la dupe que les fonds seraient investis dans une société pour les faire fructifier plus généreusement. Les décisions cantonales ne sont certes pas très précises sur le point de savoir si le recourant a parlé de fonder une nouvelle société ou de reprendre et de réorganiser une société déjà existante. Ce point est cependant sans importance pour l'application du droit fédéral, puisque la tromperie reprochée au recourant ne porte pas sur l'affectation effective des fonds prêtés, mais consiste à ne pas avoir renseigné la dupe sur sa situation financière et sur celle de la société dans laquelle il comptait investir les fonds empruntés (consid. 6.1 et 6.3). Le grief soulevé est donc infondé.
3.2 Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir retenu, de manière arbitraire, qu'il avait utilisé à son propre profit 27'000 francs remis par la dupe, alors qu'en réalité il aurait investi 17'500 francs dans une opération de commerce avec l'Afrique, pour le compte de Z.________ SA, comme il aurait dit à la dupe vouloir le faire. Il se réfère à cet égard à deux pièces jointes au dossier (pièces 54 et 55).
Comme vu au considérant précédant, la tromperie du recourant ne consiste pas à avoir donné des fausses indications sur l'affectation des fonds, mais à ne pas avoir renseigné la dupe sur sa situation financière ainsi que sur celle de la société Z.________ SA, dans laquelle il comptait investir les fonds prêtés. Le grief soulevé, selon lequel les fonds empruntés ont effectivement servi à une opération commerciale en Afrique, est dès lors sans pertinence.
3.3 Le recourant fait valoir que la cour cantonale lui reproche à tort des fausses affirmations pour n'avoir pas octroyé à la dupe un poste de secrétaire ou d'administratrice comme il le lui aurait promis. Selon lui, il serait arbitraire de conclure à un mensonge, alors que c'est la victime et son entourage qui ont mis fin aux relations entre les parties.
Compte tenu de la situation financière catastrophique de la société Z.________ SA (cf. consid. 6.1), il n'est pas arbitraire d'avoir conclu que la société était moribonde et que, partant, la promesse faite à la dupe de lui octroyer un poste de secrétaire ou d'administratrice dans cette société n'était qu'un mensonge pour l'inciter à lui prêter de l'argent. Mal fondé, le grief du recourant est infondé.
3.4 Le recourant soutient que la cour cantonale a retenu, de manière arbitraire, que la lettre de change serait "fausse".
La question de la validité de la lettre de change est une question qui relève de l'application du droit fédéral. Il s'ensuit que le grief du recourant est irrecevable dans un recours de droit public. Soulevé également dans le pourvoi, ce grief sera traité au consid. 6.3 du présent arrêt.
3.5 Le recourant fait valoir que les qualifications de vulnérabilité et de naïveté de la dupe résultent d'une appréciation arbitraire des preuves. Il serait également arbitraire d'avoir retenu qu'il aurait abreuvé la dupe de belles paroles.
Le jugement de première instance, auquel renvoie l'arrêt attaqué, a retenu que le recourant avait remarqué "l'état de vulnérabilité de l'intimée provenant de son manque affectif et d'une certaine solitude ainsi que de sa situation financière difficile à la suite d'une période de chômage et d'un emploi moins rétribué que celui de secrétaire perdu dix ans plus tôt". Le recourant ne démontre pas en quoi la constatation de fait selon laquelle la dupe était vulnérable en raison d'un manque affectif, de solitude et de problèmes financiers serait arbitraire. En particulier, ce n'est pas parce que la dupe a été secrétaire et qu'elle avait une certaine expérience professionnelle qu'elle ne se sentait pas seule et qu'elle ne manquait pas d'affection. Le recourant n'établit pas non plus qu'il est arbitraire d'avoir retenu qu'il aurait séduit et charmé la dupe par de belles paroles. Insuffisamment motivé, le grief soulevé est donc irrecevable.
4.
Le recourant s'en prend à sa condamnation pour menaces (art. 180 CP). La victime prétend qu'il lui aurait dit qu'il ferait intervenir un sorcier malien pour que des serpents se trouvent dans son lit. Selon lui, il aurait dit à la victime que la sagesse africaine précisait que le mal qu'on faisait nous retombait dessus. D'après lui, il serait arbitraire de retenir la version de la victime plutôt que la sienne.
En procédure pénale vaudoise, le juge de première instance établit souverainement les faits, en appréciant librement les preuves sur la base de l'instruction aux débats (art. 325 CPP/VD). En l'absence d'un procès-verbal, l'établissement des faits, en tant qu'il repose sur l'appréciation des témoignages, ne peut donc faire l'objet d'aucun contrôle - ne serait-ce que sous l'angle de l'arbitraire - par l'autorité de recours, dès lors que celle-ci ignore le contenu des dépositions faites en première instance, dont le recourant n'a pas demandé la verbalisation (ATF 126 I 15 c. 2a/bb p. 18). Le Tribunal fédéral ne peut en conséquence examiner s'il y a arbitraire dans l'établissement des faits que sur la base du jugement et des pièces auquel il renvoie, et non en fonction d'autres éléments du dossier. Son rôle consiste donc à vérifier que le juge du fait n'a pas violé l'interdiction constitutionnelle de l'arbitraire en établissant les faits selon les règles de procédure applicables, et non pas à se forger, à l'image d'un juge d'appel, une propre opinion sur la base du dossier.
En l'occurrence, le recourant ne fait qu'opposer aux déclarations de la dupe sa propre déposition. Ignorant ce qui s'est dit aux débats, la cour de céans ne saurait qualifier d'arbitraire la version des faits retenue par la cour cantonale. Mal fondé, le grief soulevé doit être rejeté.
5.
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Le recourant, qui succombe, doit supporter les frais (art. 156 al. 1 OJ).
Vu l'issue du recours, la requête d'effet suspensif devient sans objet.
II. Pourvoi en nullité
6.
Aux termes de l'art. 146 CP, se rend coupable d'escroquerie celui qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura astucieusement induit en erreur une personne par des affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais, ou l'aura astucieusement confortée dans son erreur et aura de la sorte déterminé la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers.
Le recourant conteste que les éléments constitutifs de l'escroquerie soient réalisés. Il nie avoir trompé la dupe, dès lors qu'il aurait utilisé l'essentiel de l'argent emprunté dans une opération commerciale en Afrique comme il le lui aurait déclaré (consid. 6.1). Il soutient que la dupe, qui n'aurait procédé à aucune vérification, bien qu'ayant une certaine expérience, devrait assumer une coresponsabilité, qui devrait faire tomber la notion d'astuce (consid. 6.2). Enfin, il fait valoir que la dupe n'aurait pas subi de dommage, puisque la créance en remboursement ne serait échue que le 1er septembre 2008 (consid. 6.3).
6.1 L'escroquerie suppose une tromperie, qui peut se présenter sous la forme d'affirmations fallacieuses, de dissimulation de faits vrais ou encore consister à conforter la dupe dans l'erreur (art. 146 CP). Selon la jurisprudence, l'emprunteur qui a l'intention de rembourser son bailleur de fonds n'agit pas astucieusement s'il ne l'informe pas spontanément de son insolvabilité (ATF 86 IV 205). Il en va en revanche différemment si l'auteur présente une fausse vision de la réalité de manière à dissuader le prêteur de se renseigner sur sa situation financière (Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. I, Berne 2002, art. 146 CP, n. 6 ss, spéc. 11) ou lorsque des circonstances particulières font admettre à l'auteur que le prêteur ne posera pas de question sur ce point (ATF 86 IV 206).
En l'occurrence, le recourant s'est présenté sous un jour particulièrement favorable, se gardant de mentionner qu'il avait connu une période de chômage jusqu'en 2002. Il a fait miroiter à la dupe des bénéfices et un poste de secrétaire, voire d'administratrice, sans indiquer que la situation économique de la société dans laquelle il voulait investir les fonds empruntés était catastrophique, puisqu'il avait pu racheter les actions pour 5'000 francs (bien que le capital-actions de 100'000 francs ait été entièrement libéré) et que cette société avait fait des pertes en 2003 (arrêt p. 15). Le capital-actions de la société, dont la valeur réelle était estimée à 5'000 francs, ne permettait ainsi pas de couvrir le montant du prêt, de sorte que la créance de la dupe était dès le début gravement compromise. En conséquence, même si le recourant a réellement affecté les fonds empruntés à une opération commerciale en Afrique comme il l'aurait indiqué à la dupe, il y a eu tromperie au sens de l'art. 146 CP, dans la mesure où il a donné des fausses indications sur sa propre situation financière et sur la santé économique de la société Z.________ SA.
6.2 La loi pénale exige que la tromperie soit astucieuse. Selon la jurisprudence, tel est notamment le cas si l'auteur recourt à des manoeuvres frauduleuses, à une mise en scène comportant des documents ou des actes ou à un échafaudage de mensonges qui se recoupent de façon si raffinée que même une victime critique se laisserait tromper (ATF 126 IV 165 consid. 2a p. 171). L'astuce sera également admise si l'auteur exploite un rapport de confiance préexistant qui dissuade la dupe de vérifier (ATF 122 IV 246 consid. 3a p. 248) ou si la dupe n'a pas la possibilité de vérifier ou si des vérifications seraient trop difficiles et que l'auteur exploite cette situation (ATF 125 IV 124 consid. 3a p. 127).
L'astuce n'est toutefois pas réalisée si la dupe pouvait se protéger avec un minimum d'attention ou éviter l'erreur avec le minimum de prudence que l'on pouvait attendre d'elle. L'astuce n'est exclue que lorsque la dupe est coresponsable du dommage parce qu'elle n'a pas observé les mesures de prudence élémentaires qui s'imposaient. Il ne suffit pas de se demander comment une personne raisonnable et expérimentée aurait réagi à la tromperie. Il faut, au contraire, prendre en considération la situation particulière de la dupe, telle que l'auteur la connaît et l'exploite, par exemple une faiblesse d'esprit, l'inexpérience ou la sénilité, mais aussi un état de dépendance, d'infériorité ou de détresse faisant que la dupe n'est guère en mesure de se méfier de l'auteur. Le principe de coresponsabilité ne saurait être utilisé pour nier trop aisément le caractère astucieux de la tromperie (ATF 128 IV 18 consid. 3a p. 20 s.)
En l'occurrence, le recourant a charmé la dupe, qui se sentait seule et qui était en manque d'affection. Séduite, mais aussi impressionnée par sa profession d'agent d'assurance, qui était pour elle un gage d'honnêteté, la dupe a fait entièrement confiance au recourant. Connaissant les problèmes financiers de la dupe, celui-ci lui a en outre fait miroiter des gains importants et un poste de secrétaire, voire d'administratrice, dans une société. Enfin, il l'a confortée dans son erreur, en lui remettant une lettre de change établie au nom d'une société Z.________ SA, dont il savait que la situation financière était mauvaise. En agissant de la sorte, le recourant a sans conteste créé un échafaudage de mensonges pour inciter la dupe à l'octroi du prêt, de sorte que la tromperie doit être qualifiée d'astucieuse.
Pour le recourant, la dupe, qui n'est pas décrite comme une personne sans capacités intellectuelles et sans discernement, aurait pu procéder à certaines vérifications avant la remise des fonds, d'autant plus que celle-ci ne s'est pas faite en un jour, mais qu'il a fallu au contraire un certain temps jusqu'à ce qu'elle dispose de la somme à prêter. On peut concéder au recourant que la dupe a fait preuve d'une certaine légèreté. Une coresponsablité de la dupe ne peut cependant pas entrer en considération en l'espèce. L'astuce du recourant consistait justement à séduire une femme en mal d'affection et à créer un climat de confiance afin de la dissuader de procéder à des vérifications. En outre, il n'était pas si facile pour la dupe d'établir la fausseté des déclarations du recourant. Ainsi, contrairement à ce que semble affirmer le recourant, la simple consultation du registre du commerce sur internet ne donnait aucun renseignement sur la santé économique de la société Z.________ SA. Mal fondé, le grief soulevé doit être rejeté.
6.3 L'escroquerie suppose que la victime est déterminée à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers. Il y a dommage en cas de lésion du patrimoine, mais aussi d'une mise en danger de celui-ci telle qu'elle a pour effet d'en diminuer la valeur du point de vue économique (ATF 121 IV 104 consid. 2c p. 107 s.). En matière d'escroquerie à l'emprunt, le préjudice pécuniaire est admis lorsque, contrairement aux espérances éveillées chez le prêteur, l'emprunteur offre, dès le début, pour le remboursement contractuel de la somme si peu de garanties que la créance issue du prêt est gravement compromise et, partant, sensiblement dépréciée (ATF 102 IV 84 consid. 4 p. 88; 82 IV 89 consid. 2 p. 91). Acquérir une créance contre un débiteur en réalité douteux, introuvable ou qui refuse de fournir sa prestation constitue ainsi un dommage (Corboz, op. cit., art. 146 CP, n. 37). Un dommage temporaire ou provisoire est suffisant (Corboz, op. cit., art. 146 CP, n. 37).
Le recourant soutient que la dupe n'aurait subi aucun dommage, du fait qu'il lui aurait remis, en contrepartie de la somme de 27'000 francs, une lettre de change au nom de la société Z.________ SA, à Genève, qui permettrait à la dupe de toucher le 1er septembre 2008 la somme de 39'360 francs (arrêt attaqué, p. 7). Selon la cour cantonale, cette lettre de change serait sans valeur, car elle ne respecterait pas les règles de forme exigées (double signature) et le recourant l'aurait signée alors qu'il n'était pas encore un organe de la société (jugement p. 8). Le recourant considère en revanche qu'il était propriétaire du capital-actions et qu'il gérait effectivement les affaires de la société, de sorte qu'il pouvait engager la société au titre d'administrateur de fait. En outre, conformément à l'art. 997 CO, sa double signature sous le nom de Z.________ SA ne constituerait pas un obstacle à la validité de la lettre de change.
La question de la validité de la lettre de change peut rester ouverte en l'espèce. En effet, même si celle-ci est valable et à supposer que la dupe obtienne le remboursement de son prêt le 1er septembre 2008, elle a déjà subi une atteinte à ses intérêts pécuniaires, du fait que la lettre de change, donnée en garantie du prêt, a été tirée sur une société, dont la situation financière était mauvaise. En effet, si la société Z.________ SA avait été prospère, la lettre de change aurait eu une beaucoup plus grande valeur, car la dupe aurait pu l'endosser ou la donner en gage. Par la simple conclusion du contrat, la dupe a déjà subi un dommage passager, qui suffit pour qu'il y ait escroquerie. Contrairement à ce que soutient le recourant, il n'y a pas lieu d'attendre le 1er septembre 2008 pour savoir si le prêt sera ou non remboursé avant de le condamner pour escroquerie. Mal fondé, le grief soulevé doit être rejeté.
6.4 Les autres conditions de l'escroquerie sont réalisées. Le recourant a agi intentionnellement et dans un dessein d'enrichissement illégitime. La cour cantonale n'a donc pas violé le droit fédéral en condamnant le recourant pour escroquerie. Mal fondés, les griefs soulevés doivent être rejetés.
7.
Le recourant conteste sa condamnation pour menaces (art. 180 CP). Il soutient que la menace de faire intervenir un sorcier malien pour que des serpents se trouvent dans le lit de la personne visée n'est pas objectivement de nature à éveiller la peur ou l'effroi chez celle-ci.
7.1 Aux termes de l'article 180 CP, celui qui, par une menace grave, aura alarmé ou effrayé une personne sera, sur plainte, puni de l'emprisonnement ou de l'amende.
La punition de l'auteur dépend de la réalisation de deux conditions. Il faut, d'une part, que l'auteur ait émis une menace grave et, d'autre part, que la victime ait été alarmée ou effrayée. Sur le second point, le jugement de première instance, auquel renvoie l'arrêt attaqué, retient que des témoins ont confirmé que les propos du recourant avaient alarmé la victime (jugement p. 9). L'une des conditions d'application de l'art. 180 CP est donc remplie.
7.2 Il reste à déterminer si la menace était de nature à alarmer ou à effrayer la victime. Selon la jurisprudence et la majorité de la doctrine, une menace est qualifiée de grave si elle est objectivement de nature à alarmer ou à effrayer la victime. Selon cette conception, il faut se demander si une personne raisonnable, dotée d'une résistance psychologique plus ou moins normale, aurait ressenti la menace comme grave (ATF 99 IV 212 consid. 1a p. 215 s.; Corboz, op. cit., art. 180 CP, n. 6; Stratenwerth/Jenny, Schweizerisches Strafrecht, Besonderer Teil I: Straftaten gegen Individualinteressen, 6e éd., Berne 2003, § 5, n. 66). S'écartant de cette conception, certains auteurs sont de l'avis qu'il faudrait apprécier la gravité de la menace en fonction de la sensibilité propre du destinataire (Schubarth, Kommentar zum schweizerischen Strafrecht, Schweizerisches Strafgesetzbuch, Besonderer Teil, vol. 3, Berne 1984, art. 180 CP, n. 8; Delmon/Rüdy, Basler Kommentar, Strafgesetzbuch II, art. 180 CP, n. 20). Dans un arrêt non publié du 2 avril 2004 (6S.103/2003), le Tribunal fédéral s'est demandé s'il ne conviendrait pas de suivre l'avis de la doctrine minoritaire, mais il a laissé la question ouverte, car la cour cantonale n'avait pas retenu que la victime était particulièrement sensible.
Il n'est pas non plus nécessaire d'approfondir cette question dans le présent arrêt. En effet, il est unanimement admis que la répression est exclue dans les cas où il est d'emblée absurde de croire à la menace. Les menaces qui effrayent des victimes hypersensibles ne sont pas punissables (Schubarth, op. cit., art. 180 CP, n. 8; Corboz, op. cit., art. 180 CP, n. 10). Or, les propos, selon lesquels un sorcier malien pourrait faire en sorte que des serpents se retrouvent dans un lit, en Suisse, sont complètement fantaisistes. En effet, on ne peut pas, en tout cas dans notre culture, sérieusement craindre qu'un sorcier puisse, depuis le Mali, faire en sorte que des serpents apparaissent dans un lit en Suisse ou que quelqu'un perde son emploi en Suisse. Suivant l'avis du recourant, il faut donc admettre que les menaces proférées par le recourant ne sont pas graves au sens de l'art. 180 CP et que la cour cantonale a violé le droit fédéral en confirmant la condamnation du recourant pour menaces. Le pourvoi doit donc être admis sur ce point.
8.
Au vu de ce qui précède, le pourvoi doit être admis sur la question des menaces, la cause étant renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision sur ce point et, partant, pour prononcer une nouvelle peine. Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de se prononcer sur les griefs relatifs à l'octroi du sursis et à la révocation du précédent sursis. Le pourvoi est rejeté pour le surplus.
9.
Le recourant obtient partiellement gain de cause, de sorte qu'il y a lieu de considérer que la part des frais qui devrait être mise à sa charge pour la partie où il succombe (art. 278 al. 1 PPF) est compensée par l'indemnité qui devrait lui être allouée pour celle où il obtient gain de cause (art. 278 al. 3 PPF). Il n'y a donc pas lieu de percevoir de frais ni d'allouer d'indemnité au recourant.
L'intimée obtient également partiellement gain de cause. Les frais de justice sont donc aussi compensés par l'indemnité alloué à titre de dépens, de sorte que l'intimée ne sera pas condamnée à payer les frais ni ne recevra d'indemnité.
Vu l'issue du pourvoi, la requête d'effet suspensif est sans objet.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
I. Recours de droit public
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Un émolument judiciaire de 2000 francs est mis à la charge du recourant.
II. Pourvoi en nullité
3.
Le pourvoi est partiellement admis, l'arrêt attaqué est annulé et la cause est renvoyée pour nouveau jugement à la cour cantonale.
4.
Il n'est pas perçu de frais, ni alloué de dépens.
III. Communication
5.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties, au Ministère public vaudois et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de cassation pénale.
Lausanne, le 27 septembre 2006
Au nom de la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral suisse
Le président: La greffière: